Les morceaux des liens YouTube vont avec l'histoire, écoutez-les svp, signé La Direction <3
HISTOIRE
« Tard dans la nuit dans une des chambres ce tumulte
serait-ce qu’un homme est mort ?
je retiens mon souffle. »
C’est un 27 mars qu’est née Akane Okumura. Sa mère était geisha. Elle vivait à Kyoto. Après son accouchement, elle fut bannie. Elle avait déshonoré son okiya. Elle avait choisi un inconnu séducteur à la place de ses ‘sœurs’ et de sa ‘mère’ ; celle qui a fait d’elle une geisha. En compensation de cette trahison, l’okiya demanda son enfant. Un bel enfant. Promis à une grande carrière de geisha s’il a les talents de sa mère. A condition qu’il n’hérite pas de son tempérament. Le nom que lui avait donné sa mère, 朱寧 (vermillon - paisible) devait faire de lui un petit garçon puissant et sage. Lui porter chance et présager d’une grande destinée. C’est ainsi que l’oikya arracha le petit Akane des bras de sa mère. Quelques temps après sa naissance. Sa mère eut le droit de le tenir quelques instants, avant de le voir s’éloigner pour ne jamais le revoir. La mère fut chassée de la maison plusieurs jours après la naissance d’Akane. Dès qu’elle fut remise sur pied, elle partit. Sans affaires puisqu’elle n’avait rien d’autre que son corps ainsi qu’un pauvre habit qu’elle s’était fabriqué. Akane se retrouve seul, entouré de visages inconnus.
L’oikya, Kouki (聖 – sacré), était une femme droite et juste mais très attachée aux traditions. Elle traitait ses protégées avec respect, tant qu’elle était elle-même respectée. Elle n’était pas violente et ne faisait subir aucun mauvais traitement à celles qui lui était confiées. Elle tenait à faire de sa maison la plus grande maison de geishas de Kyoto. Pour cela, elle investissait grandement dans l’éducation de ses filles. Elle attendait d’elles une technique parfaite et la plus grande diligence. Comme toutes les geishas, Akane commence les premières années de sa vie en effectuant toutes les corvées, en plus de sa formation. Il prend vite l’habitude de s’occuper de tout. Très studieux, il commence assez tôt les cours de danse et de cérémonie du thé. Kouki-sama est très impressionnée par ses progrès, d’une vitesse sans précédent. Mais elle resta dure avec Akane. Elle lui disait qu’elle ne devait pas se reposer sur cette impression de réussite, qu’elle devait toujours faire mieux, qu’elle devait être à la hauteur. A la hauteur de quoi ? Akane ne le sut que très tardivement. Elle ignora toujours son passé, celui de sa mère, et, encore plus celui de son père. Elle devait porter un héritage inconnu et trop lourd pour ses épaules d’enfant. Akane ne comprenait pas pourquoi sa nouvelle « mère », l’oikya, se comportait de cette manière avec lui. Elle. Tout était brouillé. Pourquoi elle ne ressemblait pas aux autres filles ? Pourquoi Kouki-sama l’appelait « elle » ? et pourquoi cette désignation ne lui posait-elle aucun problème ? après tout elle faisait de la danse, comme les autres filles, elle portait du maquillage et des kimonos, elle savait servir le thé et avait appris les manières des geishas. Alors pourquoi était-elle si différente ? ces questions constituèrent pour Akane une réelle révélation. Quand elle eut neuf ans, elle alla voir sa « mère », taraudée de questions.
Mère, pourquoi je ne suis pas comme les autres filles ? pourquoi je n’ai pas de famille ?
Cette question, naïve, ne fit pas réagir Kouki-sama. Elle se contenta de simplement répondre :
Tu as une famille. C’est nous. Ne manque pas de respect comme cela à ta mère et tes sœurs.
Akane avait déjà entendu cette réponse maintes fois. Elle la connaissait par cœur. Elle savait que ce n’était pas la réponse qu’elle attendait.
Mais, mes sœurs ont toutes une autres mère et un père et d’autres sœurs mais moi je n’ai rien de plus à part un nom de famille inconnu, Okumura. C’est tout ce qui me reste. Pourquoi ?
L’agacement commençait à monter en Kouki-sama. Elle ne voulait pas qu’Akane connaisse la vérité. Elle ne voulait pas la perdre ; ni à l’errance, ni à sa génitrice bannie.
