Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

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x-Key

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Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par x-Key »

Bonjour à tous !

Le thème du concours d'écriture de mars est : Le Petit Monde du Minuscule ! Insectes, Petit Peuple des fées et lutins, humains miniatures... laissez libre court à votre imagination et écrivez-nous une histoire sur le minuscule ! Vous avez jusqu'au 31 mars.

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Pour rappel :

♦ Vous avez tout le mois (et pas plus !) pour poster votre texte sur le sujet, nous n'accepterons pas les retardataires.
♦ Un jury composé de plusieurs personnes lira ensuite vos créations littéraires et désignera le texte vainqueur. Le gagnant sera récompensé d'un badge spécial et d'une petite surprise.
♦ Tous les types de textes sont acceptés (fiction, histoire vraie, nouvelle, essai, en vers, en prose) du moment qu'ils collent au thème !
♦ Il n'y a pas de limites minimum de caractères. En terme de taille, le format d'une nouvelle de 15 000 signes (environ 7 pages) est le maximum qui sera accepté.
♦ Faites attention à votre expression et à votre orthographe, il est toujours plus agréable de lire des textes écrits dans un français correct ;)
♦ Attention : Seuls les membres de Booknode dont le profit sera un minimum complété (quelques livres en biblio et infos sur le profil) pourront participer, peu importe votre date d'inscription. Vous pouvez très bien vous être inscrits la veille, il n'y a aucun soucis, tant qu'il est clair que vous ne vous êtes pas inscrits sur le site juste pour participer et ne jamais y revenir ;)

Bonne chance à tous ! :)
Constancedufort

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Constancedufort »

Voilà un super sujet ! Je m'y plonge, à bientôt pour ma petite histoire...
Constancedufort

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Constancedufort »

Voici ma proposition, merci pour ce concours rafraîchissant ! J'espère vous amuser et vous faire sourire, à bientôt.

Je serai le dernier…

Tout a débuté par un frémissement. Nous étions serrés les uns contre les autres depuis si longtemps que nous avions perdu la notion du temps dans cette illusion d’éternité. Un comble !
Notre monde figé s’est ébranlé. Le sol a tremblé, brisant notre immobilité, et les reflets sur le cristal nous ont éblouis. Notre univers a tangué dans un grondement pareil à un cri déchirant.
Je garde en mémoire le raclement de mes proches lorsqu’ils ont glissé le long de la paroi dressée. Nous sommes si petits, si insignifiants ! Le froid soudain m’a envahi lorsque leurs corps se sont détachés du mien. Ils tombaient dans le vide en crissant. Bientôt, mon tour viendrait. Je ne suis pas assez fort pour m’accrocher.
Mon monde en balancier s’est enfin décidé à vriller pour de bon, avant de se stabiliser dans une immobilité morbide. Puis le silence, plus lourd que le plomb. Retour à l’éternité, la tête à l’envers. Mes repères balayés.
Un cri, puis deux, puis dix. La rumeur a enflé, angoissante. Non, l’éternité n’était pas pour nous. Pas en cet instant. Notre univers se dérobait encore sous nos pieds. J’ai entendu les gémissements de mes frères emportés malgré eux lorsque le temps et l’histoire ont repris leurs droits. On m’avait dit que cela arriverait. Que notre monde était voué à disparaître en une poignée de minutes. Je sens la spirale du siphon sous mon ventre. Je me roule en boule. Mes proches sont partis, aspirés par l’inéluctable.
A mon tour je glisse et tombe…
La peur de l’inconnu me ronge et me fait trembler sous les assauts de la gravité.
Et je tombe…
Elle tue dans l’œuf mes désirs de rébellion. Je suis destiné à y passer.
Je tombe…
Au-dessus de nous, une ombre se couche le long du globe et voile la lumière. Je reconnais l’immensité d’un iris étoilé et le noir sans fond d’une pupille. Notre dieu. Je ne suis qu’un rouage, comment le contredire ? Il me rappelle qu’il a besoin de moi. Il est temps de tenir mon rôle et de jouer ma partition dans le grand chamboulement. La succion s’accentue et les gémissements se transforment en échos lointains. Je suis un des derniers à résister à la grande aspiration. Pourtant, je glisse, et je tombe… Bientôt, je les rejoindrai.
J’aperçois maintenant la porte dorée, si étroite qu’un seul d’entre nous peut s’y faufiler. Elle m’ouvre l’accès à un nouveau monde, un nouveau globe d’éternité. Je ne lutte plus, statufié par l’œil de mon dieu.
…je tombe.
Je suis son compteur de temps. La foi me revient. Lorsque je ne serai plus dans ce monde, je renaîtrai dans le suivant.
Je vois la lumière au bout du tunnel et j’entends mes frères qui m’appellent.
« L’autre globe n’est pas si différent, me clament-ils, accomplis ton office et rejoins-nous ! »
Vaincu par la peur, je me laisse aller. Le temps s’écoule, inexorablement. Un grain de sable ne peut l’enrayer. Je me laisse happer par le vide, au travers la porte dorée en chat d’aiguille. Je tombe, enfin.
J’ai au moins cette fierté : je suis le dernier grain de sable de la clepsydre, l’ultime témoin de cette minute d’éternité.
daenerys98

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par daenerys98 »

Voilà ma première participation à ce concours, j'espère vraiment que mon texte vous plaira et qu'il correspond bien au sujet ! Et surtout... Bonne lecture !


Les lucioles

Combien de fois les ai-je comptées ? Cent fois ? Cinq cents fois ? Peut-être plus. Je les ai comptés plus de fois que je ne peux m’en rappeler. Pendant huit ans, je les ai observées. Lorsque j’étais triste. Lorsque j’étais seule. Lorsque plus personne ne m’écoutait, que plus personne ne m’entendait. Que mes amis partaient et me laissaient seule avec moi-même, elles seules demeuraient.

Elles brillaient au travers de ma fenêtre, ces minuscules insectes. J’observais leur danse, toutes les nuits différentes. Je restais éveillée à les regarder. Elles menaient leurs vies et j’observais. Je les voyais aussi parfois mourir. Je voyais une petite lumière briller dans le ciel, puis l’obscurité. Plus rien. Et chaque matin, le soleil se levait en me privant de leurs douces lueurs.

Avant, j’avais peur de l’obscurité. La lumière du jour me rassurait, elle me permettait de voir chaque recoin de la pièce. Puis je me suis vite rendu compte que les pires choses arrivaient toujours durant la journée, et non la nuit. La nuit était calme, paisible et silencieuse. Et lorsque j’ai compris cela, en grandissant, je me suis aperçue que l’obscurité m’offrait un spectacle bien plus doux que tout ce que je pouvais observer durant la journée. Mes lucioles. Elles brillent et scintillent sereinement dans le voile de la nuit, rassurantes. Dans le silence de l’obscurité, elles savent signifier leurs présences. Sans s’imposer, elles se fondent dans ces ténèbres bleues. Leurs lumières vacillantes, plus ou moins intenses selon les nuits.
C’est lorsqu’il m’a apporté un livre que j’ai su que ces lumières étaient des insectes. Des lucioles qui brillaient au-dehors pour signaler qu’ils étaient prêts à s’accoupler. J’ai observé durant tellement longtemps ce livre, que j’en connais chaque dessin, chaque couleur, chaque pliure et chaque craquelure. Il était le seul livre que je possédais. Pas par envie, non. Je rêvais de dévorer d’autres livres. Des ouvrages entiers. Sur des thèmes divers et variés, tous ceux que je pourrais trouver. Après toutes ces journées remplies de surprises toutes plus désagréables les unes que les autres, je ne souhaitais qu’une seule chose, m’échapper. Me réfugier dans des histoires d’amour, d’horreur, de suspense, de trahison et d’aventure à travers le monde. Mais je n’avais que ce seul livre, qu’il ne m’avait lu qu’une seule fois. J’essayais de m’en rappeler du mieux possible. Les seuls fragments qui me revenaient étaient ceux sur les lucioles. J’ai essayé de déchiffrer les autres pages, mais je n’arrivais pas lire ce qui était écrit, je voyais d’autres dessins d’insectes et d’animaux en tout genre, mais je ne connaissais pas leurs noms.

Chaque fois qu’un ami me rendait visite, je leur demandais si eux, ils savaient. S’ils connaissaient ces créatures, si elles existaient vraiment, ou au moins s’ils savaient lire leurs noms. Mais aucun d’entre eux ne savais jamais, ou bien ne voulais pas me répondre. Et pour certain, ils n’essayaient même jamais de lever les yeux vers mon livre. Quand ils pleuraient, j’essayais de les consoler quand ils étaient tristes de passer la nuit loin de leurs papas et de leurs mamans. Mais ils continuaient de pleurer pendant longtemps. De temps en temps, j’arrivais à discuter un peu avec eux. Mais sans jamais vraiment savoir ce qu’ils aimaient vraiment. Et j’arrivais à faire en sorte qu’ils me racontent des histoires, des histoires sur le monde, sur des aventures trépidantes. Mais certains ne restaient pas la nuit complète. S’ils pleuraient trop longtemps ou trop fort, il descendait pour leur dire de se taire. Et si ça ne marchait pas (ce qui était le cas le plus souvent), il les ramenait chez eux. Sauf que moi, je ne les revoyais jamais, car quand il revenait, il me disait que leurs parents étaient extrêmement en colère et qu’ils ne voulaient plus qu’ils viennent ici.

Au bout de quelque temps, j’ai eu une amie qui est restée plus longtemps que les autres avec moi, parce qu’elle ne pleurait pas. Elle était un peu plus grande mais elle jouait tout de même avec avec moi. Et même si ses parents et son grand frère lui manquait, elle jouait. Elle m’a appris de nouveaux jeux comme par exemple des jeux de bagarre. Je ne connaissais pas et elle m’a même appris des coups spéciaux pour faire très mal au garçon et gagner. J’étais heureuse d’apprendre ça, sauf que je n’avais encore jamais eu d’ami garçon qui venait ici, mais si jamais cela arrivait, je saurais comment gagner contre eux.

Chaque nuit, nous nous racontions nos rêves et nos envies. Son plus grand rêve, c’était de visiter un pays appelé Irlande. Le mien, c’était de sortir de cette pièce, rien qu’une fois, pour voir les étoiles. Il parait que quand il n’y a pas de lumière et pas de nuages, elle recouvre toute la voûte du ciel. Et chaque nuit, nous regardions toutes les deux mes lucioles, je lui disais pourquoi elles étaient si importantes. Pourquoi ces minuscules lumières dans la nuit comptaient tant. Et elle me regardait toujours de façon étrange, mais sans jamais accepter de me dire pourquoi. Un jour, elle a écrit quelque chose sur la dernière page de mon livre avec un tout petit crayon dans une boite que je n’avais jamais utilisée. Elle n’a jamais voulu me dire ce qu’était son message.

Un jour où l’on jouait, il est descendu. Il avait été très énervé d’apprendre qu’elle m’avait fait jouer à des jeux violents et qu’elle devrait être punie. Je ne sais pas pourquoi, puisqu’il me faisait déjà jouer à des jeux durant lesquels j’avais très mal. Alors qu’avec elle, je n’avais jamais eu mal. Mais le soir même, il l’a ramené chez elle. Elle était la meilleure amie que j’ai eue. Je me suis donc retrouvée de nouveau seule, avec mes lucioles. Leurs lumières me couvaient chaque nuit, elles écoutaient mes rêves et mes tristesses.

Après son départ, j’étais sur mon matelas recroquevillé sur moi-même, les yeux tournés vers le ciel. Il m’avait punie. Punie, parce que j’avais joué avec elle et que je ne lui avais pas dit ce que nous faisions. Il me faisait toujours mal, mais cette fois, c’était différent, j’ai encore plus souffert. Mais j’avais mes lucioles. Je les regardais pendant ma punition. Je m’évadais au-delà de la fenêtre, pour virevolter avec elles dans le bleu de la nuit. Dans une obscurité d’une douceur enveloppante. Silencieuse et douce. Comment était leur vie ? À l’extérieur. C’était la première fois qu’il descendait ici de nuit.

Cela fait trois ans maintenant qu’elle est partie. Et je n’ai plus revu de nouvelles personnes depuis. Je sentis le soleil sur mon visage et j’entendis la porte du haut de l’escalier s’ouvrir puis se refermer. Je me redressais, mais je me sentis comme collée au matelas. Je baissai les yeux et je vis une énorme tache rouge sur mes vêtements et sur le matelas. Ses yeux ne cessaient de passer de mes vêtements au matelas. Il lâcha alors brusquement le plateau sur le sol.

- Tu es trop grande maintenant. Ce soir, tu vas partir en vacances. Mange et change toi. Dès qu’il fera nuit, on part.

