L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

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Perripuce

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Perripuce »

Alors je suis souvent perdu dans ce que j'ai commenté chez toi parce que je les lis toujours une première fois avant d'y revenir mais je suis positivement sûre que j'en étais là.
Et comme j'ai commenté Clem comme ça il n'y aura pas de jaloux !
annabethfan a écrit : lun. 29 mars, 2021 8:02 pm Chapitre 16 : Avoir une main à tenir

« Familles, je vous hais ! disait Gide (qui pourtant en fit une). Disons plus simplement, à deux lettres près : Familles, je vous ai ».

- Hervé Bazin -



// 31 octobre 1979 //

Théa ne savait pas exactement à quoi elle s'attendait lorsqu'elle avait accepté l'invitation de Leonidas. Elle ne voyait pas souvent le cousin de sa mère, ce diplomate bostonien qui passait de temps en temps pour les fêtes, toujours habillé de son costume et de son long manteau marine. Pourtant, il avait toujours fait partie de sa vie. Leonidas était une constance sûre. Il avait toujours été là, même s'il partait souvent pour de longs mois à Boston ou en Angleterre avec sa femme. Lysandra ne s'était en vérité pas bien intégrée chez eux. Pourtant, si Théa avait bien compris, elle venait elle aussi de vieilles lignées sangs-purs et aurait eu toute sa place parmi les Grims, mais c'était peut-être le problème : à être trop semblable, Lysandra n'avait pas réussi à trouver sa place dans la famille jusqu'à s'en isoler. Si Théa en croyait les conversations qu'elle avait surpris derrière les portes closes, c'était Lysandra qui avait refusé la proposition de grand-mère Isadora de vivre au manoir à New York. En même temos elle n'allait pas quitter une famille étouffante pour une autre famille étouffante. Et surtout pas se séparer de l'Angleterre et de sa soeur, non mais. Toujours entre deux continents, l'esprit de liberté et d'indépendance de cette anglaise était mal passé auprès de la matriarche. Théa ne comptait plus non plus les fois où elle avait entendu sa mère critiquer la femme de son cousin. Ce serait bien son style ... Lysandra n'avait apparemment pas quitter un carcan pour en rejoindre un autre et, affront ultime, elle refusait de se fondre dans le moule aristocratique des Grims tout en revendiquant ses racines familiales. Or, toute femme de haute société savait une chose : un mariage était autant une union avec un homme qu'avec sa famille. AH AH. Non. Malgré cela, Leonidas n'avait visiblement rien imposé à sa femme qu'il aimait profondément. Théa en avait au moins la certitude. Ils étaient peut-être le seul couple de son entourage dont elle pouvait dire cela. Le mariage de ses grands-parents avaient été de convenance, même s'ils s'étaient aimés tendrement au fil des ans comme des compagnons de route aux liens profonds C'est beau aussi ce genre d'amour. . Celui de son oncle et de sa tante ne tenait que grâce à leur amour pour leur fils unique alors même qu'ils n'avaient rien en commun. Quant à celui de ses parents, elle préférait ne même pas y penser. Le fiasco du siècle.

Leonidas, lui, était différent. Il l'avait toujours été. Il était le seul adulte qui avait pris la peine de lui parler comme à une égale. Il avait été celui qui lui avait tenu la main le jour de l'enterrement de Théo pendant que tous les autres pleuraient autour d'elle sans se soucier de sa propre douleur. Elle se souvenait trop bien de ce jour-là. Sa mémoire l'avait gravé en elle aussi sûrement que les larmes avaient creusé des sillons invisibles sur ses jouesoigrmbabgaoib. Quelle plume. Quelle déchirure. . Parce que ce jour-là, du haut de ses cinq ans, elle avait compris qu'elle venait de perdre la moitié d'elle-même. Seule la main de Leonidas dans la sienne lui avait permis de ne pas rester prostrée, effrayée à la simple idée de devoir faire face à toutes les personnes présentes tandis qu'on lui demandait de se tenir près du cercueil de son frère.

Aujourd'hui, presque dix ans plus tard, elle n'oubliait pas cette main littéralement tendue. Et c'était sans doute pour cela qu'elle avait accepté sa proposition de retrouvailles autour d'un café chez Hilda. Elle ne s'était juste pas attendue à ne pas être la seule autour de la table.

A côté d'elle, Julian fixait sa tasse de thé profondément. Elle devait avouer qu'elle ne savait pas encore véritablement quoi penser de lui en même temps chérie tu n'as pas forcément pris le temps de le connaitre. . Peut-être que Leonidas avait raison. Depuis qu'il était arrivé, elle n'avait pas cherché à le connaître, ni même à l'accueillir. Parler de sa tante Aurélia l'aiderait sans doute à créer un lien et elle ne voulait pas le priver d'une occasion de parler de sa mère. D'expérience, elle savait que vouloir refaire vivre les morts par les mots pouvait s'avérer la meilleure façon d'aller mieux, comme une façon d'extérioriser l'absence et la peine. Oh c'est beau. Et c'est beau que Thea mette son expérience au service de Djulianne. Décidée, elle tapa un petit coup sur la table pour engager la conversation.

- Parle-nous d'Aurélia, répéta-t-elle avec fermeté en direction de Leonidas. Moi aussi, ça m'intéresse. On ne l'a jamais vu !

- Théa... soupira-t-il. Je disais justement à Julian qu'il valait mieux qu'on parle d'autre...

- Pourquoi ? Coupa-t-elle âprement. C'est toujours la même chose. « Ne pas posez de questions, ça ne vous regarde pas... ». Ça fait des années qu'Archer et moi on voudrait savoir ce qui s'est passé mais personne ne dit rien. (Elle pointa son cousin du doigt). Et je pense que Julian a le droit de savoir des choses sur sa mère. Mais EXACTEMENT si encore Thea ça la regarde qu'à molitié, Djulianne a le droit de savoir. Puis Aurelia est MORTE ce n'est pas pas comme si elle allait lui en vouloir que des informations sortent.

Elle tenta d'avoir l'air sûre d'elle et planta son regard dans celui de Leonidas, le cœur affolé. C'était un pari absurde. Elle n'avait aucune garantie que Leonidas accepte de parler, mais elle sentait que mettre Julian dans la balance était une faille à exploiter. Si elle avait bien compris ce que sa mère lui avait dit avant la rentrée, visiblement contrariée, Aurélia avait fait de lui son parrain et il semblait avoir son rôle à cœur. Ça ne l'étonnait d'ailleurs même pas. Leonidas avait peut-être des défauts, comme celui d'échapper aux réunions de famille et de débarquer à l'improviste seulement lorsqu'il en avait envie, mais il avait toujours eu une certaine connexion avec les enfants. Elle se demandait même pourquoi lui et Lysa n'avaient jamais décidé d'en avoir. Parce que les bébés ce n'est pas leur truc, Leo les préfère plus grand et Lysa pas du tout.

- Ecoutez tous les deux, dit Leonidas, l'air las. Ce n'est pas que je n'ai pas envie d'en parler, d'accord ? C'est juste... Je ne suis pas au courant de tout et je ne suis pas sûr d'être le mieux placé pour vous raconter ces choses-là, c'est tout. Au contraire je trouve très bien placé.

- Qui d'autre ? Objecta-t-elle. Maman ne veut même pas en entendre parler à part pour jeter des piques dès que le nom de tante Aurélia est mentionné. Grand-mère quitte presque la pièce ! Grand-père se mettait à pleurer et oncle Robert se cache derrière son journal.

Leonidas laissa échapper un rire étouffé.

- Beau portrait de famille, commenta-t-il avec ironie. En vrai je trouve oui, bien joué Anna' !

- Peu importe. Leo, s'il te plait !

Elle lui fit sa moue la plus innocente, celle qui faisait toujours craquer grand-père Gerbert Cet homme a l'air d'être un papy gâteau ! il y a longtemps. Même Julian jeta un coup d'œil plein d'espoir à Leonidas et celui-ci finit par soupirer, défait.

- Très bien, très bien, céda-t-il. Si Cordelia ou Isadora me tombent dessus, je vous tiens responsables tous les deux. (Il plongea sa main dans son veston et en ressortit une petite boîte plate en fer gravée d'un petit oiseau). Il va me falloir quelque chose de plus fort qu'un café, cela dit.

D'une main, il ouvrit les battants de la boîte rectangulaire. Plusieurs cigarettes s'alignaient en rangs parfaits et Théa grimaça. Elle avait toujours détesté l'odeur du tabac, mais elle supposa qu'elle pouvait bien faire une exception en extérieur et si ça lui permettait d'obtenir ses réponses. Leonidas en piocha une et la porta à sa bouche avant de l'allumer d'un coup de baguette.

- Bon, voyons, marmonna-t-il. Par où est-ce que je commence... Tu ne veux rien commander, Théa ?

- Non, ça ira.

Il n'allait pas se dérober aussi facilement. Bien vu ma petite Thea. DES REPONSES DES REPONSES !

- Bien... Hum... J'imagine que ce qui vous intéresse, c'est le départ d'Aurélia ?

- Oui, souffla Julian avant qu'elle ne confirme. Elle n'a jamais voulu en parler. Elle disait juste qu'il fallait être fou pour ne pas préférer l'Angleterre à l'Amérique et qu'elle ne repartirait pour rien au monde...

Théa se retint de rouler des yeux Rouler des yeux c'est tellement associé à toi Marion . Elle ne savait même si Julian s'en rendait compte, mais il laissait filtrer à travers son ton un patriotisme flagrant, même s'il ne faisait que répéter les paroles de sa mère.

- Elle aimait sincèrement l'Angleterre, Londres particulièrement, admit Leonidas. C'était une fille de la ville. Nous avons tous été élevés à New York, je pense que ça marque. Non puis quand on est historienne, Londres a carrément plus de charme et plus d'attrait que NY. Quand on se revoyait encore un peu à Londres, avant ta naissance, on faisait de longues balades juste pour sentir l'agitation de la ville. Lysa n'a jamais bien compris, elle vient du Gloucestershire.

- Où ? Dit-elle.

- Au nord-est de Londres, lui indiqua Julian. Après Oxford, au-dessus de Bristol. Yes, ma zone, entre la forêt de Dean et le canal de Bristol oui oui

Elle hocha la tête mécaniquement sans être plus avancée. Sa géographie anglaise présentait des lacunes. En même temps il y a déjà à faire avec la géographie américaine.

- Peu importe, je m'éloigne... Pour que vous compreniez, je pense qu'il faut que revienne à bien avant le départ d'Aurélia. Peut-être même sa rentrée à Ilvermorny. J'ai toujours pensé qu'elle avait changé après cela. Nous n'avions qu'un an d'écart, mais cette fameuse année où elle est enfin partie au château pendant que je restais à New York a été un tournant.

- Pourquoi ?

- Parce qu'elle s'est révélée, dit Leonidas d'une voix profonde. Je suppose que ne plus être sous l'œil acéré de sa mère a été une libération. Plus d'injonction à être la parfaite petite fille de bonne famille, elle a découvert le vrai monde en dehors des soirées mondaines. Et quelle libération ça devait être je la comprends parfaitement. D'autres cultures, d'autres gens, d'autres ouvertures d'esprit ...

Il tira une bouffée de sa cigarette.

- Je sais que vous avez peut-être du mal à vous l'imaginer, mais le manoir n'a pas toujours aussi été si sombre et... comment dire...

- Reclus ? Proposa Théa.

- Si tu veux, oui, en un sens. A l'époque, Isadora organisait des soirées, des bals, des brunch... Je ne sais pas mais les brunchs devaient être moins bon que le nôtre. Que sais-je encore ? Il y avait toujours des gens. La fine fleur de l'élite sorcière se pressait pour discuter, échanger des ragots, parler de politique. Je n'étais qu'un gamin, mais avec Robert, Cordelia et Aurélia, on aimait se mettre en haut des escaliers pour écouter ou se moquer des invités. En tant que petit dernier, j'étais celui qu'on désignait pour les « missions cuisine ». Ah c'est pour ça que j'ai l'impression de l'avoir commenté, j'ai commenté sur Wattpad. Black vibes.

- Les quoi ? Fit Julian, amusé.

- Les « missions cuisine ». Je devais descendre jusqu'en cuisine et récupérer à manger pour tout le monde et remonter sans me faire prendre.

Théa sourit. Elle imagina un petit Leonidas, les bras chargés de toast et de bouts de pain, en train de slalomer entre les invités en essayant d'échapper à la surveillance de grand-mère Isadora. J'imagine très bien aussi :lol: :lol: ça ferait un bon début de film sur Ilvermorny d'ailleurs : Leonidas qui se faufile jusqu'aux grands puis focus sur les grands pour appréhender les Grims pour BOOM avancée et début de l'histoire. Voilà, embauchez-moi.

- J'étais un piètre espion, les informa-t-il après quelques secondes. Ma mère me repérait toujours et j'avais le droit à des sermons longs et ennuyeux.

Il fit un vague geste avec sa cigarette, comme s'il chassait le souvenir de sa mère.

- Tout ça pour dire qu'Ilvermorny a fait découvrir autre chose à Aurélia. Elle s'est fait des amis d'autres horizons, de tous les statuts de sang... Elle a appris à voir le monde sous un autre angle. Yeaaah Si mes souvenirs sont bons, elle s'était même engagée dans le comité des élèves Enjolras a donc un maître. . Isadora avait manqué la crise cardiaque quand la direction a envoyé une lettre pour prévenir qu'Aurélia avait participé à une espèce de manifestation organisée par les Serpents Cornus pour protester contre le fait que les filles ne pouvaient pas faire partie des équipes de Quodpot. MAIS ELLE A GRAVE RAISON Ma mère en parle encore ! Apparemment, elle aura jeté la lettre au feu en jurant pour la première fois devant témoin. Oh. My. GoD.

Théa sentit ses sourcils s'envoler en imaginant la scène. Elle ne savait même pas que les filles ne pouvaient pas jouer au Quodpot à l'époque. S'ils avaient pu voir des joueuses comme Elicia Jauncey ou Winona Qaletaga, les hommes n'auraient pas hésité longtemps Ou si ils auraient encore plus hésité : quel macho veut se faire battre par une fille? . Avec amusement, elle tenta d'imaginer sa tante Aurélia dans le rôle d'un Enjolras engagé. Julian devait aussi penser la même chose car il émit un bruit de gorge surpris Oui alors pour moi le bruit de gorge c'est carrément dans un autre contexte qui implique plus Noah que Thea , puis il fit tourner sa tasse de thé entre ses mains. Sa peau était marquée de traces noires et Théa mit une seconde à comprendre qu'il s'agissait de fusain.

- Ma mère était aussi à Serpent Cornu ? Dit-il, une touche d'impatience dans la voix. "Un lien avec elle pitié !"

Elle ressentit un élan de pitié envers lui. C'était évident que ça faisait un moment qu'il voulait parler de sa mère, savoir des choses sur elle, et elle se demanda pourquoi personne n'avait pris la peine d'en discuter avec lui et Charlotte avant la rentrée lorsqu'ils étaient tous à New York. Hum hum. Dont toi ma petite Thea?

- Oui, confirma Leonidas en souriant. Une intellectuelle, Aurélia. Elle l'a toujours été. Mais une intellectuelle convaincue avec plein d'idées. Elle voulait comprendre le monde pour le changer je crois Et c'est là qu'on voit quand même un côté Charlotte chez elle ... Ce côté rentre dedans, aventureux que pour le coup Julian n'a pas vraiment. . C'est comme ça que je la voyais en tout cas. Elle a été la seule de nous tous à prendre une voie complètement inattendue.

- La recherche historique ? C'était inattendu ?

- Bien sûr ! Il faut se replacer dans le contexte. Elle a eu son diplôme en 1952. Crois-moi, pour les Grims, la seule chose qu'elle pouvait faire c'était commencer à se chercher un bon parti, même quelqu'un qu'elle aimait, et se marier. (Il fit tomber la cendre par terre dans un mouvement nonchalant et Théa suivit des yeux cette pluie grise de particules). Certaines femmes pouvaient travailler, mais ce n'était pas encore complètement démocratisé.

- Ça ne l'est toujours pas, intervint-elle. Elle se sent concernée par la quesiton la petite Thea.

- Non, c'est vrai, reconnut Leonidas. Une idiotie, si tu veux mon avis. Il n'y a qu'à voir comment Isadora tient les comptes de la famille. Aussi douée que son fils pour la finance, Robert n'a rien appris seul même s'il aime prétendre le contraire Ce genre de petite phrases qui caractérisent parfaitement un personnage qu'on n'a même pas vu ! . (Il sembla se retenir de rouler des yeux avant de reprendre). Enfin, Aurélia ne s'est pas laissée faire. Elle voulait faire de l'Histoire, elle aimait vraiment ça. Ça même été une des premières sources de conflit dans la famille en plus de...

La voix de Leonidas déclina jusqu'à s'éteindre et il hésita. Ça y est. Il y venait enfin. ENFIN OUI TU PEUX LE DIRE Avide, Théa se pencha en avant, presque provocatrice, et le fixa intensément pour le pousser à poursuivre. A côté d'elle, Julian regardait son parrain sous ses longs cils. Malgré son expression neutre, il renvoyait la même avidité. Leonidas soupira à nouveau.

