Bien sûr le personnage principal a 16 ans, le récit est chaste et il y a un triangle amoureux. Mais ces trois caractéristiques ne sont pas des traits marquants du récit. C'est même assez marginal. Avec une héroïne de 23 ans, une scène de sexe et pas de Gale, la trilogie aurait été peu ou prou inchangée (démonstration ci-dessous). Pour l'essentiel, Hunger Games est un roman avec des thèmes très durs, traités comme dans un roman visant un public adulte.

Attention : cet avis contient - comme les films - de nombreux spoilers
Ne lisez pas cet avis si vous n'avez, ni vu les films, ni lu les livres.
INTRIGUE ÉMOTIONNELLE
L’héroïne accepte d’être envoyée à la mort pour sauver la vie de sa petite sœur. Durant les 3 tomes, les émotions de l’héroïne sont rendues à la perfection. La peur, le désir de protéger ses proches, le désespoir, le courage face à la certitude d’une mort imminente. C’est la grande réussite de cette trilogie.
Peeta est un Mary Sue peu crédible : orateur habile, extrêmement malin, puissante musculature, héroïque, honnête, sincère etc. Ça sent effectivement un peu le Roman Jeunesse. Ce manque de réalisme est irritant mais passe à peu près. En effet, les interactions avec l’héroïne reposent surtout sur l’amour qu’il éprouve pour elle depuis le bac à sable. Et ça, c’est correctement écrit.
Peeta permet aussi un récit où l’héroïne passe son temps à défendre physiquement le principal personnage masculin. Un renversement de stéréotypes assez rafraîchissant.
TOME 1
C’est un survival de 220 pages. Traques et combats en pleine nature avec des armes blanches.
Les combats sont basiques et mal décrits. Mais comme ils sont rapides, ça passe. Le potentiel narratif d’un talent à l’arc est gaché par l’autrice (Collins s’en sert mal). Mais il y a un très bon rythme. Les règles des Hunger Games sont bien pensées et fournissent un renouvellement permanent des enjeux.
Le survival est précédé de 30 pages de camp de travail : le district 12, famine, propagande, oppression, exécutions. Et de 120 pages de vernis SF : dictature, médias, pression politique.
TOME 2
280 pages racontent la situation précaire de l’héroïne de retour à la vie civile. Symbole malgré elle de résistance à l’oppression, elle est surveillée par le régime pendant ses apparitions dans les médias. L’héroïne se sait à deux doigts d’être exécutée.
L’univers SF est basique (l’histoire aurait pu se dérouler dans une dictature du XX° siècle), mais la qualité de l’intrigue émotionnelle est soignée.
L’autrice se fend de 120 pages d’un second Survival à la fin du tome. Dans ce survival, le suspense est moindre car l’héroïne n’est pas aussi démunie et désespérée que la première fois. Les nouvelles règles du Jeu fonctionnent très bien visuellement, dans l’adaptation cinématographique. À l’écrit, ça paraît un peu brouillon, sans être déplaisant.
TOME 3
- 300 pages sur l'organisation de la rébellion : désespérée de savoir un être cher aux mains du dictateur, l’héroïne convalescente découvre la vie contraignante de la cité souterraine des rebelles. Elle se voit obligée de jouer à nouveau la comédie devant des caméras. Cette fois, pour la propagande de la rébellion.
L’organisation de la base des rebelles et les quelques apparitions publiques de l’héroïne laissent pas mal d’espaces vides. L’autrice les comble avec le traumatisme de Finnick et de Johanna, deux autres survivants des jeux.
- puis 100 pages de traque urbaine à la fin. L’héroïne s’introduit avec une petite équipe de soldats dans la ville du dictateur. Fuites, combats etc. Cette partie est superbe à l’écran et donne l’impression d’avoir été écrite pour l’écran (film sorti 2 ans plus tard et donc probablement pensé en même temps que le tome 3). Néanmoins, il y a un bon rythme, ça se lit facilement. Seul défaut de ces 100 pages : elles sont vaines. Si l’héroïne était restée chez elle à faire du tricot, ça n’aurait rien changé à ses actes à la fin de l’histoire.
Mais ce tome 3 est transcendé par sa couleur émotionnelle. La descente aux enfers de l’héroïne. Blessures, deuils, désespoir, folie. Ça, c’est remarquablement bien écrit. Si bien écrit en fait, que la lectrice que j’étais à 15 ans en était restée durablement marquée.
ROMAN JEUNESSE ?
On a là un récit prenant et parfois très dur. J’ai toujours trouvé curieux qu’il soit classé en littérature jeunesse.
Certes l’âge de l’héroïne et le triangle amoureux sont des tropes de romans jeunesse. Mais :
- la littérature jeunesse n’en a pas le monopole
- l'essentiel du récit parle d'autre chose. Il parle d'oppression et de violence
- la facette romance est racontée presque indirectement, à travers une pression médiatique qui interfère avec une relation privée. Ce n’est pas un angle typique de roman Jeunesse.
- le traitement du récit est celui d’un roman de littérature générale. Par l’épaisseur psychologique du personnage principal, et par la dureté de ce qu’elle subit. Les deux personnages principaux finissent brisés.
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Je recherche des romans avec ces 4 qualités / Ma présentation