Trop grande ? Comment ça ? Et partir en vacances ? Mais où ça ? J’ai appris à mes dépens que je ne devais poser de questions, mais faire ce qu’il disait. Il repartit donc et je ne le revis pas de la journée. Le soir venu, il descendit me chercher. J’étais prête et j’attendais assise sur le bout de mon matelas, les jambes allongées sur le sol. Mon livre serré contre ma poitrine. Il me prit fermement le bras pour que je monte les escaliers. Je ne vis pas grand-chose de la maison, car nous prîmes la première porte à droite en haut de l’escalier. C’était le garage, une petite fourgonnette nous attendait, les portes arrières ouvertes. Il me força à monter à l’arrière, d’où je ne pouvais pas voir l’extérieur du véhicule. Dommage. Je ne verrais pas mes lucioles… La voiture roula pendant un bon moment sur des routes cahoteuses avant de s’arrêter. Lorsque les portes s’ouvrir, je vis des arbres. Mais je le vis surtout lui, tenant un fusil. Il m’ordonna de sortir. Je serrais encore plus fort mon livre contre moi.

- Mets-toi à genoux.

Après quelques secondes d’inactions de ma part, il posa sa main sur mon épaule et me mit un coup de crosse à l’arrière des genoux. Je m’effondrai en lâchant le livre sur le sol boueux. Je le repris et le serrai encore plus fort qu’avant contre moi.

- Donne-le-moi.
- Pourquoi ?
- Pour la prochaine.

Alors… C’était ça ? Il allait me remplacer ? Parce que j’étais trop grande ? Elle savait, elle savait ce qui allait m’arriver. Et elle m’a appris à me défendre. Mais au corps-à-corps. Pas contre une arme. Et j’allais mourir. Comme mes lucioles. Après tout, peut être que ça serait rapide. Je jetai un coup d’œil autour de moi pour rassurer, mais pas de lucioles, aucune lumière. J’avais donc eu tords. La nuit n’est pas plus paisible que le jour. Des choses mauvaises arrivent également la nuit, même si elle calme, paisible, silencieuse et douce, elle n’est pas protectrice. Et je ne reverrais plus mes lucioles. Je fermai les yeux pour essayer de chasser cette obscurité qui était tout aussi dangereuse que la lumière. En m’imaginant dans la cave à regarder ces petites lumières blanches par ma fenêtre qui étaient pleines de bienveillance, qui ont veillé sur moi durant plusieurs années. Ces petits insectes qui ignoraient l’importance qu’ils pouvaient avoir, l’importance phénoménale qu’ils avaient pour au moins une personne dans ce monde. Et peut-être aussi pour ses autres enfants que j’ai vu se succéder et qui ont très certainement fini comme moi. Peut-être les ont-ils vu au travers de leurs larmes ? J’espère. Elles sont comme mon petit monde à moi. Celui qu’il ne voyait pas. Qu’il ne remarquait pas et qu’il ne pouvait corrompre. Qu’il ne pouvait briser. Un monde parfait. Mes lucioles qui faisaient leurs vies sans savoir que la mienne était en suspens pendant huit ans. Mes lucioles qui ne savaient pas à quel point je comptais sur elles chaque nuit. Mes lucioles qui ignoraient que lorsqu’il pleuvait au-dehors, il pleuvait aussi en moi parce que je ne pouvais plus les voir danser. Je les voyais presque vibrer sous mes paupières. Si je devais partir, j’emporterais avec moi le souvenir de la paix qu’elles provoquaient en moi. Mais non. Pas maintenant. Il me manquait quelque chose. D’important.

- Je peux vous demander quelque chose ?
- Vas-y.

Je desserrai mes bras et regardai mon livre avec sa couverture verte et blanche, puis je l’ouvris à la dernière page et le lui tendis.

- Qu’est-ce qui est écrit là ?

Il observa la page un instant puis m’observa, comme s’il cherchait à savoir si je méritais d’avoir une réponse ou non. Puis il me lut enfin ce message qui patientait depuis trois ans.

- C’est écrit : « Ce ne sont pas des lucioles. Ce sont des étoiles. ».
- Merci.

Je me retournai alors, dos à lui, et je levai les yeux au ciel. Mes lucioles. Finalement, je ne partirais pas simplement avec un souvenir d’elles. Elles m’accompagneront, même maintenant, jusqu’au bout. Je suis quand même heureuse, j’ai vu les étoiles. Et c’était vrai. Elle recouvre le ciel. Comme une nappe de lumière. Une nappe brillante et scintillante. Et il y en a plus. Bien plus que pouvais en compter par ma petite lucarne. Des milliers de points minuscules, luisants très loin de moi.
Ce ne sont pas des lucioles. Mais ce sont mes lucioles. Et elles le resteront. Et ce soir elles se sont toutes réunies, rien que pour moi. Pour m’accueillir et peut-être que si elles sont suffisamment proches je pourrais me joindre à elles pour toujours. Un coup de feu retentit.

Mes lucioles.
Espritsdevie

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Espritsdevie »

Un thème qui m'inspire beaucoup, donc je participe. Bonne lecture !

Mon monde fay

La forêt est, depuis toujours, mon univers. Un monde à part, dans lequel je me sens à mon aise. J'ai pris l'habitude d'emporter un petit sac juste assez grand pour y mettre mon livre quand je pars. Je cours, je me promène, je regarde, je prends parfois des photos.

Bien sûr, pour cela, il faut que j'ai pensé à me munir de mon appareil ou de mon téléphone. Ce qui n'est pas toujours le cas.

Et je pars me caler sur "mon" arbre.


"Mon" arbre est un arbre fay. Ou arbre fée, comme vous voulez. Il me fait penser, en fonction des jours, à un Ent du Seigneur des Anneaux ou à la grand-mère feuillage de Pocahontas. Et là, je peux laisser mon imagination déborder, s'envoler et créer.

Tout un univers de magie s'ouvre soudain à moi. J'ai quitté la civilisation, le petit peuple m'attends et m'accueille.

Naturellement, j'y croyais sans y croire. Vous savez ce que c'est. Quand on ne cesse de vous répéter que ces créatures n'existent pas et que tout cela n'a aucun sens, on fini par être un peu désabusé. Mais je n'ai jamais perdu mon esprit imaginatif, créatif et merveilleux.

Cela dit, je pense que la petite créature que j'ai vu ce jour-là ne savait pas qu'elle n'existait pas ! On ne le lui avait sans doute jamais dit.

Elle devait faire la taille de mon auriculaire et, comme je suis moi-même assez petite, je vous prie de croire que mon doigt est très petit. Mais je n'ai pas pu en faire la vérification. La créature ressemblait à ce que, dans mon esprit, j'appelle une fée. Deux ailes, incroyablement grandes en comparaison de sa taille ! battaient dans son dos, la soulevant du tronc à l'horizontal sur lequel je m'asseyais d'ordinaire. Elle paraissait n'être vêtue que de feuilles de vignes, certainement taillées sur mesure. Ou peut-être étaient-elles simplement déchirées pour créer des vêtements.
De longs cheveux parfaitement verts ainsi que de grands yeux, verts également, complétaient la vision enchanteresse.

Nous nous sommes considérées un long moment. Suffisant pour que je la détaille en tout cas. J'ignore comment je me sentais.

J'aurais du, j'en suis consciente, être étonnée. Ou même abasourdie par cette créature. Mais, malgré tout ce que l'on m'avait inculqué, j'ai vécu cette apparition comme quelque chose de tout à fait normal et, même, s'intégrant avec perfection dans cet espace déjà si merveilleux. Bref, rien que de très naturel !

En fait, à y réfléchir, c'est moi-même qui ne me suis pas sentie à ma place, avec mes vêtements en tissus, mes tennis et mon sac à dos. J'étais une étrangère dans un monde qui, la veille, m’accueillait encore comme si j'en faisais partie. Je ne m'en formalisais pas. Après tout, mon univers restait bienveillant envers moi et, bien qu'étant étrangère, je n'étais toutefois pas une ennemie ni une intruse. Simplement étrangère.

La fée parlait-elle ? Elle était si petite que je craignais de l'assourdir avec des paroles. Je me contentais de murmurer, lentement :

- Savez-vous parler ?

Je n'ai pas voulu lui demander si elle était réelle, j'avais trop peur qu'elle disparaisse !

La fée m'a regardé, visiblement interloquée. Comprenait-elle ce que je disais ? Elle n'était pas effrayée, ce qui m'a paru être un bon point en ma faveur. Peut-être venait-elle souvent. Peut-être m'avait-elle vu. Peut-être même habitait-elle dans cet arbre que, chaque jour de l'été, j'utilisais comme un siège. Battant de ses belles ailes, aussi vertes que ses cheveux et ses yeux, elle s'est rapprochée de moi. Ce n'est que lorsqu'elle se plaça juste devant moi que je pu réaliser à quel point elle était belle. Sa peau, contrairement à ce que j'avais cru, n'était pas chocolat, mais écorce. Oui, je sais que ça n'est pas une vraie couleur dans "notre" monde. Mais dans celui où vit cette petite créature, c'en est bien une !

Et une très belle, de surcroît. Elle était exactement de la même couleur que l'écorce de mon arbre. Qui n'était donc plus "mon" arbre, de manière exclusive. Je suis allée m’asseoir à ma place, calée contre le tronc, et la fée m'a suivie. Je crois qu'elle peut parler, mais qu'on ne peut tout simplement pas se comprendre.

Langage différent, certainement. Sans moyen de communication, j'ai essayé autre chose et me suis mise à tailler, dans un petit morceaux de bambou, à l'aide de mon canif, quelque chose qui pourrait éventuellement ressembler à un instrument de musique.

Evidemment, mon canif, plutôt habitué à couper les morceaux de fromage que les bambous, a rechigné. Il n'était pas assez affûté pour ce que je lui demandais, mais j'y parvient néanmoins, au bout d'un certain temps. Et même d'un temps certain.

Pendant ce temps, mon observatrice, compagne silencieuse et apaisante, était restée devant moi, voletant au gré de la brise. Elle souriait et je pense qu'elle avait compris ce que je comptais faire. Elle a attendu que je relève la tête de mon travail pour pointer le doigt vers la cime de mon arbre. Puis elle est partie dans les branches et les feuilles, disparaissant très vite de ma vue.

Une créature parfaitement accordée à la nature comme jamais je ne le serais.


Je me suis inquiétée. S'attendait-elle à ce que je la suive ?

La réponse n'a pas tardé à me parvenir, sous forme d'un doux bruissement. Et brusquement, des centaines - ou des milliers ! - d'ailes multicolores m'ont entourées. Je n'ai pu repérer ma petite fée que lorsqu'elle est venue se percher sur mon genoux replié, une flûte à la main.
D'ailleurs, toutes en avaient. Elles se sont mises à jouer, ensemble dans une magnifique synchronisation. Et j'ai suivi.
Nous nous sommes ainsi exprimées dans un chœur de flûtes, de bruissements d'ailes et de feuilles.


En rentrant chez moi, le soir venu, j'ai soudain pensé avec effarement que je n'avais pas pris une seule photo de ce que j'avais vu.
Mais, finalement, peut-être était-ce bien ainsi. Grâce à la musique, les fées m'avaient fait comprendre qu'elles m'acceptaient dans leur univers, au sein de cet arbre. Je doutais de les revoir un jour, mais ça n'était pas grave.
Dans le secret de mon cœur, je savais que je venais de m'intégrer dans un espace si merveilleusement vaste et puissant que rien, jamais, ne pourrait m'atteindre. Certains se forgent des armures avec des silences protecteurs, ou des attitudes détestables. Moi, je venais de créer la mienne avec une chorale de flûtes et des bruissements d'ailes.
meslivresfavoris

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par meslivresfavoris »

Chorus in aeternum

(La musique qui m'a inspirée pour cette histoire : Jazz Suite No. 2 : VI. Waltz 2 de Dmitri Shostakovich)
https://www.youtube.com/watch?time_cont ... YhZVqODYsI

Imaginez cette pièce : spacieuse, blanche, lumineuse et recouverte d'ornements, tous plus beaux et finement taillés que les autres. L'ocre et le doré se mélangeant parfaitement aux touches de bleu roi qui subliment l'espace en y apportant un semblant de vie. Cependant le temps a laissé des traces de son passages sur les murs. Les dorures devraient être restaurées, la peinture s’écaille par endroit et le bois qui constitue le sol grince de temps à autre. Mais cela n'enlève rien à la magnificence du lieu.

En arrière-plan de la musique, l'on n'entend rien d'autre que le léger bruit des pas rythmés des danseurs ressemblant à des tintements réguliers, parfaitement calibrés. 1, 2, 3, 4... 1, 2, 3, 4... Le souffle court, les yeux fixés sur le vide, l'air maussade, empli de désespoir. Ni mort. Ni vivant. Ils dansent pourtant tous suivant la musique en silence. Leurs mouvements fluides et précis de par l'expérience n'en sont pas moins vide de sens ainsi dénués de toute émotion.

Quel spectacle fascinant. Des fantômes dansant. Si l'on peut les nommer ainsi. Étrange mais néanmoins d'une beauté toute particulière. Le charme de la scène est bouleversant. Le chic de leur tenues est sans pareil. Toutes de blanc vêtue, les dames font tournoyer leur robes prestigieuses. Ornées de perles pour certaines, de dentelle pour d'autres. En ce faisant, elles font vaciller les lumières. Leurs ombres prennent part à la danse et rendent la pièce effrayamment plus vivante et définitivement plus captivante. Les hommes quant à eux, de gris affublés, se mouvoient de façon à changer de partenaire et, dans ce méli-mélo d'ombres et de lumière, reprennent le cours de la danse.

Et moi, qui suis seul spectateur depuis mon perchoir, je ne peux qu'admirer sans y prendre part. Je ne danse pas. Je n'ai pas de partenaire. J'ai pourtant appris chaque pas, sur ce même air.

Une éternité à observer. Sans pouvoir me déplacer. Je pourrai danser les yeux fermés. Avec tellement d'enthousiasme, tellement d'énergie ! J'y mettrai toute mon âme, je souhaiterais seulement pouvoir bouger. Eux, ne sont plus que des automates, sans une once d'humanité ou de joie. Ils flânent sans vie continuellement. Ruinant mon spectacle. Je ne peux que ruminer ma colère et mon envie. En silence, comme toujours. Seul la musique et le cliquetis incessant des pas résonnent ici.

Au début, ils me donnaient le tournis. Ils étaient tous si enjoués, maladroits pour certains, mais à présent, ils se laissent simplement porter par les notes familières qui trottent dans l'air sans chercher s'amuser.

C'est tout un univers qui tient dans cette toute petite boîte, remplie de danseurs fait de métal et de bois, bien trop minuscules et rongés par le froid. J'étais la pièce de trop dans ce joli tableau. Une boîte à musique parfaite, qui paraît s'étendre à l'intérieur. On ne m'a pas réutilisé. Il a été décidé me déposer au bord de mon balcon, en spectateur d'un bal sans fin. Le seul être conscient, du haut de son perchoir, qui ne peut pour autant pas y prendre part.

Je donnerai tout afin de me décoller d'ici et changer cette mélodie pour leur rendre vie. Et ainsi changer le cours de ce bal éternel.
eminamangas

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par eminamangas »

•••Clairs de Lune•••
- Néva ! Néva ! Lève toi, bon sang !
- J’arrive Maman, trente secondes !
Je me levai péniblement de mon lit, en grognant. Ma mère tambourina une nouvelle fois sur le battant de la porte en soupirant.
- Ça va, j’arrive, j’arrive ! C’est pas possible, on peut pas être tranquille deux minutes dans cette famille…
- J’ai entendu !
Je levai les yeux au plafond et commença à m’habiller. Je m’appelle Néva. Si vous n’aviez pas remarqué. Je suis une petite elfe, avec de grands yeux vert émeraude et des cheveux blond platine, coupé au dessus des épaules, toujours en bataille avec des tonnes de boucles ridicules.
- Néva ! Toujours au lit ma grande ?!
Mon père entra dans ma chambre sans frapper, en riant. Je lui fit la moue, mais sourit tout de même malgré moi.
- C’est pas drôle. Dis-je pour me donner contenance.
- Si. Aller dépêche toi, Maman va encore s’énerver.
- Mais c’est ce que je fais ! Protestais-je.
Papa ne sembla pas totalement convaincu. Pourtant, j’avais essayer de paraître convaincante. Louper apparemment.
- Ma fille, ma fille, ma fille… Soupira Papa.
- Quoi ?
- Tu m’exaspères, tu le sais, ça, hein ?
Il faisait semblant d’être sérieux, mais depuis longtemps, je savais que c’était du flan. Je ne répondit pas et finit de me préparer.
- Vous êtes prêts tous les deux ? On va finir par être en retard, par votre faute ! Cria Maman depuis l’escalier.
Elle arriva en courant à moitié et entra comme une tempête dans ma chambre. J’ai cru que ses yeux allaient sortir de leur orbites quand elle remarqua que je venais tout juste de me préparer, et que Papa aussi.
- Mais c’est pas possible ! Lâcha-t-elle.
Papa et moi partirent d’un éclat de rire franc.
- Ne t’en fais pas, Iméa, tout va bien se passer ! La rassura Papa.
- Mais, aucun de vous n’est prêts ! Vous vous fichez de moi, c’est pas possible ! Répéta-t-elle.
- Mais si, Maman regarde, on est prêts là ! Ajoutais-je à mon tour pour la rassurer.
Maman est toujours stressé. Je comprends bien pourquoi, mais des fois, c’est un peu lourd.
- Néva, tu ne vois pas qu’il y a un souci ?
- Quel souci ? Demandais-je bêtement.
- JE VOUS AVAIS PRÉPAREZ DES TENUES POUR L’ÉVÉNEMENT ET VOUS VOUS TRIMBALLER AVEC VOS VIEILLERIES !
J’échangeai un regard avec Papa. Lui aussi avait zappé apparemment… la boulette. Pourtant, on devrait être habitué depuis le temps...
- On va se changer, Iméa, t’inquiète pas, on sera rapide ! Répondit Papa en allant chercher les vêtements, et en m’entraînant dans le couloir. Moi je continua à rire de bon cœur. Si cette journée s’annonçait au départ, pénible, elle venait de prendre un virage plutôt intéressant.
•••