- Bien, vous voulez que je le dise ? TOUT. ON VEUT DES DETAILS, ON VEUT L'HISTOIRE DIS NOUS TOUT LEOOO Elle ne s'entendait pas avec ton père, Théa. Elle ne s'entendait plus non plus avec Cordelia donc. Il faut dire qu'à l'époque, ils ne formaient qu'un. S'il pensait quelque chose, Cordelia aussi. C'était agaçant. Non mais franchement les pires couples

- Et ils n'approuvaient pas le fait que tante Aurélia voulait faire de la recherche historique ?

- C'est ce que j'ai compris. J'avais dû mal à suivre. La première année après qu'elle ait eu son diplôme, j'étais encore à Ilvermorny et je ne rentrais que pour les vacances. Tes parents étaient tout juste fiancés après plus de trois ans de relation. Les tensions étaient déjà présentes, je m'en rendais bien compte. Un jour, pendant les vacances de noël, Cordelia et Aurelia se sont disputées tellement fort que Cordelia est partie en claquant la porte. Elle n'est revenue qu'à trois heures du matin, ce qui était très scandaleux pour elle, croyez-moi. La façon dont il dit "scandaleux" je me retrouve un peu projetée dans les chroniques des Bridgeton Robert et moi on n'en revenait pas.

- Ma mère a fait ça ? S'étonna Théa.

Leonidas lâcha un rire sans joie.

- Oh, crois-moi : il n'y a rien de pire que deux sœurs qui ont décidé d'être ennemies un jour après avoir été si proches. C'est une vérité propre à toutes les familles. Oh ...

Théa fronça les sourcils. Elle avait l'impression qu'il parlait d'une réalité bien plus large que sa mère et sa tante. Avec un temps de retard, elle crut se rappeler que Lysandra avait peut-être bien une sœur, mais elle ne demanda pas. Ce n'était pas Lysandra qui l'intéressait aujourd'hui.

- Parce qu'elles l'étaient ? Dit-elle. Proches, je veux dire ? Ma mère et tante Aurélia ?

- Oh oui. Petites, elles l'étaient. Elles n'avaient que deux ans d'écart, elles étaient les deux seules filles parmi nous et avant Ilvermorny elles se ressemblaient beaucoup. Elles aimaient jouer ensemble pendant des heures au thé, à la poupée, que sais-je encore... Quand je venais les week-end leur rendre visite, elles me mettaient des rubans dans les cheveux. Ça les faisait beaucoup rire. Je meurs, c'est si classique mais c'est si drôle :lol: :lol:

En écho, elle éclata de rire en même temps que Julian.

- C'est ça, moquez-vous...

Leur hilarité redoubla face à l'expression résignée de Leonidas. Plié en deux, Julian repoussa sa tasse de thé vide pour ne pas la heurter dans son hilarité et Théa se couvrit le visage des mains pour essayer de reprendre contenance.

- Dis-moi... commença Julian, apparemment incapable de se réprimer. Ils étaient roses, les rubans ? Les enfants, vous le laissez vous distraire. Vous ne comprenez pas qu'il fait ça pour vous éloigner du sujet principal? Pff, amateurs.

Théa pouffa de plus belle.

- Tu sais que je peux encore te renvoyer en Angleterre, pas vrai ? Menaça faussement Leonidas. Ou résigner mon rôle de parrain ?

- Je ne crois pas que ça marche comme un abonnement à un journal, se moqua Julian. :lol: :lol: :lol:

Il tenta de cacher son rictus dans son écharpe bleue et bronze ridicule Je meurs, il a carrément mis son écharpe de Serdaigle, quel petit provocateur notre Djulianne. , sans succès, et Théa regretta soudain de ne pas avoir commandé au moins un verre d'eau pour se calmer.

- Vous avez fini ? Je peux continuer ? Dit Leonidas, l'air amusé. C'est vous qui vouliez des réponses.

- Désolée, articula-t-elle. Vas-y. Tante Aurélia était proche de maman... Franchement vous avez de la chance que ce soit un sucre Leo.

- C'est ça. Cordelia et elle s'entendaient bien jusqu'à Ilvermorny parce que comme je le disais Aurélia a commencé à avoir d'autres idées, elle a grandi, s'est construite sa propre personnalité. Pour la première fois, elles ne fréquentaient plus les mêmes personnes ni les mêmes cercles. C'est aussi à ce moment que je me suis éloigné de Cordelia.

- Parce que tu prenais le parti de ma mère ?

- Oui, on peut dire ça. Elle ne me pardonnait pas de choisir son « camp ». Pour moi, il n'y avait pas de doutes. Aurélia et moi, on avait juste toujours été plus proches. S'il fallait en choisir une, je... (il parut soudain ému, chose si rare que Théa mit une seconde à déchiffrer son expression et elle eut l'impression d'assister à quelque chose d'intime). Disons que je n'avais pas à hésiter. Et c'est là que je me rends compte que Leonidas aussi a perdu Aurelia. Presque sa soeur. Et qu'il doit souffrir affreusement. Mon pauvre petit Leonidas.

- Donc tante Aurélia s'est révélée à Ilvermorny, elle a voulu s'émanciper après ses études, et ensuite ? Comment elle en est venue à juste... claquer la porte ? Insista Théa, impatiente.

Leonidas se passa une main sur sa mâchoire carrée, pensif.

- Comment expliquer ? De ce que je percevais et de ce qu'Aurélia me rapportait, c'était comme une guerre civile chez elle. Tout le monde y allait de son commentaire ou avait un avis sur ce qu'elle était en train de faire de sa vie. Son père l'encourageait à poursuivre ses rêves tout en réfléchissant bien à sa réputation, sa mère voulait qu'elle arrête avec ses grandes idées sur la recherche historique et se marie, sa sœur lui reprochait de ne pas aimer son fiancé... C'était épuisant pour elle. Et je pense que le pire c'était justement avec lui.

Une boule se glissa dans la gorge de Théa. Naïvement, elle espérait que son père reste en dehors de la conversation de la même façon qu'il était resté en dehors de sa vie. Sans pouvoir s'en empêcher, elle glissa un regard vers Julian. Son cousin attendait la suite, neutre, et elle comprit soudain qu'il ne savait pas.

- Avec le fiancé de tante Cordelia ? Répéta-t-il, perplexe avant de se tourner vers elle. C'était qui ? Ton père ?

- Oui...

- Celui qui n'apparaît pas dans Les Chroniques des Grims ? Avec le nom en tâche d'encre ? perspicace notre petit Djulianne.

Son ventre se tordit violemment. Brusquement, elle se sentit incapable de lui expliquer. Elle n'avait d'ailleurs jamais eu à le faire : les gens savaient juste. Qui aurait pu l'ignorer ? Son emprisonnement avait été un scandale à l'époque dans la communauté sorcière, tout comme la demande de divorce de sa mère qui avait été retirée en quelques jours sous la pression. Pourtant, Julian n'avait aucune idée de tout cela. A un océan d'écart, il avait grandi sans sentir les regards des autres peser sur lui.

- C'est bien lui, confirma Leonidas en sentant sa détresse. Nous n'aimons pas beaucoup en parler.

- Pourquoi ?

- Parce que c'était un connard, claqua-t-elle. BAM BAM BAM

- Théa !

Le regard de Leonidas se fit soudain plus dur et Julian haussa un sourcil, déstabilisé. Elle tenta de se concentrer sur sa respiration, soudain erratique, et inspira profondément pour se calmer. Elle n'aurait jamais osé utiliser ce mot devant sa mère ou sa grand-mère, mais il lui avait échappé. Et c'était étrangement satisfaisant.

- Désolée, marmonna-t-elle.

- Tout ce que tu as à savoir, Julian, reprit Leonidas, c'est que le père de Théa n'était pas quelqu'un de bien. Mais on peut pas lui expliquer ce qui s'est passé? Puisque tout le monde sait, pourquoi Djulianne ne pourrait pas savoir? Disons que nous nous en sommes rendu compte trop tard, bien après la naissance des jumeaux.

A la mention de Théo, elle baissa les yeux et Julian eut un tic nerveux. Du bout des doigts, elle toucha le ruban rouge à son poignet droit. La sensation familière de la soie effilochée contre sa peau l'apaisa. Depuis le début je me dis qu'il est là pour ça le ruban. ça me rappelle des films ou séries avec des traumas qui ont des bracelets qu'ils vont claquer dès qu'ils angoissent, pour s'arrimer à la réalité.

- A la différence de nous tous, Aurélia ne l'a jamais aimé. Les premières années, ça allait encore. Il n'était que le copain plus âgé de Cordelia hors d'Ilvermorny et Aurélia s'inquiétait seulement un peu de voir sa sœur si... éprise. Elle le trouvait pourtant intelligent et charismatique, ce qu'il était. Il était très cultivé en histoire et ils ont trouvé un point d'entente sur cela. Inutile de dire que ça n'a pas duré longtemps. Je ne sais pas trop ce qui s'est passé, mais la tension entre eux est devenue bien plus forte.

Dans sa tête, Théa imagina sa tante Aurélia telle qu'elle apparaissait sur certaines photos – jeune, blonde et sûre d'elle – en train de crier par-dessus son épaule et de claquer la porte sans se retourner. Leonidas confirma sa vision en poursuivant :

- Entre ça et la pression de ses parents, Aurélia a décidé de partir le plus loin possible. A l'autre bout du pays, littéralement. Elle est restée deux ans en Californie. J'avais obtenu mon diplôme entre temps et je venais de rentrer à l'Ambassade au service anglais. Et puis, un soir de mai...

- Quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

- Je ne pourrais pas dire exactement. Elle était rentrée pour le week-end à New York pour fêter l'anniversaire de son frère. Je n'avais pas pu me libérer à cause de réunions importantes, mais je devais passer au manoir apporter mon cadeau à Robert avec un peu de retard. J'allais partir quand Aurélia est arrivée chez moi. Elle avait l'air... paniqué. Je n'ai pas d'autre mot. Je comprenais à peine ce qu'elle me disait, elle criait qu'elle les détestait tous les deux, qu'ils étaient des hypocrites... Le pauvre Leo qui n'a absolument dû rien comprendre de ce qu'elle lui disait ... Qui a tout fait sans savoir. Si ce n'est pas de la loyauté ...

- Elle parlait de mes parents... ? Souffla Théa.

Son mal de ventre s'accentua quand Leonidas hocha la tête.

- Elle venait de se disputer avec eux, dit-il. Je n'ai jamais su ce qui s'était passé exactement, mais elle avait... (il hésita puis porta sa main à sa gorge dans un geste de réminiscence) des marques rouges autour du cou. Elle m'a demandé de la faire sortir du pays. Je ne comprenais rien, j'ai essayé de la raisonner, mais elle me répétait que ça faisait un moment qu'elle y pensait et que ses affaires étaient prêtes. Je ne pouvais rien lui refuser. Ce n'est pas que de la loyauté, c'est aussi de l'amour.
C'est beau, je trouve cette relation entre Aurelia et Leonidas très belle.
On est parti tous les deux à l'Ambassade et j'ai demandé à deux de mes collègues en qui j'avais confiance de me couvrir pendant que je lui faisais un visa en accéléré complètement illégal. Si quelqu'un avait pris la peine d'y regarder d'un peu plus près, ma carrière était finie avant d'avoir commencé.

- Et ça a fonctionné ? Elle a pu... partir ? Comme ça ?

Théa entendit son étonnement dans son propre ton. Elle ne s'était pas attendue à une fuite si précipitée. Elle avait toujours imaginé que sa tante était partie après des semaines de préparation contre l'avis de toute la famille et que tout le monde avait tenté de la retenir. Visiblement, personne n'en n'avait eu l'occasion.

A ses côtés, Julian n'en menait pas large non plus. Il serrait désormais sa tasse vide comme s'il s'accrochait à elle et Théa eut peur une seconde qu'elle ne se brise entre ses mains. Elle se demanda ce qu'il pouvait bien ressentir à écouter le récit de la fugue de sa mère, le cou meurtri de plaques rouges.A la revoir vivante dans son imaginaire alors que maintenant bah ...

- Je ne comprends pas... s'étrangla-t-il. Qu'est-ce qu'elle fuyait ? Et pourquoi tu as pris des risques comme ça pour l'aider ?

- Je ne peux pas répondre à ta première question, Julian, avoua Leonidas. Je ne le saurais peut-être jamais et Cordelia refuse d'en parler à quiconque. Pour ce qui est de la deuxième, ce n'est pas bien compliqué... Aurélia avait l'air si sûre d'elle. C'est sans doute idiot, mais ce jour-là, j'avais l'impression que si je ne l'aidais pas à quitter les Etats-Unis, je la condamnais.

Le poids des paroles de Leonidas resta suspendu dans l'air. Théa ne put s'empêcher de se demander si elle avait craint pour sa vie à cause de son père. Elle connaissait ses prises de position, mais elle n'avait jamais entendu dire qu'il était violent. De tous les commentaires des membres de la famille qui avaient été laissés échapper au fil des années, rien ne l'avait suggéré. Il n'avait jamais été dangereux dans ce sens-là. Et c'est assez paradoxal. Ou peut-être qu'on le lui a caché?

- Toujours est-il qu'Aurélia a réussi à partir en Angleterre. Dans les semaines qui ont suivi, j'ai régularisé ses papiers et son visa dans les formes. Toute la famille m'est aussi tombée dessus pour m'ordonner de la ramener, sans succès. Elle s'est installée à Londres et a coupé les ponts. J'étais le seul qu'elle voulait bien voir encore, même si je savais que ses parents lui manquaient. Et puis quelques années plus tard, elle a rencontré Ethan. (Leonidas désigna Julian). Tu es arrivé, puis ta sœur. Aurélia a arrêté de me parler et de me voir aussi. J'étais occupé, j'avais Lysa... Je n'ai pas fait les efforts que j'aurais dû pour maintenir le lien. Oh mais non ce n'est pas de ta faute ...

A nouveau, il regarda au loin. Des accents de regrets étaient perceptibles dans sa voix, même si Théa lui trouvait un air apaisé, comme s'il racontait l'histoire après des nuits entières à se l'être lui-même repassée jusqu'à en être apaisé avec le temps. Aujourd'hui, pourtant, l'histoire devait raisonner autrement pour lui. Elle savait ce que c'était de vivre avec un fantôme coincé dans la tête C'est beau et déchirant comme expression. . C'était peut-être précisément parce qu'elle le savait qu'elle remarqua les yeux humides de Julian. Mal à l'aise, elle s'éclaircit la gorge pour rompre la tension.

- J'avoue que je ne m'attendais pas à tout ça, dit-elle. A toute cette histoire...

- Crois-moi, même en l'ayant vécu, je ne m'y attendais pas non plus et j'ai encore du mal à comprendre aujourd'hui, dit Leonidas, laconique. Mais en vrai. Lui aussi ça doit le bouffer, il doit en crever de pas avoir compris, de ne pas savoir tous les tenants et les aboutissants.

Il porta sa main à son veston et en sortit sa montre à gousset, celle sans laquelle Théa ne l'avait jamais vu.

- L'heure tourne... Vous devriez commencer à retourner au château. Profitez du bal.

Julian releva la tête et fronça les sourcils.

- Quoi ? Quel bal ?

- Oh... Personne ne t'a prévenu de ce qui passe à Ilvermorny le soir d'Halloween ?

- Non...

Il avait l'air soudain anxieux. Théa se retint d'éclater de rire alors qu'elle croisa le regard de Leonidas. Ils savaient tous les deux très bien ce que Julian avait en tête : un bal mondain de lycéens avec robes et capes sorcières, musique et danse. "mettez votre main sur ma taille - votre QUOI?!" Elle aurait aimé faire durer son angoisse encore un peu, histoire de rire, mais Leonidas – toujours cavalier – se chargea de lui expliquer :

- On l'appelle le bal, mais ce n'en est pas vraiment un. Je ne voudrais pas te gâcher la surprise ceci dit...

- Ne dit rien ! L'enjoignit-t-elle. Tu verras par toi-même, je te jure que ça vaut le coup.

Julian la considéra, sceptique.

- Mais si c'est un bal...

- Pas ce genre de bal. Si ça peut te rassurer, on l'appelle en réalité le bal des fantômes Et ça rend la chose hyper rassurante. J'ai en tête l'anniversaire de Nick quasi sans tête. . Il a lieu chaque année le 31 octobre.

- Des fantômes... Mais j'en ai pas vu à Ilvermorny... Tiens. It's true.

- Oh, tu vas les voir, assura Leonidas avec un sourire amusé. Bon allez, les jeunes ! Filez ! Tu me diras ce que tu as pensé du bal dans ta prochaine lettre, ajouta-t-il en direction de Julian. Et je te tiens au courant pour ton père, promis. Quant à toi, Théa, si tu as un message pour ta mère...

- Aucun, assura-t-elle.

Elle eut conscience d'avoir mis un peu trop de mordant dans son ton et elle soutint le regard de Leonidas qui se contenta de soupirer sans insister. Elle savait qu'il aurait aimé une autre réponse, mais elle était incapable de lui donner. Ça faisait longtemps que la parole avec sa mère était rompue. A bien y penser, elle s'était même sans doute rompue au moment où le cercueil de Théo s'était enfoncé dans le sol pendant qu'elle-même serrait la main de Leonidas dans la sienne Oh cette image. Oh pauvre Thea. . Peut-être que si elle n'avait pas tenue cette main, elle aurait sombré dans ce trou noir sans fond elle aussi... Peut-être qu'elle aurait été enterrée sans que personne ne la retienne ni ne se soucie qu'elle soit toujours là. Pourtant, Leonidas s'en était soucié et avait été son ancre, la corde qui l'avait empêché de s'enfoncer avec la boîte mortuaire. Roh la la mais quelle plume Marion. Comme toujours.

