L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

Message par Micum »

Bonjour ! Pour si peu que cette page soit dynamique, je vais m'échiner à la rendre plus active !

"L'Aube du Crépuscule" est mon 1er roman pour lequel je suis encore et toujours en quête d'un éditeur. Un des personnages principaux, sinon LE principal, se nomme Anselme. Car si, les balbutiements de ce roman ne tournent pas autour de lui, les deuxièmes pas ne pourront pas ne pas vivre avec lui. (Beaucoup de "pas" :shock:, oui...)
Si d'aucuns sont enclin à découvrir cela, je ne vais non point vous présenter ce personnage mais plutôt vous enjoindre à lire l'histoire de ce personnage jusqu'à son introduction dans le roman.

Bon, le langage pédant, c'est lourdingue :roll:
Du coup, si certaines personnes lisent ce premier chapitre (potentiellement sujet à quelques corrections), pourraient-elles m'en faire un retour ?

Merci d'avance !


Les morts ne souffrent plus


— Va t’en ! Trouve refuge chez Serino ! Lui et ses hommes vous cacheront ! supplia un jeune homme aux épaules solides et aux cheveux ébène. (Voyant que la femme à qui il parlait ne pipait mot, il insista.) Vite ! Les hommes du Roi seront bientôt là !
Et alors que cette dernière porta sa main épuisée contre le témoin de sa prégnance, la porte fut pulvérisée sans ménagement ni sommation.
Astaroth décocha une flèche qui n’aurait pas manqué sa cible si la magie de l’autre ne l’eût protégé.
Il les regarda comme on regardait pour l’ultime fois son parent jouxtant la mort. Puis le démon prit le dessus, sa peau s’étira, ses yeux se rondirent et des pattes griffues se substituèrent aux mains du jeune chasseur. La métamorphose touchait à sa fin quand une vive lumière jaillit du magicien et paralysa tout acte de sorcellerie. L’instant d’après, une volée de traits perça la chair du monstre qui n’eut pas le loisir de crier sa douleur. Il s’affala seulement et simplement à quelques mètres de sa tendre aimée.
— Enfin tu retournes au royaume putride, pesta le mage en battant sa soutane pour rétablir la lumière dans la maison. Hélas, trois fois hélas, Lazahr n’a pu prendre part à cette petite passion. Quoiqu’il ne chôme pas en ce moment. Tu savais sorcière que des loups ont été vus près des chutes d’Arrach ? (La sorcière demeurait astome.) Vois-tu, des loups, plus grands et plus féroces que leurs congénères ; des loups-garous. Tous tes bons amis qui ont, par je ne sais quel moyen réussi à passer outre la tourmente de glace, sont tous destinés à suivre le même sort que ton amant. Le trépas ! s’exalta-t-il comme si chacune de ses lettres employées n’étaient que « r ».
En s’approchant de sa prisonnière, il tâta du bout du pied le cadavre d’Astaroth en ajoutant :
— Eusses-tu été prince, que ton sort n’en eût changé d’un iota. Pourriture ! Et toi sorcière ? Quelle issue préfères-tu ?
— Dis-moi ton nom, exigea-t-elle maladroitement mais avec une telle pression dans ses pupilles dilatées que son interlocuteur ne put ne pas lui rétorquer.
— Gwaro.
— Tu es trop juvénile pour endosser une telle responsabilité, dit-elle alors qu’elle dessinait discrètement des spirales sur son ventre.
— La jeunesse fait la forme, sorcière. Maintenant, comment veux-tu mourir ? alla au fait Gwaro.
— Et toi ?

***


Il y eut une assourdissante détonation, puis le calme s’installa. Gwaro se remit debout fébrilement en dépit de la fureur qui régnait dans ses yeux. La violence de l’assaut magique de la sorcière et de la parade du magicien avait soufflé et renversé tout ce qui se trouvait dans la pièce. Même le corps d’Astaroth se vit projeté à l’autre extrémité. Faisant apparaître une dague dans sa main droite, Gwaro s’approcha de son ennemie.
— Vermine ! Tes tours n’ont rien fait sinon m’enrager ! Profite de tes derniers moments de vie que le Roi t’accorde.

La sorcière était assoupie contre le mur, la tête penchée sur son ventre ruisselant de larmes. Tout son monde se bornait au simple enfant qui y grandissait encore. Le magicien parlait de mort, mais celle qu’elle allait regrettée n’était pas la sienne.

— Je me demande combien de temps met un fœtus à crever lorsque sa mère a rendu l’âme, argua Gwaro.

Puis il donna un coup de pied dans son ventre et les doigts qui le recouvraient craquèrent douloureusement.

— Vois-tu, s’il survivait, ce ne serait qu’un enfant pourri, cassé, et maudit.
Dernière modification par Micum le dim. 12 sept., 2021 3:05 pm, modifié 3 fois.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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Manière noire


La vesprée souillée de cendres, la vie est passée
Sur le bûcher, sans vice ni péché
Autre que celui d’être différent.

Enlacés et enchevêtrés sans amour
Ardent sans chaleur, sentence sans jugement.
Brûlés pour être nés un jour,
Et désormais morts pour l’éternité.

Cette blessure éphémère est le mal de tout un âge.
Où sont passés les belles morales et les beaux adages ?
Quand la folie gangrène, la raison est le remède.

La Camarde désabusée,
Les charognards affamés.

Soudain, l’Ange noir apparut dans ces scories grisâtres.
Entre ces cris, s’élevaient ceux de l’enfant.
Ainsi que le phénix, d’une mère emportée,
La progéniture ne s’est pas éteinte dans l’âtre.

Par cette naissance le charlatan
Est dupé et encoupé.
La vendetta affleure
Où nulle sépulture nulle fleur.

Il n’y a que l’Homme pour abandonner.
Et les Bêtes pour sauver.

Les pleures s’essorent sous ce nouveau soleil,
Essimé, vivre par la seule volonté.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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Omineux


Ces derniers temps, la purge s’était accélérée. Les magiciens de l’Ouest, qui avaient alors revêtu l’uniforme de chasseur, croyaient avoir annihilé toute trace de créature malfaisante dans un succès éclatant. Toutefois, Lazahr le dernier des Traqu’Heur demeurait introuvable. Son corps ne figurait parmi aucun des tas et la raison voulait qu’il soit encore en vie puisque le défaire n’était pas une tâche dont tout le monde pouvait s’en charger. Le Roi, qui, satisfait du bon labeur de ses hommes, jugea la recherche du Traqu’Heur une perte de temps et qu’il valait mieux rassurer la population. Ainsi Gwaro eut l’honneur de participer des magiciens de la Cour.
En une paire d’années, nombre des profanateurs tournèrent leur veste et oublièrent, ce disait-il, les maléfices et pratiques de ce sombre art pour ne conserver que celui de la magie. Un parmi les plus grands aurait dû se voir la tête décollée si quelques-uns de ses amis ne s’étaient pas démenés pour lui. Et le Roi lui permit même de rester à la tête de son école quoique sujette à l’œil inquisiteur du Grand Ziliff. Aussi, les relations avec l’Est s’améliorèrent nettement si bien que ceux qui côtoyaient de près le Roi se demandaient par quels conflits les ententes avaient dû être compliquées à nouer.
Tout ceci dépassait de haut l’Enfant à la Corneille. C’était le surnom que les gens du voisinage lui avaient attribué, car chaque fois qu’il passait en ville, une corneille était perchée sur son épaule ou bien voletait au-dessus de lui. Le tout jeune garçon courait les pavés par tous temps, mangeait ce que les gens voulaient bien lui laisser ou n’hésitait pas à chaparder quand la faim hurlait trop. Parfois, son petit ami lui apportait aussi des baies ainsi que des insectes et des vers. Mais jamais il ne se passait un moment sans que la corneille ne veillât sur lui.
Bien des fois, le jeune garçon dut échapper aux soldats, se cacher dans l’ombre et la terre humide.
Un mauvais jour du destin, il se fit voir et reçu un violent coup de pied à la main qui lui fit lâcher de fait le morceau de pain qu’il tenait. Puis piétinant la pitance, l’homme lui jeta :
— Pourquoi la terre nourrirait-elle de la vermine comme toi ! Voleur tu finiras au bout d’une corde ! Et toi oiseau de mes deux, dégage !
Un nouveau coup de pied percuta la corneille qui, perdant plumes et force, heurta de plein fouet un mur sans que celle-ci ne se relevât. Le garçon voulut voler à son secours mais il fut saisi par les cheveux.
— Tout doux, toi. Tu vas payer pour tes larcins, démon !
— Inutile, je vais payer, dit un homme au ton maniéré.

Il posa une main sur le brassard du garde et, sans que le garçon ne le vit, lui asséna un regard tellement lourd qu’il ne souffrait d’aucune déconvenue.

— Bien, ça va pour le coup, mais si je le reprends à piquer, je le piquerai aussi, avertit-il en mâchant à moitié ses mots coincés dans sa barbe broussailleuse.
— Il n’en va pas ainsi de la loi, soldat.

Mais le garçonnet se moquait bien de tout cela. Son monde se limitait au bien-être de son ange protecteur qu’il n’a su protéger des siens. Ses petites ailes au creux de ses menottes. Ses larmes chaudes de tristesse ruisselant puis cascadant sur le plumage noir.
L’homme compassé le prit par le bras et l’emmena malgré lui. Des mains, la corneille tomba pour une ultime fois. Ni l’un ni l’autre ne savait parler, pourtant un serment fut fait alors que l’éloignement les prenait.

***

Mon ami, mon enfant,
Que ne m’entends-tu point !
Sache que l’amour soigne la douleur et le chagrin.

Si tous sont semblables,
Quelle est donc la raison de tant d’intolérance.
Nos ailes, la loyauté qui nous unit et nous pousse plus haut.
Brisez-les pour que notre solidarité croisse.
Chassez-la pour que la justice se transforme en vendetta.

Enfant des cendres, de la peine et souffrance.
Un jour notre monde sera si beau.
Garde confiance.
Dernière modification par Micum le jeu. 09 sept., 2021 12:51 pm, modifié 1 fois.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

Message par Micum »

Quelle charité y a-t-il à me laisser agonisante ?
Et je suis là, sur ces petites tombes que tout le monde foule. Notre loyauté, ce sont nos ailes. Même cassées, elle demeure. Car quand l’amitié se voit entravée elle n’en devient que plus forte. Les liens se resserrent pour ne porter que la même voix.

Sur ce tas de morts, je me tiendrai debout.
La mort, ce mot n’existe pas pour nous. Car nous la sommes pour eux. Nous sommes ceux qui volent les champs et sèment la peste. Les rats-volant. Sur mes plumes, tout s’estompe.

Soutirez-moi le sort de mon chemin,
Pour qu’il se jette sur vous. Si nous amenons le mauvais sort, alors qu’il ne vous quitte plus jusques à votre dernière génération. Ne voyez-vous pas ces minuscules insectes qui ne prient que de me réduire. Sachez que vous ne vaudrez pas mieux.

Tôt ou tard, le Crépuscule sera mis dans tout son jour.
C’est une promesse de l’avenir. La force n’existe qu’aux côtés de la débilité. Ainsi, nous vous aimons tant, vous qui croyez que la vie n’est qu’une affaire d’homme et d’argent. Que le second étouffe le premier.

En attendant, je suis là. Entre terre et vers. Ses doigtelets ne m’apportent plus cette chaleur. Tout est fini pour moi mais ce ne sont pourtant que les balbutiements. Tout est fini pour moi, mais pas pour nous. Le sort capricieux partout frappe sans choix, et son ordre souvent fait et défait les rois.
Dernière modification par Micum le sam. 11 sept., 2021 8:49 pm, modifié 1 fois.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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« Je t’aime. » Comment ces maigres mots ont-ils encore un sens alors que nous ne tenons plus chapitre. Les bien-pensants affirment que l’on n’a guère de vertu quand on ne peut se faire estimer que par celle de nos ancêtres. Peut-être, tiennent-ils ici un bout de vérité. « Contre la mort, il y a un remède ? » Cette dernière question tourbillonne en ma tête. Ma main passe sur ce carreau comme pour effacer un réel présent. Je voudrais quitter ce souci, sans qu’en moins, je n’en ressente le devoir.
De crasseux, associable, pesteux, mais libre à propre, ouvert, sain mais prisonnier. Et entre les deux, sa disparition, la disparition de mon amie, qui me parlait et plus tôt me nourrissait. Bientôt, la sonnette donnera de son glas, et il faudra descendre les escaliers, saluer, et se mettre à table. Je ne suis pas un chien. Une autre leçon que les hommes conséquents donnent est que l’on ressemble ordinairement aux personnes que l’on fréquente. Les hommes ont-ils oublié cette chose essentielle à mon égard, celle que je ne veux pas leur ressembler. Je veux être moi Anselme. Ce « Verfang », qu’il soit noble ou gueux n’est qu’un nom surérogatoire et dégradant.
La cloche est en retard. Et qui sont ces chevaux qui piaffent ? La blancheur de sa robe rouanne ne m’est guère familière. Des voix ! Sont-ce celles de la maisonnée ?
Malgré les interdictions, j’ouvre la porte qui, à chaque fois que je le prie, n’émet pas même le moindre bruit. Le ronge-lard m’observe de ses yeux émeraude, il est dans la connivence et ne miaule certes pas. Réduisant les marches avec moult précautions, je sens mes sens en total éveil.
— Serino, dit une voix. Il nous faut absolument passer la frontière sans le risque d’être fouillés. Notre chargement ne doit en aucun se mettre en danger à cause d’un bougre trop causeur. L’Ordre assurera sa protection jusqu’à Heilz. Il nous faut ce laissez-passer ! s’exclama-t-il alors qu’un coup sourd résonna.
— Calme-toi, Paol. J’ai fait valoir ma position au Grand de Victus. C’est un homme de confiance et de confidence, il vous accordera ce laissez-passer. Néanmoins, vous devriez traverser Victus, ce qui allongera votre périple.
— Il n’importe, trancha net Paol. Mon frère et moi nous accommodons aisément des longs voyages.
— Avant que tu ne t’en ailles, je voudrais savoir la raison pour laquelle le Roi n’est pas mis au courant.
— Oriat n’est Roi que par son père. Ce qui ne le justifie pas. De plus, l’Ordre nous a tous ordonné de la cacher aux deux frères. Même Tagh est écarté de l’affaire. Cela ne concerne que les mages et dans de moindres mesures, les passeurs, comme toi et moi.
— Une fois de l’autre côté de la frontière, tu n’auras plus à te faire de souci, l’Ordre y prêtera la plus grande attention, assura une voix qui me parut plus jeune.
— J’espère, j’aurais aimé vous accompagner. Par acquis de conscience.

Je vis l’homme, Paol, s’approcher de Serino et lui taper doucement l’épaule. Quelle attitude étrange.

— Mon ami, nous emprunterons des voies sûres, on contournera même Armloss.
— Paol, Paol. Te rends-tu compte de la valeur sans limite de ton chargement ? demanda Serino sur un ton qui tenait plus de la mise en garde. Si les bagues tombent dans des mains trop malintentionnées et aux esprits trop subtiles, c’est la fin pour toi et moi.
— Je ne suis pas de la Ghilde pour rien.
— Je n’ai jamais mis en doute tes talents. Ni ceux du malin. Maintenant, allez, sans vouloir vous mettre à la porte, mon petit phénix va s’impatienter.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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Elle, mes cendres


Serino me prend par la main. Qu’y a-t-il de si étrange que je ne ressente nulle chaleur. Il m’a dit créer mon éducation, être mon échalas pour bien grandir – pour bien vieillir. Mais je ne veux pas vieillir. Pas même bien. D’ailleurs, j’ignore parfaitement mon âge ; certainement situé entre huit et dix ans selon ses dires. Je ne sais toujours pas dire. Je ne fais que sentir, pressentir et ressentir. Car mon vrai monde, c’est celui de la corneille. C’est celui que je souhaite tant regagner. Mais sur terre, il faut marcher bas, et pourtant juger de haut le peuple croassant, huissant ou titinant.
Aujourd’hui, je suis heureux ; nous allons en ville, sur la place du marché, là où je chassais. Les étales n’ont guère changé. Les marchands si. Leur mine s’est assombrie, leur voix s’est étouffée. Leurs produits auraient été frais qu’on les eut dits blets. Serino sert un peu plus ma main ; certainement ne veut-il pas que je m’en aille. Moins la ville est prospère et plus les soldats grouillent comme des fourmis en quête inlassable de nourriture. Peut-être ce père se veut mon ange protecteur. Il a l’aura des célestes sans leur amour.
Par moments, il nous fait s’arrêter, parle avec un parfait inconnu en des mots tous plus rusés les uns que les autres et nous repartons. Si je tourne légèrement la tête à droite je vois l’éclat de sa lamette. Elle s’agite doucement contre sa cuisse, tel un poisson d’argent. Un jour, il me promit de m’enseigner la tenue de l’épée. Ce prolongement du bras qui ne fait que voler les vies. Comme il est fabuleux que ce vol ne qualifie point l’auteur de voleur. Et dire que pour un quignon de pain…
— Vois-tu, Anselme, la grande bâtisse là devant, c’est la chambre des Chevaliers. Ce sont des hauts militaires, émissaires directs du Roi. Même mon frère n’a aucune autorité sur eux. Ils ne dépendent que du Roi. Tu as compris ?
Je lui fais signe que « oui ». Qu’est-ce que je m’en fiche des Chevaliers ! Mais ça mon éducation m’empêche de le dire. Heureusement, la pensée est libre.
A chaque ombre du sol, je crois espérer mon amie s’apprêtant à se poser sur mon épaule. Combien de lunes sont donc tombées depuis !
— J’ai des connaissances dans cette Chambre, tu voudrais qu’ils t’apprennent ?
— Oui ! m’exclamé-je instinctivement.
— Mais attention, se sont de très fines lames, me dit-il m’adressant un sourire que les gens trouvent charmeur. En attendant, je vais te présenter à un ami, j’ai quelques affaires à traiter avec lui, mais toi, tu iras faire connaissance avec sa petite fille, m’annonça-t-il en m’ébouriffant les cheveux comme si j’étais un cabot que l’on flatte.