Tout ce que je peux te dire, mon enfant, c’est que tu es ma fille et que tu dois travailler dur pour repayer ta dette envers moi. Tu dois parfaire ton art afin de devenir la meilleure geisha de tout le pays ! et peut-être même qu’un jour tu arriveras à être une mère comme moi.
Akane savait que sa « mère » cachait quelque chose. Mais elle était aussi assez futée pour prétendre.
Oui, mère. Mais comment je pourrais devenir une aussi grande geisha que les autres filles alors que je suis si différent.
Tu n’es pas différente.
Mais…
Non Akane, tu es ma fille et tu seras une grande geisha qui apportera la renommée à cette maison. Maintenant va préparer le dîner.
Ou- oui. D’accord.
Cette entrevue restera gravée en la mémoire d’Akane, et la réponse de Kouki-sama ne cessera de résonner en elle. En préparant le repas du soir, elle méditait sur ces mots. Tu es ma fille. Tu es ma fille. Tu es ma fille. Akane avait envie de dire « oui, c’est vrai. » et en même temps, elle ressemblait plus à celui qui leur enseignait la danse qu’aux autres geishas. Elle ne pouvait pas encore dire quoi mais quelque chose ne lui semblait pas être à sa place en elle. C’est donc en coupant les tomates qu’elle prit conscience de qui elle était ; et qui elle voulait être. A l’âge de neuf ans seulement elle eut connaissance de son identité. Elle était prête à entamer ce long voyage. Elle commença par changer son nom. Si elle devait être la plus grande, alors elle s’appellerait Akane Hime 光姫 (lumière – princesse). Le nom d’Okumura ne lui a jamais rien dit. Un nom inconnu pour des gens inconnus. Elle n’a pas besoin de ça. Le passé devait rester enterré et ne plus venir la hanter de son poids. Se débarrasser de son nom était déjà pour elle le moyen de se débarrasser de l’héritage qu’elle devait porter.
Bien que les corvées d’Akane étaient normales pour une geisha de son rang, le rythme de sa vie était difficile à tenir. Pas une seule seconde de répit. Cette vie qu’elle n’avait pas choisi. Elle qui voulait simplement être une enfant était pratiquement emmurée. Alors un jour, pendant que la maison dormait, Akane décida de sortir. Elle enfila des vêtements noirs, et se faufila hors de la maison. Le quartier était assez animé pour que personne ne la remarque. Une simple ombre dans la foule. Elle avançait rapidement, enivrée par le monde et les lumières. Son quartier vivait toujours plus la nuit. Toutes sortes de personnages s’y rencontraient : des jeunes fêtards, des hommes d’affaires et grands de ce monde venus voir des geishas, des artistes amateurs de théâtre, etc. En vadrouillant dans les ruelles bordant sa rue, elle entendit au milieu du chaos auditif un son particulier. Un son qui l’attira. Un instrument de musique. Lequel ? elle n’avait jamais entendu ce son avant. Elle s’en approcha. Se retrouva devant une modeste porte, entr’ouverte. Elle entra. Se retrouva dans une petite salle à peine éclairée. La salle était vide à l’exception des acteurs sur scène. Ils bougeaient de manière étrange. Akane arrivait difficilement à penser qu’ils étaient humains. Elle s’approcha doucement. Non, ce n’étaient pas vraiment des humains. Mais de grandes marionnettes, encore plus grandes qu’elle. Des acteurs tout de noir vêtus les font bouger. C’est si gracieux, on dirait de la danse. Mais ils ne parlent pas. En plus des acteurs sur scène, Akane vit deux musiciens. Un joueur d’instrument ; ce même son qui l’avait attirée ici. Quelque chose en cet instrument touche son âme d’une manière qu’elle ne peut expliquer. Et à côté de cet instrumentiste, un chanteur qui semblait conter une histoire. Akane fut intriguée par ce curieux spectacle. Elle était tapie dans l’ombre d’un recoin et admirait ce qui se passait sur scène. Les marionnettes sont si grandes ! l’histoire est une épopée racontant l’histoire d’un chevalier, qui se bat contre des créatures hantant des villages afin de les libérer.
Qui es-tu ?
Akane sursaute. Elle n’avait pas vu qu’elle s’était faite remarquer par l’un des artistes. Il se tenait droit devant elle et la regardait d’un air sceptique. La petite fille était si absorbée par le spectacle qu’elle ne l’avait pas vu s’approcher d’elle.
Je… je suis désolée j’ai vu que la porte était ouverte et je suis entrée. C’est quoi ce spectacle ?