Quelque chose tira dans sa poitrine, une sorte de douleur douce-amère et elle amorça un geste pour se lever. Les mots se bousculèrent contre ses lèvres.

- Merci pour tout, Leo, souffla-t-elle. Je suis contente d'être venue aujourd'hui.

- Avec plaisir. N'oublis pas, tu peux m'envoyer une lettre quand tu veux. Pour n'importe quoi.

- Je sais...

La sensation du ruban rouge à son poignet se rappela soudain contre sa peau et elle fit mine de l'ignorer. Julian se leva à son tour. Il paraissait un peu pâle sous le soleil automnale. Ils devaient offrir un triste spectacle, tous les deux, pourtant Leonidas leur adressa un sourire confiant.

- Bon retour à tous les deux. On se revoit à noël, mais si vous voulez prendre un café comme celui-ci un week-end de sortie, vous savez où me trouver. Boston et le Village ne sont pas loin dès qu'on peut transplaner. (Il ramassa son journal, abandonné au coin de la table). Et passez le bonjour pour moi à Archer et Charly.

- Promis... Embrasse Lysa pour nous.

- Je n'y manquerai pas.

De loin, il fit signe à Hilda, la patronne, et sortit quelques pièces de sa poche. Julian n'eut même pas le temps de protester.

- Je payes, ne t'en fais pas, dit Leonidas.

- Mais...

- C'est juste un thé, laisse-moi faire ça pour toi.

- Comme nos frais de scolarité ? Tiens j'ai relu ce passage récemment.

Théa n'avait aucune idée de ce dont il parlait, mais Leonidas parut comprendre car il eut l'air embarrassé et il se passa la main sur sa mâchoire. Julian le regarda d'un air entendu.

- Ah... J'espérais que...

- Que je n'apprenne pas que les élèves étrangers payent une taxe pour étudier à Ilvermorny ?

- Sérieusement ? Fit Théa. Et ouii. Allez, organisez une grande manifestation contre ça ! Noah pourrait faire des caricatures et Julian des pancartes et ils pourront faire une bataille de peinture et ... OH come on Anna', tu sais qu'il y a du potentiel dans cette idée !

- Aileen me l'a dit, confirma son cousin. Ceux qui viennent du Canada, du Mexique, de Cuba... Ils payent des frais de scolarité en plus. Je crois que Enjolras veut protester contre. OUI GRANDE MANIFESTATION

- Etonnant.

Elle croisa le regard de Julian et elle y lut la même chose qu'elle pensait : « contre quoi Enjolras ne protestait pas ? ».

- Sauf que j'ai signé la plupart des papiers moi-même et je n'ai jamais vu celui de la taxe ? reprit Julian. Je me suis dis que Isadora avait dû s'en occuper, mais c'était toi, pas vrai ?

- C'est bien possible, admit Leonidas. Mais ce n'était pas grand-chose, c'était juste une facilité administrative.

- Attends, tu signes les papiers de l'école toi-même ? S'étonna Théa. Appuyer sur les choses qui fâchent, fait ...

Julian se raidit et il sembla déstabilisé sur le coup, comme s'il venait de se rendre compte de ses paroles. Sa réaction l'intrigua d'autant plus. Avant la rentrée, elle avait bien compris que le père de Julian et Charly était un peu... spécial. Il quittait rarement sa chambre, travaillait beaucoup sur ses recherches, et même lorsqu'il était présent aux dîners, il paraissait absent. Elle avait entendu grand-mère en parler et dire que la mort de sa femme l'avait plus ébranlé qu'elle ne l'avait cru. Théa commençait à comprendre ce qu'elle avait voulu dire par là.

Le silence commençait à devenir gênant et Leonidas sauva Julian en refermant sa veste et en se râclant la gorge pour clore la discussion.

- Assez tergiversé, dit-il, je payes et vous repartez à l'école. Allez, les jeunes !

- Tu sais que plus tu nous appelles « les jeunes » plus tu fais vieux ? Lança Théa, amusée. J'ai un rire nerveux. Je me sens incroyablement vieille. Ah la la je vais pas être bien demain.

Pour toute réponse, Leonidas fit miner de lever son journal, offensé, pour lui donner un coup et Théa recula en riant. Julian la suivit dans un éclat de rire. Tous les deux, ils adressèrent un dernier signe de la main à Leonidas, puis s'engouffrèrent dans la rue principale sous l'œil de Hilda Douzebranches qui semblait vérifier qu'ils ne partaient pas sans payer. Ce regard suspicieux c'est pas hyper engageant.

Avec l'impression d'être plus légère qu'en début d'après-midi, Théa offrit son visage aux rayons du soleil. Elle n'avait pas menti : voir Leo lui avait fait du bien. C'était un peu comme retrouver un bout de la maison, mais un bout positif, loin de la tension avec sa mère et de la bienséance imposée par sa grand-mère. Oh c'est mignon dit comme ça. Et c'est cool de voir Thea détendue et pas amère et sur la défensive.

- Leo m'avait manqué, dit-elle à Julian pour lancer la conversation entre eux. Je suis contente de l'avoir vu mais... je suis désolée si j'ai interrompu le moment que tu devais passer avec lui... Je ne voulais pas...

- Non, t'inquiète pas... Je crois qu'il avait prévu ça comme ça. Pour qu'on se parle enfin.

Théa grimaça.

- Ouais... Désolée pour ça. Je ne savais pas bien quoi vous dire à Charly et toi, je pense. Pour le coup c'est une excuse qui s'entend. C'est toujours difficile, surtout vu les circonstances.

- Ah ? Pourtant, j'ai trouvé que « bienvenue dans la famille la plus dysfonctionnelle d'Amérique » était une bonne entrée en matière, se moqua-t-il.

- Eh ! J'étais très fière de cette phrase, protesta-t-elle. En plus, c'était vrai, non ? Je vous ai mis en garde d'une certaine façon.

Julian haussa les épaules, le bas de son visage enfouit dans son écharpe de Poudlard.

- Je ne pense pas que les Grims soient pire que d'autres. Toutes les familles sont dysfonctionnelles, non ? En un sens ... Oui. Y'a toujours un grain de sable quelque part.

- Attends de vivre avec eux plus longtemps...

- Honnêtement, je m'attendais à pire d'Isadora par exemple. Tu sais... Dans le genre vieille matriarche de famille sang-pur un peu vieux jeux. (Théa hocha la tête). Alors qu'en fait... Je penses qu'elle appartient seulement à une autre génération et qu'elle est juste heureuse que sa famille se retrouve après toutes ces années, même si elle ne sait pas très bien l'exprimer.

- Je vois ce que tu veux dire, dit-elle. Grand-mère n'est sûrement pas la pire. Mais n'empêche que tu n'as jamais vu oncle Robert et tante Dilysa parce qu'ils étaient trop occupés à gérer leurs affaires pour venir vous accueillir. Ils ne sont même pas revenus pour le dernier départ d'Archer à Ilvermorny. Yeah, that's hurting

- Tu vois, au moins ta mère était là, elle.

Théa soupira. Rationnellement, Julian avait raison, mais elle avait du mal à voir la présence de sa mère comme quelque chose de positif. Mais ce n'est pas complétement faux ... Elle était là. Elle pourrait être indifférente mais elle était là. Tant de nuance Anna', c'est extraordinaire. Elle n'avait pas vraiment eu le choix après tout... Ce n'est pas comme si elle pouvait être ailleurs, coincée depuis des années dans ce manoir sans travailler ni vie personnelle.

Perdue dans ses pensées, elle faillit rentrer dans quelqu'un et se décala au dernier moment. Julian fit un pas de côté sur la gauche. A cette heure-ci, ils n'étaient pas les seuls à faire le trajet inverse pour rentrer à Ilvermorny et plusieurs élèves encombraient le chemin. Des chuchotements enthousiastes pour le bal des fantômes lui revinrent aux oreilles. Julian dut les entendre aussi car il redressa la tête, intéressé.

- Tu vas me dire ce que c'est, ce bal ? Demanda-t-il. Non, elle veut te voir flipper.

- En vrai, c'est juste une coutume de l'école... Othilia est plus calée en histoire que moi, elle pourra sans doute t'expliquer. Je me demande où elle est... Quelque part dans un recoin en train d'embrasser Noah.

Sur la pointe des pieds, elle tendit le cou pour essayer de la trouver dans la foule, mais elle ne repéra aucun carré blond parmi les têtes autour d'elle.

- Je crois qu'elle était avec Noah, indiqua Julian, tête baissée. hihihihi

- Quand est-ce qu'elle ne l'est pas...

- Hilda a dit la même chose.

Théa fronça le nez.

- Rah, ne me compare pas à Hilda, s'indigna-t-elle.

- Pourquoi ? Tu ne l'aimes pas ?

- Ses cafés sont à tomber par terre, concéda-t-elle, mais alors ne la contrarie jamais. A côté, ma mère est un modèle de chaleur et de patience.

- A ce point ? exactly my reaction

En voyant que Julian avait l'air sincèrement intéressé, elle se décida à raconter et fit remonter ses souvenirs d'il y a quelques années.

- Comment t'expliquer ? Se demanda-t-elle à voix haute. Hilda est quelqu'un... d'intransigeant. Elle a des exigences et elle le fait savoir. D'une certaine façon, elle est courageuse. Les Douzebranches ont une réputation sur le dos évidemment et en tant que femme, elle n'était pas promise à un grand avenir. Elle a décidé qu'elle y arriverait au mérite. Elle ne s'est jamais mariée, elle a racheté les Deux Souafles avec le peu d'économie qu'elle avait contre l'avis de ses parents et elle a aidé toute sa famille. Elle a un sens des affaires incroyable. Ce n'est pas sa sœur en somme... J'aime beaucoup son portrait mais je vois parfaitement quelle genre de femme ça peut être. Le genre qui met le travail et l'ambition au dessus de tout. Du genre à ne pas comprendre les "gribouillis" de Noah.

- Pourquoi ? Qu'est-ce qu'elle a sa sœur ?

Théa ralentit et manqua de s'arrêter, surprise. C'étaient dans ces moments-là qu'elle oubliait que Julian ne savait pas ce que toute la communauté sorcière savait en général. Il dut surprendre son regard et l'interpréter pour du jugement car ses épaules se raidirent.

- Désolé de ne pas savoir, dit-il, presque amer. Mais les Etats-Unis ne sont pas le centre du monde, je ne connais pas l'histoire de chaque famille. Si je te parle des Black, tu connais chaque anecdote peut-être ? Evidemment il faut qu'on parle des Black !

- Eh, te braque pas ! S'hérissa-t-elle. Je n'ai rien dit !

Un court silence s'étira entre eux, puis Julian se détendit. Il fit un vague geste de la main qu'elle interpréta comme une excuse et elle continua :

- La sœur d'Hilda, Heather, est son opposé. Je ne l'ai vu qu'une seule fois et crois-moi je m'en souviens encore aujourd'hui. Elle accompagnait Noah pour sa rentrée. Imagine une femme qui ressemble à Hilda, mais une Hilda qui aurait fait la fête jusqu'à 3h du matin et qui serait coincée dans sa période adolescente. OK l'image que j'ai est carrément pitoyable.

- Ah...

- C'était assez étrange. Mais bref, pour en revenir à Hilda elle-même, elle plaque un peu les exigences qu'elle s'est imposée sur ses neveux. Elle veut qu'ils soient bien élevés, doués en cours, obéissants... Pour Raphaël, ça va. Pour Noah, c'est plus compliqué. Et elle n'aime pas trop Othilia pour ça aussi, elle pense qu'elle distrait Noah. Si elle savait qu'elle est sûrement une des élèves les plus sérieuses de l'école... C'est ce que j'étais en train de me dire. Au moins il sort avec quelqu'un susceptible de le tirer vers le haut. Enfin voilà, tout ça pour dire que Hilda n'est pas la personne la plus aimante. Ça reste leur tante, mais ça doit être compliqué.

- Ils vivent avec elle, c'est ça ?

- Oui... Depuis qu'ils sont petits. C'était un peu compliqué, Hilda n'avait pas vraiment leur garde jusqu'à quelques années.

- Un rapport avec l'accident pendant votre première année ? I HAVE TO KNOOOOOOOW

Etonnée, elle réussit cette fois à continuer à marcher au même rythme, mais elle se garda bien de répondre avant d'aviser l'expression de son cousin. Il regardait droit devant lui, les yeux plissés à cause du soleil couchant qui lui faisait face. Une sorte d'halo doré faisait ressortir ses cheveux blonds foncés et elle prit quelques secondes à contempler les reflets mordorés et ambrés qui jouaient sur les contours de son visage. Le spectacle aurait pu la distraire, mais elle ne manqua pas l'air fuyant de Julian et elle vit soudain à travers son coup de bluff. Roh toujours un travail incroyable sur les lumières Marion.

- Tu ne sais pas ce qui s'est passé, pas vrai ? Devina-t-elle.

Il émit un grognement dépité et jeta ses mains vers le ciel. Les tâches de fusain qu'elle avait déjà remarqué tout à l'heure se parèrent d'or sous le soleil. Encore une fois. Où est le smiley avec les coeurs à la place des yeux? BN ça manque de coeur ici !

- Est-ce que quelqu'un va finir par m'expliquer ce qui s'est passé ? On dirait que c'est un secret d'état !

- Ce n'est pas ça... C'est Noah, expliqua-t-elle. Il a bien fait comprendre qu'il ne voulait plus que quelqu'un en parle. La dernière fois, il s'est tellement disputé avec Liam qu'ils ne se parlent plus et Wilde a fini avec le nez cassé. Watcha

- Quoi ? C'est Noah qui a... le nez de Wilde, c'est lui ?

- Je sais, on dirait pas comme ça à cause de la carrure de Wilde. Mais Noah a bien frappé. Il a manqué l'exclusion. Le père de Wilde était furieux. Il est ministre, je ne sais pas si tu le sais... WWATCHA

- Je crois que Liam me l'avait dit, oui... (Il la regarda à travers ses cils, presque incandescents). Et donc ? Tu ne vas pas me dire ce qui s'est passé, c'est ça ?

- Et risquer la colère de Noah ? Non, je ne suis pas suicidaire. Il ne m'aide déjà pas assez comme ça.

- Pourquoi ? Ou ça aussi c'est un secret d'état ?

Théa secoua la tête en laissant échapper un rire étouffé.

- Non, ça c'est juste parce qu'on est un peu pareils tous les deux. On ne sait pas se taire et on se braque facilement. Et on n'aime pas que l'autre nous prenne Othilia. Ah ça, je veux bien croire que vous êtes pas partageur. Franchement j'aimerais avoir le point de vue d'Othilia là-dessus.

- Je ne sais pas comment elle fait pour vous supporter...

- Parfois, moi non plus, admit-elle. :lol: :lol: :lol:

Elle avisa le chemin à flanc de montagne qui venait de surgir devant eux et chercha à nouveau sa meilleure amie du regard sans la trouver. Elle retint un soupir. Si Leonidas avait été celui qui lui avait tenu la main enfant, Othilia avait été celle qui l'avait porté en arrivant à Ilvermorny. Et même si rationnellement elle savait que Noah Douzebranches avait besoin plus que quiconque d'une main tendue, elle ne pouvait s'empêcher de lui en vouloir d'accaparer Othilia. Oh c'est beau cette amitié. Encore une fois, on n'a pas encore beaucoup vu Othilia donc j'ai hâte de la voir interagir avec Thea et Djulianne (et Noah)

- Je voulais juste te dire... marmonna Julian brusquement. Merci pour aujourd'hui.

- Merci ? Répéta-t-elle, sourcils froncés.

- D'avoir insisté pour que Leonidas nous parle de ma mère... explicita-t-il. Je n'aurais jamais réussi à le pousser comme tu l'a fait...

- Oh... De rien, je suppose, répondit-elle avec gêne. Je pense que j'en avais juste marre qu'on refuse de nous répondre. Tu m'as plus servi d'excuse qu'autre chose. Ne crois pas que j'agissais par altruisme. Non, on irait pas croire ça de toi ma chère Thea ...

Un sourire fin fit frémir la commissure de la bouche de Julian, mais il ne prit pas la peine de la contredire. Au lieu de cela, ils continuèrent à marcher côte et côte et Théa se fit la réflexion que Julian n'était peut-être pas ce qu'elle avait imaginé. Il n'était pas un secret de plus dans cette famille repliée sur elle-même ; il était peut-être même justement la pointe qui allait faire éclater la bulle créée par des années de rancœur.

Et alors que le soleil sombrait derrière la ligne d'horizon, Théa continua son ascension vers Ilvermorny, Julian à ses côtés.

**************************************

Et voilà pour le chapitre tant attendu ! Alors les réponses ne sont pas encore toutes là, mais ça commence. J'espère que vous avez trouvé ça intéressant ^^

Eléments tirés de Pottermore :

- Rien pour cette fois ^^

Prochain post : Chapitre 17 - 12 avril

OH
Je peux pas l'avoir demain? Allez Marion pour mon anniversaire !

BREF

C'était un super chapitre ! Hâte d'être aux prochains :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
Alanna2

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Alanna2 »

Hello

Super chapitre ! C'est chouette d'avoir le point de vue de Théa moi je l'aimais bien dès le début, au sens que c'est un personnage avec un potentiel d'évolution. Et son côté plus doux et qui essaye de se mettre à la place de Julian est très intéressant, et c'est pas trop amené brusquement. Mais on sent qu'elle ne se confiera pas si facilement. Que de mystère autour de son père ! D'ailleurs tous les personnages semblent avoir un passé tragique ou un secret particulier voir les deux parfois XD.