***

Elle est belle, ses yeux d’un jaune vivace sont comme des étoiles dans sa chevelure d’ébène. Un firmament allant et respirant.
— Je m’appelle Lugos et toi ? me demanda-t-elle alors que ses étoiles tantôt se voilent tantôt se découvrent.
— Anselme.

Je me sens bête. Mes pupilles ne font que se ficher dans les siennes. A prononcer ce mot, mes oreilles oient une langue étrangère.

— Je trouve que tu le portes à merveille ! Cela me rappelle ces petites divinités pour lesquelles certaines branches de Druides organisaient sacrifices et festins. Tu ne connais pas ? s’étonne-t-elle devant ma ignorance manifeste.

Ma tête se balade de droite à gauche puis de gauche à droite. A quoi me sert de connaître les autres s’ils ne sont ni mes amis ni mes ennemis. Lugos passe une main dans sa chevelure, quelques mèches frôlant mon nez me suffirent à en saisir son odeur.
C’était une odeur de Moi.
Micum

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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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***


Lugos agite ses lèvres fines, dévoilant par certaines articulations des petites dents blanches rangées militairement. Mais je ne comprends rien, je suis coupé du monde. Mon esprit vaque ailleurs dans une tranquillité inhumaine.
— C’est bien silencieux, la coupé-je sans m’en rendre compte.

Elle me regarde avec des yeux débordants de féerie lunaire. Chacun de ses battements de cils sont un conte qu’elle narre avec le plus beau des langages. Je me sens toute chose.

— C’est bien silencieux, dit-elle à son tour.

Puis la lune de ses yeux s’ennuage. Sans trop comprendre, je m’éclipse à toute allure de la chambre de Lugos, décline les escaliers encore plus prestement. Serino et un autre homme que je n’ai jamais vu sont affalés sur la table de séjour. Plus je me rapproche de Serino et plus ma perception me dit qu’il est en vie malgré du sang qui découle de ses narines. Serino demeure au firmament. Je découvre avec horreur que son manteau a été éventré et qu’on a retiré quelque chose de la fausse doublure. Lugos descend à petits pas timides. Avant même qu’elle ne comprenne, je ne suis déjà plus là.

La ville est mon terrain de jeu. Et elle le restera.

***


Je ne marche plus, je cours. Je ne suis plus, je vais. Comme au bon vieux temps. Seulement, j’ignore où aller. Diable ! Encore une ombre de soldat ! Je me retourne. Noire. Noire de serre en cap.
— Le gamin est revenu ! lance un gros type, qui jadis, partageait avec moi, et qui dorénavant ne comble que son ventre sur le point de rendre l’âme. Il va encore nous faucher ! renchérit-il, hélant les autres vendeurs.

C’est ici que je regrette la main de Serino, avec lui, je n’ai rien de ces vipères. Si j’étais le seigneur de cette ville, serais-je ainsi traité ? Noire me tire par le col de ma capette. Mes émotions naviguent entre deux extrêmes, je jette les amarres.
— Noire, à la voix de Stentor, je ne te quitterai plus jamais.

Je ne cours plus, je vole. Je ne suis plus, je vais avec.

Alors, la magie de l’amour s’opère. Mes pieds abandonnent les pavés. Sa voix résonne dans ma tête. Mourir n’est pas la porte d’entre du Paradis puisque j’y suis. Il n’y a que ceux que j’aime et qui m’aiment. Je l’ai déjà tant rêvé, je le vis. Au-dessous de moi, les excitations s’estompent. Ils ne sont qu’une mauvaise tache sur le parchemin de mon histoire.
Lugos, je lui ouvrirai mon monde. Qu’elle soit la reine du Paradis.

***


— Ce petit se débrouille rudement bien !, s’éberlue un homme d’âge mur, plus petit que Serino mais aux épaules non moins larges. Je ne vois en lui qu’un bel avenir, je suis certain que le Roi l’accepterait s’il se présentait à la Chambre.
— Alban, comment peux-tu être aussi assuré ? Anselme n’est pas même un adolescent.

Puis le chevalier l’entraîna à l’écart. Et je reste au milieu du terrain, avec cette grande épée et le regard vide, presque hagard.

— Hé mon gars, ça te dirait de croiser le fer avec moi ?

Je ne saurais dire pourquoi, mais cette phrase, quoique prononcée avec beaucoup de bonté, n’en gardait pas moins une certaine agressivité. L’homme est plutôt grand car ses cheveux semblent gratter le ciel, il doit être dans la force de l’âge, pensé-je alors que, sans avoir formulé la moindre réponse, il se place en face de moi, prêt.
— Je m’appelle Zelote, me dit-il en amenant sa lame au devant de ses yeux.
— Et moi, Anselme, répliqué-je, plein de ferveur.
— Le bouclier de quoi ? Mon éducation a été avortée.
— Des Dieux, réponds-je en posant un pied devers lui.
Dernière modification par Micum le mar. 19 oct., 2021 9:54 pm, modifié 1 fois.
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Re: L'Aube du Crépuscule - Fantasy

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Rêvé


Serino, penché au-dessus de mon lit. Une odeur de pommes cuites embaume ma chambre. Des couvertures chaudes me collent à la peau comme du sang coagulé. Ce n’était qu’un rêve. Jamais je n’ai rencontré cette délicate fillette, jamais je n’ai retrouvé ma tendre amie, jamais je n’ai tenu l’épée. Jamais.
— Comment te sens-tu Anselme ? me demande Serino.

Son haleine chaude défait une sorte de pellicule de givre qui crispait mon visage.

— Bien, je suppose.

Ça n’a pas l’air de le convaincre. Ses yeux expriment ce qu’il n’ose pas me dire ; pas encore me dire. Tout dans la pièce à l’air figé. Comme si un grand pinceau avait peint ce moment pour qu’il ne se flétrisse. Même le feu dans l’âtre semble de pierre.

— Je voudrais que tu saches, que je t’aime, que je ne te laisserai pas tomber. Quelle que soit ma situation. Tu fais partie des Verfangs. Et un Verfang est honnête homme, digne et loyal.

Je le regarde d’incompréhension. Quelque chose m’échappe. Sa main qu’il pose sur mes jambes…

— Tu es tombé et…le Créateur n’a souhaité te venir en aide, Anselme, m’avoue-t-il alors que l’éclat de ses yeux s’évanouit.

Sur mes jambes roides…



Je

Au temps du jeune âge, voici mon heure
Au brûleur, j’ai dansé,
En rêve du gain, j’ai aimé
A l’hyver de mes ennuis, je meurs.


***


— Serino ? Certains druides honorent-ils des divinités ?
— Certainement, pourquoi cette question ? me demande-t-il en fronçant les sourcils, un plus haut que l’autre.
— Que faut-il pour être divin ?

Même le ronge-lard s’arrête de ronronner dans les bras de Serino. Sur le front de ce dernier, une veine se gonfle, comme pour retenir une pensée de son esprit qu’il n’ose clairement exprimer.

— On ne le décide pas. On naît ainsi.

Sa réponse ne me convient certes pas. Le prédestin n’existe pas, on se le façonne.

— Est-ce par un culte, par un honneur que le divin devient ce qu’il est ?

A ça, Serino s’est refusé tout commentaire.
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