L’homme sourit. Il regarda ses camarades puis ses yeux revinrent sur Akane. Il lut l’émerveillement sur son visage, et adoucit son expression.
Ça t’intéresse ? ça s’appelle le bunraku (文楽), ça te plait ?
Akane hocha la tête énergiquement.
Viens t’asseoir devant, la répétition est en train de se terminer.
Elle s’assit par terre juste devant les comédiens et regarda attentivement la fin du spectacle, et le triomphe du héros. Le spectacle terminé, les comédiens commencèrent à débriefer à propos de cette générale. Le petit instrumentiste se faufila vers Akane.
Comment tu t’appelles ?
Akane. Akane Hime (光姫). Et toi ?
Moi c’est Haruki (春貴 printemps – précieux). Mais tu peux juste m’appeler Haru (春 – printemps). Enchanté de te connaitre Akane-chan.
Enchantée, Haru-kun. C’est quoi l’instrument dont tu joues ?
Tu n’en as jamais vu ? ça s’appelle un shamizen. Il n’y a pas beaucoup de cordes mais c’est pas si facile à apprendre. T’aimes bien ?
Oui, j’ai beaucoup aimé le spectacle.
Tu voudrais apprendre ? s’exclame Haru.
Akane semble gênée.
C’est que… je ne suis pas la meilleure joueuse d’instrument. Répondit-elle timidement.
Aucun souci ! tu peux apprendre à conter les histoires ! comme ça on pourra jouer ensemble !
Tu penses que j’en serais capable ?
Mais oui ! dans le bunraku¸ conteur et le musicien forment un couple artistique et ne se quittent plus ; ils jouent ensemble jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent de pratiquer. Et j’aimerais beaucoup jouer avec toi…
Akane sourit. Qu’est ce qui la retient d’accepter ? ce n’est pas comme si elle ne pouvait pas cumuler ça avec ses devoirs d’apprentie geisha. Ici enfin elle pourra faire quelque chose qu’elle aime, quelque chose qu’elle a choisi. Avoir le choix ne faisait pas partie du quotidien d’Akane. Elle avait l’habitude de suivre tout ce qu’on lui disait de faire, de suivre une routine bien tracée et ancrée dans son esprit. Si elle voulait vraiment être elle-même, elle devait commencer à reprendre sa vie en main, même pour une si petite chose.
D’accord ! mais je ne pourrai venir ici que la nuit. Et en secret.
Haru vit le combat qui se déroulait au sein de son esprit, et ne demanda rien. Il répondit affirmativement.
Akane était si heureuse ! elle avait hâte de commencer sa formation et de pouvoir exercer un art qui parlait à son âme, plus que la danse ou la musique en tout cas. Elle sentait que le théâtre serait plus pour elle. Elle était à l’aise dans ce lieu, pourtant encore inconnu. Après avoir longuement discuté avec les artistes, Akane rentra doucement chez elle. Elle se sentait libre. Cette nuit, elle dormi mieux que jamais.
« En pleine nuit brusquement je m’éveille,
sans raison j’ai envie de pleurer,
et de la couette je me recouvre la tête. »
Deux ans ont passé. A force de travail acharné, Akane a enfin gagné le statut de geisha. Kouki est fière de son travail, et sait qu’Akane fera le succès et la renommée de sa maison. De nouvelles apprenties geishas sont arrivées ; Akane ne doit donc plus s’occuper des corvées. Bonne et mauvaise nouvelle pour la nouvelle geisha qui devra maintenant assurer ses représentations le soir. Le temps du bunraku était compté. La tragédie frappa Akane. Lors de sa cérémonie d’intronisation, tout le quartier vint admirer la nouvelle geisha, et cette dernière dut aller saluer les commerçants et autres habitants du voisinage. Dans la foule, Akane reconnut ses amis comédiens. La stupeur sur leurs visages lui fit peur. Elle avait peur qu’ils la laissent, elle avait peur de se retrouver seule à nouveau, elle avait peur de perdre sa famille. Tout le reste de la journée ne fut qu’angoisses pour elle. Elle devait les voir, elle devait leur parler, leur expliquer les raisons. Elle se cachait derrière son sourire. Après avoir fait sa ronde, Kouki lui annonça qu’elle commencerait demain. Prépare-toi bien ce soir et repasse en ta mémoire ce que tu as appris. N’oublie jamais les enseignements que tu as reçus. Quand la maison fut endormie et regardait ailleurs, Akane prit ses jambes à son cou, et alla dans son théâtre secret. Elle entra doucement. Honteusement. Aucune pièce ne se jouait ce soir-là. Haru était assis, près de son instrument. Entouré de silence. Il l’entendit et leva les yeux vers elle.
Je savais que tu viendrais. Lui dit-il.
Akane ne répondit pas. Elle s’avança vers lui. Elle le regardait droit dans les yeux.
Je n’avais pas le choix… répondit-elle.
Haru sourit. Il se leva et la prit dans ses bras.
Je sais bien. Ça a dû être difficile pour toi. Mais maintenant tu n’es plus seule, Akane.
Premier coup. Akane sentit les larmes monter. Elle avait toujours l’habitude d’être seule, de s’occuper d’elle-même, de se protéger seule. Mais maintenant, elle a une famille sans titre. Enfin.
Pourquoi personne n’est là ? demanda Akane
Les autres sont en train de manger. Viens, on va les rejoindre.
Haru la prend par la main, et l’emmène à l’extérieur. Ils marchent un peu, et entrent dans une maison d’où émanent une bonne odeur de ramen ainsi que de joyeuses voix. Les deux entrent dans la maison et entrent dans la salle d’où provient le bruit. A peine ont-ils poussé la porte, que les joyeux lurons poussent des cris de célébration et applaudissent. Akane sourit. Son cœur est chaud. Les autres leur font signe de les rejoindre, et leur servent à manger. Akane et Haru s’assoient et commencent à manger. Les autres comédiens racontent des histoires, les uns après les autres. Akane est émerveillée par leur capacité à capter l’attention, et toute sa peine semble maintenant aussi irréelle que ces histoires.
Deuxième coup. Vers la fin du repas, l’un des comédiens se tourne vers elle et lui demande :
A toi maintenant de nous raconter l’histoire.
Akane a compris. Elle s’éclaircit la voix, et commence son récit.
Une jeune femme naquit un jour dans une maison de geishas…
Après avoir terminé son histoire, elle regarda son auditoire, et ne vit que des sourires. Les uns et les autres se levèrent, se dirigèrent vers elle et la prirent dans leurs bras. Les larmes se mirent à couler. Akane était la meilleure conteuse d’entre eux. Elle avait comme une sorte de don pour cette forme de théâtre épique. Elle savait manier les mots et les marionnettes mieux que quiconque. Sa libération était telle. Elle pouvait enfin partager son fardeau. Elle savait que jamais plus elle ne se sentirait seule. Les comédiens l’avaient acceptée comme étant l’une d’entre eux dès son arrivée et tous étaient impressionnés de son fulgurant apprentissage. Tout le monde lui disait qu’elle a été courageuse de tout affronter seule depuis si longtemps ; qu’elle les inspirait ; qu’ils la soutenaient dans tout ce qu’elle avait à faire. Tout le monde lui demandait comment elle avait fait, ce qu’elle avait ressenti. Tout le monde l’entourait et la rendait plus heureuse que jamais. Elle voulait rester ici éternellement ; ne jamais quitter le théâtre.
Troisième coup. Elle prit sa décision. Le lendemain même elle irait dire à Kouki qu’elle quittait les geishas. Bien que difficile, cette décision l’emplissait de joie. Après être secrètement rentrée dans sa chambre, elle s’endormit rapidement. Quand elle se réveilla, elle eut le plaisir de ne pas avoir à préparer le petit déjeuner. Elle s’habilla, et descendit dans la salle à manger. Tout le monde était là, et la table était prête. Le repas se passa paisiblement et, une fois terminé, Kouki vint voir Akane. Elle lui rappela ses devoirs et tout ce qu’elle devait retenir pour sa performance du soir.
D’ailleurs,
Commença timidement Akane
Mère, je voulais vous demande l’autorisation de partir. Je ne pense pas être faite pour être geisha, et j’ai trouvé autre chose qui me plait plus.
Kouki resta silencieuse un moment. Assez longtemps pour effrayer Akane. Puis elle prit la parole.
Partir ? qui te plait ? Akane ma petite je crois que tu ne comprends pas. Tu resteras ici. Tu performeras ton devoir. Tu paieras ta dette. Et tu ne te poseras pas plus de questions.
Akane sentit son corps se décomposer. Toujours le même discours. Elle s’était menti. Elle n’avait aucune volonté propre. Elle avait obtenu le droit de vivre et devait maintenant le payer. Elle qui ne l’avait pas demandé. Elle qui avait souvent préféré être morte et libre. Elle qui avait vécu pensant qu’elle pourrait accéder à la liberté. Elle qu’on gardait enchaînée. Tout cela pour rien. Elle ne pourrait jamais partir et elle accomplirait les rêves fous de sa mère de substitution.
Oui. Bien.
Voilà tout ce qu’elle réussit à répondre. Comment accepter cette captivité ? comment accepter sa condition sans issue ? elle ne le pouvait pas. Sa survie en dépendait. Elle devait agir. Mais maintenant n’était pas encore le moment. Il lui fallait attendre. Agir comme elle l’avait toujours fait. Cachée, tapie dans la pénombre, à l’abri des regards indésirables. Donc elle attendit. Elle guettait l’arrivée du moment opportun. Il lui semblait qu’il arrivait mais elle ne pouvait pas encore le voir. Ce n’est qu’après sa représentation qu’elle le vit. Là, tout clair et tout beau, le moment. Elle prit ses affaires, sortit de la maison, la regarda. Pour la dernière fois. Et s’enfuit.
« Bien que j’aie fermé les yeux,
rien ne m’est apparu.
Tristement, à nouveau, je les ouvre. »
Akane courut se réfugier au théâtre. Le seul endroit où elle se sentait bien, où elle pouvait être elle-même. Elle fut accueillie par Haru, qui était seul dans la pièce. Il jouait un morceau qu’Akane n’avait jamais entendu. Elle entra dans la pièce en courant, essoufflée. Il ne fallut que quelques instants à Haru pour qu’il se rende compte que c’était elle. Il sauta sur ses pieds, et se rua vers elle. Il la prit dans ses bras. Elle était éplorée. Après quelques minutes, elle se reprit.
Je suis partie. J’ai besoin de votre aide.
Haru avait compris avant même qu’elle lui explique.
On est là pour toi Akane. Ne t’en fais pas, tu es en sécurité ici. On en parlera avec les autres demain, mais tu sais que tout le monde te soutient.
Les larmes revinrent. Mais Akane ne pleura pas.
Merci.
C’est normal ! viens dormir maintenant, tu dois te reposer.
Haru emmena Akane dans l’autre pièce au fond, et sortit deux futons.
Tu dors toujours ici ? Akane était surprise.
Oui, sourit Haru, je ne viens pas d’ici, le théâtre c’est ma maison.
Tu viens d’où ?
De la nature.
Akane ne comprit pas. Mais elle sourit. Elle se sentait bien en compagnie d’Haru. Elle savait que, pour une certaine raison, lui seul pouvait totalement la comprendre. Elle ne voulait plus le quitter. Après que les lits furent prêts, Akane s’allongea, et s’endormit rapidement. Ce fut la meilleure nuit de sa vie. Visitée par de beaux et tendres rêves, elle se sentait paisible.
Le matin, elle fut réveillée par des voix indistinctes. Il faut attendre… qu’elle est en danger… lui demander. Elle ouvrit les yeux. La pièce était baignée de lumière, mais Akane ne s’en était pas même rendu compte. Elle se leva, fit son lit et se dirigea dans la direction des voix, dans l’autre pièce. Toute la troupe était là. Quand ils la virent arriver, tous se tuent. Un silence pesant. Haru prit la parole.
Akane, tu as l’air d’avoir bien dormi. Il sourit. Je viens d’expliquer ta situation à tout le monde. La maison a déjà commencé à te chercher…
Akane vit sa vie défiler devant ses yeux.
… ils ne vont pas tarder à arriver ici. Il vaudrait mieux que l’on parte.
On ? partir ? la peur se lisait dans les yeux d’Akane.
Partir pour aller où ?
Partir loin. lui répondit Haru.
La panique montait en Akane. Elle allait de nouveau être seule.
Pars avec moi Akane, prenons un bateau et partons loin d’ici. Tu pourras être libre là-bas, tu pourras être toi-même.
Seule, peut-être pas. Le doute montait en elle. Comment pouvait-elle juste partir comme ça, d’un coup ? elle n’en était pas sûre. Elle était chez elle et elle était perdue. Elle regarda autour d’elle. Tous ces visages souriants. Pourquoi sourient-ils dans un moment aussi tragique ? mais elle se sentait soutenue. Elle regarda en direction d’Haru. Il n’avait pas peur. Son visage était une mer calme. Elle prit une grande inspiration.
Partons.
Tous la regardèrent.
Tu es sûre ? demanda Haru
Oui. Je ne peux pas rester là. Je ne peux pas mettre tout le monde en danger. Tant que je suis avec toi Haru tout se passera bien.
Tout est prêt. Partons à la tombée de la nuit.
Akane hocha la tête.
La journée lui parut longue. Si longue. Il ne fallait pas sortir. Pas faire trop de bruit. Sa présence devait passer totalement inaperçue. On lui donna un long manteau avec une capuche. Un petit sac. Et c’est tout. Rien de plus à emporter. Elle devrait tout reconstruire à son arrivée. Arrivée où ? elle ne le savait pas encore. Mais Haru savait. Elle lui faisait confiance. Elle n’emporta pas grand-chose avec elle. Quelques vêtements, à manger et à boire, quelques livres de Yukio Mishima, et une broche ; souvenir de ses jours en tant que geisha. Le soir venu, les deux adolescents firent leurs adieux au reste de la troupe. Tous savaient que jamais plus ils ne se reverraient. Les larmes coulaient. Tout le monde voulait étirer ce moment à l’infini ; rester ensemble pour toujours. L’un d’eux prit la parole.
Akane Hime. Je prononce ton nom pour la dernière fois. Nous garderons tous le souvenir de ton passage dans nos vies. Du changement que tu as apporté. Ta présence parmi nous était aussi douce que les premières lueurs du printemps. L’hiver que nous avons à traverser, pour le restant de nos jours, ne sera supportable que par le souvenir constant de ta présence. Nous chérirons ce souvenir pour toujours, et porterons ton héritage silencieux, ici même. J’espère, nous espérons que ton prochain séjour te sera bon, et doux, et que ta lumière pourra se déployer partout où tu iras. Akane, de princesse tu es passée reine, et nous te souhaitons, nous vous souhaitons de vivre dans le bonheur et la félicité. Maintenant il se fait tard, partez tous deux. Filez dans la nuit, faufilez-vous dans les ombres et quittez cet endroit.
Akane et Haru étaient en pleurs. Ils se reprirent, attrapèrent leurs sacs et s’en allèrent. Leur cœur était lourd, mais leur esprit léger. Ils savaient que cette douleur était nécessaire, et qu’elle était la meilleure pour eux. Il se dirigèrent d’un pas rapide vers le port. Haru cherchait un bateau dans la pénombre, parmi tous ceux qui sommeillaient sur l’eau. Une fois repéré, ils avancèrent doucement vers le bateau, et montèrent à bord. Haru fit signe à Akane de se taire, et de le suivre. Elle s’exécuta. Le bateau était rempli de conteneurs. Ils se faufilèrent dans un petit trou entre deux conteneurs et s’assirent.
Voilà votre carrosse, ma chère. Personne ne devrait entrer ici avant notre arrivée, dans 25 jours. D’ici là il faudra tenir avec nos réserves. Mais ne t’en fais pas. Une fois arrivés, tout sera fini et on sera à l’abri de tout.
Je te fais confiance Haru. Lui répondit Akane.
Le bateau partit à l’aube, et c’est ainsi que commença leur voyage. Les deux amis restèrent dans cette cale pendant 25 jours. Le voyage leur sembla durer une éternité. Ils n’avaient plus la notion du temps. Ils ne voyaient pas l’extérieur, et n’entendaient que le bruit des vagues. Le jour commençait quand ils se réveillaient et se terminait quand ils s’endormaient, sans qu’ils sachent s’il faisait jour ou nuit. Les jours étaient tous les mêmes. Ils n’existaient même plus. Haru et Akane ne manquèrent de rien. Pour s’occuper, ils inventaient des histoires et les chantaient, faisaient bouger des marionnettes invisibles. Tous deux savaient que c’était un mal pour un bien. Et tous deux savaient qu’ils n’auraient pu tenir sans l’autre. Ils étaient comme frère et sœur. Mais les 25 jours ne furent pas éternels. Leur voyage maritime touchait à sa fin. Quand ils entendirent le sifflet du bateau, Akane et Haru comprirent qu’ils étaient arrivés. Ils se cachèrent dans le plus petit recoin, attendant la nuit. Ils entendirent la lourde porte s’ouvrir, et furent éblouis par la lumière du soleil. Les premiers conteneurs furent déchargés. Ils ne durent attendre que quelques heures avant de n’entendre plus un bruit. La nuit était tombée. Ils se faufilèrent hors du bateau, et rejoignirent la terre ferme. La sensation leur parut étrange, comme s’ils quittaient un nuage.
Bienvenue à New-York Akane darling.
Elle rit.
Je ne sais pas ce que ça veut dire, mais woooow! New York! Ça change du Japon. On va où ?
Suis-moi. Lui répondit Haru. On va prendre un taxi puis on sera arrivés.
Tous deux se mirent en route. Ils sortirent du port, sans se faire remarquer. Ils rejoignirent la route. Il n’y avait aucune lumière.
Haru sortit de sa poche une pièce d’or.
Stêthi 'Ô hárma diabolês. Dit-il en lançant la pièce sur la route.
La pièce disparut aussitôt. Akane écarquilla les yeux. Elle regarda en direction d’Haru. Ses yeux s’agrandirent encore plus quand elle le vit. Comment n’avait-elle pas remarqué ? ses jambes. Elles étaient changées.
Haru ? il se passe quoi là ?
Haru la regarda. Il reconnut cette expression. Il s’avança vers elle et la prit dans ses bras.
Ne t’en fais pas Akane, tout ira bien. Je t’expliquerai tout quand on sera en sécurité.
Alors qu’il prononçait ces mots, ils virent une intense lumière se diriger vers eux et un fort bruit de moteur. En un instant, le taxi s’arrêtait devant eux. La porte s’ouvrit. Ils montèrent à l’intérieur.
Half-blood hill please. Demanda Haru dans un anglais approximatif
Mmmmh très bien. Accrochez vos ceintures, et c’est partiiiiii. Résonna une voix à l’avant.
Akane ne savait pas ce qui s’était dit, mais dès que la voiture partit, elle s’accrocha comme elle put à la portière. Elle regarda Haru. Il avait n’avait pas l’air si effrayé que ça. Akane dirigea son regard à l’avant. La voiture était conduite par trois vieilles. En regardant de plus près, elle se rendit compte que deux d’entre elles n’avait pas d’yeux, et que la troisième n’en avait qu’un seul. Elle prit peur. Où était-elle tombée ? qui étaient ces gens ? et qui est Haru ? elle repensa au Japon. Peut-être que vivre en geisha n’était pas si mal que ça. Elle commençait é regretter. Si c’était ça la liberté, elle n’en voulait pas. Avant qu’elle ait pu réaliser quoi que ce soit, la voiture s’arrêta au pied d’une petite colline, et la portière se rouvrit. Haru sortit. Akane fit de même. A peine furent-ils sortis que la porte se referma, et la voiture repartit en une fraction de seconde.
Haru souriait. Akane ne pouvait pas avoir peur de lui. Il était identique à celui qu’elle avait connu. Elle décida de lui faire confiance de nouveau. Il la prit par la main, et elle se laissa entraîner vers le haut de la côte. Haru courait, il semblait impatient d’atteindre le haut de la colline. Ils traversèrent à la hâte une porte avec des sortes de flammes, en haut de laquelle était une inscription d’une langue qu’Akane ne connaissait pas, mais qu’elle put déchiffrer malgré elle
Colonie des sang-mêlés. Elle n’avait aucune idée de l’endroit où elle venait d’arriver, et ne savait pas encore que son long périple touchait à sa fin.
IDENTITE
Après son arrivée à la colonie, Akane fut accueillie par Chiron et rejoint rapidement le bungalow de Dionysos avec son frère. Elle avait à l’époque 14 ans. Elle en a maintenant 16 et est résidente permanente. Elle apprend rapidement l’anglais. Ses pronoms sont she/her (elle) et son identité trans n’est pas un tabou pour elle.
POUVOIRS
Fille du dieu du théâtre, Akane a la capacité de combattre avec des marionnettes de bunraku armées qu’elle construit elle-même (sous la supervision des enfants d’Héphaïstos). Elle peut également mentir en faisant passer tout ce qu’elle dit pour une vérité immuable et certaine, si la personne a bu de l’alcool. Enfin, elle a la capacité (pas encore totalement) de faire apparaître un personnage de théâtre qu'elle invente, et de lui ordonner d'effectuer des actions pour elle. Ces actions restent dans la limite de ce que le personnage peut faire (ex il ne peut pas voler si c'est un humain), et les personnages doivent rester plus ou moins réalistes (dans la limite de ce qui est réaliste pour eux en tout cas, par exemple ça ne peut pas être un personnage surpuissant et invincible). Et la création est plus ou moins difficile selon que c'est un chat, ou un guerrier Et ça vaut aussi pour la durée, plus un personnage est fort/complexe, moins longtemps elle pourra l'utiliser.
POINTS FORTS/FAIBLES
Akane est forte. Surtout mentalement, c’est sa plus grande qualité. Elle est difficilement affectée par les remarques ou les situations difficiles qu’elle traverse. Elle sait aussi se battre mais est moins puissante sans ses marionnettes.
Elle a une peur paralysante de l’abandon, de la solitude et elle a du mal dans les espaces clos.
PHYSIQUE
Akane est très belle. La plupart des gens trouvent que c’est une fille magnifique.
RELATIONS
Nadya
Nadya est un peu plus âgée que moi, ET c’est une enfant d’Aphrodite donc elle me faisait un peu peur au départ. Ce n’était pas vraiment de la peur mais je pense que j’étais impressionnée par son aura et sa personnalité. J’admire toujours ceux.elles qui assument leur identité, ne changent pas leur personnalité pour plaire aux autres, et Nadya reste toujours elle-même. Bon on n’est pas très proches elle et moi mais j’aime beaucoup sa compagnie et c’est toujours fun de s’entraîner avec elle. Elle me fait beaucoup rire, surtout parce qu’elle connaît tous les dramas de la Colonie, et qu’elle peut être tellement véhémente envers certaines personnes ! ça m’amuse beaucoup de voir sa confiance en elle et toutes les émotions par lesquelles elle passe. Peut être parce que nous sommes différentes, je pense que je suis plus passive-agressive (certains pourraient dire fourbe). Mais ce que je préfère le plus chez Nadya c’est sa loyauté ; le fait qu’elle défend ses amis.es avec une telle passion ! Enfin c’est une personne que j’apprécie beaucoup et de qui j’aimerais être plus proche.
Daithe
Oh Daithe ! s’il y a bien une personne à la Colonie qui m’apaise toujours c’est bien elle. Comme j’ai toujours besoin de temps seule je me pose souvent dans les bois où près du lac. Je crois que c’est là que j’ai rencontré Daithe pour la première fois. Elle m’a demandé si tout allait bien, apparemment j’avais l’air triste, mais je pensais juste au fait que cette colonie manque cruellement de vignes. Quand je lui ai expliqué on a bien ri, et à partir de ce moment-là, on est devenues assez proches. On a toujours des conversations intéressantes, j’admire sa sagesse et sa bonté. Elle me dit souvent qu’elle m’aiderait si j’ai des problèmes, et c’est réciproque. Je défendrai Daithe avec tout ce que j’ai.
Felix
Je ne sais même pas par où commencer. Je ne parle pas beaucoup à Felix mais on se retrouve souvent ensemble au même endroit ; mais on ne parle pas. C’est étrange. Je sens souvent son regard sur moi et je ne sais pas trop ce qu’il veut. Il est difficile à lire. Mais bon connaissant sa réputation de grand charmeur, j’ai ma petite idée. Je ne sais pas. C’est vrai que Felix est traditionnellement beau mais… il y a quelque chose qui ne clic pas. Je ne sais pas ce que c’est. Il a l’air très sûr de lui. Peut être un peu trop. Mais j’essaie de ne pas juger avant de le connaitre parce que je peux sentir qu’il y a quelque chose de plus profond en lui. Peut être que si l’on se côtoie et qu’on se parle plus je pourrais être amenée à être attirée par lui. Même si pour l’instant, ça me fait bizarre rien que d’y penser.
Madeleine
J’aime Madeleine comme une petite sœur. Je pense que je me retrouve dans sa personnalité inconventionnelle. Je pense qu’elle me rappelle le moi du Japon. Mais j’aime beaucoup sa présence, elle me fait beaucoup rire parce qu’elle a tout le temps l’air d’être à l’ouest. Par exemple elle a eu beaucoup de mal à comprendre ma transidentité et m’appelait « il » sans se rendre compte de ce que cela impliquait. Mais c’est encore normal à son âge, je ne lui en voulais pas parce que ça se voyait qu’elle fait des efforts. Elle est vraiment adorable, je l’aime de tout mon cœur. Elle essaie toujours d’apprendre et d’aller vers les gens, même si c’est parfois maladroit. Je ne peux même pas exprimer toute l’affection que j’ai pour elle ; je la défendrai au péril de ma vie.