Sinon j'avais pas mal de chapitres de retard mais j'ai une théorie. Je pense qu'Aileen a un don particulier un truc comme ça. Elle semblait savoir que Julian avait froid sans qu'il le dise est semblait avoir aussi mal que Liam quand il s'est coupé la main dans la vitre... Je trouve que cela dépasse la simple empathie... Peut être une forme de legimencis particulière ? Par contre je ne sais pas comment interpréter sa réaction au stade pendant le match... Peut-être trop de monde ?

Hâte de savoir la suite en tout cas !
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Heyyy !

Merci pour vos commentaires :D La suite tout de suite ^^


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Chapitre 17 : Le bal des fantômes


« Le même cours des planètes

Règle nos jours et nos nuits

On m'a vu ce que vous êtes ;

Vous serez ce que je suis. »

- Pierre Corneille -


// 31 octobre 1979 //

Le souffle haché, Julian arriva enfin en haut du mont Greylock après une ascension d'une quinzaine de minutes alors que le soleil rougeoyait au loin. Derrière lui, Théa avait une main sur la poitrine, comme si elle avait peur que son cœur n'en sorte après tant d'efforts et il ne pouvait pas vraiment l'en blâmer. Lui aussi percevait les battements sourds du sien à chaque inspiration difficile.

- Je crois encore que je préférais les montgolfières, haleta-t-il.

- Trop de boulot de les sortir à chaque week-end, dit Théa en repoussant ses cheveux. C'est seulement pour les jours où on a un train à pendre, le reste du temps on marche.

- Au moins, ça te fait ton cardio pour la semaine...

- Ou ta crise cardiaque hebdomadaire, ironisa-t-elle.

Julian sourit. Depuis cette après-midi, il avait l'impression de découvrir Théa et même son humour sec et piquant ne le dérangeait plus tant que ça. Les jambes douloureuses, il se laissa encore quelques secondes avant de rentrer dans le parc et retourner au château. Il jeta un coup d'œil en contrebas. Dans la vallée, le Village s'étendait, lové entre les deux versants du mont Greylock et du mont des Errants. Même d'ici, Julian distinguait le tracé courbé de la rue principale et l'architecture hétéroclite. La vallée était éclairée par les rayons déclinants du soleil et semblait entourée d'un véritable halo embrasé aux nuances orangées, rouges, et irisées d'un jaune pâle fuyant. Comme d'habitude, son envie de dessiner se manifesta dans ses doigts qui se crispèrent et il pianota contre sa jambe pour se débarrasser de la sensation.

- La vue est pas mal... souffla-t-il.

- Merci, répondit une voix goguenarde.

Surpris, Julian tourna la tête en même que Théa et il manqua de se prendra ses cheveux bruns dans la figure. Othilia et Noah arrivaient vers eux depuis le chemin qu'ils avaient eux-mêmes empruntés quelques minutes auparavant, main dans la main. Ils avaient dû faire des pauses pendant leur remontée car ils paraissaient moins essoufflés.

- Très spirituel, Noah, cingla Théa.

- Ne commencez pas, soupira Othilia. On vient juste de se retrouver. (Elle lui adressa un léger sourire). Salut, Julian.

Il le lui rendit sans savoir quoi dire. Il fut même surpris qu'elle connaisse son prénom alors même qu'ils ne s'étaient jamais parlé.

- Je n'ai rien fait moi, se défendit Noah. Tu remarqueras que c'est encore elle qui...

- Allez tout le monde ! Interrompit la voix ronde et chaude de Otis un peu plus loin. Il faut rentrer ! On se presse !

Julian se retourna. Entre les larges portes qui gardaient l'entrée du domaine d'Ilvermorny, Otis faisait des grands moulinets pour encourager les élèves à rentrer. Plusieurs groupes rassemblés autour du mur d'enceinte, retardant au maximum le moment de terminer leur sortie, se remirent en mouvement.

- Venez, on y va ou on va louper le début du bal, dit Othilia en avançant.

Ses cheveux blonds et fins encadraient son visage et, à son ton, Julian devina qu'elle avait l'habitude de se faire écouter.

- Est-ce que quelqu'un va m'expliquer ce que c'est ce bal ? Grommela-t-il.

- Tu sais pas ? Lança Noah.

Julian se raidit. Dans la voix de Noah, il percevait cette moquerie sous-jacente et ce jugement permanent qui émanaient de lui dès qu'il sentait une faiblesse chez son interlocuteur. Heureusement, Othilia devait être plus conciliante et lui coula un regard en biais.

- J'avais oublié que tu n'en avais jamais vu, excuse-moi. C'est une vieille tradition d'Ilvermorny.

- Et comme elle adore l'Histoire, elle va tout t'expliquer.

- Au moins un de nous deux est un peu cultivé, rétorqua Othilia sans même regarder son petit ami.

Noah ne broncha même pas, mais Julian la remercia intérieurement de le remettre à sa place.

- Le bal des fantômes remonte au XIXe siècle, expliqua-t-elle, le regard droit devant elle. Après les procès de Salem en 1692 et 1693, la communauté magique avait été traumatisée et comme Ilvermorny a commencé à prendre de l'importance à peu près au même moment, les sorciers du Massachussetts se sont déplacés ici. Salem a longtemps été délaissé par les autorités, même le MACUSA. Certains pensaient que c'était une terre maudite et que les sorcières brûlées ou pendues là-bas hantaient les lieux.

- Et c'était vrai ?

- Oui et non... Certains esprits étaient effectivement restés et étaient assez... vindicatifs. Les sorcières de Salem reprochaient aux autres sorciers de ne pas les avoir aidés, même si c'était compliqué... Elles n'avaient pas respecté le nouveau Code International du Secret Magique et en avaient en quelque sorte payé les conséquences.

- Le Code, c'était en 1689, c'est ça ? Se souvint Julian.

Othilia hocha la tête.

- C'est ça. Il venait d'être mis en place, mais les autorités avaient du mal à le faire respecter. Les sorcières de Salem étaient une vieille communauté, elles étaient fières et n'ont pas voulu obéir. Mais à force de vouloir défier le MACUSA, elles se sont faites repérées. Le reste, on connait... Procès, exécutions, dénonciations, énuméra-t-elle. Des filles Non-Maj' ont même été accusées dans le lot. C'était un chaos impossible.

A l'évocation de jeunes femmes, moldus ou sorcières, exécutées ; Julian frissonna. Les chasses aux sorcières avaient émaillées l'Histoire, il le savait. Sa mère avait écrit un ouvrage sur la question et il se souvenait qu'elle lui avait montré des documents, des comptes-rendus de procès, et des rapports d'enquêtes des Aurors. Pourtant, rien n'avait jamais été comparable à Salem. Véritable symbole de persécution et d'hystérie collective, les procès de Salem avaient aussi servi d'exemple pour le gouvernement et son message : le Code International du Secret Magique était là pour une raison. Les protestations des plus virulents avaient été étouffées devant ce spectacle tragique qui avait largement dépassé les frontières de l'état du Massachussetts.

Tendu, il réajusta son écharpe de Serdaigle avant de poser sa prochaine question :

- Mais quel rapport avec le bal des fantômes d'Ilvermorny ?

- J'y viens. Comme je te disais, Salem a plus ou moins été délaissé pendant plus d'un siècle, jusqu'à ce que les histoires de fantômes commencent à inquiéter le MACUSA. Les Non-Maj' racontaient trop d'histoire. Du coup, des sorciers sont allés parlementer avec les esprits des sorcières de Salem. Ça a pris des années pour qu'elles se laissent approcher, mais progressivement ils ont établi un dialogue avec elles. Certaines ont même trouvé la paix. L'Institut de Salem a été construit et les sorciers ont réinvesti la ville en veillant à rester cacher. Et pour marquer ce renouveau, un peu de terre a été prélevé là où des dizaines de sorcières avaient été brûlées et cette terre a été remise dans le parc d'Ilvermorny, comme une sorte d'hommage. C'est le petit monticule, là-bas.

Othilia tendit le bras et Julian suivit le point qu'elle lui indiquait. A quelques mètres de là où ils étaient, il vit une petite colline qui s'élevait dans le parc dont le reste du terrain était plat. Il dû plisser les yeux, mais il crut voir une plaque en pierre qui devait honorer la mémoire des sorcières exécutées.

- L'Institut et Ilvermorny ont commencé un partenariat comme ça, reprit Othilia. Les sorties les week-end avec le lien par cheminée a été mis en place un peu plus tard.

- Sauf que le déplacement de la terre a eu un petit effet secondaire, intervint Théa.

- On peut dire ça... La terre était chargée du souvenir de la mort des sorcières de Salem. En fait, les chercheurs essayent toujours de comprendre, mais d'après ce qu'on sait elles auraient imprégné la terre de leur pouvoir, comme une marque ou un souvenir à cause de la violence de leur mort. Le phénomène était si important que leur magie les a liés à la terre sur laquelle elles sont mortes.

- C'est un peu la même magie qui est à l'œuvre quand des fantômes sont l'empreinte de ce qu'ils étaient vivants, non ?

- Exactement. C'est juste que là, le phénomène n'était pas individuel. C'était toute une communauté qui était restée attachée à Salem. (Othilia ramena une mèche blonde derrière son oreille avant de poursuivre). Donc lorsqu'ils ont déplacé la terre...

- Ils ont déplacé les sorcières, devina Julian.

- Bien compris, l'intello, lança Noah.

Il marchait derrière eux, l'air ennuyé. Julian réalisa à cet instant qu'il avait lâché la main d'Othilia et cette constatation le pris au dépourvu. Il n'arrivait pas non plus à comprendre l'expression morose de Noah et il se demanda s'il était agacé par leur présence à Théa et à lui. Si c'était vraiment à cause de ça, il trouvait l'attitude de Noah agaçante. Ce n'était pas comme s'il avait déjà passé toute la journée seulement avec Othilia.

- Et donc c'est ça le bal des fantômes ? Dit-il tout en ignorant sciemment Noah. Les sorcières de Salem qui se montrent ?

- Pas seulement. Elles se matérialisent à Halloween parce que c'est le jour où le voile entre le monde des vivants et le monde des morts est le plus fin, voire se déchire, mais... La force magique imprégnée dans la terre de Salem couplée au rayonnement d'Ilvermorny attirent d'autres fantômes. Chaque année, des centaines d'apparitions se matérialisent dans le parc. Avec le temps, les élèves ont appelé ça le bal des fantômes.

- Et Hicks nous laisse y assister, compléta Théa.

Elle désigna la directrice sur le monticule. Ils avaient fini par rejoindre leurs camarades au niveau de la plaque commémorative des sorcières de Salem et un brouhaha incessant les entourait. Déstabilisé, Julian regarda autour de lui. La plupart des élèves revenaient visiblement de la sortie au Village ou à Salem même et discutaient entre eux, un verre de jus de citrouille à la main. Le soleil couchant éclairait les profils de tout le monde. La scène renvoyait une image de temps suspendu. A quelques mètres, plusieurs professeurs bavardaient en jetant un œil attentif aux élèves, sûrement pour éviter que quelqu'un comme Liam ne verse du whisky pur feu dans le jus de citrouille. Un peu à l'écart de ses collègues, le professeur Perrot était plongé dans une conversation animée avec Enjolras qui tenait des tracts à la main. Julian se demanda quel combat il défendait aujourd'hui. Juste derrière eux, Clémence Laveau leur jetait des regards insistants par-dessus ses lunettes en fer, comme si elle mourrait d'envie de se joindre à la conversation. De fait, elle ignorait superbement Elicia Jauncey, Sora Qualetaga et Wilde Wilkinson qui débattaient à côté d'elle. Et même de là où il se trouvait, Julian devina qu'ils parlaient de Quodpot à la simple façon dont son camarade de chambre mimait une explosion de souafle.

Soudain, il réalisa qu'il ne voyait Charly nulle part, et il se mit à tourner sur lui-même pour tenter de la repérer dans la foule.

- Tu cherches quelqu'un ? Demanda Othilia.

- Ma sœur, marmonna-t-il, le cou tendu. Elle était avec Raphaël pour faire du balai...

- Raphaël ? Ton frère ? Dit Théa.

Noah lui renvoya un regard hautain, presque comme s'il se moquait d'elle.

- Tu connais beaucoup de Raphaël prodige sur balai ? Rétorqua-t-il avant d'ajouter dans sa direction. Et ne t'inquiète pas, ils doivent être quelque part.

- Julian s'inquiète encore pour sa frangine ? Lança une voix derrière eux.

Ils se retournèrent. Aileen et Liam arrivaient vers eux d'un pas rapide. C'était Liam qui venait de parler et il fit passer sa pique avec un sourire espiègle que Julian avait appris à connaître. Autour de son cou, son appareil photo se balançait au rythme de ses mouvements.

- Pas « encore », nia-t-il. Je voulais juste... savoir où elle est.

- C'est cela, se moqua Liam sur le ton de celui qui n'en croyait pas un mot. Qu'est-ce qu'on avait dit ce matin ? Que tu devais la laisser respirer ta frangine. Elle va pas disparaître...

Au moment où il prononçait ces mots, il parut réaliser ce qu'il était vraiment en train de dire et tout le monde se figea. Même Noah détourna les yeux. Au-dessus d'eux tous, le nom d'Emilia et sa photo dans le journal parurent flotter avec insistance jusqu'à ce que Aileen se racle la gorge.

- Alors ? Dit-elle d'une voix forcée. Comment t'as trouvé le Village ?

Julian la remercia silencieusement pour la diversion.

- Plutôt bien, répondit-il en gardant pour lui qu'il préférait Pré-au-Lard. Je n'ai pas eu le temps de voir grand-chose, mais bien.

- T'as pu voir ton parrain ?

- T'as rencontré la vieille Hilda ? Lança Liam au même moment, curieux.

Immédiatement, la posture de Noah passa de nonchalant à tendue.

- Quoi ? S'exclama-t-il.

- Attends, réalisa soudain Julian en se rappelant de l'attitude de Liam ce matin, c'est pour ça que t'as fait une drôle de tête quand j'ai dit que je rejoignais Leonidas au Deux Souafles ?

- A ma décharge, Hilda est terrifiante.

- Il n'a pas tort, approuva Noah.

Julian les dévisagea tour à tour. Il ne pensait pas les voir tomber d'accord sur quelque chose et encore moins sur la tante gérante de café de Noah. Il se souvint de ce que Théa lui avait dit en revenant du Village : Hilda était connue pour sa fermeté et ses attentes en acier. L'entente de Noah et Liam sur la question n'était peut-être pas si surprenante que ça à bien y réfléchir, même si les deux se renvoyèrent un regard presque surpris. Pourtant, aucun d'eux ne voulu le relever et Liam s'attaqua à autre chose :

- Qu'est-ce que c'est cette écharpe, l'intello ?

Julian avisa son écharpe bleu et bronze.

- Celle de Poudlard, expliqua-t-il. De ma maison... enfin de mon ancienne maison, Serdaigle.

- Vos noms de maisons sont bizarres.

- Dit celui dont le nom de maison est Puckwoodgenie, rétorqua Noah d'un ton mordant. C'est tellement imprononçable que la moitié des élèves l'appelle Puck. (Il marqua une pause avant d'ajouter). Elle est très bien son écharpe, mieux que ta tête en tout cas.

- Noah ! Réprimanda Othilia.

- Mais pour qui tu te prends ? S'énerva Liam.

Il fit un pas en avant, presque menaçant, et Aileen le retint physiquement en tendant le bras pour lui barrer le passage. Julian, lui, resta figé. Il avait tendance à l'oublier, mais sous les airs de pitre de Liam et ceux d'artiste torturé de Noah, ils étaient tous les deux capables de se battre. En deux mois, il avait notamment appris que Liam avait grandi dans un quartier difficile de la banlieue d'une ville moyenne en Oregon et que sa tendance à ne pas savoir se taire lui avait déjà valu quelques bagarres. Quant à Noah, il ne se remettait toujours pas de ce que Théa lui avait révélé : il était responsable du nez cassé de Wilde Wilkinson. Autant dire qu'il préférait éviter une altercation entre les deux, même s'il ne pouvait pas s'empêcher de ressentir une sensation étrange et irrationnelle dans la poitrine en voyant que Noah prenait sa défense pour quelque chose d'aussi trivial qu'une écharpe.

- Les garçons, arrêtez, pas maintenant, intima Aileen d'un ton ferme. M'obligez pas à vous mettre des heures de colles.

- En plus, tout ça pour une écharpe anglaise, se moqua dédaigneusement Théa. S'il faut se battre pour quelque chose autour de Julian, je propose ses goûts en matière de thé.

Par réflexe, il faillit protester avant de comprendre que Théa se payait simplement la tête de Noah et Liam pour le soutenir. Leur après-midi ensemble avait peut-être véritablement changé les choses entre eux.

- Mon écharpe de Serdaigle, le thé, énuméra-t-il avec humour. Quoi ensuite ? Mon accent ? Si vous voulez déclarer la guerre à l'Angleterre, dites-le directement.

Théa se mit à rire malgré la façade qu'elle tentait de maintenir et, juste comme ça, la tension retomba. Les épaules de Liam s'affaissèrent et Noah fit mine de regarder au loin, désintéressé, même si sa posture indiquait le contraire. Aileen et Othilia se contentèrent d'un sourire reconnaissant.

- Bon et ces fantômes, ils arrivent quand ? Demanda Julian, histoire de vraiment passer à autre chose.

- Bientôt, dès que le soleil sera couché...

Derrière le mont des Errants, les couleurs orangées enflammaient justement le ciel dans leur descente progressive. Les cheveux d'Aileen paraissaient de la même couleur sous cette lueur.

- Je vais nous chercher du jus de citrouille, décida-t-elle soudain. Julian, viens m'aider à porter.

Et sans lui demander son avis, elle lui faucha le coude et l'entraîna dans la foule, laissant les autres derrière. Plusieurs personnes s'écartèrent de leur chemin tandis qu'Aileen avançait d'un pas rapide.

- Je te jure, ils sont impossibles ces deux-là, maugréa-t-elle entre ses dents. Merci pour ton aide.

- Pas de problème... (il se tourna vers elle). Alors ? Salem ? Vous avez trouvé quelque chose ?

- C'est pour ça que je voulais te parler loin des autres. On a réussi à acheter presque tous les ingrédients pour la potion mentionnée dans le contre-rituel. Avant de vous rejoindre, on a été déposer les sacs dans la salle du deuxième étage pour qu'on ne nous remarque pas.

- Quand tu dis « presque tous », c'est-à-dire ?

Aileen grimaça. Ils étaient arrivés devant longue table recouverte d'une nappe blanche où plusieurs verres se remplissaient tout seuls de jus de citrouille. Il en attrapa trois en équilibre précaire et Aileen l'imita, les mains instables.

- Il manque la poudre de corne de licorne, dit-elle. C'est vraiment rare et je ne parle même pas du prix... L'apothicaire n'en avait plus et on n'aurait jamais pu se la payer...

- Merlin... On ne peut pas faire la potion sans ça.

- Je sais...

En faisant attention à ne rien renverser, ils firent demi-tour. Julian gardait les yeux sur ses pieds pour éviter de trébucher et de renverser les verres.

- On a qu'à commencer la potion, jugea Aileen. Et on avisera au moment venu ?

- Pas trop le choix...

Même si l'idée le dérangeait, Julian supposait que ça restait le mieux à faire pour avancer au plus vite. Le contre-rituel serait déjà assez long comme ça pour qu'ils ne perdent pas plus de temps avant de le commencer.

Lorsqu'ils revinrent auprès des autres, Théa et Othilia discutaient, Liam prenait des photos de la fête, et Noah se tenait légèrement à l'écart. Le tableau offrait l'image d'un groupe éclaté et Julian pouvait presque sentir le malaise ambiant. Heureusement, ils n'eurent pas besoin de s'attarder dessus : dès que les verres de jus de citrouille furent distribués, le soleil s'endormit enfin derrière le mont des Errants. Et les errants d'un autre monde se réveillèrent.

- Ca commence... souffla Aileen.

Julian crut d'abord que sa vision lui jouait des tours. Les professeurs avaient fait apparaître des boules de lumière dorées pour éclairer le parc, les mêmes que celles qui se trouvaient d'habitude dans le Réfectoire, et il ne remarqua ainsi pas tout de suite ce qui arrivait. Pourtant, une seconde plus tard, le phénomène était impossible à ignorer : des dizaines de silhouettes se matérialisaient entre les élèves. Des silhouettes éthérées et vaporeuses, presque argentées. La température déjà fraîche de cette nuit de fin octobre baissa soudain encore plus et Julian sentit un long frisson glacé remonter sa colonne vertébrale. Plusieurs cris de surprise et d'émerveillement s'élevèrent autour de lui. Julian partageait le sentiment : le spectacle était aussi fascinant par sa beauté qu'effrayant. Les fantômes prirent de l'épaisseur et leurs contours se stabilisèrent jusqu'à prendre la forme familière de ceux qu'il avait déjà observé à Poudlard. Au contraire du Baron Sanglant ou du Moine Gras , les fantômes d'Ilvermorny arboraient un air presque perplexe, comme s'ils se réveillaient d'un songe.

- Il leur faut toujours quelques minutes pour comprendre qu'ils sont passés de l'autre côté du voile, expliqua Aileen à voix basse pour ne pas rompre le charme de l'instant.

Julian l'écouta à peine. Il promena ses yeux sur les différents silhouettes. Les fantômes avaient tous une allure hétéroclite : il aperçut des sorciers en robe de cérémonie du XVIIIe siècle ; un chef de tribu indienne à la coiffe en plumes ; des sorcières à l'allure puritaine et au cou formant un angle étrange. Il réalisa avec un temps de retard et un soubresaut de son estomac qu'elles avaient dû être pendues.

- Les sorcières de Salem, devina-t-il d'une voix étranglée.

Aileen suivit son regard et acquiesça d'un simple hochement de tête. La présence des fantômes avaient transformé les boules de lumières dorées dont les orbes avaient viré vers le bleu. La dualité des couleurs jetaient des éclats surnaturels sur les visages des élèves et sur les silhouettes vaporeuses qui commençaient à se mouvoir. Julian mit quelques secondes à comprendre ce qui le perturbait : les fantômes ne faisaient aucun bruit en se déplaçant. Il avait presque oublié.

- C'est incroyable, murmura-t-il. Je n'en avais vu autant d'un coup...

- Regarde là-bas, indiqua Othilia. C'est Marie Laveau. Elle vient chaque année.

Julian tourna la tête. Un peu plus loin, Clémence Laveau était assise par terre face à une femme fantôme, des cartes de tarot disposées devant elle. Debout, Marie Laveau observait et pointait des cartes tout en parlant et en agitant les mains. Son corps de fantôme avait beau être entièrement grisâtre et transparent, Julian distingua les lourds bracelets à ses poignets. Elle portait une longue robe, un châle drapé sur les épaules et un foulard noué sur le sommet de la tête. A ses pieds, un serpent s'enroulait.

- C'est l'ancêtre de Clémence, c'est ça ? Se rappela-t-il.

- Oui, confirma Othilia. Grande prêtresse de la Nouvelle-Orléans, reine Vaudou de Louisiane... En vérité, c'était une sorcière spécialisée dans les arts occultes et la divination. Toute sa famille suit son chemin depuis.

- Elle est... impressionnante, jugea Julian, faute de mieux. Et elle est là chaque année ?

- Je n'ai jamais vu de bal sans elle, intervint Liam. La reine vaudou veut garder sa couronne même dans le monde des morts et crois-moi, elle s'est proclamée reine de ce bal ! Elle n'en louperait jamais une édition !

- Mais les fantômes peuvent décider de venir ?

Il imaginait mal les morts dans l'au-delà regarder leur agenda et se dire « hum le bal ce soir... oh allez je n'avais rien de prévu ». Théa but une gorgée de jus de citrouille avant de lui répondre :

- Les chercheurs du Ministère s'acharnent à essayer de comprendre comment le monde des morts fonctionnent, dit-elle. Mais ils n'obtiennent pas beaucoup de résultats, les fantômes refusent de parler. On suppose juste qu'ils peuvent décider comme certains viennent des années et d'autres non avant de réapparaître.

D'une main, elle désigna un petit groupe d'hommes habillés formellement. Julian mit une seconde à déchiffrer le logo sur le devant de leur robe : un aigle stylisé frappé du drapeau américain. Ces hommes faisaient partis du MACUSA, le congrès américain de la magie. Ils tentaient visiblement d'interroger les sorcières de Salem, carnet à la main, mais elles gardaient obstinément le silence et les regardaient froidement. Si les fantômes avaient encore leur baguette, il ne faisait aucun doute qu'elles en auraient fait usage. A portée de voix, Julian entendit ce qu'une d'elle était en train de dire :

- Ne cherchez pas à percer les secrets de notre monde, vivants. Vous y entrerez bien assez tôt et vous regretterez d'avoir passé votre temps à chasser des réponses illusoires. N'oubliez pas, nous fûmes ce que vous êtes, vous serez ce que nous sommes.

Et sur ces mots, elle se détourna et entraîna ses compagnes plus loin. L'angle de leur cou était toujours aussi perturbant. Julian se reconcentra sur son groupe. Toujours à l'écart, Noah jaugeait ses réactions et il rougit. Il se demanda s'il avait l'air aussi perdu qu'il ne le craignait. A côté de lui, Liam prit une photo. Le flash illumina un fantôme en habits des années 50, pantalons à pince et moustache compris.

- Il y a des fantômes récents, commenta-t-il inutilement.

- Evidemment, répliqua Liam en changeant sa pellicule, tête baissée. La mort ne s'arrête pas au siècle dernier. Ça peut jouer des tours d'ailleurs. Vous vous souvenez de Sora et Winona il y a trois ans ? Quand leur mère qui venait de mourir est apparue ? Morgane, ça avait été un bordel !

Julian se figea. La sensation glacée qui se répandit dans son corps n'avait soudain plus rien à voir avec la présence des fantômes. Les conversations bourdonnaient toujours de lui et pourtant il eut l'impression d'être plongé sous l'eau plusieurs secondes : les bruits s'étouffèrent, sa poitrine se comprima et il eut terriblement froid. Merlin, il avait essayé. Il avait vraiment essayé. Il n'avait pas voulu y penser, il avait fermé son esprit à double tour dès qu'il avait appris pour le bal des fantômes. Mais l'anecdote de Liam fit sauter le verrou.

- Tu pourrais être un peu plus sensible, rabroua brusquement Théa avec verve.

Surpris, Liam releva la tête de son appareil.

- Quoi, votre majesté ? La reine des glaces a quelque chose à dire ? Le mot « bordel » vous choque ?

- Non, imbécile. Mais la scène était juste triste à voir, elles pleuraient toutes les deux...

- Et le bal est censé être une fête, tous les fantômes sont partis, personne ne savait quoi dire. J'ai eu de la peine pour elles, crois-moi, mais je me souviens surtout que ce n'était pas un moment agréable. C'est tout ce que je voulais dire.

Théa émit un claquement de langue, agacée, et Julian comprit ce qu'elle allait dire une seconde avant qu'elle ne s'exclame :

- Même, dire quelque chose comme ça n'est vraiment pas correct. Surtout devant Julian.

Il n'eut pas le temps de l'arrêter. Les mots étaient lâchés et Liam fronça les sourcils, perplexe.

- Pourquoi Julian ?

Son ami l'interrogea du regard, mais il fut incapable de répondre. Il ne savait pas si c'était parce qu'il avait parlé de sa mère toute la journée avec Leonidas, mais la simple idée de la voir fit gonfler un espoir impossible à réprimer dans sa poitrine. Son visage s'imposa à lui et, inconsciemment, il se mit à le chercher parmi les fantômes qui déambulaient autour d'eux. Parce que c'était obligé. Si sa mère pouvait venir le voir, elle viendrait. Elle avait toujours été là et elle le serait encore maintenant. Peu importait qu'elle soit morte de l'autre côté de l'Atlantique, elle viendrait...

En face de lui, Théa le regarda avec pitié et il détesta ça.

- C'est assez évident, se contenta-t-elle de répondre à Liam.

- Ah... Vraiment, j'ai l'impression de louper une info. Je suis le seul ?

Il se tourna vers Aileen en quête de soutien. Cette dernière fronçait les sourcils et Julian fut persuadé qu'elle était en train de comprendre, comme si elle assemblait les pièces d'un puzzle dont elle avait eu les pièces en main depuis deux mois. Il eut soudain la nausée. Il ne savait pas pourquoi il n'avait jamais confié la mort de sa mère à Aileen et Liam... Peut-être parce que, tant qu'ils ne savaient pas, il pouvait prétendre qu'elle ne le hantait chaque seconde de chaque jour.

- Attendez... Vous ne savez pas ? Comprit soudain Noah.

Dans les accents de sa voix, il était clair qu'il jetait leur ignorance au visage de Aileen et Liam. Surtout Liam, sans doute. Julian ferma les yeux brièvement. Noah avait été la première – et la seule – personne à laquelle il avait confié la mort de sa mère à Ilvermorny. Théa, Archer, même le professeur Perrot, l'avaient tous su au préalable.

- Savoir quoi ? S'impatienta Liam avec humeur.

- Ta mère est morte, déclara soudain Aileen en le regardant droit dans les yeux. C'est ça, n'est-ce pas ?

La phrase était si simple. Sujet et verbe, rien de plus. Pourtant, Julian en ressentit la violence jusqu'au creux de son ventre qui se souleva. Il sera son verre de jus de citrouille vide et une fissure apparu entre ses doigts. Il savait que ça n'avait rien à voir avec la force exercée : c'était sa magie qui se manifestait. Elle était en agitation à l'image de ses émotions et il tenta de prendre une grande inspiration pour se calmer.

- Quoi ? S'étonna Liam. Non... Ils ont emménagé ici en septembre...

- Il n'a parlé que de son père, se rémora Aileen d'une voix morne. Jamais sa mère. Je viens de réaliser...

- Oh...

Ils le dévisagèrent. Leur expression renvoyait leurs sentiments : malaise, pitié, une once de colère d'avoir été tenu à l'écart, et une profonde tristesse. Julian se sentit étouffer.

- Je... s'étrangla-t-il avant de s'interrompre en réalisant qu'aucun mot ne lui venait.

- Pourquoi t'as rien dit ? L'apostropha Liam, presque accusateur. Je t'ai fait confiance sur ma sœur, il y avait plein d'occasion...

- Eh, il ne te devait rien, le défendit Théa. S'il ne voulait pas en parler...

- Oui, mais ça ne l'a pas empêché de le dire à Noah, contra-t-il.

- Alors c'est peut-être toi qui devrait te remettre en question, riposta ce dernier.

Un éclat blessé traversa le visage de Liam, vite remplacé par une pointe de colère plus prononcée qu'avant. Julian maudit Noah, incapable de se taire ou de rester à sa place. Il ne blâmait pas même pas Liam : sa réaction était un mécanisme de défense classique et il savait qu'il le méritait en partie. Liam avait toutes les raisons de lui en vouloir. Il avait peut-être des défauts, mais le manque d'honnêteté n'en faisait partie. Il lui avait confié ses peurs concernant sa sœur, il lui avait fait confiance pour le message du corbeau, et il l'avait laissé assister à sa détresse à minuit près des serres. En retour, Julian prenait conscience qu'il n'avait rien laissé filtrer de sa propre vie.

- Ce n'était pas contre toi, finit-il par se justifier piteusement. Contre vous, je veux dire, corrigea-t-il en désignant Aileen. Je... ça n'est juste jamais venu dans la conversation.

- Quoi ? On aurait dû te demander explicitement ?

- Non mais...

Encore une fois une fois, les mots lui manquèrent. Il ne savait pas comment expliquer. Son esprit était à moitié pris par la conversation et à moitié par les spectres qui continuaient à évoluer dans le parc. Si sa mère apparaissait, aussi fou que cet espoir pouvait être, il ne voulait pas la manquer.

- Elle est morte récemment, non ? Souffla Aileen avec une douceur qui tranchait nettement face à l'attitude de Liam.

Comme d'habitude, l'instinct d'Aileen était perspicace et Julian hocha la tête.

- Une attaque de mangemorts... A son travail. Ils ont fait exploser le bâtiment. C'était en juin dernier. Mon père a décidé de nous faire déménager après ça... La situation devenait incontrôlable.

- Je suis désolée, Julian... J'aurais dû savoir...

- Tu ne le pouvais pas.

Aileen se mordit la lèvre, l'air de s'en vouloir malgré tout. Irrationnellement, il lui en voulu. Il n'avait pas la force de gérer les états d'âmes de Aileen et Liam ce soir. Pas quand il cherchait désespérément le visage de sa mère dans une foule de fantômes. C'était égoïste, il le savait. Ses amis attendaient de lui davantage qu'une explication aussi courte, mais il se sentait incapable de répondre à leurs attentes. Son champ de vision se rétrécissait aux êtres translucides d'une couleur gris perle. Dans sa concentration, il manqua de louper Lottie qui arrivait droit sur lui, Raphaël Douzebranches sur les talons. Les autres s'écartèrent pour la laisser passer.

- Ju' ! Cria-t-elle en arrivant à sa hauteur. T'as vu tous ces fantômes ?

Il manqua de lui répondre qu'il aurait été difficile de les louper, mais le ton de sa sœur l'interpella. Elle n'avait pas son enthousiasme coutumier face aux nouveautés du monde américain. Il l'observa plus attentivement. Ses grands yeux verts mordorés reflétaient une émotion étrange.

- Oui, oui, Lottie, j'ai vu...

- Raph' m'a dit qu'ils venaient chaque année ! Que tous les morts pouvaient sentir le voile tomber.

Elle le regarda avec insistance. Julian se demanda surtout depuis quand Raphaël était devenu « Raph' ». Ce dernier, visiblement mal à l'aise au milieu des élèves plus âgés, glissa une œillade vers son frère, mais Noah l'ignora. Son attention était dirigée vers lui et Julian aurait pu soutenir son regard s'il n'avait pas soudain compris ce que sa sœur essayait de dire. Son cœur dévala dans son estomac qui lui-même se noua, l'enfermant dans une cage douloureuse.

- Oh Lottie...

- Tu crois que c'est possible ? Demanda-t-elle, une touche d'impatience dans la voix. Tu crois qu'on pourrait la voir ?

Ses questions faisaient tellement écho à son propre espoir qu'il sentit son espérance s'embraser. Pourtant, son premier instinct fut de calmer les ardeurs de Lottie. Il n'en eut pas le temps : Théa s'en chargea.

- Ca ne fonctionne pas come ça, Charly, dit-elle avec une prévenance qui ne lui ressemblait pas. Il faut que le fantômes ait des regrets, qu'il soit encore en partie attaché au monde des vivants...

- Mais justement...

- ... et surtout il doit être mort près d'ici ou avoir une attache physique. Les sorcières de Salem ont leur terre, les indiens ont la réserve de l'autre côté de la montagne. Il y a des exceptions bien sûr, comme Marie Laveau, mais elle avait un lien avec les esprits de son vivant. (Théa parut sincèrement attristée). Crois-moi, j'ai espéré aussi tant de fois mais... ça n'arrivera pas.

Julian fit à peine attention à l'allusion à Théo, son jumeau perdu, ou au visage de Charlotte qui se décomposait. Une vague de déception déferla en lui, si intense que sa vision se troubla . Le bourdonnement de tout à l'heure revient, plus fort et plus douloureux. S'il poussait un peu son imagination, il pouvait presque entendre la voix de sa mère. Il n'avait pas besoin d'une apparition physique, son fantôme vivait déjà dans son esprit et il aurait tout donné pour sortir ce souvenir de sa tête.

- Julian... on dirait que tu vas être malade, s'inquiéta brusquement Othilia.

Restée en retrait jusque-là, il l'en aurait presque oublié. Pourtant, son ton empathique l'agaça soudain. Il avait tous les droits de ne pas se sentir bien.

- Elle a raison, approuva Aileen, inquiète. Tu devrais peut-être t'assoir.

- Je vais bien.

- Ju', elles ont raison...

- J'ai dit que j'allais bien, Lottie ! La rabroua-t-il sèchement.

D'un coup, les larmes montèrent aux yeux de sa sœur. Noyé sous sa vague de déception et de désillusion, il n'arriva pas à réaliser qu'il en était responsable. Merlin, ses sensations étaient saturées et son souffle se fit soudain laborieux. Instinctivement, ses mains se crispèrent le long de son corps, plus violemment que lorsqu'il avait juste envie de dessiner.

- Julian, mec, sérieux t'as une tête à faire peur... dit Liam, toute véhémence envolée.

- Ju', respire, lui enjoignit Charlotte.

- Vous voulez que j'aille chercher mon père ?

- Othilia, la dernière chose dont on a besoin c'est un prof, rétorqua Liam.

- Mais il ne va clairement pas bien, intervint Théa.

Plus leurs paroles l'atteignaient, plus il avait l'impression de perdre pied. Leurs mots lui obstruaient la gorge alors que les siens refusaient de sortir. Il n'arrivait plus à respirer. Merlin, il voulait juste sa mère... Il voulait la voir, la sentir contre lui, il voulait lui parler...

- Julian !

La voix de Noah perça la brume autour de lui. Il leva les yeux.

- Va-t'en.

Julian entendit les mots. Le sens vint une seconde plus tard. Le regard bleu de Noah le fixait intensément, lui offrant un point d'ancrage, et il comprit soudain ce qu'il lui offrait : une échappatoire. Il ne perdit pas de temps pour s'en saisir. Comme mues d'une volonté propre, ses jambes s'animèrent et il fit volte-face. Alors qu'il dévalait la colline, il laissa le bal des fantômes derrière lui ainsi qu'un espoir brisé aussi sûrement que le cou des sorcières de Salem.

***********************

Ce chapitre a été difficile à écrire, mais c'était un des premiers que j'avais imaginé. J'espère qu'il vous aura plu ! Je voulais vraiment montrer la détresse de Julian, qui malgré ce qu'il veut faire croire, est toujours prisonnier de son deuil. Un deuil qui prend du temps... C'est un peu ce que j'essaye de construire d'ailleurs depuis le début de cette fanfiction : montrer en filigrane le souvenir d'Aurélia qui hante Julian.

Eléments tirés de Pottermore/Animaux Fantastiques :

- La date du code international du secret magique a été déterminée par Rowling. Le fait qu'elle soit si proche de la date des procès de Salem m'a bien arrangé ^^

- L'histoire des sorcières de Salem est un vrai fait historique, mais toute la réflexion pour l'ancrer dans le monde sorcier vient de moi.

Prochain post : Chapitre 18 - 26 avril
Charmimnachirachiva

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !
Je m'excuse pour tous ces chap sans com, ici et sur LPDH (j'ai honte là :oops: :lol: )
MAIS je tiens à te dire qu'ils sont tous géniaux !!
J'ai beaucoup aimé ce chapitre !! On ressent bien la détresse de Julian et surtout le fait qu'il n'ait pas pris le temps de faire son deuil et de s'occuper de lui. Il avait tout à gérer : l'inscription à Ilvermorny, Charly, son père. Il s'est soudainement trouvé à devoir tout prendre en charge et je pense qu'il en mis en ''stand-by" son deuil pour s'occuper de celui des autres. Et à Ilvermorny il a continué, il devait aider Liam, s'adapter, s'occuper de Charly, sauf qu'il le faisait trop, du coup il a dû gérer la nouvelle indépendance de sa soeur. Il a tout pris sur lui et tout entasser et refouler. Sauf qu'au bout d'un moment, quand on laisse pas les choses se faire à leur rythme, ça finit par exploser ...ou imploser. Et je pense que c'est ce qui est arrivé à Juju. Enfin, voila mon analyse personnelle de pourquoi Juju nous a fait une mini-crise de panique et enfin je sais pas trop comment ça s'appelle mais voila...
Et je pense que justement, Noah va lui apporter cet équilibre et lui permettre de ne pas sombrer dans son deuil...
Voila, sinon, mise à part tout ça, j'aime aussi beaucoup la nouvelle dynamique qui s'installe entre Thea et Juju, je les adore tous les deux !!! Et j'aime bien Othillia, mais je pense que c'est parce que niveau caractère, c'est à elle que je ressemble le plus (enfin d'après ce que j'en sais maintenant). En fait j'adore tous les perso de LHDI !!! :lol:
Le bal des fantômes est une super idée. Outre les souvenirs que ça provoque à Juju et Charly, j'aime bien l'idée et l'explication que tu lui a donné. C'est une des choses que j'apprécie le plus dans cette histoire, tu te bases sur des choses qui ont été évoquées et tu leur donnes des explications justes parfaites : elles collent super bien à l'univers et sont plausibles (enfin dans la mesure où c'est un monde sorcier) !
cochyo

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par cochyo »

WoW puissant
Bravo
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Merci énormément Charmi et Cochyo pour vos commentaires :D Le fait que vous soyez toujours là me fait tellement plaisir !

Chapitre 18: Le ciel pour seul témoin

« On aime d'abord par hasard,

Par jeu, par curiosité,

Pour avoir dans un regard

Lu des possibilités »


- Paul Géraldy -


//31 octobre 1979//

Le reflet des lumières bleutées sur le corps argenté des fantômes aveuglait Julian. A moins que ça ne soit les larmes qui pressaient contre ses paupières mais qu'il refusait de laisser échapper. Au fond de lui, il savait simplement que s'il laissait ses émotions sortir, il serait submergé. Et être submergé au milieu du bal des fantômes annuel d'Ilvermorny était bien la dernière chose qu'il voulait. L'estomac noué, il se fraya un chemin parmi la foule et bouscula Clémence Laveau au passage. Elle poussa un cri de surprise et ses cartes de tarot s'éparpillèrent autour d'elle. Il ne s'arrêta même pas pour s'excuser. Il voulait juste arriver au château le plus vite possible. Son corps avançait presque à l'instinct et seul la masse imposante du château à quelques mètres le guidait vraiment.

Le souffle comprimé au creux de la poitrine, il remonta l'allée principale. Plus il avançait, plus le bruit des conversations s'amenuisait. Il n'était même pas sûr que ça soit une bonne chose : le silence le laissait avec ses propres pensées. Pour éviter ça, il accéléra encore. Immédiatement, ses jambes protestèrent : visiblement, elles n'aimaient pas l'effort subi aujourd'hui entre sa remontée du Village jusqu'en haut de la montage et maintenant sa fuite effrénée à travers le parc. Pourtant, la douleur de ses jambes courbaturées était une distraction bienvenue. Ou du moins, elle le fut un temps. Très vite, son esprit le rattrapa et il visualisa les expressions accusatrices de ses amis. Il avait de toute façon toujours été incapable de faire taire son cerveau. Matthew aimait plaisanter en disant que c'était son côté Serdaigle.

D'un côté, il comprenait Aileen et Liam. Depuis deux mois, ils passaient leur journée ensemble et Liam lui avait fait confiance avec la traduction des runes qui pouvait en théorie être la clé pour sauver sa sœur disparue. Le manque de réciprocité devait blesser. Il l'avait compris à force de le fréquenter : sous ses airs de garçon détaché et trublion, Liam pouvait être d'une honnêteté désarmante. Il prenait les réactions des autres à cœur, il fonctionnait à l'instinct et n'avait jamais peur d'affirmer ce qu'il pensait. C'était sans doute pour ça que sa relation avec Noah s'était si vite détériorée quand ils étaient plus jeunes. Quant à Aileen... Elle avait un côté doux et psychologue propice aux confidences. Mais Julian n'avait pas pu se résoudre à se confier sur quoique ce soit. Ni sur l'Angleterre qui lui manquait, ni sur son angoisse par rapport à Hanna, et encore moins sur la douleur sourdre qui ne le quittait jamais à cause du décès de sa mère. Et Merlin, même s'il savait qu'il aurait pu se confier à eux, il en leur en voulait aussi d'avoir réagi comme ça envers lui ce soir. Parce qu'après tout, il ne leur devait rien. Il gardait pour lui ce qu'il voulait. Il connaissait Aileen et Liam depuis seulement deux mois. Ils ne pouvaient pas remplacer Matthew juste en un tour de baguette.

Les émotions en bataille, Julian arriva enfin aux portes du château. Dans sa hâte, il faillit les ouvrir sans remarquer la créature au pied de la statue de Isolt Sayre qui nettoyait la pierre. Ce fut sa voix qui interrompit son élan.

- Eh bien, vous n'êtes pas au bal ? Qu'est-ce que vous fichez ici ? Vous allez salir ce que je viens de nettoyer !

Julian s'arrêta net. La créature lui arrivait à peine à la taille. Son apparence se rapprochait un peu de celle d'un gobelin, même si sa peau virait vers le gris et que deux grandes oreilles se dressaient de chaque côté de sa tête. Une touffe de cheveux clairsemés tirant vers le blanc couronnait sa tête.

- Pardon... répondit-il instinctivement. Je ne savais pas...

- Le bal est le seul moment où je peux nettoyer la statue d'Isolt sans avoir les sales gamins dans ton genre dans les pattes ! Quelle idée de revenir à cette heure !

- Je...

A nouveau ce soir, les mots lui manquèrent. Son esprit était trop surchargé par ses émotions vis-à-vis de sa mère pour réussir à appréhender les paroles de la créature. Faute de mieux, il se décida à demander, incertain :

- Excusez-moi mais... qui êtes-vous ?

- Moi ? Qui je suis ? Mon garçon, en voilà une question ! Je suis William ! Je vis ici.

- Ici ? A Ilvermorny ?

- Non, en Arkansas ! Evidemment ici ! Ce château était à moi bien avant votre arrivée, espèce d'insolent.

- Ah...

Brusquement, Julian se souvint enfin. Liam lui en avait parlé : William, le puckwoodgenie concierge de l'école. Il le surnommait Willy le Pucky. Avec ça, ce n'était pas étonnant que William déteste les élèves. Ou alors c'était une règle universelle des concierges, ce qui expliquerait l'attitude de Rusard.

- Je ne voulais pas vous déranger, dit-il finalement en retrouvant ses esprits. Je vais vous laisser...

- Et pourquoi tu es parti, hum ? Le bal n'était pas à ton goût ?

- Non... ce n'est pas...

Le puckwoodgenie le scruta intensément. Un voile léger troublait ses yeux, preuve supplémentaire de son grand âge. Il n'avait pas non plus l'air d'avoir trois cents ans comme les rumeurs le prétendaient, mais il n'était certainement pas tout jeune.

- Eh bien ? Parle ! Ou les sorciers ont-ils perdu le peu d'intelligence qu'ils avaient ?

- Non, ce n'était pas une question de goût, s'énerva-t-il. J'aurais juste voulu... Enfin, je m'attendais à voir une personne mais elle n'est pas apparue. C'est tout.

William l'observa, l'air de le juger, et il détesta le sentiment.

- Ah c'est un danger ça... Les morts et les vivants ne font pas bon ménage, petit. Parfois, il faut savoir dire adieu.

- Qu'est-ce que vous en savez ?

Il eut conscience d'être un peu trop agressif, mais il s'en fichait. Pendant un court instant, William parut sincèrement sur le point de lui répondre et une émotion étrange joua sur son visage. Mais le moment fut brisé avant même d'avoir lieu lorsqu'une voix héla derrière eux :

- Julian !

Il se retourna. Noah remontait vers le château. Sa cape ondulait autour de son corps au rythme de ses pas et ses boucles noires se confondaient presque dans l'obscurité ambiante, loin des lueurs tour à tour chaleureuses et bleutées de la colline des sorcières de Salem. Julian sentit sa gorge se fermer à mesure que Noah approchait. Il n'arrivait pas à décider s'il le maudissait de l'avoir suivi ou s'il était soulagé que tout le monde ne l'ait pas juste laissé partir. Il se trouvait étrangement démuni, seul. Et à choisir, il préférait être avec Noah qu'avec William le puckoowgenie.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Demanda-t-il malgré tout lorsque Noah arriva devant lui.

-Je t'ai laissé un peu d'avance, c'est tout. Mais j'ai cru comprendre que tu ne voulais pas vraiment rester au bal, non ?

- Pas vraiment...

- Parfait, moi non plus. Viens.

Julian fronça les sourcils.

- Où ?

- Tu verras, dit Noah d'un air mystérieux.

Il le narguait ouvertement. Julian débattu avec lui-même quelques secondes pour savoir s'il avait la force de s'opposer à Noah, mais il renonça.

- Je te suis, se contenta-t-il de dire.

Noah parut satisfait. Il commençait à comprendre que Noah aimait être aux commandes. Lors de leurs séances de dessin, c'est lui qui choisissait le thème la plupart du temps et Julian acceptait ses idées. Il devait avouer qu'elles étaient plutôt bonnes de toute façon. Alors que Noah ouvrait la porte du hall, il remarqua soudain que William avait disparu. Il tourna sur lui-même, fouillant le parc du regard, mais le concierge n'était nulle part en vue.

- Julian ?

- J'arrive, désolé...

Décidant d'oublier sa rencontre fortuite, il s'engouffra dans le hall. La chaleur l'enveloppa immédiatement et il fut encore plus ébloui que ce matin par les décorations. Sans la lueur du jour, les bougies dans les bouches des citrouilles ressortaient plus vivement et le jeu des ombres étaient saisissants. Même Noah s'arrêta une seconde.

- Ca ferait une belle peinture, jugea-t-il.

- Je trouve aussi...

Le visage de Noah se découpait justement dans la lumière et toute l'esthétique que produisaient les décorations le rendait plus fascinant que d'habitude, sûrement à cause de son physique aux traits fins et en même temps volontaires. Il haussa un sourcil en remarquant que Julian le dévisageait.

- Je parlais du hall, précisa-t-il, rictus aux lèvres.

Julian sentit ses joues et son cou chauffer.

- Moi aussi, s'empressa-t-il de dire.

- Hum... Allez viens, Picasso.

Et sans même s'assurer que Julian le suivait, il traversa le hall et pénétra dans le Réfectoire pour prendre les escaliers. C'était étrange de parcourir le château vidé de ses élèves : tout était plongé dans un silence angoissant et calme à la fois. Julian détestait ça. Il ne savait même pas d'où lui venait cette certitude viscérale, mais il tenta de s'imaginer Poudlard sans le bruit ambiant qui accompagnait sa vie quotidienne et n'y parvint pas. L'idée même semblait contre nature. Or, c'était exactement l'impression qu'Ilvermorny renvoyait. Une sorte de carcasse vide. Heureusement, Noah faisait du bruit en marchant. Ses pas frappaient le sol avec assurance et l'écho se répercutait contre les pierre de grès. Au premier étage, Julian s'attendait presque à ce qu'ils se dirigent vers leur dortoir, mais Noah poursuivit sa montée. Et il n'arrêta pas, enchaînant les étages.

La respiration de plus en plus courte, Julian se força à rester silencieux. Il ne voulait pas paraître impatient ou pire apeuré. Noah savait ce qu'il faisait. Ou du moins il en avait l'air. Sa crise de panique tout à l'heure devant tous les autres était déjà assez embarrassante comme ça. Maintenant qu'il avait mis de la distance entre lui et les fantômes, ses émotions se rendormaient progressivement et il avait le sentiment qu'il en reprenait le contrôle. Il avait été juste idiot d'espérer. C'était évident que sa mère n'aurait jamais pu apparaître ici. Elle n'était même pas morte sur ce continent. La déchirure dans le voile entre le monde des vivants et celui des morts à Halloween avait ses limites.

Les poumons douloureux, il ralentit sur le pallier du quatrième étage et Noah lui jeta un coup d'œil par-dessus son épaule.

- Encore un effort, allez, l'enjoignit-il. On est bientôt arrivés.

- Arrivées où ?

Il grimaça instinctivement. Il s'était pourtant refusé à poser la question depuis plusieurs minutes.

- Tu verras bien. A moins que tu ais la trouille, Shelton ?

Le défi était perceptible. Haut et fort. Julian tenta de se composer un visage neutre.

- Avance, se contenta-t-il de dire.

Noah émit un rire moqueur. Ils continuèrent leur ascension. Plus ils montaient, plus les escaliers se faisaient étroits et sombres. C'était évident que cette partie du château n'était pas destinée aux élèves. Il réalisa qu'il avait sérieusement perdu la main – ou plutôt le souffle – depuis l'année dernière. Il avait l'habitude de monter jusqu'en haut de la tour d'Astronomie. Ilvermorny était deux fois moins haut. Sans pouvoir s'en empêcher, penser à la tour d'Astronomie le fit penser à Hanna. Il la revoyait monter les marches presque deux par deux, pressée d'arriver en haut pour ne pas louper un phénomène céleste qu'elle avait calculé pendant la journée grâce à ses cartes du ciel et ses calendriers lunaires. Soudain, l'image d'Hanna lui donna la clé et il comprit.

- On monte sur le toit, c'est ça ?

- Ah l'esprit Serpent Cornu a encore frappé, déclara Noah, même s'il semblait déçu que Julian ait deviné.

Il s'en voulu presque aussitôt d'avoir verbalisé sa découverte, mais sa curiosité le poussa à continuer :

- Mais... on a le droit ?

Cette fois, Noah ne prit pas la peine de répondre. Il lui renvoya simplement un regard équivoque comme s'il se moquait d'un élève plus jeune et innocent. Pour la énième fois, Julian rougit.

- T'as peur d'une retenue, Shelton ? Lança Noah.

- Non...

- Parfait. Alors bienvenu dans l'envers du décor.

Et d'un coup d'épaule, il ouvrit la porte qu'ils venaient d'atteindre après avoir gravi une dernière volée de marche poussiéreuse et biscornue. Le plafond, qui s'était fait de plus en plus bas, laissa place à l'infinité du ciel. Julian passa l'embrasure, incertain. Devant lui se déployait un vaste belvédère : la terrasse s'élançait au-dessus du vide au milieu des tours et des tourelles du château qui perçaient le firmament. Le vent soufflait encore plus fort ici et produisait un bruit implacable, comme s'il cherchait à compenser le silence du château vidé de ses élèves. Julian avança lentement jusqu'au parapet. En contre-bas, il avait une vue imprenable sur le parc éclairé par les fantômes et les lumières de sort. Ses camarades formaient des points minuscules qui se mouvaient de loin.

- C'est incroyable... souffla-t-il. Comment... ? Comment tu savais ?

- Je viens souvent ici, révéla Noah en s'accoudant à la balustrade à côté de lui. Fleming laisse toujours la porte ouverte quand elle vient fumer. Je pense qu'elle en avait marre de la fermer et de l'ouvrir à chaque fois. (Il haussa les épaules). Pas de chance pour elle, j'ai tendance à traîner là où je devrais pas, ajouta-t-il non sans une certaine fierté.

Julian tenta de s'imaginer sa nouvelle directrice de maison et professeur de sortilèges en train de fumer seule sous les étoiles. L'image avait quelque chose de poétique et triste à la fois.

- Et t'es sûr qu'elle va pas débarquer ce soir ?

- Elle est au bal à superviser les fantômes et les autres, assura Noah. Le toit est à nous !

D'un geste grandiloquent, il écarta les bras comme pour englober tout l'espace et Julian se surprit à sourire, ce qu'il n'aurait pas crut possible il y a trente minutes. Noah sembla le remarquer car il le pointa du doigt, tête inclinée sur le côté.

- T'as une meilleure tête, commenta-t-il.

- Pas très dur, rétorqua-t-il, embarrassé. Désolé pour tout à l'heure, ça a dû vous paraître bizarre... C'était idiot...

- Quoi ? De vouloir revoir ta mère ? Plutôt normal, si tu veux mon avis...

Il haussa les épaules et plongea la main dans sa poche pour en sortir un paquet de cigarette. D'un geste, il en sortit une du paquet et la porta à sa bouche avant de l'allumer du bout de sa baguette. Julian, qui avait déjà dû subir l'odeur du tabac avec Leonidas, fronça le nez.

- Tu fumes ? Dit-il.

Immédiatement, il se trouva ridicule à énoncer l'évidence et il aurait voulu pouvoir ravaler sa phrase.

- Perspicace. Et toi tu serais pas anglais ? Rétorqua Noah avec sarcasme avant de tendre le paquet vers lui. T'en veux une ?

- Non...

- Laisse-moi deviner. T'as jamais essayé ?

- Pour faire comme tout le monde ? Non merci, je suis pas intéressé. J'ai déjà du mal à monter les escaliers jusqu'ici, mes poumons ont pas besoin de ce genre de trucs.

Au moins, la réponse lui était venue facilement. Il était sincère, il détestait l'idée de fumer. Matthew avait essayé quelques fois l'année dernière pendant des fêtes, mais il n'avait eu l'air d'apprécier et la réaction de son meilleur ami l'avait conforté dans son choix. Noah parut apprécier sa réponse car il tira une bouffée, le coin de la bouche relevée.

- Je fume seulement de temps en temps, expliqua-t-il au bout de quelques secondes. Pour me détendre.

- Et comment tu les trouves ? Ta tante tient un marché noir en plus de son café ?

- Morgane, non. Ça serait bien la dernière chose qu'elle pourrait faire. Non, je les achète à Grand Central à la rentrée. J'en prends plusieurs paquets pour le semestre.

- A Grand Central ? S'étonna Julian. Tu dois quand même aller à New York pour prendre le train ? Mais... tu vis littéralement au pied du château !

- Avancer, revenir en arrière, retour à la case départ, énuméra Noah en prenant un air philosophe. L'histoire de ma vie !

Sur le coup, Julian ne sut pas quoi faire de cette remarque. Comme souvent, il n'arrivait pas à déterminer si Noah faisait de l'humour ou non et il ne le connaissait pas encore assez pour savoir s'il disait la vérité. Faute de mieux, il se contenta de secouer la tête en souriant.

- Tu devrais dire ça à la directrice, elle y réfléchirait peut-être.

- Hicks ? Tu parles... Elle est perchée dans sa tour d'ivoire. Ou du moins elle l'est quand le MACUSA n'est pas là.

D'un geste, Noah désigna le parc du château en contrebas. De là où ils étaient, ils ne pouvaient pas distinguer précisément les silhouettes, mais Julian se souvenait parfaitement de la directrice qui discutait avec les hommes au logo du MACUSA brodé fièrement sur leur robe de sorcier. Plus il l'observait, plus il remarquait que Noah avait un problème avec l'autorité : la directrice, les professeurs, sa tante... Il passait son temps à les fuir ou à leur répondre et il ne comprenait pas pourquoi. Aucun d'eux n'avait pourtant paru hostile envers lui. Les professeurs, comme Fleming au club de duel, l'encourageaient même à exploiter ses capacités.

- Pourquoi tu ne les aimes pas ? Eut-il le courage de demander sur un coup de tête, enveloppé par l'obscurité. Les profs ou la directrice.

- Quoi ? Je devrais faire des soirées pyjama avec eux ?

- Je n'ai pas dit ça, protesta-t-il en riant. Mais ils ne m'ont pas semblé si mal depuis que je suis arrivé.

- T'es là depuis deux mois, c'est pour ça, dit Noah avant de de porter sa cigarette à ses lèvres et d'en exhaler la fumée. Je sais pas... reprit-il finalement après avoir réfléchi quelques secondes. Je crois que ce qui m'agace chez la plupart des adultes, c'est leur esprit fermé.

Julian fronça les sourcils.

- Comment ça ? Dit-il, intéressé.

- Je veux dire... Prends le dessin par exemple. L'art en général même. Ça ne t'énerve pas que personne ne s'en soucie ? Pourquoi on arrive à voir quelque chose qu'ils n'arrivent pas à voir ? (Il marqua une pause avant de répondre à sa propre question). Parce qu'ils ne prennent pas le temps de s'y intéresser ni de regarder. Si ça n'a pas un intérêt direct, comme une bonne note, un métier à la clé ou de l'argent à gagner, ça ne les intéresse pas. Ma tante dit que le dessin ne me mènera nulle part.

Julian pencha la tête. L'amertume de Noah, il la ressentait en écho au fond de lui. Il n'y avait peut-être jamais prêté attention, mais maintenant qu'il posait des mots sur cette impression, il sentit s'agiter en lui aussi un sentiment d'injustice : tout le monde l'avait toujours encouragé à travailler les sortilèges à cause de ses pré dispositions en la matière, mais à part sa mère personne n'avait considéré le dessin comme quelque chose de sérieux. Instinctivement, il voulut la défendre.

- Pas tous les adultes, nuança-t-il. Ma mère aimait l'art, elle trouvait que c'était important. Quand elle m'emmenait pas aux Archives magiques, on allait à des expositions. Je m'ennuyais au début, mais elle me montrait toujours des tableaux avec des personnages à la tête bizarre. Ça me faisait rire.

- T'avais quel âge ?

- Je ne sais plus... Huit ou neuf ans.

Noah eut un sourire tordu.

- Le prodige en tout, s'exclama-t-il. Laisse-moi deviner, tu reproduisais du De Vinci à dix ans ?

- N'importe quoi...

Piqué au vif, il détourna le regard. Il avait aussi remarqué ça sur Noah : il mettait derrière ses blagues apparemment anodines une pointe ardente qui atteignait toujours sa cible, comme s'il changeait d'humeur ou ne pouvait s'empêcher de se servir de sa langue acérée pour éviter de se dévoiler. Pourtant, incapable de supporter le silence, il reprit :

- Je me suis déjà demandé pourquoi les sorciers ne s'intéressaient pas à l'art, tu sais. Je pense que c'est plus une question de mentalité que d'adultes. Je veux dire, les moldus s'y intéressent eux.

- Les moldus, répéta Noah en faisant rouler les sonorités anglaises, l'air amusé.

- Les Non-Maj', c'est pareil, se corrigea-t-il d'un geste de la main impatient. Bref, je pense que c'est pour des raisons historiques. Tout nos attributs sont hérités du Moyen-Age : les plumes, les parchemins, nos architectures les plus importantes... C'était justement l'époque où on interagissait encore avec les moldus – les Non-Maj' pardon – et que la magie faisait partie du quotidien, même si elle faisait peur. Avec le Code du secret magique, les interactions se sont arrêtées. La société moldu a continué à avancer techniquement pendant qu'on prenait du retard. La plupart des sujets de nos tableaux datent d'il y a plusieurs siècles... On n'a même pas commencé à investir le cinéma !

Noah, attentif, hocha la tête même si Julian voyait bien qu'il ne savait pas ce qu'était le cinéma.

- J'aime bien ta théorie, approuva-t-il malgré tout. J'ai toujours trouvé ça idiot qu'on n'ait pas de musée d'art. Hilda refusait que j'y mette les pieds chez les Non-Maj'.

- Les sorciers ne voient de la beauté que dans la magie, c'est pour ça... Regarde la photo ou la peinture, ça n'a d'intérêt pour eux que s'ils les ensorcellent.

- Eux ? Ou nous ?

Julian lui accorda le point. En tant que sang-mêlé, il avait toujours été entre deux mondes, même si la magie faisait partie intégrante de sa vie. Il avait juste appris à cloisonner pour certaines choses. En ce qui concernait l'art, il avait clairement choisi son camp.

- C'est juste que... Les sorciers travaillent tellement la magie, ils l'ont poussé et en ont repoussé les limites. La magie est l'équivalent d'un art pour eux. Pourquoi ils auraient besoin d'autres choses ?

- Parce que l'art exprime quelque chose de la vie que la magie ne pourra jamais faire, répondit Noah sans hésitation.

Julian acquiesça. A nouveau, l'absolu exprimé par Noah raisonna en lui.

- Je pense vraiment que le Code du secret a tout changé, reprit-il, pensif. Ça a marqué la fracture symbolique et politique avec le monde moldu. L'art s'est délité chez les sorciers et le gouvernement devait avoir peur que des moldus tombent par erreur sur des peintures qui bougeaient, des dessins ensorcelés... Ca aurait été dur à expliquer.

- T'imagines ? Railla Noah. John-Mr-Tout-Le-Monde qui rentre du travail et se fait provoquer en duel par une peinture de chevalier ?

- Tu serais capable de faire ça, je suis sûr.

- Quoi ? Ensorceler un dessin pour qu'il provoque les autres en duel ?

- Non, ensorceler un dessin pour rendre la vie impossible à Liam par exemple.

Noah éclata de rire. Il avait un rire étonnement grave et la fumée de sa cigarette tournoya dans l'air, informe. Il n'avait pas le talent de Leonidas pour lui donner des formes en tous genres.

- N'empêche, même si le gouvernement avait peur, je trouve que c'est des conneries qu'on nous apprenne rien d'artistique, s'agaça Noah, vindicatif. Je veux dire, on comprend assez facilement par nous même comment animer un dessin, mais la technique pour peindre un portrait en donnant une âme à un sujet, ça c'est intéressant.

- Tu pourrais apprendre, suggéra-t-il. Après Ilvermorny. Il doit y avoir des instituts de magie supérieure qui propose ça...

- Comme si Hilda me laisserait. Aucune chance. Avec elle, je dois finir au MACUSA ou reprendre le café. « Faire quelque de ta vie, mon garçon », imita-t-il d'un ton sec assez proche de celui de sa tante.

- Mais Raphaël... Elle le laisse faire du balai à haut niveau, non ?

Noah émit un rire étouffé et cynique.

- Seulement parce que les recruteurs s'intéressent à lui depuis quelques mois. Sinon, elle n'aurait jamais changé d'avis.

- Un trait de famille, peut-être ? Suggéra Julian innocemment.

Il l'avait bien constaté, Noah n'était pas la personne la plus souple au monde et ses avis étaient souvent tranchés.

- Eh ! Protesta-t-il. Je peux changer d'avis : je l'ai fait sur toi.

- Moi ?

Etonné, il se tourna vers Noah pour lui faire face. Il n'avait pas eu l'impression que son camarade de dortoir l'ait traité différemment ces deux derniers mois : depuis le début, Noah se contentait de se moquer de lui à ses heures perdues et de lui imposer sa présence dans le dortoir lors de ses séances de dessin. Leurs séances de dessin en vérité désormais.

- Toi, acquiesça Noah avant d'expliciter sans ambages comme à son habitude. Je te trouvais agaçant avec ton accent, ton air de premier de la classe et ta manie de tout ranger. C'est presque angoissant.

- Angoissant ? S'amusa-t-il, moitié vexé moitié surpris que Noah ait relevé ce genre de détails à son sujet. Excuse-moi de vouloir retrouver mes affaires. Si je ne fais pas ça, je peux passer une heure à rechercher mes crayons avant de les retrouver sous ton lit !

- Je sais toujours très bien où je les laisse, assura Noah.

- C'est ça...

Julian secoua la tête, peu convaincu. Vivre au quotidien avec Noah, Liam, Enjolras et Wilde n'était pas la chose la plus facile. Il ne comptait plus les fois où il avait trébuché sur un accessoire de Quodpot qui traînait par terre ou retrouvé ses affaires déplacées. Il avait failli faire une crise de nerf lorsque Wilde avait bougé son écharpe de Serdaigle sans le prévenir et qu'il l'avait cherché pendant une heure. Vu son regard, Noah s'en souvenait aussi car il tendit la main et attrapa le bout de la dite écharpe avant de tirer doucement dessus.

- C'est celle de Poudlard, c'est ça ?

- De Serdaigle, se sentit-il obligé de préciser.

- J'aime bien les couleurs.

- Moi aussi... De toutes les maisons, le bleu et le bonze ont toujours été mes préférées. Ça énervait Matthew et sa foutue fierté de Gryffondor.

- Matthew... Le meilleur ami, hum ?

Noah fixait à nouveau le parc en contrebas et Julian n'arriva pas à distinguer son visage, mais quelque chose dans sa voix le fit tiquer. Il se contenta d'acquiescer.

- Ouais... Matthew Bones.

- Et ta copine ? Sarah ?

- Hanna, corrigea-t-il en grimaçant.

- Ah oui, elle... Alors ? Tu lui as écrit finalement ?

- Oh oui, ça fait un moment... On s'envoie des lettres, ça va mieux. T'avais raison, le dessin était sans doute une bonne idée pour rétablir le contact. Ça me faisait juste bizarre de lui reparler, mais c'est passé je crois.

- Et pourquoi ça te faisait bizarre ?

Toujours sans le regarder, Noah écrasa sa cigarette sur la balustrade du parapet. La lueur grésillante qui avait faiblement éclairé son visage jusque-là disparu et Julian se concentra sur ses mains. Il hésita pendant un court silence à révéler à Noah ce qu'il avait enfin compris cette après midi en discutant avec son parrain, mais le poids des mots fut finalement trop lourd dans sa poitrine et il s'en déchargea :

- Tu vas trouver ça tordu mais... On ne s'étaient pas revus elle et moi après... la mort de ma mère.

Si Noah fut surprit, il ne le montra pas.

- Tu pensais qu'elle ne comprendrait pas ? Dit-il.

- Non, c'est pas ça... Hanna est une fille empathique, elle m'aurait soutenu, je le sais. Mais... Elle aurait été là trop tard. Je sais que ce n'est pas de sa faute si elle n'était pas là, personne n'aurait pu prévoir. Mais le temps qu'elle revienne, l'enterrement avait déjà eu lieu, j'avais été au Ministère subir les discours des politiques sur le drame que l'attentat avait été pour notre communauté et toutes leurs conneries... C'était idiot de lui faire un résumé de ce que je ressentais depuis des semaines. Je ne savais pas quoi lui dire, ni comment lui dire...

- Et maintenant ? Avec le recul ? Tu trouves quoi dire ?

Julian baissa la tête, l'estomac lourd.

- On évite le sujet on va dire, avoua-t-il. On parle de plein de choses comme d'habitude, de ce qui se passe à Poudlard et ici, mais pas de ma mère... C'est sans doute plus simple comme ça, je ne veux pas lui imposer...

- Comme tu n'as pas voulu l'imposer à Aileen et Liam ?

Le ton n'était pas accusateur, mais Noah le mettait clairement et volontairement face à ses choix. Presque embarrassé, il se tordit les mains et repéra des tâches de fusain noire sur sa peau. Il les frotta mécaniquement.

- Liam avait assez à gérer avec la disparition d'Emilia, se justifia-t-il. Et Aileen a déjà fait beaucoup pour moi depuis que je suis arrivé au château, je ne voulais pas ajouter ça en plus...

- Le « ça » en question te pèse plutôt pas mal pourtant. A juste titre.

Cette fois-ci, Noah laissa filtrer une certaine compréhension dans ses paroles et Julian se souvint brusquement de ce qu'il lui avait dit sur sa propre mère : il savait ce que c'était de ne plus en avoir une parce que la sienne avait décidé qu'elle ne voulait pas de ses fils. La curiosité le poussa.

- Qu'est-ce qui s'est passé avec la tienne ? Pour que tu vives chez ta tante ?

- T'essayes de détourner la conversation de toi ?

- Non, je veux vraiment savoir. C'est toi qui en a parlé une fois.

Noah le fixa longuement, comme s'il tentait de le percer à jour et voir s'il disait la vérité. Il soutint son regard et Noah soupira. Avec un dernier coup d'œil au bal des fantômes en bas, il se retourna puis se laissa glisser au sol, dos contre le muret et jambes repliés devant lui. Julian l'imita. Assis par terre, ils ne subissaient plus l'assaut du vent et il sentit les muscles de son corps se détendre. Il avait mal partout, surtout au niveau du torse. Sa crise de panique de tout à l'heure lui avait coupé le souffle douloureusement et il en ressentait encore les effets.

- C'est compliqué et simple à la fois, commença à raconter Noah d'une voix désincarnée. Ma mère a toujours été un peu spéciale. T'as vu ma tante ? Imagine l'exact opposé. Hilda a toujours eu un esprit assez terre à terre, elle a conscience des choses je pense... Ma mère ? Elle aime vivre. Elle n'a pas besoin de l'approbation des autres, elle n'aime pas les convenances. Avec Raphaël, quand on était petits, elle nous laissait faire ce qu'on voulait. On pouvait partir en vacances à l'improviste et revenir des jours plus tard. Hilda détestait ça : elle disait qu'on ne devait pas louper l'école et qu'on devait faire ce qu'elle disait parce qu'elle était l'adulte.

Julian se retint d'intervenir. A ses yeux, les revendications de Hilda paraissaient légitimes. Il comprenait mieux le portrait que lui avait dressé Théa lorsqu'elle lui avait raconté que Heather Douzebranches ressemblait à une adolescente sur le tard. Et ça ne l'étonnait pas non plus que Noah, au vu de sa personnalité, oscille entre colère et admiration pour elle. Parce que dans le fond, il ne paraissait pas bien différent. Il lui donna raison en poursuivant :

- Elle nous laissait souvent chez Hilda enfants... Parfois, elle pouvait décider de partir avec des amies ou en voyage et elle pouvait pas nous emmener. Elle nous laissait sur le pas de la porte du café et Hilda nous récupérait à l'ouverture. Dès qu'elle nous voyait, elle avait l'air en colère. Je la revois encore se figer à chaque fois quand elle ouvrait le rideau. Et puis elle ouvrait la porte d'un coup de baguette comme si on venait de foutre en l'air sa journée. On était un peu un fardeau pour les deux, j'imagine.

A nouveau, Julian s'empêcha d'intervenir pour ne pas couper l'élan de Noah maintenant qu'il s'était décidé à parler. Mais s'il avait dû faire une hypothèse, il n'était pas sûr qu'Hilda ait été en colère après les deux enfants déposés devant sa porte. Sa sœur en revanche... Il supposa que la nuance avait dû être dure à percevoir pour un petit garçon balloté entre deux maisons et que, même aujourd'hui, la vision de Noah était trop influencée par son ressenti enfant pour être complètement objectif.

- Mais y'avait du bon aussi... continua Noah, insensible à ses pensées. (Il leva les yeux vers les étoiles). Hilda nous faisait toujours à manger, elle n'oubliait jamais si on avait un contrôle ou un mot à signer pour le lendemain. Elle nous lisait des histoires. Raphaël voulait toujours celle des Trois Frères... Je ne sais pas si vous la connaissez en Angleterre ?

- Si, si, elle est connue... Le père de Matt lui lisait souvent, je crois, se rappela-t-il.

- Hum... Enfin bref, un jour Hilda en a eu assez. Elle s'est mise à dire les quatre vérités à ma mère et elles se sont disputées. Ma mère disait qu'elle n'avait jamais prévu de nous avoir, qu'elle ne savait juste pas comment mais qu'elle allait faire mieux maintenant. Qu'elle allait nous emmener à Chicago pour tout recommencer.

- A Chicago ?

Noah déglutit. Ses doigts se crispèrent, comme s'il avait envie de reprendre une cigarette.

- C'est là où habite mon père, lâcha-t-il en regardant droit devant lui. Aux dernières nouvelles du moins...

- Oh...

C'était idiot, mais Julian n'avait pas songé un instant où pouvait bien être le père de Raphaël et Noah dans le tableau. Hilda remplissait très bien le rôle de deuxième parent et naïvement il s'était imaginé que le mari d'Heather était mort aux alentours de la naissance des garçons.

- Ils ont divorcé ? Demanda-t-il après quelques secondes.

- Ils n'ont jamais été mariés, corrigea Noah. Là encore, c'est compliqué et simple à la fois. Une histoire vieille comme le monde : elle était amoureuse de lui et lui se fichait d'elle. Leur histoire a duré par intermittence. Elle a tenté de lui faire deux enfants pour le retenir, mais il l'a quitté à chaque fois. Ça ne l'empêchait pas de vouloir nous emmener à Chicago en espérant qu'on vive en famille. C'était assez paradoxal, elle ne voulait pas d'une vie classique, mais elle se disait justement qu'avec lui elle pourrait continuer à être libre, mais qu'on aurait un père...

- Ca n'a pas fonctionné, devina Julian.

- Non, pas du tout. La dernière fois qu'on s'est pointé chez lui, il a dit qu'il voulait bien nous donner un peu d'argent mais pas nous laisser rester.

Sous l'éclairage du ciel nocturne, les traits de Noah paraissait plus figés que jamais. Ses boucles noires prenaient un reflet argent et ses mains s'étaient repliées en poings contre ses genoux. Julian n'arrivait pas à détacher ses yeux du portrait qu'il offrait. Il sentit une vague de colère monter en lui envers les adultes de la vie de Noah : la mère irresponsable qui n'avait pas su être mère alors que deux petits garçons en avaient fait les frais, la tante qui s'était vu imposée un rôle qui n'était pas le sien sans essayer prendre en compte leurs émotions, le père qui n'avait pas assumé ses actes...

- Qu'est-ce qui s'est passé alors ? Souffla-t-il. Pour que vous restiez chez Hilda ?

- Comme je disais, ma mère et elles se sont engueulées. Hilda a accusé ma mère d'être incapable de s'occuper de nous et ma mère s'est vexée. Elle nous a demandé avec laquelle on voulait vivre...

- Elle a... quoi ? Mais vous aviez quel âge ?

- Six et quatre ans, dit Noah avec un rire amer. Je te laisse imaginer ce qui passe dans la tête de deux gamins quand les deux seules femmes qui s'occupent d'eux leur demandent de choisir...

- Merlin...

Il ferma brièvement les yeux. Quand il les rouvrit, il s'aperçut que Noah s'était enfin tourné pour lui faire face. Il déglutit. Dans la nuit, ses yeux bleus se confondaient avec l'obscurité.

- Vous avez choisi qui ? Osa-t-il demander, hésitant.

- Raphaël a choisi Hilda. Ils sont toujours mieux entendus, tous les deux. Moi... j'ai hésité. J'aimais la vie avec ma mère. C'était toujours drôle, imprévu... Elle peignait beaucoup, version Non-Maj'. Ça rendait mes grands-parents dingues apparemment quand elle était plus jeune. Elle me laissait peindre avec elle. On mettait nos mains dans la peinture et on faisait des toiles comme ça.

Julian sourit devant l'image. Il n'avait pas de mal à imaginer Noah et son aversion pour les règles s'épanouir dans ce genre d'environnement créatif et libre. Plus que tout, ça lui faisait penser à sa propre mère et à leur matinée à dessiner ensemble. Il eut l'impression que le lien qui l'unissait à Noah par le dessin se renforçait soudain : ils ne devaient pas leur passion à eux-mêmes, mais à leur mère. Et même si elles étaient radicalement différentes l'une de l'autre, elles avaient été habitées par la même énergie.

- Alors tu l'as choisi ? Ta mère ?

Noah se mordit la lèvre. L'attente parut interminable et quand il ouvrit la bouche, sa voix se réduisit à un murmure.

- Non...

- Tu... Tu as choisi ta tante...

- Non plus. Je n'ai rien dit. Je n'ai pas réussi... (Il s'étouffa à moitié et se râcla la gorge avant de reprendre). Alors ma mère a attrapé sa cape et elle est partit. Juste comme ça. Elle nous a laissé chez Hilda.

Agité, il se passa une main dans les cheveux et tira sur une de ses boucles. Julian eut envie de l'arrêter, mais il n'osa pas le toucher.

- Je lui ai couru après, Jules... J'ai essayé de la rattraper, mais elle m'a repoussé. Elle a dit que je devais rester avec ma tante et que c'était mieux comme ça... Voilà, c'est tout.

Dans cette fin abrupte, Julian entendit tout ce que Noah ne disait pas : les sentiments chaotiques qu'avaient dû ressentir un petit garçon de six ans, les années suivantes avec ce qui s'était passé entre ce fameux jour et aujourd'hui, comment tout ça avait forgé sa vision du monde qui l'entourait... Pourtant, il tiqua sur autre chose et haussa un sourcil.

- Jules ? Répéta-t-il.

- Plus court que Julian, se défendit Noah en accentuant de façon exagérée son accent américain pour faire sonner son prénom étrangement.

Il retint une grimace, puis laissa le surnom résonner dans sa tête avant de l'essayer à voix haute :

- Jules... J'aime bien.

- Charly avait déjà pris « Ju' ».

- Tout le monde a déjà pris « Ju' ». Matt, Lottie, mes parents... Ma mère m'appelait comme ça quand j'étais petit, c'est pour ça...

Et il réalisait à cet instant qu'il était reconnaissant envers Noah de ne pas utiliser ce surnom. C'était la marque de son nouveau départ aux Etats-Unis, celui qu'il ressentait depuis son arrivée dans le nouveau monde.

- Tu pourras me parler d'elle un jour si tu veux... proposa soudain Noah avec une prudence peu coutumière chez lui, les doigts crispés sur ses genoux.

- De ma mère ?

- Hum... Vraiment en parler, je veux dire. Pas juste quand il faut annoncer ce qui s'est passé aux autres comme ce soir.

Avec force, le rappel de Liam et Aileen qu'il avait planté au bal lui revint à l'esprit et il contrôla son anxiété avant qu'elle ne s'empare à nouveau de lui. Il pourrait gérer ça demain. Derrière la proposition de Noah, il percevait aussi surtout sa vulnérabilité à s'être confié et sa tentative pour le pousser à en faire de même, comme pour être à nouveau sur un pied d'égalité.

- Je le ferai... promit-il, la gorge obstruée. Juste... pas ce soir, ok ?

- Pas ce soir, répéta Noah en hochant la tête. Ce soir, c'est juste toi et moi.

Julian eut un léger sourire. Il aimait cette idée. Juste Noah et lui sur le toit d'Ilvermorny le temps d'un soir.

Après tout, les fantômes ne pouvaient pas les atteindre ici.

*************************

Ce chapitre marque un peu un tournant dans la fanfic : le lien entre Noah et Julian commencent vraiment à naître. Au passage, je remercie les trois autres filles du Quatuor Infernal pour leurs idées sur l'art chez les sorciers, ça m'a énormément aidé ! Et dernière précision : je précise que l'idée de Noah qui doit choisir entre sa mère et sa tante m'a été fortement inspiré par le film Nowhere Boy que je conseille à tous!

Eléments tirés du canon/Pottermore:

- William le concierge puckwoodgenie

Prochain post : Chapitre 19 - Lundi 10 mai
Scandium

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Scandium »

Wow, super chapitre, j'ai pas vu le temps passé !

J'aime beacoup trop leur relation !! Jai vraiment eu un coup de coeur sur toute la discussion sur l'art en général, sur les Moldus, sur leurs mères qui leur ont transmis leur passions, sur les histoires de familles dramatiques, sur le fait de pas supporter les adultes ou l'autorité. Franchement, c'était très riche et très intéréssant à chaque fois ! J'ai adoré plein d'éléments, pleins de petits détails ! Bravo pour ce super dialogue.

ECe chapitre m'a personnellement fait penser à un manga très récent qui s'appelle Blue Period. J'ai lu que deux tomes mais c'est un jeune qui fait de la peinture et qui veut faire des études d'art alors que pourtant il a des bonnes notes et l'art c'est pas un vrai métier et patati et patata. On apprends plein truc sur l'art et y a aussi toute une dimension sur l'acception de soi, et la tolérance aux autres,les différences bref je conseille fortement et je sens que le couple principal va être aussi fou.

Oops, j'ai disgrésse, pardon pardon !! Non mais en tout cas c'est super bien écrit, on voit bien que c'est un moment charnière dans la relation Julian/Noah. Il y a avais tout, les confidences, les moqueries, le nouveau surnos, leurs point communs, des idées sur au contraire leur différence, ce qui pourrait leur éloigner, le début de jalousie quand Julian évoque Hannah et Mathew, Noah qui lui parle de la première impression qu'il avait eu de lui et qui a maintenant changé ... Il y avait plein de petits prémices c'était chouette. Julian le mate beaucoup aussi ! Il est vraiment pas discret en plus, ce pas doué :D :D Franchement, Noah a déjà l'air so in love ! Alors que Julian est plus dans la découverte de ses sentiments, il a pas encore mis le doigts dessus ! Mais ça ne saurait tarder, je crois en toi Julius ! (oui, moi je le suromme Julius !)

Bravo à toi, super chapitre, j'ai hâte de voir comment ça va évoluer !

(et je suis désolée de pas avoir commenté la dernière fois. J'étais un peu énervée de la réaction de Liam et Aileen quand il s'est rendu compte que Julian avait pas voulu se confier. Du coup je m'étais dit que j'écrirai plus tard mon comm, mais j'ai zappé :D :D )
Charmimnachirachiva

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !!!
Aaaarrrrrrggggg J'ADORE ce chapitre !!!!!!!!
Les confidences de Noah sont trop touchantes, ça explique tout (bon ok pas le fameux incident avec Liam mais PRESQUE tout). L'analyse de Julian est tellement bien faite ! elle permet de comprendre les sentiments de Noah sans que celui-ci ai à les expliciter (parce que ça ne collerait pas à son caractère je trouve). Et même si Hilda n'est pas toujours très sympa, elle est quand-même présente pour Noah et Raphael et elle a acceptée de les prendre en charge. Elle a ses défauts mais je trouve que je trouve que rien que ça ça prouve qu'elle aime ses neveux.
Et Noah qui surnome Julian Jules, c'est juste trop mims !!!!!!!! 8-) 8-) Mais je garde le monopole du surnom Juju :lol:
Sinon, pauvre Juju, il est perdu et sa mère lui manque trop :cry: :cry:
Et juste, à chaque fois que je lis le nom de Matthew Bones, j'ai à la fois envie de pleurer et sourire...
cochyo

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par cochyo »

J’ai adoré ce chapitre.
Fort, profond, avec beaucoup de réflexion.
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Chapitre 19: God save the Minister

«Les vivants sont trop bien unis aux vivants pour que j'accepte les frontières fermées. »

- Oskar Wadyslaw et Lubicz Milosz -


// 4 novembre 1979 //

Après sa soirée d'Halloween si ambivalente entre sa crise de panique et son moment avec Noah sur le toit d'Ilvermorny, Julian avait été incertain quant à la réaction de Liam et Aileen le lendemain matin. Il connaissait maintenant assez le premier pour savoir qu'il pouvait être rancunier, mais lorsqu'il descendit plus tard que d'habitude au petit déjeuner avec appréhension, ses deux amis se contentèrent de lui tendre une tasse de thé en guise de bonjour. Le message derrière était clair : ils oubliaient. Il avait senti un souffle soulagé le quitter et il s'était assis entre eux, apaisé. Aucun d'eux ne lui demanda où il avait passé le reste de la soirée, ce qui l'arrangeait bien. Il n'était pas sûr que Liam prenne bien le fait qu'il soit resté avec Noah. Au moment de partir en cours, Aileen s'était contentée de lui poser une main sur le bras et de murmurer à voix basse pour que leurs camarades n'entendent pas : « on est désolés pour ta mère... On a réagi un peu excessivement. