Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

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x-Key

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Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par x-Key »

Bonjour à tous !

Le thème du concours d'écriture de mars est : L'Empire des sens ! Ouïe, toucher, vue, goût, odorat : laissez libre court à votre imagination et écrivez-nous une histoire sur l'un des cinq sens ! Vous avez jusqu'au 30 avril.

Image



Pour rappel :

♦ Vous avez tout le mois (et pas plus !) pour poster votre texte sur le sujet, nous n'accepterons pas les retardataires.
♦ Un jury composé de plusieurs personnes lira ensuite vos créations littéraires et désignera le texte vainqueur. Le gagnant sera récompensé d'un badge spécial et d'une petite surprise.
♦ Tous les types de textes sont acceptés (fiction, histoire vraie, nouvelle, essai, en vers, en prose) du moment qu'ils collent au thème !
♦ Il n'y a pas de limites minimum de caractères. En terme de taille, le format d'une nouvelle de 15 000 signes (environ 7 pages) est le maximum qui sera accepté.
♦ Faites attention à votre expression et à votre orthographe, il est toujours plus agréable de lire des textes écrits dans un français correct ;)
♦ Attention : Seuls les membres de Booknode dont le profit sera un minimum complété (quelques livres en biblio et infos sur le profil) pourront participer, peu importe votre date d'inscription. Vous pouvez très bien vous être inscrits la veille, il n'y a aucun soucis, tant qu'il est clair que vous ne vous êtes pas inscrits sur le site juste pour participer et ne jamais y revenir ;)

Bonne chance à tous ! :)
Lilya99

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par Lilya99 »

Bonjour,

Voici ma participation à ce très beau thème. C'est un texte très différent de ce que j'écris d'habitude, j'espère qu'il vous plaira.

Symphonie

À ma Liza

- Plus un bruit désormais.
- Niko…
- Chut ! Ferme les yeux.
- Mais…
- Détends toi. Tu attends ce moment depuis si longtemps. Ne gâche pas tout maintenant.

Sans rien dire cette fois-ci, je hoche la tête tout en fermant les yeux. Je réajuste ma position pour m'installer le plus confortablement possible et je me concentre sur ma respiration. Inspire. Expire. Inspire.
Je sens les mains de Nikolei sur mes oreilles. Il retire avec délicatesse les lourds appareils que je porte en permanence depuis ma plus tendre enfance. D'abord l'oreille droite, puis la gauche. Le silence envahit mon esprit.

La sensation est étrange. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai du bruit dans la tête et un poids sur mes oreilles. Je me sens à la fois libérée et prisonnière. Libérée du carcan formé par les machines sophistiquées, mais prisonnière d'un silence absolu, effrayant par son intensité.

Ils m'ont expliqué ce qui allait se passer. Ils ont fabriqué un robot spécialement pour moi. Une merveille de technologie, capable d'une précision jusqu'à cent mille fois plus élevée qu'un humain lambda. Cela leur a pris des années. Et enfin il est prêt.

Je souffre d'une anomalie génétique peu commune, qui a affecté le développement de mes tympans. Je n'en possède pas dans l'oreille gauche, et celui de mon oreille droite est défectueux, trop rigide et percé de trous. Mes appareils ont tant bien que mal tenté de les remplacer, mais difficile à enlever sans aide et produisant un bruit de fond noyant mon esprit, ils sont loin d'être parfaits. Alors j'ai sauté de joie quand j'ai su qu'une opération était possible.

J'ai peur aussi. À quoi ressemble le monde avec des tympans normaux ? Je crois que ce qui m'effraie le plus, c'est la possibilité que je sois déçue, que le résultat ne soit pas à la hauteur de mes attentes. Et si mes nouveaux tympans ne pouvaient rien faire de mieux que mes anciens appareils ? Aucun retour en arrière ne sera permis.

Avant que l'angoisse ne monte trop en moi, je sens sur mon nez qu'on installe une machine. Inspire. Expire.
Je m'endors doucement.

****

La première chose que je remarque est le silence autour de moi. Je suis en paix. Puis vient un doux fredonnement. Il s'arrête, puis recommence une nouvelle fois. De l'autre côté de moi, un fredonnement semblable lui répond. Un dialogue s'engage. Je n'ai jamais rien entendu de pareil. Il y a tellement de nuances dans ce chantonnement joyeux. L'absence de bourdonnement directement dans mes oreilles est merveilleuse. Je capte sans difficulté chaque changement de position de la source de ce chant captivant. Un autre son se fait alors entendre. Plus brusque, régulier, mais loin d'être assourdissant. Parfois ce son s'arrête, comme hésitant, puis reprend pour se mêler harmonieusement aux deux premiers chanteurs.

Les brumes du sommeil s'écartent lentement de moi, et je perçois de plus en plus de sons que je n'ai jamais entendu auparavant. Me laissant porter par cette incroyable beauté, je laisse une larme unique rouler sur ma joue.

Comme s'il n'avait attendu que ça, après un léger bruit sur ma gauche, un instrument prend vie. Tellement différent de ce que j'ai pu entendre précédemment, je sais que l'objet que j'entends a été façonné pour produire la mélodie fascinante qui résonne dans ma tête. Je suis néanmoins incapable de l'identifier. Je pourrai ouvrir les yeux, mais je veux profiter le plus possible de la magnifique musique qui s'échappe de lui pour trouver refuge dans mes oreilles.

Les graves succèdent aux aigus dans une lente et sensuelle danse qui se joue dans mon esprit. Sans bouger, je bois tous ces sons que je n'avais jamais espérés percevoir. Des larmes de bonheur coulent en silence sur mes joues alors que je comprends ce qui m'était jusqu'alors inaccessible, et l'infinité de possibilité qu'il me reste à explorer.

Le morceau s'achève sur une longue et lancinante note qui me perce le cœur d'espoir. En inspirant, j'ose ouvrir les yeux.

Le ciel, d'un bleu éclatant, est la première chose qui me fait face. En périphérie de mon champ de vision, de nombreux arbres abritent les oiseaux que j'entends encore chanter. Doucement, je tourne la tête sur ma gauche.

C'est lui. Son violon encore en main, il me sourit.

- Bonjour, mon amour.

Nikolei.
Lilya99
Eurylia

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par Eurylia »

Petite question : il faut obligatoirement choisir un des sens ou est-ce qu'on peut brasser les 5 ?

Et petite précision au cas où je participerais, je suis membre du staff mais je ne participe pas aux votes et mes camarades sont suffisamment objectifs pour ne pas être influençables ;)
x-Key

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par x-Key »

Eurylia a écrit :Petite question : il faut obligatoirement choisir un des sens ou est-ce qu'on peut brasser les 5 ?
Tu peux en choisir autant que tu veux ^^
ELFAfanny

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par ELFAfanny »

Voilà pour moi! :D

Tu ne me parles pas et je ne t'entend pas

Les mères de Drest et Matty se connaissaient depuis plusieurs années. Ces deux petits anges âgés de six et cinq ans s'entendaient parfaitement bien ; malheureusement la petite Matty souffrait depuis la naissance d'une maladie chronique qui agissait sur l'ensemble de sa tête et sa gorge. Celle-ci avait pour effet principal d'empêcher ses cordes vocales de fonctionner correctement ; donc elle ne parlait jamais.