J’ai mille ans. Et je suis une elfe. On pourrait croire que cette histoire va être idiote, banale, et c’est peut-être vraiment le cas. Pour certains, mais pas pour moi. Mon histoire ne sera jamais banale pour la simple et bonne raison que mon histoire, c’est ma vie, et une vie n’est jamais banale. Pour quiconque. Ne pensez pas seulement aux vies des Humains. Il y en a d’autres, bien cachées, à la vue d’autrui. Des vies différentes, mais toujours aussi pleines de joies, de rires et de pleurs. J’ai mille ans. Je pourrais vous dire que j’ai tout vue en mille ans, mais ce n’est pas possible. Le monde évolu. Toujours. Tout le temps, sans s’arrêter. Les gens aussi, évoluent. Nos rencontres, nos expériences, nous poussent à changer. À voir le monde d’une manière différente, et parfois, de manière totalement inattendue. Mon histoire n’est peut-être pas des plus exceptionnelle mais j’en suis fière. C’est le plus important, me disait ma mère. Ma mère… elle n’est plus là, maintenant. Elle est partie, dans une autre dimension, une autre vie, pour une autre aventure. Seule la mort nous la fait découvrir, cette autre aventure. Comme je l’ai déjà dit, j’ai mille ans. Et je n’ai pas peur de mourir. C’est une autre histoire qui s’écrira, voilà tout. Seule la nature et le temps décideront quand je serais prête à affronter cette nouvelle vie. Pour l’instant, ils ont décidé que je resterais ici, sur cette bonne vieille planète, qu’est la Terre. Oui, n’allez pas croire, je suis heureuse. J’ai ma famille, mes amis, mes proches qui sont avec moi, et ça me suffit. Bien qu’ils ont souvent tendance à me surprotéger, aillant peur que je fasse une chute, ou que sais-je encore ? Moi je me sens vivante. Pleine de vie. C’est tout ce qui compte. Je suis l’arrière grand-mère de mes petits enfants, qui sont encore bien jeunes par rapport à moi. Mais attention ! N’allez pas croire que je suis une petite vieille femme, qui ne peut plus se déplacer ! Ah ça non ! J’ai tout gardé de ma jeunesse. Les Clairs de Lune m’aide à rester aussi vivante et forte qu’à mes cent ans. Malheureusement, ce n'est pas vrai pour tout les elfes… pour une raison encore inconnue de vous, j'ai vécue beaucoup plus longtemps que mes ancêtres. Les elfes vivent en moyenne jusqu'à cinq cent ans. La vieillesse ne se remarque que très peu. Physiquement, évidemment. Nous sommes le Petit Peuple, le Peuple du Minuscule. Chez les Humains, le Peuple du Haut, nous sommes inexistant. Ils ne nous voient pas. Ne nous remarquent pas. Pourtant nous sommes là, caché derrière une pierre ou une feuille. Ils ne font pas attention. Nos ancêtres ont appris à se méfier d'eux, à ne pas se faire voir. Ils disaient que le Peuple du Haut était dangereux pour nous. Qu’ils étaient sans pitié. Leur actes ne peuvent que témoigner en la faveur des nôtres. La guerre, la violence… pendant près d'un siècle, les nôtres se sont caché dans des souterrains, bien profondément sous la terre. Maintenant, nous vivons dans les arbres, où nous avons reconstruit nos maisons et nos vies. Depuis trois siècles, nous sommes en paix. Jamais les Humains ne nous ont embêté. Mais aujourd’hui, à l’heure où je vous parle, tout ça n’est plus d’actualité. Je suis devenue cette femme, la sagesse de notre peuple, la doyenne de notre village, celle qui va bientôt mourir. Mais je ne veux pas partir d’ici avant d’avoir pu raconter mon histoire. Peu de gens la connaissent. Ou du moins, ceux qui la connaissait ne sont plus là pour la conter. C’est à moi de l’écrire, sur ce bout de parchemin que j’ai retrouvé dans les vieilles affaires. Elles non plus ne sont plus toutes jeunes. Enfin, voilà une partie de mon histoire, celle qui est la plus exceptionnelle à mes yeux… et celle qui a changé l'histoire de tant de petits elfes.
•••
Si Maman nous avait déjà montrer ce qu’elle voulait nous faire porter pour aujourd’hui, je comprends mieux pourquoi mon cerveau a préféré l’oublier. Et vu la grimace que Papa faisait dans le dos de sa femme, je suis certaine qu’il se disait la même chose que moi.
- Tu es réellement sûre que ça va nous aller Maman ? Tentais-je.
- Évidemment, ma chérie. Aller habille toi. Et toi aussi, Jaymes ! Ne crois pas que tu vas y échapper !
Papa ne répliqua pas. Son expression en disait assez long. Je soupirai, embarquai avec moi la tenue qui m'était destinée, et je rejoignit ma chambre. Il me fallut quelques instants pour la mettre, et seulement deux secondes pour comprendre que j’avais eu raison : c’était vraiment le genre de truc que je suis incapable de porter correctement sans que l’on me trouve ridicule. On était pas sortie de l’auberge… pour vous donnez une idée de quelle genre de tenue Maman m’avait préparée, dites vous que c’est une sorte de robe, moulante, qui m’arrive au dessus des genoux, avec des manches courtes et qui retombe sur mes épaules. Elle est aussi rouge qu’une feuille d’automne. Elle était belle, ok, mais je suis incapable de porter un truc comme ça sans la tâcher, la déchirer, ou même tout juste marcher normalement. Faut dire que je ne porte jamais de robe. Trop gênant pour courir, sauter et faire tout ce que je fais d’interdit (selon ma mère). Et je ne vous parle même pas des chaussures que je devais mettre. Des chaussures à talons… hyper fins en plus. Je sais même pas si je suis capable de marcher avec…
- Tu es prête Néva ?
- Oui Maman. Mais euh… t’es sûre de ton coup pour les chaussures ?
Maman passa sa petite tête rousse dans l'entrebâillement de ma porte. Son sourire s’agrandit.
- Tu es sublime. Tu as un souci avec les chaussures ? Je suis sûre qu’elles t’iront très bien.
- Le problème c’est que je suis pas capable de marcher avec ça…
- Bien sûr que si !
Maman est bien trop confiante. C’est hors de question que je me ridiculise devant tant de monde. Autant marcher pieds nus, j’aurais l’air moins idiote.
- Viens vers moi, sans te tenir au meuble. On va voir si tu y arrives.
Je fis quelques pas incertains vers elle. Oula… je me sentis vaciller dangereusement.
- Néva, ce n’est pas des chaussures plates, ne va pas trop vite. Me conseilla Maman.
- C’est facile pour toi, tu en portes tout le temps ! Protestais-je.
J’arrivai tout de même à la rejoindre, quoique difficilement.
- C’est pas gagné… grognais-je.
- Il ne faut pas que tu ailles trop vite, c’est tout. Tu te débrouilles très bien !
- La patience sera ta meilleure amie, Néva. Ajouta Papa derrière Maman en rigolant.
- Allons-y ! Maman souria et m’ouvrit la porte pour que je puisse passer.
Là, je rigolais plus du tout. Inspirer. Expirer. Ça va bien se passer. Pourquoi ça irait mal de toute manière ?
•••
J’avais cent ans quand tout s’est chamboulé. Quand tout a changé. Avant ma centième année, j’étais une petite elfe ordinaire, sans rien de plus spécial que les autres. À part des parents roi et reine du Peuple du Minuscule. Et puis, il y a eu cette cérémonie. Chaque année, à l’arrivée de l’été, nous organisions une grande fête. Au tout début, nous étions censé, mes parents et moi, inauguré l’arrivée de la saison chaude avec une sorte de cérémonie. Je les ai toujours détesté. Le fait d’être devant tout le monde, alors que je suis comme les autres, que je voudrais juste dire dans ces moments là : « Quelqu’un pour me remplacer ?! »… tout le monde vous regarde, vous applaudit, vous sourit… Maman ne comprend pas pourquoi j’ai aussi peur des gens. Elle, elle est à l’aise, c’est dans ses gènes. Sa mère était la reine, avant elle et a donc toujours été baignée dans cette vie. Papa aussi déteste cette cérémonie. Il a tout tenté pour que Maman change cette maudite tradition, mais rien ne l’a fait changer d’avis. Papa n’est roi que parce qu’il a épouser Maman. Lui, il vivait avec ses parents dans un endroit reculé du village, un peu plus loin dans la forêt. Quand il a rencontré Maman, c’était le coup de foudre et il a tout fait pour qu’elle tombe amoureuse aussi. Ce qu’il n’a su que bien plus tard c’est que Maman l’avait fait tourner en bourrique pendant des mois lui faisant croire qu’elle n’était pas sous le charme alors que c’était tout le contraire. Allez savoir, je n’ai jamais compris pourquoi elle a mis autant de temps à lui dire qu’elle l’aimait. Bref. Moi je suis arrivée, quelques temps après. Avec une grave maladie. Mes parents ont cru me perdre. Ils sont donc retourné au palais pour essayer de trouver un remède. J’ai passé des semaines entre la vie et la mort. Par un miracle tombé du ciel, une vieille elfe est venue voir mes parents en leur disant qu’elle savait comment me guérir. Et elle n’avait pas menti. Quelques semaines plus tard je gambadais déjà partout, sous l’œil vigilant d’une mère surprotectrice, qui avait failli perdre son enfant. À mes cinquante ans, il m’a fallu des mois et des mois d’argumentation pour que mes parents me disent comment cette vieille dame m’avait guérit. Je ne comprenais pas pourquoi on me cachais la vérité. Mais à force d’insister, j’ai pu connaître cette cachotterie. La vieille femme m’avait soigné avec des Clairs de Lune.
•••
J’entendais déjà la foule. Dense, excitée, compacte, souriante… un mauvais pressentiment m’envahit. Papa dû remarquer mon malaise et posa sa main sur mon épaule.
- Tout va bien se passer, Néva. Comme d’habitude. Me chuchota t-il à l’oreille.
Je lui rendit son sourire, même si ça ne m’aidait pas tellement à aller mieux. Une fois ma corvée terminée, je pourrais souffler.
- Courage Néva, je sais que tu n’es pas à l’aise mais ça va le faire ! M’encouragea Maman qui venait d’arriver. Prêts ? C’est parti…
Elle ouvrit le grand rideau de feuilles d’érables qui nous cachaient de la foule il y a à peine deux secondes. Des applaudissements se fit entendre. Papa me poussa gentiment en avant, et je dû me retenir par le rideau pour ne pas perdre l’équilibre. Foutu talons.
- Souris, Néva. Me glissa Papa avant d’aller rejoindre Maman.
Je soupirai et fit mon plus faux sourire et avançai pour rejoindre mes parents. Maman commença son discours. Étrangement, au fur et à mesure, sa voix se faisait plus lointaine, et je tanguais dangereusement. Sûrement ces talons de malheur…
- Néva, tu vas bien ? Me demanda une voix.
Je ne répondit pas, trop concentré pour essayer de rester debout. Oh la, ça devient bizarre cette histoire.
- Néva ! Néva !
Mais qui est-ce qui cri comme ça ? Ça me casse les oreilles… j’eus l’impression que je tombais de plus en plus profondément, mais tout doucement… puis tout devint instantanément noir.
•••
Quand la vieille dame m’avait guérie, elle m’avait fait don de la vie, mais également celle d’une dangereuse malédiction. Les Clairs de Lune ne sont à utiliser qu’en cas d’urgence extrême. Il est très important d’en connaître les effets. Jusqu’à mes cent ans, je n’avais jamais rien soupçonné. Quelques faiblesses passagères, certes mais rien d’alarmant. Sauf ce jour là. Le jour de la cérémonie de l’inauguration du début de l’été. Tout a basculer. Mes parents étaient désemparés, ne sachant ce qu’il m’arrivait. Moi je savais. Au fond de moi, je le savais. Dommage qu’il m’est fallu tant de temps pour le découvrir. Ce jour là, ce jour de trop, aurait pu m’être fatal.
•••
- Je vais bien Papa… t’en fais pas, je suis juste tomber dans les pommes.
- Juste ?! Juste ?! Ma fille, si tu étais JUSTE tomber dans les pommes ça se saurait ! Tu es blanche comme une pétale de pâquerette, mon cœur, alors non, tu ne vas pas bien.
- Jaymes, laisse la respirer, c’est normal qu’elle n’ait pas de couleur, tu es en train de l’étouffer !
- N’importe quoi ! Ça ne changera rien !
- Arrêtez de hurler… maugréais-je.
Papa se pencha vers moi, avec une mine inquiète.
- Tu es sûre que tu vas bien, Néva ?
- Moui…
En vérité je me sentais vide. Étrangement calme, mais vide. Si Papa disait que j’étais blanche, eh bien, moi, je voyais TOUT en blanc. Et ça ce n’était pas trop normal… même pour une elfe. Ma tête me tourna encore. J’attrapa la main de Papa.
- Néva, qu’est ce que tu as ?! Respire, ma fille, calme toi, on est là.
La blague, je suis moins paniqué que lui. Les Clairs de Lune. Pense aux Clairs de Lune…
- Néva ! Qu’est ce que tu as ?!
- Jaymes, arrête d’hurler, on ne l’entends même plus !
Il n’y a que ça pour te guérir. Pour te sauver.
- Iméa, elle ne respire plus !
- Calme toi !
J’ouvris difficilement les yeux.
- Néva ! Papa est là, ne t’inquiètes pas…
- Y a que toi qui panique, Papa. Fis-je remarquer.
Maman me souria.
- Est-ce que tu te souviens de ce que tu viens de dire, Néva ? Me questionna t-elle.
Je la regarda en haussant les sourcils. Je n’avais rien dit… papa sembla se ranimer, et partit en courant, hors de la pièce.
- Maman, tu m’expliquer ce qui se passe ?
- Ma chérie. Elle s'essaya sur le bord de mon lit. Tu te souviens de ce que nous t’avons dit à propos des Clairs de Lune qui avaient réussi à te sauver, quand tu étais bébé ?
- Oui, bien sûr.
- C’est en lien. Je ne sais comment, mais tu viens de nous dire que seules ces fameux Clairs de Lune pourront te sauver.
- Me sauver de quoi ?
- Aucune idée…
Papa revint à ce moment là, tout essoufflé, en train d'hyper ventiler, mais bien vivant. Il tenait dans sa main droite un flacon aussi gros qu’un vers de terre. Dedans, un liquide blanc et pailleté semblait remuer tout seul.
- Bois ça, Néva. Me dit-il en approchant le flacon.
Je ne le sentais pas mais bon, puisqu’on y était… autant y aller jusqu’au bout. J’avalai péniblement le liquide blanchâtre et épais. Après l’avoir complètement ingurgité, je me sentis renaître. Comme une bouffé d’oxygène dont on m'avait privé depuis trop longtemps.
- Néva ? Alors ? Ça fonctionne ? Me questionna Papa.
- Oui, répondis-je avec franchise. Oui, ça va beaucoup mieux !
Il poussa un soupir de soulagement et s’affala par terre. Muni d’un pressentiment soudain, je ferma les yeux et me laissa guider par mon instinct. Et je me retrouva… à regarder à travers les yeux de Papa ! Trop fort ! J’essayai de me concentré pour faire de même avec Maman… et ça marchais ! Je ne savais pas ce que contenait ces Clairs de Lune, mais c’est magique ! Je me leva aussitôt pour essayer mes nouveaux pouvoirs.
- Néva ! Où vas-tu ? Fais attention, tu viens juste de te remettre de tes émotions ! Protesta Papa.
Je ne l’écoutais déjà plus et fonça vers le village. Je m’agrippai à une branche et monta le plus haut possible, pour avoir une vue d’ensemble. Je m'assis confortablement et renouvela l’expérience. Impressionnant. Tout ce que voyait les gens étaient perçus de mille et une manières différentes… pourtant c’était le même village pour tous… eh bah…
Soudain, ma vue se brouilla et donna une chose encore plus spectaculaire. L’Arbre était devenu beaucoup moins grand, mais toujours plus grand que moi. Les fleurs, les feuilles, les pierres étaient devenues toutes petites. Et la forêt était devenu sous mes yeux beaucoup plus étrangère… le regard se tourna vers la droite et je rencontra le regard d’un Humain… qui était visiblement à la même taille que la personne dont j’avais « emprunté » les yeux. Je compris avec étonnement que cette personne n’était pas un elfe mais un Humain… Tu m’étonnes qu’ils ne puissent pas nous voir. Leurs yeux glissaient sur le paysage, ne s’arrêtant sur qu’un seul quart des détails que je pouvais percevoir habituellement. Décidément, mieux valait être un elfe. L’Humain et son ami s’approchait dangereusement de notre Arbre et semblaient soudain attiré par le désir de grimper. Oh non… non, non, non et non. S’ils grimpaient ils allaient nous découvrir. Je retourna dans mon corps pour donner l’alerte. Je traversa le village à une vitesse dont même moi je ne m’en pensais pas capable et retourna auprès de mes parents qui n’avaient pas bougé depuis mon départ.
- Te revoilà ! Papa me serra dans ses bras mais je n’avais pas le temps pour ça.
Maman sembla remarquer mon impatience et me questionna immédiatement :
- Qu’est-il arrivé ?
- Des Humains. Deux, et ils veulent monter à l’Arbre !
- Comment as-tu vue ça ? On ne peut pas les voir de là où on est d’habitude ! Releva Papa.
- Plus tard, Papa, plus tard ! Pressais-je.
Maman était déjà partie en courant, pour donner l’alerte générale. Tout rentra dans l’ordre quelques heures plus tard, au cours desquelles je m’étais expliqué. On était tous les trois d’accord sur le fait que c’était évidemment les Clairs de Lune qui me donnaient cette force. Moi ça me plaisait. Enfin, j’allais pouvoir faire quelque chose d’utile et que me corresponde. Pas parler devant un public. Pas me montrer et faire je ne sais quoi devant tout un village. Mais surveiller. Observer. Protéger le village. Mon village.
•••
J’ai mille ans. Et je m’appelle Néva. Mon bout d’histoire est terminée, mais il faudrait plus qu’un seul morceau de parchemin pour écrire toute une vie. Les Clairs de Lune m’ont aidé à tenir aussi longtemps. Mais maintenant c'est à moi de laisser ma place. D’autres sauront comment protéger notre village. Le monde, notre monde a évolué depuis mes cent ans. Et il évoluera toujours. Que l’on soit Petit, Grand, ou… Minuscule.
ELFAfanny

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par ELFAfanny »

Voilà pour moi! J'espère que mon texte vous plaira et bonne lecture! :D

Si j’étais minuscule...

« Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ? »
On s’est tous posé cette question au moins une fois dans notre vie. La seule différence est que personne n’a la même réponse…

***

Tristan, 7 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
Je monterais sur le dos de mes jouets dinosaures ! Grwaaaa !


Pfiou ! C’était dur, mais j’ai enfin réussi à monter jusqu’à mon étagère à dinosaure !
C’est bizarre d’être plus petit que mes jouets alors que normalement je les tiens d’une seule main mais au moins maintenant je peux faire ce que j’ai toujours voulu faire : monter un dinosaure ! Je marche entre mes dinosaures tous bien rangés et je me hisse sur un diplodocus vert. Génial ! Par contre il ne bouge pas. Tant pis, c’est moi qui vais bouger alors. Je me redresse et saute sur le dos du tricératops à côté, puis sur le tyrannosaure mais sur celui-ci je dérape et tombe. Je hurle contre le dinosaure et le frappe de mes points en ne réussissant qu’à me faire mal.
Finalement je préfère quand c’est moi qui les commande.
Je me vengerai T-Rex !
Au prochain combat je te ferai mourir et tu verras qui est-ce qui commande ! Bon… après je te ferai sûrement revivre parce que j’ai besoins de toi mais ne recommence pas !

***

Alice, 12 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
J’aiderais les grandes personnes à retrouver leurs objets cachés sous les meubles et puis j’essaierais de toucher mon coude avec ma langue pour voir si ce n’est toujours pas possible…


Non, je n’y arrive pas.
Même minuscule mon coude et toujours hors de portée de ma langue.
C’est bien dommage.
Tant pis, pour le moment je dois aller chercher les perles qui se sont échappées du bracelet que Emma est en train de faire et qui ont glissé sous le meuble du salon.
Je suis si petite que, moi par rapport à ce meuble, c’est un humain de taille normale par rapport à un immeuble d’au moins cinq étages. Emma n’a pas pu passer le bras dessous pour récupérer ses perles mais moi je passe sans problème en me mettant à quatre pattes. Alors j’avance dans le noir qui devient de plus en plus sombre au fur et à mesure que je me rapproche du mur et je ramasse les perles une par une. Quand je ne peux plus les tenir je les pousse de toute mes forces pour les faire sortir de sous le meuble et j’entends Emma se précipiter vers ses perles en poussant des cris. Je vois ses doigts les attraper et là j’attends que ses pas précipités sortent de mon champ de vision pour sortir discrètement de ma cachette puant la poussière et filer.
Mission accomplie !

***

Alma, 13 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
Pff ! Il y aurait beaucoup trop de choses à faire ! Je rentrerais dans une machine à pop-corn pour en manger autant que je veux, je visiterais une maison Playmobil, je chevaucherais des moineaux pour me déplacer en volant, je me glisserais dans des colis pour voyager et je m’infiltrerais en douce dans les librairies et les bibliothèques pour lire tranquillement !


C’est très étrange. J’ignore si je dois rire ou paniquer.
Comment réagir lorsque l’on se retrouve avec la taille d’un Playmobil dans une maison Playmobil ?
Je suis assise sur une chaise de la cuisine Playmobil de ma sœur et j’observe ce qui m’entoure.
Du plastique. Partout.
Je pensais que se serais cool de visiter une maison Playmobil mais maintenant que j’y suis, je me sens plutôt bizarre… Rien n’est confortable et rien ne bouge. Ça ne me plaît pas, je m’en vais.
Je décide de me glisser dans le colis que maman à déposer sur la table de la salle à manger. Je l’ai entendu dire à papa qu’elle allait l’envoyer à son frère qui travaille dans un cirque à plusieurs kilomètres de chez nous.

Le voyage a été long et pas très confortable, mais je suis en vie ! Quand le carton s’ouvre, je reste tapissée dans un coin sombre de la boîte avant de me faufiler en dehors. Je balaye la pièce où je suis du regard. C’est une petite caravane… avec une machine à pop-corn ! Je ne cherche même pas à savoir ce qu’elle fait là, je m’y précipite ; du moins aussi vite que ma petite taille me le permet.
Inutile de détailler les efforts que j’ai dû déployer pour monter sur la machine à pop-corn. Je suis rouge comme une tomate et essoufflée. Je cherche comment entrer dedans et je vois un petit trou. Dans ma précipitation je me fais un croche pied à moi même et… je tombe… Qui n’a jamais rêvé d’un bain de pop-corn ! Sauf que moi, avec ma taille, je vais me noyer dedans ! Alors je me débats en m’enfonçant. Heureusement il n’y en a pas trop et j’arrive à en manger assez pour me permettre de dégager un peu d’espace autour de moi. Même minuscule je suis toujours aussi gourmande !
C’était très bon ! Maintenant il ne me reste plus qu’à réussir à monter sur un oiseau qui, par hasard, m’emmènera près d’une librairie ou d’une bibliothèque ! Mais on verra plus tard.
Parce que là, j’ai beaucoup trop mangé…

***

Vincent, 14 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
Je sais pas… j’irais dans un magasin et je prendrais tous les
Kinder Buenos ! Mais sinon vu que je serais minuscule je pourrais mieux voir les choses minuscules donc j’essaierais de faire avancer la science micro moléculaire.

Je profite que quelqu’un sorte du magasin pour me faufiler à l’intérieur.
Ils sont là ! Sur le présentoir ! À moi les Kinder Bueno !
Le caissier sort de derrière la caisse pour aller montrer un rayon à une dame. Parfait, j’ai juste le temps de prendre un paquet et de me cacher dans un coin. Alors j’escalade le présentoir et tente d’en récupérer un mais maintenant que je suis minuscule c’est un peu compliqué…
Le paquet tombe enfin par terre dans un bruit mat et je m’empresse de redescendre. J’attrape le paquet à deux mains et le tire derrière le présentoir où il fait sombre, mais pas trop et j’ouvre le paquet avec mes petites mains.
Quand il cède enfin je passe au second qui emballe la barre chocolatée et je m’attaque à mon goûter, à la fois fier et honteux. « Irrécupérable ! » lancerait ma copine si elle me voyait. D’ailleurs je dois me dépêcher de la rejoindre ; elle est au courant pour ma taille et à accepter m’aider pour mes expériences ! Aujourd’hui on doit trouver d’éventuelles micro bactéries dans plusieurs échantillons de produits divers. Si je suis minuscule autant me rendre utile, non ?
Et si je lui gardais un morceau de Kinder ?

***

Adeline, 16 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
Je pense que, primo: je passerais mon temps à espérer ne pas me faire écraser, deuzio : je crierais à mes amis et ma famille que je suis en vie et qu’ils me manquent et tertio : j’essaierais de trouver des gens comme moi pour ne pas passer le restant de mes jours dans la solitude et la dépression.


J’ai peur.
Tout est immense et moi je suis minuscule.
Je ne peux pas faire un pas sans me dire que je risque de me faire écraser par quelque chose ou quelqu’un. Je dois prévenir ma famille, mes amis ; mais pour ça je dois réussir à bouger. J’entends Quentin rentrer de son cours de tennis et me décide enfin à bouger. Je cours, le plus vite possible et une fois arrivée à ses pieds je crie son nom tout en courant pour rester à son niveau, mais il ne m’entend pas. Alors je tape dans sa chaussure tout en sachant que c’est inutile. Quand il arrive en bas des escaliers je panique. Il pose une main sur la rambarde, le pied droit sur la première marche et s’immobilise.
— Adeline ! Je suis rentré ! crie-t-il une main maintenant son sac sur son épaule et l’autre en porte-voix.
Aussitôt je me mets à crier, à hurler. « Je suis là ! Regarde en bas ! ». Mais il ne m’entend toujours pas.
Il hausse les épaules devant l’absence de réponse et monte les escaliers quatre par quatre.
Je n’ai plus peur.
Je me sens seule. Terriblement seule.
La porte s’ouvre de nouveau laissant entrer un courant d’air qui soulève mon t-shirt et me fait frissonner. Mes parents sont rentrés, mais je ne cherche pas à attirer leur attention. Je profite du moment, poussée par un besoin inconnu, et je fonce vers la porte encore ouverte. Je suis dehors. Je vais chercher quelqu’un comme moi.
Je ne mourrai ni écrasée, ni seule !
Mais qu’est-ce qu’il fait froid !...

***

Marie, 25 ans
Si j’étais minuscule, qu’est-ce que je ferais ?
Pour commencer j’aurais très peur de me perdre et je ferais en sorte que personne ne me voit… Ensuite je m’amuserais à me balader dans ma bibliothèque, je glisserais le long d’une rampe d’escalier et je rentrerais dans une boulangerie pour manger des tartes aux framboises ! Après tout même adulte on a le droit de se faire plaisir !


Minuscule… Il n’y a pas d’autre mots pour décrire comment je me sens.
Minuscule, perdue et paniquée.
Je suis perdue…
Dans ma couette…
Je suffoque et tâtonne autour de moi dans l’espoir de sortir de ce méli-mélo de tissu. J’avance droit devant moi en me jurant de faire mon lit tous les matins à partir de maintenant. Puis tout à coup mes mains rencontrent du vide et je me sens basculer. Je n’ai pas le temps de penser, ma chute dure deux secondes et je m’écrase brutalement sur… mon tapis ! Je suis sortie de ma couette ! À la fois excitée et étourdie je me redresse et relève mes lunettes sur mon nez. Je me sens vraiment toute petite…

Je me plais bien comme ça, finalement ! Tant que je ne me fais pas écrasée, c’est marrant de devoir tout escalader ! Moi qui aime grimper, je suis servie !
Je suis arrivée sur une des étagères de ma bibliothèque et je longe mes livres tout en les effleurant du bout des doigts, retirant ici et là la poussière qui commençait à s’amonceler. Les livres dits « de poches » ne m’avaient jamais parus aussi grands ! J’inspire à fond pour sentir la merveilleuse odeur des livres que j’aime tant et je m’endors…
Aïe aïe aïe ! Descendre les soixante-dix marches de mon immeuble se révèle épuisant ! Je tombe à chaque fois de manière très peu gracieuse et je manque tout le temps de me casser une cheville en me réceptionnant. Au bout de la dixième marche je m’arrête et j’attache mes cheveux en une queue de cheval de sorte qu’ils ne me gênent pas dans mon entreprise d’escalader un des barreaux vertical qui retient la rampe d’escalier. Arrivée en haut je m’accroche à une bonne prise pour reposer mon bras droit et, pour la première fois depuis le début de mon ascension, je regarde en bas. Gloups…
« Si je tombe, je meurs » songeais-je
Cette simple constatation suffit à me redonner assez de force pour que je puisse me hisser sur la rampe en position assise. Seules mes jambes serrées autour de la rampe m’empêchent de glisser. Mon idée est dangereuse et stupide, c’est en ce moment que je m’en rends compte. Il semblerait que le fait de devenir minuscule m’ait fait perdre mon sens de la raison et du mot « responsable ».
« A vingts-cinq ans tu deviens minuscule et tout ce que tu trouves à faire c’est glisser le long d’une rampe au risque de tomber ou de te brûler, juste pour accomplir un rêve de gosse ?! »
Je secoue la tête pour rester concentrée. Je ne peux pas revenir en arrière de toute façon ; et puis la rampe a une forme un peu particulière qui me permet de caler mes pieds sur un petit rebord. Je n’ai aucune raison de tomber !
Après un instant d’hésitation je desserre légèrement les jambes et je commence à glisser à une allure folle qui m’oblige à hurler comme un dément. Dans les gros virages je resserre les jambes pour me ralentir et ne pas basculer mais une fois que j’entraperçois la fin de la rampe je plante mes talons dans la rampe mais cela ne m’empêche pas de finir ma descente par un vol plané dans le hall de l’immeuble et d’atterrir sur… le tapis d’entrée de l’immeuble ! Décidément les tapis me sauvent la vie, aujourd’hui ! Je prends le temps de retrouver mes esprits avant de me mettre à plat ventre pour ramper sous la porte et me retrouver dehors. Heureusement la boulangerie est juste au pied de l’immeuble et je ne mets pas longtemps à arriver devant les portes coulissantes ; celle-ci ne s’ouvre pas, bien sûr, incapable de détecter ma minuscule présence. J’enlève alors mes lunettes que je garde pliées dans ma main au moment de traverser le petit espace entre les deux portes.
J’observe avec convoitise les belles tartelettes à la framboise disposées sur le plus bas des présentoirs.
Après l’effort le réconfort, comme on dit !
Roxane10th

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Roxane10th »

Hello !

Voici mon texte pour ce concours du mois de mars :) J’espère qu'il vous plaira et qu'il rentre bien dans le thème x'D

Bonne lecture :3


Je suis en vous, je suis ce mal qui vous ronge petit à petit. Je m'infiltre et me développe dans votre organisme humain, si complexe et pourtant si fragile, pour le détruire à petit feu. A cause de votre insouciance, lorsque vous découvrez enfin ma présence, il est trop tard pour vous : Je ne suis plus minuscule.
Je suis un cancer, du foie, du poumon, du sein, peu importe, je vis pour mourir avec vous, n'est-ce pas presque romantique ?
Si je suis en vous, c’est souvent à cause de vos propres excès : de tabac ; d'alcool ou encore d'aliments dont vous ne vérifiez même pas la composition avant de les avaler ! Vous n'êtes pas aidé : Produire des aliments cancérigènes est tellement plus facile et plus économique, pourquoi s'en priver ? Après tout, l'argent prime sur la vie dans votre monde on dirait : Vous mettez les autres êtres vivants en esclavage, plus pour votre luxe que pour votre survie, et pourtant vous tremblez devant moi, qui suis si petit.
Tout ce que vous pouvez faire, c’est tenter de me rétrécir, à coup de machines et de médicaments qui vous affaiblissent plus qu’ils ne vous guérissent. Une fois que c’est fait, vous essayez de me retirer de vos corps en ayant recours à une opération qui peut vous sauver, ou vous tuez. Voyez, tout cela reste hasardeux, il y a même des chances pour que je revienne vous hanter.
Tant qu’on y est, c’est étrange que malgré toutes vos belles avancées technologiques, vous soyez toujours incapable de m'éradiquer ! Vous préférez investir dans des recherches futiles, tel qu'un robot qui serait capable de faire les courses ou le ménage à votre place. Ne devriez vous pas pensez à la survie de votre espèce en priorité ?
C’est vrai, même si vous avez beaucoup à vous reprocher, je sais aussi que vous êtes capable du pire comme du meilleur.
Vous êtes capable de donner vos vies pour en sauver d’autres ; de réaliser des œuvres d’art fantastique ; de chercher et de développer dans des secteurs si prometteurs, vous êtes tous une source incroyable d’amour ! Vous avez le pouvoir d’apporter et de rependre le bonheur autour de vous, l’effet papillon peut aussi être bénéfique ! Vous devez apprendre à vous libérer et à exprimer d’avantages cet amour.
Votre vie est précieuse, n’attendez pas que je vienne la saboter pour la vivre.
En effet, beaucoup ont commencé à vivre, seulement après mon passage, et cela est ma seule fierté. Soyez heureux, en paix avec vous-même et avec les autres. Sauvez-vous, vous seuls en êtes capable, vous le méritez.
Humains, prenez enfin soin de vous : tuez-moi.


Voilààà ! Merci d'avoir lu :3
N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez :3
bearandlitchi

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par bearandlitchi »

Hello ! Voici mon texte:




Tout ce qui est or ne brille pas




"- Univers, je t'aime. Aide-moi."
Pshiouuuuu
Boum boum badaboum
Fffff
Une tempête secoue mon être
J'explose dans un sursaut
Je me détache de mon morceau
De uns je passe à un
Je me divise et m'avise
De changer de direction
Je ne me laisse aller au gré de la brise
D'une place à une autre, je construit des ponts
Pour que ma famille puisse me suivre
Que notre arbre redessine son tronc
Au loin des tourbillons de sphères ivres
Qui ne cessent de tourner vigoureusement
J'avance vers l'une d'elle comme une bombe
Je tombe en trombe
Je me pose doucement
Dans un océan de lumière
Je suis accueillie par une rivière de vent
Qui me guide jusqu'à sa mer de diamant
Là je chute dans le coton blanc
Avant de rencontrer un monde géant
D'ici j'aperçois chaque grain voisin
Chaque humain qui se tient la main
Ils murmurent ensemble des prières qui se ressemblent, qui les rassemblent
Leurs divisions les unissent
Ils ont compris qu'il est grand temps qu'ils agissent
Je devine le grand bleu qui s'étire
Je flotte au-dessus d'espaces verts
Ici le monde paraît plus clair
Je vois tout; et à travers
La bordure de forêt qui murmure des prières
L'océan dissimulant ses ecchymoses
Je vois l'influence subtile de chaque chose
La mer aussi lourde que tous ces soucis
Qui dans leur tête se propagent et tuent leurs envies
La montagne, son règne calme
Le feu qui lèche les cieux
La baleine, son énergie sereine
L'éléphant qui marche paisiblement
Le requin qui ne tue qu'à dessein
Le cheval qui galope, royal
Le poisson qui visite les fonds
Le chat qui n'écoute que ses choix
La tortue qui a déjà bien vécue
L'écureuil qui avant l'hiver, se recueille,
Le corail qui sert de refuge sans faille
La fleur pleine de couleurs
Le coquillage qui se laisse emporter sur le rivage
Le scarabée déterminé à la recherche de solidarité
La coccinelle belle demoiselle qui s'envole d'un coup d'aile
La méduse qui erre et s'amuse
Les molécules de particules
Le photon qui grâce à des associations
Parvient à toutes les compositions
Je vois mes amis parsemer la vie par myriades
Je lutte contre une tornade qui achève ma croisade
Une tempête traverse mon humain
Qui cherche à s'accrocher, en vain
C'est cet enfant qui jadis, était souriant
Il m'a appelé, je le sens
Je me dépose au creux de son cœur
Réalisant son vœux, j'y dépose une lueur:
Illuminant sa vie dans le noir
Je lui fais le cadeaux de l'espoir.
Immensément petite,
Minusculement grande,
Je suis une poussière d'étoile
Infini et insignifiante.









(J'ai conscience d'avoir interprété le sujet à ma façon. En fait, le petit monde du minuscule dont il est question ici, c'est celui des poussières d'étoiles. Je raconte leur voyage, le rôle qu'elles jouent pour les humains au travers de l'épopée d'une de ces poussières d'étoile. Elles sont minuscules par leur taille et montrent qu'une minuscule action - sourire à quelqu'un, lui parler avec compassion ou encore espérer, croire- peut impacter directement toute une vie. D'où le titre, une citation de Tolkien, qui souligne qu'une action qui peut paraître banale peut faire la différence. De plus, nous sommes composés de poussières d'étoiles et j'ai joué avec cela dans le titre: le trésor des hommes ne se trouvent pas à l'extérieur d'eux-même mais bien à l'intérieur.
Elles sont donc "insignifiantes" dans le sens où leur action se limite à un humain et "infini" dans le sens où leur pouvoir ne connaît de limite, un humain peut propager son espoir à tant d'autres ..)
melemele14

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par melemele14 »

Voici ma participation, j'espère qu'elle vous plaira ^^

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A notre amitié


Je suis né dans un arbre, comme tous les lutins. Comme tous les lutins, je ne mesure pas plus de 2 cm de haut. Et comme tous les lutins de ma race, je suis un mâle.

C’est Clara qui m’a appris tout ça. Clara n’est pas un lutin, c’est un géant. Pendant des millénaires, les géants ne connaissaient pas notre existence. Nous les voyions se promener dans nos forêts et couper les arbres de nos voisins. Nous n’avions pas le droit d’entrer en contact avec eux, c’était interdit par à peu près toutes les règles de vie des lutins. Et quand je dis lutin, je ne parle pas que de ma race, mais de toutes les races confondues. Les Luthiel, les Luthin, les Luthëal, les Luthion, même les Luthïr respectaient cette règle, alors que tout le monde sait que l’écoute n’est pas leur fort !

Ce sont les Anciens qui ont dicté les règles, il y a des milliers d’années. Au début les géants n’étaient que de vulgaires animaux, mais lorsqu’ils ont commencé à évoluer, nous nous sommes reclus dans la forêt. Pourquoi nous cachions-nous me direz-vous ? Car les géants sont des êtres abominables. Dès que quelque chose dépasse leur compréhension, ils l’exterminent ou l’enferment. Alors nous nous sommes isolés du reste du monde, et les Anciens ont dicté les règles. Règle n°1 : Ne jamais se faire repérer par un géant.

Ainsi le monde nous a oubliés, nous les êtres présents ici avant même ce que les géants appellent les dinosaures. Nous sommes les premiers être apparus sur cette terre, nous avons tout vu, tout vécu. Malgré toutes nos différences, nous sommes les gardiens de l’histoire de ce monde, nous savons l’importance de notre existence et nous respectons la vie de tous les autres lutins.

Chaque race est responsable d’une chose dans notre peuple : les Luthiel, mon peuple, sont les gardiens des arbres, nos maisons. Les Luthin sont les gardiens de l’histoire, ils se chargent de l’éducation des plus jeunes. Les Luthëal sont les gardiens de la vie, ils s’assurent que les petits lutins naissent comme il faut et qu’ils soient bien acceptés par leur race. Les Luthion sont ceux qui nous procurent à manger. Et les Luthïr sont les guerriers qui nous protègent des géants et des autres créatures qui rôdent autour de notre maison. Nous vivons dans ce que les géants appellent la « Forêt Amazonienne ». Nous ne la quittons jamais physiquement, mais il arrive régulièrement que les Luthin regardent ce qu’il se passe à travers le monde depuis l’Arbre-Mère.

Ainsi, pendant des millénaires, nous n’avons pas pu entrer en contact avec les géants. Nous en voyions beaucoup passer dans notre forêt cependant. Ils viennent prendre ce qu’ils appellent des « photographies de la faune et la flore ». Certains meurent chez nous, parce qu’ils ne savent pas comment aborder le courant, parce qu’ils rencontrent des créatures dangereuses, ou parfois parce qu’ils ont découvert notre existence. Lorsque c’est le cas, les Luthïr se chargent de faire en sorte qu’ils ne ressortent plus jamais de la forêt. Nous ne pouvons pas risquer que les géants découvrent notre existence. Ils nous tueraient tous sans la moindre hésitation. Enfin, c’est ce que nous pensions.

Nous pensions que tous les géants étaient des créatures sanguinaires, qui ne savaient que détruire. Nous étions sûrs que jamais nous ne pourrions survivre si le reste du monde découvrait notre existence, car ils auraient peur de nous. Jusqu’à ce que nous rencontrions Clara.

Un jour, nous observions un autre groupe de gens de passage. Ils prenaient un tas de photographies, comme d’habitude, mais pour une fois il y avait avec eux une toute petite créature, qui les suivait partout, comme un poids lourd. Je me rappellerai toujours ce jour. Un des géants dit à la petite créature :

-Clara, je veux que tu restes ici et que tu m’attendes bien sagement. Papa et ses amis seront de retour très vite, mais il ne faut pas que tu bouges si tu veux qu’on te retrouve, d’accord ?

La petite créature hocha la tête, et s’assit au pied d’un arbre. Des lutins suivirent les autres géants et vinrent me dire qu’ils s’étaient fait pourchasser par un jaguar, qu’un seul géant avait survécu, et s’était enfui de la forêt. Moi j’étais concentré sur la petite créature. Au début, elle était très sage, elle ne bougeait pas, mais les heures ont passé, la lumière du soleil a décliné et la créature a commencé à s’agiter. Elle s’est levée, a commencé à pleurer, à crier « Papa », bien que je ne sache pas ce que cela voulait dire à l’époque. Elle s’est alors éloignée de son arbre. Elle a erré quelques heures dans la forêt et nous étions assez nerveux, car plus elle avançait, plus elle se dirigeait vers notre Arbre-Mère. L’Arbre-Mère est le centre de notre peuple, là où toute notre vie s’articule. Si un humain pénétrait sur notre territoire, il n’en ressortait jamais. Quand nous en avons discuté avec les Luthïr, supposés l’abattre, ils nous ont dit qu’ils s’étaient sentis cloués sur place. Ils étaient subjugués par ce petit être, dont la détresse était immense.

Elle s’est approchée de notre Arbre, s’est assise à son pied et a pleuré, durant de très longues heures. Elle a fini par s’y endormir, et nous ne pouvions que rester assis là à la regarder. Nous sommes restés toute la nuit à l’observer pleurer dans son sommeil.

Alors que les premières lueurs de l’aube pointaient le bout de leur nez, mes jambes se sont mises en mouvement. Je me sentais irrésistiblement attiré par elle, par cette petite chose si fragile. Tout le monde avait peur que je la réveille, qu’elle découvre notre existence, mais personne ne faisait rien pour m’arrêter. Alors je me suis avancé, et je me suis assis devant elle.

Je l’ai observée pendant quelques heures, essayant de la comprendre, lorsque ses cils ont commencé à battre et que ses yeux se sont ouverts. Je suis alors resté figé de peur, pensant qu’elle allait hurler et essayer de m’écraser, mais elle m’a juste regardé. Elle est restée allongée quelques secondes, puis elle s’est redressée et s’est assise en tailleur face à moi. Elle a levé les yeux et a découvert tout le peuple des lutins qui la fixait. Sa réaction m’a beaucoup surpris. Elle a reporté son regard vers moi, m’a souri, et alors que ses yeux s’embuaient, m’a demandé :

-Est-ce que c’est ça le Paradis ?

Je n’ai pas compris ce dont elle parlait à l’époque, mais je l’ai regardée, interloqué. J’ai secoué la tête, et lui ai répondu.

-Je ne sais pas ce que c’est, mais ici tu es au pays des Lutins. Tu t’es endormie devant notre Arbre-Mère.

Ses sourcils se sont alors haussés, avant de se froncer très fortement.

-Je ne suis pas morte ?
-Bien sûr que non. Nous aurions dû te tuer dès que tu as pénétré sur nos terres, cela dit.

Elle s’est alors levée, a observé son environnement, puis seulement alors elle a eu l’air de se rappeler des évènements de la veille.

-Où est mon père ?
-Qu’est-ce qu’un père ?
-Je suis arrivée hier dans la forêt avec mon père et ses amis. Ils sont partis prendre des photos, et ils ne sont jamais revenus.

Je ne savais comment lui dire que les personnes qui l’accompagnaient étaient probablement toutes mortes. Alors je lui ai sorti mon plus beau mensonge.

-Nous ne savons pas de qui tu parles. Nous n’avons vu que toi.

Ainsi se déroula ma rencontre avec Clara. Elle se présenta, m’expliqua qu’elle était ce que les géants appellent « une fille de 10 ans », qu’elle venait d’un pays appelé Europe, et que son père aimait venir dans la Forêt Amazonienne pour découvrir de nouvelles créatures. Elle m’expliqua plein de choses sur sa race, les humains comme ils s’appelaient. D’autres lutins se joignaient à nos discussions, curieux d’en apprendre plus sur les géants, mais aussi pour surveiller cette intruse sur notre territoire. Nous lui apprîmes beaucoup de choses sur notre mode de vie, sur nos différentes races, sur notre histoire. Elle nous expliqua que nous étions des êtres minuscules selon les standards de son peuple.

Clara resta de nombreux jours avec nous, et même si elle ne mangeait pas comme nous, nous nous débrouillâmes pour lui trouver autant de manger que possible. Clara et moi avions développé une relation très particulière, je passais tout mon temps libre avec elle, je lui apprenais nos coutumes et elle m’apprenait les siennes. J’étais très content de l’avoir avec moi, je n’avais pas énormément d’amis parmi les autres lutins, et j’étais si curieux de connaître le monde des humains. Mais après 5 jours, les Luthïr lancèrent la sonnette d’alarme. Des géants arrivaient sur nos terres. Alors que les Luthïr s’armaient, près à attaquer, un cri nous prit par surprise.

-CLARA !

Clara se redressa, elle qui était cachée dans les feuilles de l’Arbre-Mère. Elle se leva, et courut vers la personne qui l’appelait. Je la suivis comme je pus parmi les arbres.

-CLARA !
-Oncle Aldo ! Je suis là !

Je m’arrêtai à une certaine distance, regardant mon amie se jeter dans les bras de cette personne inconnue.

-Clara ! Oh ma puce je pensais ne jamais te revoir.
-Tonton je suis si heureuse ! Je croyais qu’il vous était arrivé quelque chose. Où est papa ?

J’avais envie de m’élancer, de dire à cet homme qu’il ne pouvait pas lui apprendre une pareille nouvelle ! Mais je ne pouvais pas mettre en péril notre existence. Alors je regardai cet homme annoncer la terrible vérité à mon amie, je la regardai s’effondrer au sol alors qu’il la prenait dans ses bras. Je les observai, soutenant mon amie de loin, attendant que tout se calme et espérant qu’elle revienne vers moi par la suite. Je la regardai essuyer son visage et se redresser.

-Tonton, je dois aller récupérer mon sac, tu veux bien m’attendre ?

Elle ne lui laissa pas le temps de répondre et s’élança à travers la forêt, revenant vers notre peuple. Je la suivis aussi vite que possible, des tonnes de question dans ma tête. Alors qu’elle s’arrêtait devant notre arbre, je descendis jusqu’à elle. Elle me prit dans ses mains, comme à son habitude, et me fit un sourire que je trouvai très triste.

-Je suis désolée mon petit ami, mais je dois rentrer avec mon oncle. Je dois retourner vivre parmi les humains, surtout maintenant que je sais ce qui est arrivé à mon père. J’ai ma maman qui m’attend également, et qui a besoin de moi. Je suis vraiment désolée mais je ne peux pas rester ici.
-Je comprends…
-Je reviendrai, je te le promets. Dès que je le pourrai, et aussi souvent que possible ! Je ne peux et ne veux pas vous oublier. Je vous promets à tous de garder votre secret pour moi. Vous m’avez aidée et je ne l’oublierai jamais.

Ses paroles avaient un air d’adieu pour moi, et mon cœur se serra à cette pensée. Je ne voulais pas ne jamais la revoir, mais quel choix avais-je ? Elle me reposa au sol, prit ses affaires et nous fit un dernier au revoir. Je la regardai s’éloigner, le cœur lourd, pensant ne jamais la revoir. Tout le monde resta immobile, jusqu’à ce qu’elle disparaisse de notre champ de vision. Ensuite chacun retourna à sa vie d’avant. Moi je n’y suis jamais parvenu.

Pendant des années, nous n’avons eu aucune nouvelle de Clara. J’étais persuadé ne jamais revoir son petit visage souriant, et je m’étais fait à l’idée de ne plus la revoir. Puis un jour, les Luthïr sonnèrent l’alarme, nous partîmes tous nous cacher, jusqu’à ce que je reconnu la jeune fille qui s’avançait vers nous. Elle avait grandi, mais j’aurais reconnu ce visage entre milles.

-Clara !

Son visage se fendit d’un grand sourire lorsqu’elle entendit ma voix. Tout le monde se rassembla autour d’elle pour écouter ce qu’elle avait à dire. Elle nous dit avoir pensé à nous tous les jours de sa vie, et n’avoir jamais divulgué notre secret. J’avais honte de penser qu’elle avait pu nous oublier, mais j’étais si content de la revoir. Pendant une semaine, ce fut comme lorsqu’elle avait 10 ans, nous passions nos journées ensemble, à discuter de sa vie et de son monde. Après 7 jours, elle m’apprit qu’elle devait repartir, mais elle me promit de revenir dans un an.

Et c’est ce qu’elle fit. L’année suivante, et toutes les années d’après. Chaque année, elle nous revenait, plus vivante et souriante que jamais. Elle me racontait sa vie, me montrait des photographies de son école, ses amis, ses amours. Je ne comprenais pas tout ce qu’elle me racontait, mais j’étais juste très heureux d’être avec elle. C’était ma plus grande amie, mon plus précieux trésor.

Les années passèrent, elle eut 20 ans, puis 30, puis 40. Plus le temps allait, plus je sentais que Clara était moins vigoureuse. Les effets du temps se faisaient voir sur son corps et son esprit, alors que je demeurais inlassablement le même. Je la voyais grandir, murir, devenir une magnifique femme. Puis elle passa ses 50 ans, et ses 60. Elle revenait chaque année vers nous, toujours assez en forme pour faire une escapade dans la forêt Amazonienne mais de moins en moins énergique pour gambader partout avec moi.

Malgré les effets du temps, notre amitié n’en était que plus forte. Je la voyais changer, mais j’aimais toutes les facettes qui faisaient de mon amie ce qu’elle était. Je continuais ma vie parmi les lutins, mais une semaine par année je m’évadais dans le monde des humains, dans le monde de Clara. Elle me montrait des photos de sa fille, de son mari, de toute sa vie.
Ses 70 ans passèrent, et à partir de ce moment-là, je sentais que l’énergie commençait à la quitter. Elle m’assurait que non, qu’elle était toujours ravie de venir ici et je n’en doutais pas. Mais son corps flétrissait à vue d’œil, son souffle se faisait court lorsque nous marchions trop longtemps, et ses yeux devenaient moins vifs. Même si les lutins sont immortels et ne ressentent pas les effets du temps, ce n’est pas le cas des humains. Je savais que mon temps avec elle était compté.
Alors que Clara allait sur ses 77 ans, elle arriva chez nous avec pour une fois quelque chose dans les mains. Lorsqu’elle fut sûre que nous étions seuls, elle se tourna vers moi.

-Mon très cher ami, j’ai une mauvaise nouvelle à t’annoncer. Je suis malade, gravement malade, et ce voyage ici sera mon dernier.

Je voyais ses yeux s’embuer et je sentais également des picotements dans les miens. Je savais bien que ce jour arriverait, mais j’avais espéré le repousser le plus loin possible.

-Je sais que c’est dur, et crois moi ça me déchire le cœur de savoir que je ne te verrai plus jamais, que ton dernier souvenir de moi sera nos adieux, mais nous savions que ce jour arriverait n’est-ce pas ?

J’hochai la tête, les lèvres pincées, refusant de pleurer devant mon amie.

-Je t’ai amené un petit souvenir, pour que tu te rappelles de moi. C’est un chardon sauvage qui vient de l’Europe. Il est magique, car tant que je vivrai, il sera violet et fermé. Lorsque je ne serai plus là, il deviendra alors d’un rouge éclatant et s’ouvrira pour te montrer toute sa beauté. Ainsi tu ne m’oublieras jamais, toi qui vivras éternellement sur cette terre. Je voulais te laisser autre chose que des souvenirs. Je voulais rester connectée à toi pour toujours, mon plus vieil ami. J’espère que tu prendras soin de ma plante, et qu’elle t’apportera du réconfort lorsque je ne pourrai plus le faire.

Contrairement à ses autres séjours ici, elle repartit le lendemain. Elle devait rentrer le plus vite possible en Europe pour se faire soigner. Je la regardai partir, les larmes cette fois-ci dévalant mes joues et mouillant mon torse. Je n’arrivais pas à réaliser qu’il s’agissait de la dernière image que j’aurais d’elle.

Durant des semaines, je passai mes journées à fixer la plante, m’attendant du jour au lendemain à ce qu’elle change de couleur. Mais rien ne se produisit, et j’en conclus que mon amie continuait à se battre pour rester dans ce monde.
Durant 3 ans, la plante resta violette, d’une beauté incomparable, même fermée. Cependant, des taches rouges apparurent au bout de ces 3 années. Subtiles d’abord, elles commencèrent à prendre plus de place, et mon cœur se serra lorsque je réalisai que ma Clara était en train de mourir. Plus les jours passaient, plus le nombre de taches rouges augmentait. C’était la fin, et je le savais. Ainsi, dès l’apparition de ces taches rouges, je repris mes habitudes et passai mes journées devant le chardon. Je ne pouvais qu’attendre, attendre le moment où mon cœur se briserait, où mon amie me laisserait seul sur cette terre.

Et me voici, assis comme chaque jour devant ta plante, Clara. La dernière tache de violet se teinte sous mes yeux d’un rouge aussi brûlant que le soleil couchant. Alors que les pétales commencent à s’ouvrir, mes yeux s’embuent, pendant que tous nos souvenirs me reviennent en mémoire. J’espère qu’en ce moment où ton souffle se rarifie, où ton cœur s’arrête de battre, tu trouves un instant pour penser à ton vieil ami. Je suis là avec toi Clara, je suis là pour te soutenir dans cette étape qu’est la mort. Je pense à toi, et j’espère que tu ne souffres pas. Je vois le chardon fleurir, Clara, et il est magnifique. Tu es partie, la vie a quitté ton corps, mais je sais qu’elle habite maintenant cette fleur. Je n’arrive pas à détacher mes yeux du chardon, mon amie, je n’arrive pas non plus à sécher mes larmes. Tu es partie, tu m’as laissé sur cette terre, mais je sais maintenant que je n’y serai pas seul. Je sais maintenant que cette plante que tu m’as laissée contient une partie de toi, que je ne serai jamais seul tant que je verrai cette belle plante fleurissante. Je vais vivre encore de longues et solitaires années, mais pas un jour ne passera sans que ton souvenir ne se rappelle à moi. Tu étais ma meilleure amie, mon précieux trésor, mon plus beau secret. Sur toute la longueur de ma vie, les nombreuses années que nous avons passé ensemble sont peut-être insignifiantes, mais pour moi elles seront un trésor que personne ne pourra jamais m’enlever. Je vais me lever maintenant mon amie, et partir loin de cette fleur, car je ne dois pas m’effondrer, mais je viendrai te tenir compagnie aussi souvent que possible. Merci, Clara, merci d’avoir fait partie de ma vie, et de m’avoir laissé un si précieux cadeau. Je le chérirai tous les jours de ma vie, je te le promets. Repose-toi bien, ma précieuse amie, repose en paix, et rappelle-toi que tu auras toujours une place au sein du petite monde du minuscule.
Ipiuti

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Ipiuti »

J'adore le thème ! Alors voici ma proposition, en espérant qu'elle vous plaise, bonne lecture ! :)

Voyage, Voyage

J’erre, silencieuse.
Je n’arrive pas à me rappeler quand mon voyage a commencé.
Je ne sais pas quand il finira.
Malgré tout, je ne suis pas seule. Des milliers de mes comparses m’accompagnent. Toutes ensembles, nous avançons vers notre but. Marchant, courant, volant, peu importe. La seule chose qui compte est l’arrivée.

Mais le voyage n’est pas aride et vide pour autant. Chaque nouveau virage nous offre une vue détonante et magnifique, une vue à l’opposé de notre monde de départ.
Je viens, ou plutôt nous venons, d’un monde chaud. Incroyablement chaud. L’enfer ne tiendrait pas la comparaison, même l’espace de 5 minutes. C'est un souffle brûlant qui nous prend à la gorge pour ne plus nous lâcher, un souffle jaloux qui nous refuse tout espoir de fraîcheur.
C’est cette chaleur, et notre envie de découvrir d’autres horizons qui nous ont fait quitter notre terre d’origine.

Si le voyage s’avère magnifique, il est pourtant loin d’être facile.

Tout d’abord, il y a ce froid glacial. Un froid qui s’infiltre jusqu’au plus profond de vous et vous gèle petit-à-petit, jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un bloc de glace de vous. Un froid qui ne vous laisse aucun répit, aucune pause, aucune chance de survie si on fait l’erreur de s’arrêter ne serait-ce qu’une seconde. Nous ne nous arrêtons donc pas.

Ensuite, il y a la fatigue. Cette course sans fin pour échapper au froid ne laisse aucune occasion de repos. Il faut continuer la route, sans relâche, sous peine de finir gelé sur place. La moindre seconde, minute, heure, est consacrée à un unique but : avancer, à tout prix. C’est alors que vient la fatigue, compagne fidèle de notre voyage. Elle se love contre nous, nous engourdit les sens et nous murmure de ralentir, de s’arrêter. Nous dit que ce ne serait pas si grave, que se reposer quelques instants ne nous mettrait pas en danger.
La fatigue est insidieuse, elle profite de nos moments de faiblesse pour se faire plus forte, pour nous forcer à nous arrêter.
Nous la combattons comme nous pouvons. En filant d’autant plus vite, en accélérant pour lui échapper.

Mais c’est là qu’arrive, comme pour nous achever, la lassitude.
Le voyage est long, immensément long. Cette course incessante contre nos ennemis nous parait interminable. Lorsque la fatigue se rapproche de nous, elle nous envoie son acolyte, la lassitude. Celle-ci nous prend dans ses bras, et nous nous demandons alors quel est le but de notre voyage, pourquoi continuons-nous de nous battre. A quoi bon, puisque ce voyage n’a ni début ni fin.

Finalement, alors que nous sommes sur le point d’abandonner, une lueur nous redonne de la force. Une sphère lumineuse, bleue, nous apparait comme un endroit où se réfugier, un monde où nous pourrions nous établir.

Un dernier effort. Une dernière salve d’énergie à donner. Une dernière portion de chemin à parcourir.
Se dresse alors face à nous une muraille. Immense, imposante, infranchissable. En s’approchant, certaines d’entre nous se sont pourtant rendues compte qu’elles pouvaient la traverser aussi facilement que s’il s’agissait d’eau.
Nous passons donc, abandonnant les quelque unes d’entre nous qui s’heurtaient à ce mur sans comprendre pourquoi.

Après la traversée, nous nous séparons, trop pressées de découvrir cet univers qui s’offre soudainement à nous.
Je descends rapidement, et aperçois un pilier surmonté de petits objets verts. Je m’en approche, curieuse. Finalement, je me pose sur l’un de ces objets.
Il m’absorbe immédiatement. Je vais enfin pouvoir me reposer.
C’est ainsi que se termine mon voyage, à moi, particule.
Vous pouvez retenir mon nom : Photon.
mythik

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par mythik »

Salut !
Voici mon texte. Bonne lecture !


Les envahisseurs




Je sors péniblement de mon tunnel de sable. Le vent a soufflé fort la nuit dernière, si bien que la sortie était en partie obstruée. Le soleil m'aveugle un instant avant que ma paupière interne transparente se referme, me protégeant de son éclat et des grains de sable par la même occasion. Le sable rouge s'étend à perte de vue, formant montagnes et vallées. Ce n'est pas ici que je trouverai de quoi manger. Je me mets en route, mes six pattes griffues s'enfonçant dans la fine poussière rouge. Le froid de la nuit est encore bien présent, renforcé par le vent, malgré le soleil brûlant au-dessus de ma tête. Mes écailles, épaisses et solides, me protègent d'ordinaire autant du froid que de la chaleur mais les bourrasques de la tempête qui frappe la région les empêche de se réchauffer.

J'arrive en vue de la Montagne-Brillante. Il y a quelques temps, d'étranges créatures sont arrivées avec, envahissant notre territoire. Ces créatures sont grandes – bien plus que moi ou que n'importe qui d'autre que j'ai pu rencontrer dans ma vie. Elles possèdent quatre pattes mais n'en utilisent que deux pour se déplacer, ce que je trouve très étrange. J'ai essayé de le faire et ce n'est pas pratique du tout. Ils ont une grosse coque blanche et un immense œil noir sur tout l'avant de leur tête. Il font du bruit aussi, beaucoup de bruit. « Pschiiit. Pschiiit. ». Ça n'arrête jamais. Les anciens de ma colonie ont interdit les nôtres de les approcher. Nous ne savons pas ce qu'ils veulent après tout et ils sont si grands qu'il pourraient nous écraser sans même se rendre compte de notre présence : je ne mesure même pas le quart des empreintes qu'ils laissent derrière eux !

J'ai néanmoins reçu une dérogation : pour pouvoir aller chercher à manger dans les Grottes Sombres, je dois passer à côté de la Montagne-Brillante. Elle ressemble un peu à cette créature qui vit dans les Grottes de la Vallée Aride, à quelques jours d'ici : de longues pattes fines qui s'enfoncent dans le sol et un gros corps rond au milieu. Bien sûr, la Montagne-Brillante est bien plus grosse, plus encore que les créatures qui l'ont amenée ici. Je me faufile entre leurs étranges animaux-rochers. Les créatures les utilisent pour se déplacer mais je n'ai jamais vu un animal-rocher bouger lorsqu'ils n'étaient pas là. Ils ont des pattes bizarres, rondes comme des yeux, et ne font du bruit que lorsqu'ils bougent. La première fois que j'en ai vu un s'arrêter et cesser de faire du bruit, j'ai cru qu'il était mort. Mais une créature à coque est montée dedans et l'animal-rocher est reparti bruyamment.

Je suis tout près de la Montagne-Brillante à présent. Il faut que je fasse attention et que l'on ne me remarque pas – les anciens ont été très clairs sur ce point. Heureusement mes écailles sont aussi rouges que le sable et si je m'y enfonce un peu, il est difficile de me repérer. J'avance tout doucement. Soudain, la coquille luisante de la Montagne-Brillante se fissure et un morceau se détache. Deux créatures à coque sortent du trou béant ainsi formé dans son flanc. Je m'enfonce encore plus dans le sable et n'ose plus bouger une écaille. Je suis si près d'eux que leurs ombres me recouvre. Pourvu qu'ils ne me voient pas ! Et qu'ils ne m'écrasent pas par la même occasion... Lorsqu'ils passent à côté de moi, je remarque pour la première fois des symboles étranges – mais néanmoins familiers – sur leur coque. Mais où ai-je donc pu les voir ?

Cela me revient d'un coup : les symboles sont similaires à ceux situés sur la surface de la Montagne-Brillante et sur les animaux-rochers. Il s'agit de grandes lignes sombres et un peu agressives :

ARES I


et en-dessous, en plus petit :

NASA



J'observe les symboles en attendant le départ des créatures puis me dirige de l'autre côté de la Montagne-Brillante. J'ai l'impression qu'elle est encore plus grande que la dernière fois que je suis venu et d'autres pattes et d'autres plus petits corps sont apparus, rattachés entre eux par de longs membres épais et brillants. La Montagne-Brillante est-elle en train de faire un nid ? Il faudra que je le rapporte aux anciens : elle est trop proche de nos tunnels. Il ne faudrait pas qu'elle nous envahisse ! Mais cela attendra que je sois revenu des Grottes Sombres avec de la nourriture. La voie est enfin libre et je peux filer. Il faudra sans doute que je trouve bientôt un autre terrain de chasse, loin de la Montagne-Brillante et de ces étranges créatures à coque blanche.

Mon ventre se rappelle à moi. Ma famille doit avoir faim, elle aussi, alors je me dépêche, glissant dans la fine poussière, l'esprit de nouveau focalisé sur mon futur repas.
x-Key

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par x-Key »

Bonjour à tous ! Voici les résultats du concours de mars ! En première place, constancedufort avec Je serai le dernier…. En deuxième position ex-aequo se trouvent Ipiuti et Daenerys98, et enfin, la troisième position, toujours ex-aequo, revient à Atzue et ELFAfanny. Bravo à tous !

Je serai le dernier…


Tout a débuté par un frémissement. Nous étions serrés les uns contre les autres depuis si longtemps que nous avions perdu la notion du temps dans cette illusion d’éternité. Un comble !
Notre monde figé s’est ébranlé. Le sol a tremblé, brisant notre immobilité, et les reflets sur le cristal nous ont éblouis. Notre univers a tangué dans un grondement pareil à un cri déchirant.
Je garde en mémoire le raclement de mes proches lorsqu’ils ont glissé le long de la paroi dressée. Nous sommes si petits, si insignifiants ! Le froid soudain m’a envahi lorsque leurs corps se sont détachés du mien. Ils tombaient dans le vide en crissant. Bientôt, mon tour viendrait. Je ne suis pas assez fort pour m’accrocher.
Mon monde en balancier s’est enfin décidé à vriller pour de bon, avant de se stabiliser dans une immobilité morbide. Puis le silence, plus lourd que le plomb. Retour à l’éternité, la tête à l’envers. Mes repères balayés.
Un cri, puis deux, puis dix. La rumeur a enflé, angoissante. Non, l’éternité n’était pas pour nous. Pas en cet instant. Notre univers se dérobait encore sous nos pieds. J’ai entendu les gémissements de mes frères emportés malgré eux lorsque le temps et l’histoire ont repris leurs droits. On m’avait dit que cela arriverait. Que notre monde était voué à disparaître en une poignée de minutes. Je sens la spirale du siphon sous mon ventre. Je me roule en boule. Mes proches sont partis, aspirés par l’inéluctable.
A mon tour je glisse et tombe…
La peur de l’inconnu me ronge et me fait trembler sous les assauts de la gravité.
Et je tombe…
Elle tue dans l’œuf mes désirs de rébellion. Je suis destiné à y passer.
Je tombe…
Au-dessus de nous, une ombre se couche le long du globe et voile la lumière. Je reconnais l’immensité d’un iris étoilé et le noir sans fond d’une pupille. Notre dieu. Je ne suis qu’un rouage, comment le contredire ? Il me rappelle qu’il a besoin de moi. Il est temps de tenir mon rôle et de jouer ma partition dans le grand chamboulement. La succion s’accentue et les gémissements se transforment en échos lointains. Je suis un des derniers à résister à la grande aspiration. Pourtant, je glisse, et je tombe… Bientôt, je les rejoindrai.
J’aperçois maintenant la porte dorée, si étroite qu’un seul d’entre nous peut s’y faufiler. Elle m’ouvre l’accès à un nouveau monde, un nouveau globe d’éternité. Je ne lutte plus, statufié par l’œil de mon dieu.
…je tombe.
Je suis son compteur de temps. La foi me revient. Lorsque je ne serai plus dans ce monde, je renaîtrai dans le suivant.
Je vois la lumière au bout du tunnel et j’entends mes frères qui m’appellent.
« L’autre globe n’est pas si différent, me clament-ils, accomplis ton office et rejoins-nous ! »
Vaincu par la peur, je me laisse aller. Le temps s’écoule, inexorablement. Un grain de sable ne peut l’enrayer. Je me laisse happer par le vide, au travers la porte dorée en chat d’aiguille. Je tombe, enfin.
J’ai au moins cette fierté : je suis le dernier grain de sable de la clepsydre, l’ultime témoin de cette minute d’éternité.
daenerys98

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par daenerys98 »

Je suis très heureuse d'être à la deuxième place surtout quand je vois les très bons textes qui étaient en compétition ! Je suis vraiment ravie et merci beaucoup au jury ! :D
Espritsdevie

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Espritsdevie »

Bravo à tous pour les excellents textes ! Le thème était vraiment super sympa en plus ! ^^
ELFAfanny

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par ELFAfanny »

Ravie de cette troisième place! Bravo à tous pour vos excellent texte! :D
Ipiuti

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Ipiuti »

Très heureuse également pour ma 2ème place ! Merci au jury, et bravo à tout le monde ! :)
Constancedufort

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Re: Concours d'écriture - Mars 2019 : Le Petit monde du minuscule

Message par Constancedufort »

Un grand merci pour cette première place, je suis très touchée ! J'ai mis un peu de temps à m'en rendre compte, je présente mes excuses mais je suis ravie !
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