Elle riait en silence,
Elle pleurait en silence,
Elle criait en silence,
Elle s'exprimait en silence...

On lui avait appris à écrire les principaux mots dont elle avait besoin et un professeur venait tous les soirs chez elle pour lui apprendre la langue des signes, à elle et à ses parents. Ce handicap n'avait rien changer à sa complicité avec Drest.

« On réussira toujours à se comprendre ! » affirmait celui-ci

Matty était scolarisée dans une école normale. Son professeur, chaque année, prenait en compte son mutisme et sa maladie mais du reste cela ne posait pas de problème. Elle avait tout le temps un carnet sur elle et elle écrivait plus vite que n'importe lequel de ses camarades ; sinon elle pouvait compter sur son ami pour jouer les traducteur et l'aider. Elle le considérait comme son grand frère et lui comme sa petite sœur.

Au moment où notre histoire commence Drest se trouve en classe de CP et Matty en grande section. Ils ne se voient plus dans la cours de récré ni à la cantine et Matty, malgré le soutien de son aide personnalisée et de sa maîtresse, vit très mal cette séparation. Elle a hâte d'entrée en école primaire pour rejoindre son frère de cœur.

Vers la fin de cette année scolaire, une troupe de théâtre vint jouer une pièce aux élèves de primaire. Le spectacle eut lieu dans l’amphi-théâtre et tout se passa bien ; du moins jusqu'à la fin, où Drest perdit de vue sa classe. Un sentiment de panique l'envahit alors et il chercha des yeux un visage connu parmi toute la foule qui se pressait vers la sortie, en vain. Perdu, ne sachant pas quoi faire, il s'assit dans un coin de l'amphi près de l'une des enceintes géantes et il attendit que quelqu'un vienne le chercher.
C'est alors qu'un problème se produisit dans la cabine du son. Les enceintes laissèrent échapper un son strident sur quelques secondes durant lesquelles tout le monde se boucha les oreilles en criant.

Drest se trouvait à quelques centimètres de l'une d'elle.


~ Sept ans plus tard ~
Matty a douze ans, elle est toujours muette mais sa maladie ne l'affecte plus autant qu'avant.
Drest a treize ans, il est sourd mais s'y est vite fait.
En effet ,ce jour là dans l'amphi-théâtre, un professeur retrouva un petit garçon à la peau métisse et à la tignasse brun-fonçé inconscient près de la scène. Il fut directement emmené à l'infirmerie de l'école et, à son réveil, l'infirmière commença à lui poser des questions auxquelles il ne répondit pas. Pourquoi ne répondait-il pas ? Parce qu'il ne l'entendait pas. À la place il percevait un léger brouhaha lorsqu'il la voyait ouvrir la bouche. Il essaya alors de parler mais il ne s'entendait pas lui-même.
Consciente d'un problème, l'infirmière le fit transférer à l'hôpital et le professeur qui avait retrouvé Drest fut interrogé par les médecins pour aider à comprendre ce qu'il c'était passé.
Plus tard dans la journée, Drest qui venait de passer trois heures sans rien percevoir d'autre qu'un bruit étouffé, appris que son tympan droit avait explosé et que le gauche était gravement endommagé. Il n'avait pas souffert car il s'était évanoui sur le coup.

Maintenant Drest et Matty sont dans un collège spécialisé et se soutiennent mutuellement. Les parents du garçon sont heureux de voir que cette surdité soudaine n'a pas démoli leur fils moralement. D'ailleurs celui-ci leur dit souvent (parce qu'il parle toujours, bien qu'en bégayant):

« Matty ne parle pas mais je ne pourrais de toute façon pas l'entendre alors on est à égalité maintenant ! »

Par une matinée ensoleillée, durant la récréation, Matty entraîna Drest dans un coin de la cour et opta pour le langage écrit.

Je n'en ai pas encore parlé à mes parents mais en ce moment je me sens de moins en moins bien...

Il lut et leva ses magnifiques yeux bleu vers son amie d'un air inquiet.

— Tu as des migraines?

Et des vertiges, et des nausées.

— Tu dois aller en parler à tes parents où à ton médecin !

Elle hocha la tête et lui fit signe de ne pas s'inquiéter.

— Si je m'inquiète justement. Fait très atten-attention. Tu es ma-malade et tu dois faire attention à t-toi!

Je sais...
J'ai peur, justement...


Le jeune garçon la serra contre lui. Jusqu'à maintenant la maladie de son amie n'avait pas fait des siennes et il commença à s'inquiéter de cette manifestation brusque.

Les jours qui suivirent, Matty se plaignit de plus en plus souvent de migraines et elle voyait ses médecins plus régulièrement. Drest la suivait comme son ombre et s'inquiétait plus de la maladie que la principale intéressée.
Après l'école il lui tenait compagnie en l'emmenant se promener, en l'aidant dans ses devoirs et en discutant. Un soir où il était plus enhardi que d'habitude, il essaya même de l'embrasser, elle recula aussitôt en rougissant et il éclata d'un rire franc et lui sourit.

— Ex-excuse moi ! Je ne sais pas se qui m'a pris !

Cette soirée fut malheureusement la dernière qu'ils passèrent ensemble.

Matty Jitlen, 12 ans, 3h56, morte d'un arrêt cardiaque causé par un arrêt respiratoire brusque.



Matty chérie,
Tu étais la chose la plus merveilleuse qui est pu nous arriver. Tu étais une enfant adorable et intelligente. Sache que tu resteras à jamais avec nous, dans nos cœurs...
Nous t'avons aimé, nous t'aimons et nous t'aimerons toujours.
Papa et maman



Matty,
L'annonce de ta perte a été un choc terrible, mais je garderai la tête haute parce que je sais que c'est ce que tu aurais voulu.
Malheureusement les mots que l'on écrivait sur le papier pour se parler, ne pourront jamais exprimer le bonheur et le soutien que ton amitié m'a apporté.
Repose en paix.
Drest


___________________________________________________________________________________________

J'espère que cela vous aura plu, même si c'est très triste je sais :cry:.
Calimero33

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par Calimero33 »

Voilà ma participation...

La femme

Une femme est allongée sur le bord du lit. C'est le matin, la lumière est pure et pâle comme la peau d'un enfant. Ses jambes sont légèrement repliées et si on se rapproche, on distingue des traces de coupures au rasoir. L'imperfection d'un désir de féminité... Comme ce maquillage qui, bien qu'elle ait pris soin de l'enlever le soir laisse une trace dans la commissure de ses lèvres. Ses joues rondes laissent les rayons de soleil rebondir avec une telle tendresse que je ne peux réprimer un sourire. D'ailleurs, je ne sais comment mais ce léger mouvement provoque le déplacement de son bras qui passe de sa taille à son ventre. Ce qui entraîne le glissement de la chemise qu'on a posée sur ses épaules frissonantes le soir d'avant. Son petit sein pointu apparaît. La peau est plus pâle à cet endroit, plus tendue aussi. Les veines vertes rampent jusqu'au téton pour disparaître sous la peau brune. Une brise se lève dehors, je lève les yeux. La fenêtre ouverte donne sur un grand chêne dont le bruit des feuilles rappelle le ruissellement de l'eau ou alors la pluie contre la vitre d'une chambre d'enfant. Les feuilles sont d'un marron-gris triste, cela fait un moment que je ne les ai pas vues vertes. Je ne sais pourquoi, mais depuis quelques années, la couleur a complètement quitté mon entourage. Tout est d'un gris clair désagréable.
Et puis il y a eu cette femme avec cet air légèrement joufflu, enfantin. Sa peau claire et son regard net quand elle me parle. La rougeur dont se teint son visage quand elle danse, son sourire simple et sincère. Son rire bleu comme le ciel d'un mois de mai où volent ses deux yeux, oiseaux de passage. Et ses iris noirs comme deux olives juteuses... La brise fait frémir sa chair comme une onde fraîche. Elle serre légèrement ses lèvres, et je promets avoir eu sur ma langue le souvenir de son gloss à la myrtille artificielle. C'est alors que quelque chose change, je ne sais quoi exactement. Une autre onde, plus vive cette fois, l'anime. Elle fronce ses sourcils gauchement épilés. C'est le réveil. Son petit nez se retrousse furtivement, les tâches de rousseur semblent d'autant plus dorées que la lumière les caresse. Elle bouge son menton et toute l'expression de son visage est mue par l'installation d'une moue qui annonce la fin d'un rêve agréable. Le menton crispé, elle risque un mouvement de ses doigts. Ses ongles translucides grattent légèrement le matelas. Le son, comme le craquement d'un morceau de pain grillé adoucit son visage et sa bouche fond même en un vague sourire. Elle risque alors le geste le plus téméraire, celui qui vous extirpe définitivement du sommeil, celui qui est interdit aux morts. Elle soulève sa paupière et c'est comme une symphonie synaptique qui explose en moi. La douceur est si forte que je me mets à transpirer rapidement, la vague chaude de l'amour s'est emparée de mes membres et je ne peux rien y faire. Elle enfouit sa tête dans son oreiller pour nier le temps. Elle aimerait que la nuit soit éternelle et en inspirant bien, elle pourra peut être retrouver, dans le drap blanc, la senteur âcre que la soirée a laissée en perles sur nos peaux. Mais l'air a tourné et tel une vague, c'est maintenant le beurre mou et le jus d'orange qui parviennent à nos narines. Elle expire, résignée. Ses cheveux frais flottent autour de ses petites épaules bronzées. Ils semblent si légers qu'on n'oserait les regarder. Elle reste ainsi quelques instants et se tourne enfin vers moi. Le sommier craque alors qu'elle se redresse pour s'assoir. Je redécouvre ainsi son visage, averti d'être observé à présent. Tout est différent, plus maîtrisé et anxieux. Son air enfantin est caché sous ce pli du front, cette crispation des lèvres ou encore cette paupière trop ouverte pour paraître naturelle. Toujours souriante, elle étire ses jambes et fait jouer ses orteils. Sa peau brunie par le soleil coule comme du caramel mou sur le lit blanc alors qu'elle entreprend de se lever. Je n'ose pas tendre la main tant la parfaite harmonie qui émane de son corps m'a paralysé. Je sens que le moindre contact pourrait la casser dans sa jeunesse lumineuse, briser ses os d'or. Je ne veux pas lui transmettre toute cette masse noire qui repose en moi et je suis convaincu qu'il suffit d'un doigt sur sa peau laiteuse pour que la masse se transforme en ombre et glisse en elle pour ravager son été intérieur en nuit hivernale.
La femme se lève, riant de mon immobilité. Elle secoue sa tête dans un rythme particulier, lent mais vif, de l'ordre de l'orange pâle. Elle me dit quelque chose et sa voix résonne comme un doux brouillard au dessus d'un champ de rose. Alors je ferme les yeux et hume. Des étalages de vert, jaune et bleu dansent sous mes yeux clos.
Soudain une troisième présence pénètre dans la pièce. Je sens la panique passer de la femme à moi, ultime onde qui nous relie. Ses yeux s'agrandissent et ses doigts se crispent, une odeur de brûlé se répend dans l'atmosphère soudain lourde. J'aimerai la protéger mais je suis toujours pétrifié par la peur de détruire son corps de verre. Elle semble ne pas comprendre mon inaction et c'est un soupçon de colère qui affaisse son sourire en perle. Je voudrais lui dire que je suis désolé qu'elle soit si intouchable mais une voix railleuse m'interrompt.
- Alors m'sieur, vous allez m'dire pourquoi fallait v'nir dans c'te maison?
Elle m'interpelle encore quelques fois avant que je ne tourne la tête, souriant tristement au jeune homme qui vient d'entrer :
- Ma fille aurait dû devenir femme aujourd'hui.
Le garçon fronce les sourcils, il délire complètement ce vieux.
- Allez, m'sieur faut rentrer à la maison maintenant.
La femme sourit pour me signifier que je peux partir. Elle recule un peu et me fait signe de sa main. La poussière monte comme une vague menaçante sous ses chevilles. Je fais demi tour et suis le garçon qui a déjà quitté la maison en ruine.


Les sens se basent sur l'expérience, ce ne sont que des souvenirs. Et comme toute espèce de ce genre, ils trompent.



Merci pour ce thème très vaste et cool!
(Désolée pour les fautes restantes)
jfjs

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par jfjs »

Bonjour les lectrices et les lecteurs. Voici mon texte pour le concours. Amusez-vous ^^

Flegme

Quatre fois dans l’année, le grand conseil magique se réunissait. Pendant les équinoxes et les solstices, le pouvoir des fées était à son apogée et c’était à cette période qu’elles distribuaient leurs précieux dons aux enfants des humains. Elles en profitaient également pour voir l’évolution du don qu’elles avaient offert à leurs protégés et le rectifier, si besoin était. Une sorte de service après-vente en quelque sorte. Les fées s’occupaient des petites filles car elles étaient beaucoup plus sensibles à la magie tandis que les fées-garçons dont les pouvoirs magiques étaient bien inférieurs, se chargeaient des enfants mâles.
En ce mois de décembre, la neige était tombée en couche épaisse. Elle pesait sur les branches dénudées des chênes, des bouleaux et des marronniers. Les vertes ramules des sapins ployaient sous son poids, les enterrant à demi sous les congères. Les cristaux de neige semblaient s’adresser aux étoiles du ciel, les implorant de briller plus ardemment en cette froide nuit. Les fées s’étaient regroupées derrière un muret de pierre et lançaient ça et là, divers enchantements pour transformer la neige en fauteuil de glace, ou des charmes pour ne plus souffrir du froid. Elles attendaient toutes l’arrivée de leur souveraine Khinomé, la reine des fées. Subitement, le ciel fut traversé par une traînée dorée. Tout le monde comprit la signification de ce signe. Il annonçait l’arrivée du carrosse royal qui était tiré par une monture fantastique. Ce n’étaient pas des libellules, des rennes ou des colibris qui tractaient le véhicule, mais des dragons miniaturisés et qui avaient gardé intact, malgré le sort de réduction, leurs puissants souffles de feu.
Quand ils se posèrent et que Khinomé descendit du carrosse, toute la foule s’inclina en une profonde révérence. Il régna pendant quelques instants dans la forêt, un silence majestueux. La reine des fées donna congé aux dragons. Tout le monde était impressionné par la puissance et la majesté de ces lézards volants. Les fées avaient spécialement incanté pour qu’un chêne mette à la disposition de leur reine, une de ses souches. Les fées-garçons avaient changé la neige en soie, afin que Khinomé puisse s’envelopper de douceur. Elles avaient simplement mis de côté Fabien qui devait être la fée-garçon la plus maladroite, la plus malchanceuse et la plus étourdie de la terre.
- Je ne peux vraiment pas aider ? demanda Fabien.
- Mmm, oui ! Tu pourrais aller voir si personne ne rôde dans les environs.
Fabien tellement content de servir à quelque chose, battit des ailes pour s’envoler et slaloma à travers les arbres.
- Bien joué, Mélusine.
- Y a pas de quoi, Morgane.
Toutes étaient soulagées de voir s’éloigner la fée-garçon catastrophe. Khinomé prit place sur le trône et déclara officiellement ouverte la cérémonie de distribution des dons du solstice d’hiver. Toutes les fées applaudirent. Leur reine fit apparaître un immense miroir afin que les futures marraines puissent voir leurs protégés. Des fées aux certaines couleurs de l’arc-en-ciel s’en approchèrent. La fée rouge offrit le don de la beauté - un grand classique pensa-t-on dans l’assemblée - mais c’était un don particulièrement apprécié chez les humains. La fée orange lança un sort pour que l’enfant possède une voix aussi précieuse que l’or. La fée jaune dispensa comme don celui de la grâce en toute chose ; la fée verte prit le relais et prononça une incantation pour que sa protégée soit une danseuse reconnue dans le monde entier. La fée bleue voulait que sa filleule ne manque jamais d’esprit quant à la fée indigo qui était la chef d’orchestre du chœur des licornes, elle offrit de jouer de n’importe quel instrument de musique avec brio. La fée violette, quant à elle, donna un talent reconnu dans le domaine de la broderie. Alors que d’autres fées s’approchaient du miroir pour voir l’évolution de leurs filleules, Fabien était tombé par le plus grand des hasards sur un campement de trolls. Il s’était caché derrière un tronc et fut très surpris de ne pas entendre leurs traditionnels grognements mais une conversation parfaitement compréhensible. Ils savaient donc parler.
- Nous sommes bientôt arrivés, annonça un troll-soldat.
- Elles ne vont pas en revenir ces chères petites fées, et il serra son poing pour montrer sa force.
- Après avoir capturé leur reine, nous exigerons tout l’or et les bijoux du trésor royal, dit fièrement un troll-général.
- Quant à leur magie, nous n’avons rien à craindre, je m’occupe de tout.
Fabien était très surpris de voir que cette dernière phrase avait été prononcée par une trolle. Que faisait donc une trolle au milieu d’un camp de soldats ? Il fallait faire vite. Les trolls n’étaient plus très loin du muret de pierre et avec les différents jets de couleurs magiques qui jaillissaient des baguettes pour la distribution des dons, il était extrêmement facile de les voir dans une forêt dépouillée.
Fabien vola aussi vite que ses ailes pouvaient le lui permettre et zigzaguait entre les troncs d’arbres. Il se demandait pourquoi les trolls voulaient attaquer aujourd’hui ; ils n’avaient pas la moindre chance en ce jour où le pouvoir des fées atteignait sa pleine puissance. Il arriva au milieu du rituel de la fée jaune-vert fluo.
- Les trolls vont attaquer, les trolls vont attaquer, cria-t-il.
Toutes les fées éclatèrent de rire. Tout le monde savait que les trolls étaient des créatures totalement stupides. C’était bien pour cette raison que, même si elles avaient décidé d’attaquer, elles choisiraient forcément le jour du plein-pouvoir et seraient ainsi absolument sûres de perdre. C’était parfaitement censé pour une logique de troll, persuadé qu’un carré était forcément rond. Tout le monde savait ça.
- Je vous assure, ils ne sont pas très loin. Ils veulent vous capturer, votre Majesté !
- Qu’est-ce qu’il ne ferait pas pour se faire remarquer, dit Diaks la fée jaune-vert fluo qui fulminait et avait viré au violet foncé.
- Mais je les ai entendus !
Nouvel éclat de rires.
- Parce qu’en plus, ils parlent !
- Mais oui, même qu’une trolle a dit qu’elle se chargerait de contrer notre magie !
Diaks demanda le silence puis se tourna vers lui : « Raconte-nous déjà ce qui est arrivé du don d’architecture que tu avais offert », une certaine fois.
Fabien baissa les yeux et ne dit mot car depuis ce jour, il n’avait plus le droit de faire des dons magiques.
- Tu ne dis rien ? Je vais te le rappeler.
Fabien avait offert le don de construction à un architecte toscan qui avait érigé une tour sur une plaine alluviale sans vérifier la constitution du sol. La tour avait irrémédiablement penché. Seul l’immense concile des fées avait pu jeter un sort pour que cette erreur se transforme en un des monuments touristiques les plus connus du monde. Fabien savait qu’elle avait raison mais sa souveraine était en grand danger et il n’y avait pas pire sourde qu’une fée qui ne voulait pas entendre.
C’est à ce moment que la trolle se rendit visible à côté du trône et captura de sa grosse patte velue Khinomé tandis que les soldats trolls lançaient des filets pour capturer le reste des fées. C’était la panique totale. Les dragons étaient trop loin pour les protéger et la trolle créa autour d’elle un bouclier pour empêcher toute attaque magique à l’intérieur comme à l’extérieur. Des jets de couleurs jaillissaient de toutes les baguettes pour libérer la reine mais rien n’y faisait. Comment une trolle avait-elle pu apprendre un pareil sortilège ? La trolle serrait fort dans son poing Khinomé.
- Rendez-vous, où je lui arrache les ailes !
Fabien qui voyait la situation échapper à son peuple, tenta un dernier coup de baguette et lança son sort. Une ridicule étincelle jaillit et fit « ploc » contre la puissante protection de la trolle.
- Pauvre petite fée-garçon. Même chez nous, tes exploits sont connus, dit-elle en riant grassement. Mais qu’est-ce qui se passe ?
Le sort lancé par Fabien avait touché le bouclier et s’était enroulé autour. La trolle était en train de flotter dans les airs comme un ballon, et de surprise, elle relâcha sa concentration mettant fin à sa protection. Khinomé qui n’avait pas besoin d’incanter à voix haute, ni d’avoir une baguette, profita de l’occasion, télétransporta tous les trolls au pays de leurs ennemis jurés les « orcs » sans avoir oublié d’effacer toute connaissance magique de leurs mémoires. Elle n’était pas reine pour rien. Il lui fallait aussi résoudre très rapidement un autre problème : récompenser Fabien sans qu’il puisse commettre de bévues. Elle avait en tête qu’un jour, il s’était trompé de formule et avait tellement salé une mer qu’on pouvait désormais flotter dedans sans bouger. Alors que les fées encore prisonnières se dépatouillaient pour sortir des filets, la reine demanda à Fabien de s’approcher.
- Ton intervention m’a sauvée. Je t’autorise à distribuer un don aujourd’hui.
L’assemblée retint son souffle. Le choc avec la trolle avait dû ébranler leur reine plus que prévu. Mais la souveraine, fine stratège, ajouta en levant un doigt : « Mais uniquement à un adolescent qui traversera cette forêt aujourd’hui ».
Fabien remercia en s’inclinant et les fées poussèrent un « ouf » de soulagement. Le don est offert aux bébés car ils apprennent très vite. En grandissant, les enfants se transforment en adultes et ne croient plus en la magie. La reine faisait ainsi d’une pierre, deux coups. Elle récompensait la fée-garçon et elle protégeait son peuple d’une future catastrophe magique, l’adolescent ne serait plus très réceptif au don. Un vol d’oiseaux leur annonça que des humains s’approchaient et parmi eux un ado qui gesticulait beaucoup.
- C’est ta chance, mon cher Fabien. À toi de jouer, lui annonça la reine. Ne crains rien, je lance un charme d’invisibilité. Les humains ne nous verront pas.
Fabien chercha rapidement quel don, il pourrait offrir à son futur protégé.
- C’est pour aujourd’hui ou pour demain ? demanda la fée jaune-vert fluo énervée qui était restée couleur aubergine. J’ai aussi un don à offrir.
C’était ça l’idée ! Fabien incanta et dirigea sa baguette vers l’humain : il ne s’énerverait jamais. L’ado fut frappé de plein fouet par le sort. Fabien remercia sa reine et Diaks put enfin exprimer son don.
- Tu n’auras jamais peur dans le noir.
- Tout ça pour ça, soupira Morgane.
- Quel sketch, elle nous a fait ! dit Mélusine.
- Nous nous reverrons toutes à l’équinoxe du printemps, annonça Khinomé et nous pourrons voir l’évolution du pouvoir sur nos petits protégés. Au revoir, mes fidèles sujets.
Tout le monde s’inclina et les dragons apparurent avec le carrosse.
Le lendemain, Diaks reçut une livraison par le service hippocampes volants express. C'était un fort joli bouquet de jonquilles accompagné d'un petit mot : « Désolé d'avoir troublé ton passage mais tout est bien qui finit bien. Rendez-vous pour l’équinoxe.
Fabien »
Fabien était peut-être maladroit mais c'était une fée-garçon gentleman.
Les mois passèrent bien vite. La neige commençait à fondre. Les pâquerettes et les boutons d’or fleurissaient dans les prés. Les oiseaux construisaient leurs nids. Au milieu de la journée, le chaud soleil faisait s’égoutter les glaçons. La vie reprenait soudainement et annonçait le printemps. Une bonne odeur montait des champs de trèfle, la récolte de chance serait excellente. Les fées le cultivaient pour cette propriété spécifique et offraient avec plaisir leurs récoltes aux lutins et farfadets qui distribueraient ainsi la chance à des kilomètres à la ronde. Toutes les fées étaient impatientes de voir l’évolution des dons qu’elles avaient offerts et plus particulièrement celui de Fabien. Même la reine était curieuse de savoir. La fée grise apporta des gouttes de rosée qu’elle avait récoltées tôt ce matin à l’aube. Chaque goutte ferait un réceptacle, une sorte de boule de cristal, pour voir le trimestre passé. Les protégées des fées de l’arc-en-ciel évoluaient tranquillement et chacune en ressentait une grande satisfaction. Les fées-garçons s’approchèrent du miroir magique. La reine les invita à offrir leur don. Tel petit garçon serait doué en mécanique tandis que tel autre serait un grand chef cuisinier, celui-ci un excellent jardinier et celui-là, un bricoleur hors-pair. Quant à celui-ci, il remporterait une médaille d’or aux jeux olympiques. La fée grise souleva une grosse goutte de rosée afin que tout le monde puisse voir l’évolution du jeune adolescent de Fabien. Diaks était particulièrement attentive. Le garçon ne s’était pas énervé une seule fois. Il avait une sorte de flegme. Certaines fées pensaient que c’était dû au hasard, d’autres que Fabien était tombé sur un bon élément. Fabien regardait fièrement son protégé. S’il continuait ainsi, il pourrait avoir peut-être le droit de faire un nouveau don prochainement. Il remarqua quand même que l’adolescent passait souvent la main près de son oreille : sans doute un signe de reconnaissance entre bandes d’ados. Pourvu que son don perdure pour le solstice d’été…
Les fleurs préférées des abeilles avaient envahi les prés, qui avaient pris maintenant des teintes roses et pourpres et le soleil chaud de l'été favorisait la croissance des plantes. Diaks était arrivée la première près du muret et avait été rapidement rejointe par ses congénères. Ils procédèrent à une nouvelle distribution de dons – tel enfant serait un nouvelliste reconnu, tel autre, aurait le don des langues rares et cette petite fille deviendrait une chercheuse de renommée mondiale. Le moment tant attendu arriva ! Les fées n'avaient pas grand chose à craindre avec leurs tout jeunes protégés. Le don allait tranquillement évoluer avec la croissance des petits humains, et de mémoire de fées, jamais au grand jamais, un don n'avait mal évolué. Mais avec Fabien...
Dans la bulle de rosée, on voyait un groupe d'amis jouer dans les eaux claires de la rivière joliment nommée : la Savoureuse. Ils s'éclaboussaient, et riaient bien fort. Le protégé de Fabien n'avait pas entendu venir deux garçons derrière lui qui lui sautèrent dessus. Fabien se crispa, Diaks observa. Les jeunes poussaient des cris mais le filleul de Fabien resta calme et les éclaboussa avec beaucoup de plaisir.
-Quel flegme ! Bravo Fabien pour ce don !
- Merci votre Majesté,
Diaks observait scrupuleusement le comportement des ados. Fabien avait peut-être réussi pour une fois ! Elle serait attentive à l’équinoxe d’automne.
Septembre arriva bien vite. L'air était déjà très froid et l'on s'attendait à voir apparaître la gelée blanche. Les jours suivants, les feuilles rouges et jaunes de l'automne tombèrent pour former un épais matelas sur le sol. Les écureuils gambadaient ça et là pour faire des provisions de faînes. Dans le ciel, les oies sauvages se hâtaient vers des contrées plus clémentes.
Le grand conseil magique se réunit une nouvelle fois. En attendant Khinomé, les fées échangeaient les derniers potins. La cérémonie se déroula sans anicroche. Fabien était nerveux. Il n'était pas à l'abri d'un égarement de son protégé. On le vit dans la bulle de rosée en train de conduire, lorsqu’un automobiliste lui fit une queue de poisson. Les fées s'énervèrent d'un tel comportement et lancèrent des jurons – oui, les fées savent jurer – tandis que le filleul de Fabien continuait tranquillement à rouler. Fabien poussa un soupir de soulagement. Assise sur un champignon, Diaks se repassait l'incident en boucle dans sa tête. Un tel flegme n'était pas normal ; c'était trop magique pour être honnête ! Elle avait été touchée par le bouquet de jonquilles et espérait sincèrement que le don de Fabien tienne bon. Tout le monde a droit à une deuxième chance, même chez les fées. Elles se séparèrent et se donnèrent rendez-vous pour la prochaine saison.
Diaks allait être en retard mais le vent hurlait et la neige tourbillonnante l'avait prodigieusement ralentie. Elle aperçut enfin le verger mitoyen de la forêt. Les branches des cerisiers squelettiques s'entrechoquaient et faisaient un bruit lugubre. Elle se hâta. La séance avait déjà commencé. Fabien ne la voyant pas arriver, lui avait gardé une place. Il lui fit signe dès qu'il la vit.
- Ta protégée est passée. Rien à signaler.
- Merci. J'espère qu'on pourra en dire autant du tien, chuchota-t-elle.
Mélusine et Morgane remarquèrent cette complicité naissante. Fabien sentit son estomac se nouer quand vint le tour de son protégé. On voyait son filleul en compagnie d'une charmante jeune fille, ils se promenaient dans la forêt. L'adolescent trébucha sur une souche que la neige avait recouverte.
- Il a du se faire mal ! dit Mélusine.
- Il a un sacré caractère. Il n'a pas pipé mot, dit Khinomé.
Le jeune garçon se releva et continua sa balade avec son amie. Il traça dans le ciel avec son index « Laura, je t'aime ». Les fées fondirent.
- Je tiens à te féliciter Fabien !
- Merci, votre Majesté.
- Et si tu le veux, je t'autorise à lui révéler ton existence.
C'était un très grand honneur que la reine lui accordait. Diaks avait très, très peur. Elle devait agir rapidement, c'était tout de même Fabien la fée catastrophe. Elle se rappela toutes les fois où elle avait observé le jeune adolescent – quand il gesticulait, quand il était en voiture ou à la rivière. Elle comprit, c'était une évidence. Sans crier gare, elle figea toute l'assemblée.
- Peux tu m'expliquer ? demanda Khinomé dont la puissante magie royale l'avait protégée du sort.
- Veuillez accepter mes excuses, Majesté pour ce que je viens de faire mais il me fallait agir très vite. Je demande votre indulgence pour Fabien qui a vraiment joué de malchance. Je vais tout vous expliquer.
Khinomé ouvrit grand les yeux.
- Si cet humain a tant de flegme, dit Diaks, ce n'est pas grâce à la magie de Fabien. Il ne s'énerve pas pour une bonne raison ! Vous m’entendez votre Majesté ?
- C’est-à-dire ? questionna la reine des fées.
- Ce pauvre enfant ne réagit pas car il est… sourd-muet.
mythik

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par mythik »

Bonjour à tous !
Voici ma contribution pour le concours de ce mois-ci. En espérant que ça vous plaira !

(PS : petit conseil de lecture : lisez-le dans un endroit calme, vous apprécierez sans doute mieux le texte ;) )



Concerto



Mes doigts volent sur le clavier, aériens. Le stress qui m'a envahi quelques minutes plus tôt a disparu, tel un nuage chassé par le vent. Ce vent-ci est constitué de notes, pures et claires. Les graves, les aigus, toutes ces notes si différentes s'assemblent et se complètent pour former une mélodie unique et envoûtante. Je me laisse emporter par la musique. Elle a commencé douce et calme, comme une légère brise d'été qui caresse la peau de ses longs doigts. Telle une berceuse, elle endort la méfiance, calme les tensions et ensorcelle les sens. Puis elle accélère doucement, petite rafale à peine perceptible. Le ton se fait plus lourd, les notes plus froides et mordantes. Une chape de ténèbres semble être tombée, et recouvre tout ici-bas. Une nuit silencieuse mais pourtant bruissante de mille sons, presque indistincts, imperceptibles, avant d'éclater, orage majestueux. La mélodie roule, tonnerre assourdissant de notes graves dont l'écho emplit la salle et tout notre être. Puis, l'orage cesse aussi soudainement qu'il était venu et la chape de ténèbres revient, semblant plus lourde encore. Les notes se font longues, plaintives, et s'interrompent parfois brusquement, mourant sans prévenir. Et le silence nous étreint. Le froid qu'il crée nous fait frissonner. Mais une note, une unique note, le transperce alors, réveillant chaque être. D'autres suivent rapidement, joyeuses, légères, amenant une éclaircie dans la tempête, véritable rayon de soleil à travers la nuit. La mélodie prend la saveur du printemps, et les notes ressemblent aux trilles joyeux des oiseaux et au bruissement des feuilles des arbres. Et nous voilà transportés dans une plaine ensoleillée, réchauffés au plus profond de notre âme. La mélodie guérit la peur, le froid, les peines et les cauchemars induits par les ténèbres qui l'ont précédée. Elle forcit encore avant de repartir, s'éloignant doucement. Et enfin, la note finale résonne, longtemps, avant de s'évanouir. Le silence suit. Celui-ci est léger, chargé du bonheur qu'a créé la musique.

Et soudain, il est brisé par des milliers d'applaudissements. Ils ramènent à la réalité, dans mon corps, mon âme qui s'était envolée pour danser avec la musique. J'ôte les doigts des touches du piano et me lève pour saluer la foule, encore hébété, envoûté par la musique que mes doigts ont créé. Des milliers de gens me font face, les yeux brillants, des grands sourires sur le visage. Le concert est terminé mais ils reviendront sûrement, animés par le désir d'écouter la musique non seulement avec leurs oreilles mais aussi avec leur âme tout entière.
Roxane10th

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par Roxane10th »

Hellow !

Voici ma participation au concours de ce mois ci ! En espérant que ça vous plaise ;)

Une chanson se termine, et les artistes présents sur scène laissent alors place à leurs confrères, comme il est réglementé dans ce bar qui accueille les jeunes musiciens.

Les lumières s’éteignent, très certainement pour laisser un peu de suspens sur le prochain groupe, ils sont nombreux à faire ce coup là ! Ça fait son petit effet parfois, mais je n’aime pas trop ce faux coté mystérieux.

C’est alors qu’elle résonne, cette mélodie, et surtout cette voix. Une voix masculine, à la fois grave et douce, un plaisir pour les oreilles.
J’ai du mal à prêter attention aux paroles, mais je voyage, seulement avec la puissance du timbre de sa voix.

Je prie pour qu’il ne soit pas moche, mais en fait, avec une voix pareille, Laidron ou Apollon, je mords à l’hameçon.

On éclaire enfin la scène, et, comme je l’espérait, il était magnifique, en tout cas, il répondait, à peu près, à tout mes critères de beauté chez un mec :
Pas trop grand, assez mince cheveux brun, yeux verts émeraude et une jolie peau ivoire. Il portait une chemise à carreaux rouge, certain trouverais ça ringard, mais moi, j’adore !

Je prête enfin attention aux paroles de sa chanson, et elle sont comme je les aimes : Elles ont du sens, elles porte un message fort ! Elle parlent du fait que l’on tombe tous dans les bas-fonds de nos enfers personnel, et qu’on peut tous en sortir. Une dure vision de la réalité et en même temps, une ode à la vie, à l’espoir. Je vis une expérience incroyable, inoubliable.

La musique jusque là puissante, s’attenue d’abord avant de se s’évaporer complètement, laissant le tonnerre d’applaudissements résonner.
Ils font les salutations et pendant quelques délicieuses secondes, je jurerais qu’il m’avait regardé
« Seigneur, faite qu’il soit gay…» ai-je prié dans ma tête.

Il entame alors de chaleureux remerciement et présente son groupe, ce qui me donne l’occasion de connaitre son prénom : Connor.
Ils ramassent leurs affaires, commencent à partir, et je me fais la promesse d’aller le voir dès qu’il irait prendre un verre avec son groupe pour fêté leur monté sur scène !

Le moment est venu, encouragé par mes amis, et je m’avance vers lui, en essayent d’oublier le fait qu’il soit avec son groupe et surtout entouré par des groupies… Comme je les comprends.

« Salut ! » Ai-je réussi à lui lancé avec tout le semblant de confiance en moi que j’avais à ce moment là. Il tourna son regard vers moi et me sourit.

« Salut ! Alors, ça t’as plu ? »

L’aclool aidant, je ne me suis pas retenu :

« Ah ouais putain mec t’imagine même pas ! »

Il fut visiblement amusé par mon enthousiasme, et une groupie lui agrippe le bras avec un rire niaiseux et commente « Oui, il as vraiment une super belle voix ! ». Je me dit alors que c’est foutu, quand pour mon plus grand plaisir, Connor semble géné de ce contact et dégage son bras de la fille. Pas sa copine donc, bon début ! Je continue : « Je parle pas seulement de la voix ! Je te parle des paroles ! C’est du génie ! C’est à la fois profond et poétique ! On sent que vous avec vraiment bossez dessus ! Je te jure je suis encore secoué ! Bravo les gars ! » Le batteur du groupe s’exprime alors : « Ah ça, pour les paroles c’est pas nous qu’il faut remercier, c’est Connor ! C’est lui qui as tout fait ! » je remarque au passage que Connor ne m’as pas lâché du regard et que son sourire est toujours accroché à son visage.

« Et bin encore une fois, bravo mec ! »

« Je te remercie, ça me fait vraiment plaisir, viens t’asseoir ! » me dit-il en me donnant une place VIP à coté de lui, faisant enragé toutes les harpies, qui me lance toutes un sale regard. « Tu aime quoi comme style de musique du coup ? »

« J’aime principalement le rock et le métal ! Et toi ? »

« Pareil ! Bien que j’admets volontiers adoré le classique ! »

Tiens, peu courant pour un mec de nos jours !

« Compositeur préféré ? » J’ose lui lancé avec un petit sourire de défi.

« Chopin ! Mais le maître reste Beethoven ! »

Je veux l’épouser.

« On est bien d’accord, merci ! Enfin quelqu’un qui me comprend »

Nous nous mettons tout les deux à rire.

De là s’en suis une conversation passionnante sur plusieurs sujet diverses et variés et je constate surtout qu’il à complètement délaissé le joli parterre de filles pour me parler ! Je trouve que c’est bon un très bon signe !

L’heure passe en un éclair, et il temps pour mes amis de me trainé vers la sortie ! Je salue alors Connor et commence à partir à contrecœur, le suppliant silencieusement de me retenir. « Attend, du coup j’ai même pas ton prénom ! » Me demande-t-il enfin
« William ! »
« Enchanté, William ! »
« Enchanté, Connor ! »
On s’échange un regard puis mon pote me tire littéralement vers la porte de sortie, je le déteste pour ça. Je pense alors que c’est trop tard, que c’était un moment génial passé avec lui, mais que je n’en n’aurait surement pas d’autre. Mais une main viens me posé sur mon épaule, je me retourne et vois Connor, me regardant avec un air timide, puis il me sourit en me tendant un petit bout de papier avec son numéro écrit dessus.
« Appelle-moi » me dit-il avec un clin d’œil, avant de repartir à sa table. Le seigneur avait entendu ma prière ! Me remettant peu à peu de mes émotions, je décida que je l’appellerais le lendemain, quand les effets de l’alcool se seront dissipés.

Notre premier rendez-vous se passe à merveille, comme le soir de notre rencontre, le temps défile trop vite et nous constatons que nous avons tout les deux énormément de choses à partager ! Ce que j’ai également pu remarqué, c’est son odeur envoutante. On dirais un mélange subtile de pin et de cannelle, avec un soupçon de rhubarbe. Qu’es-que j’adore. Je rêvais déjà de sentir ce parfum éternellement. J’ai entendu dire que si l’odeur de quelqu’un nous plait vraiment c’est que « C’est le bon ». J’espère que c’est vrai.

A la fin de notre troisième rendez-vous, il s’approche de moi et m’embrasse, m’offrant alors le plaisir de gouter à ses lèvres sucrées. J’intensifie ce baiser et savoure ce met exit, et je sens que je n’arriverais jamais à m’en lasser.

Au bout de trois mois de relation, et presque sans prévenir, on couche ensemble. Pour la première fois, je le touche dans son intimité, avec autant de douceur ou d’ardeur qu’il le désire. Je veux lui donner du plaisir, comme pour lui rendre tout ce qu’il m’apporte au quotidien depuis que je l’ai rencontré.

Puis viens la première grosse dispute, où la peur de le perdre était plus forte que jamais.
J’exprime ma colère, il affirme sa déception; j’expose ma peur la plus profonde, avec quelques larmes. Nous nous regardons un instant, et la pression retombe enfin. Il m’écoute, verse également ses larmes, je l’écoute, et nous finissons par nous dire et à avouer des choses que nous n’avons jamais osé dire ou avoué jusque là.

Lorsqu’il m’enlace après cette dispute éprouvante, il me chuchote un « Je t’aime », le plus sincère de tous.

C’est alors que je sens une chose s’éveiller en moi, ce que j’aime appeler mon sixième sens, mon âme. Je sens mon âme se connecter à la sienne. Comme si nous n’étions qu’un, comme si nos âmes était lié depuis la nuit des temps, lié à jamais, faite pour se rencontrés, se complétés, et s’alliés à jamais.

Depuis ce jour, je réalise que tout mes sens être en symbiose quand je suis avec lui, et plus particulièrement quand tout faisons l’amour :

Je vois mon la beauté de mon partenaire, je goûte ses lèvres sucrées, je respire son parfum, j’entends sa jouissance, je vibre au contacte de sa peau et surtout, je sens mon âme résonner avec la sienne. Je me sens vivre !

Je l’aime.

~

Merci beaucoup de votre lecture ! N’hesitez pas à me dire ce que vous en pensez, ça m’en ferais très plaisir et surtout ça m’aiderais à progresser ! :)
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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par x-Key »

Voici les résultats du concours d'avril ! En première position se trouve Symphonie le texte de Lilya99, suivie en 2e position par Caliméro et en 3e par Mythik. Bravo à tous pour vos participations ! :)

Symphonie


À ma Liza


- Plus un bruit désormais.
- Niko…
- Chut ! Ferme les yeux.
- Mais…
- Détends toi. Tu attends ce moment depuis si longtemps. Ne gâche pas tout maintenant.

Sans rien dire cette fois-ci, je hoche la tête tout en fermant les yeux. Je réajuste ma position pour m'installer le plus confortablement possible et je me concentre sur ma respiration. Inspire. Expire. Inspire.
Je sens les mains de Nikolei sur mes oreilles. Il retire avec délicatesse les lourds appareils que je porte en permanence depuis ma plus tendre enfance. D'abord l'oreille droite, puis la gauche. Le silence envahit mon esprit.

La sensation est étrange. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai du bruit dans la tête et un poids sur mes oreilles. Je me sens à la fois libérée et prisonnière. Libérée du carcan formé par les machines sophistiquées, mais prisonnière d'un silence absolu, effrayant par son intensité.

Ils m'ont expliqué ce qui allait se passer. Ils ont fabriqué un robot spécialement pour moi. Une merveille de technologie, capable d'une précision jusqu'à cent mille fois plus élevée qu'un humain lambda. Cela leur a pris des années. Et enfin il est prêt.

Je souffre d'une anomalie génétique peu commune, qui a affecté le développement de mes tympans. Je n'en possède pas dans l'oreille gauche, et celui de mon oreille droite est défectueux, trop rigide et percé de trous. Mes appareils ont tant bien que mal tenté de les remplacer, mais difficile à enlever sans aide et produisant un bruit de fond noyant mon esprit, ils sont loin d'être parfaits. Alors j'ai sauté de joie quand j'ai su qu'une opération était possible.

J'ai peur aussi. À quoi ressemble le monde avec des tympans normaux ? Je crois que ce qui m'effraie le plus, c'est la possibilité que je sois déçue, que le résultat ne soit pas à la hauteur de mes attentes. Et si mes nouveaux tympans ne pouvaient rien faire de mieux que mes anciens appareils ? Aucun retour en arrière ne sera permis.

Avant que l'angoisse ne monte trop en moi, je sens sur mon nez qu'on installe une machine. Inspire. Expire.
Je m'endors doucement.

****


La première chose que je remarque est le silence autour de moi. Je suis en paix. Puis vient un doux fredonnement. Il s'arrête, puis recommence une nouvelle fois. De l'autre côté de moi, un fredonnement semblable lui répond. Un dialogue s'engage. Je n'ai jamais rien entendu de pareil. Il y a tellement de nuances dans ce chantonnement joyeux. L'absence de bourdonnement directement dans mes oreilles est merveilleuse. Je capte sans difficulté chaque changement de position de la source de ce chant captivant. Un autre son se fait alors entendre. Plus brusque, régulier, mais loin d'être assourdissant. Parfois ce son s'arrête, comme hésitant, puis reprend pour se mêler harmonieusement aux deux premiers chanteurs.

Les brumes du sommeil s'écartent lentement de moi, et je perçois de plus en plus de sons que je n'ai jamais entendu auparavant. Me laissant porter par cette incroyable beauté, je laisse une larme unique rouler sur ma joue.

Comme s'il n'avait attendu que ça, après un léger bruit sur ma gauche, un instrument prend vie. Tellement différent de ce que j'ai pu entendre précédemment, je sais que l'objet que j'entends a été façonné pour produire la mélodie fascinante qui résonne dans ma tête. Je suis néanmoins incapable de l'identifier. Je pourrai ouvrir les yeux, mais je veux profiter le plus possible de la magnifique musique qui s'échappe de lui pour trouver refuge dans mes oreilles.

Les graves succèdent aux aigus dans une lente et sensuelle danse qui se joue dans mon esprit. Sans bouger, je bois tous ces sons que je n'avais jamais espérés percevoir. Des larmes de bonheur coulent en silence sur mes joues alors que je comprends ce qui m'était jusqu'alors inaccessible, et l'infinité de possibilité qu'il me reste à explorer.

Le morceau s'achève sur une longue et lancinante note qui me perce le cœur d'espoir. En inspirant, j'ose ouvrir les yeux.

Le ciel, d'un bleu éclatant, est la première chose qui me fait face. En périphérie de mon champ de vision, de nombreux arbres abritent les oiseaux que j'entends encore chanter. Doucement, je tourne la tête sur ma gauche.

C'est lui. Son violon encore en main, il me sourit.

- Bonjour, mon amour.

Nikolei.
Lilya99

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Re: Concours d'écriture - Avril 2019 : L'Empire des sens

Message par Lilya99 »

Merci beaucoup pour cette première place <3 !! Bravo à tous, il y a ici des textes vraiment beaux ! Et je ne peux que redire que ce thème était super, j'aurais presque eu envie de participer plusieurs fois ;)
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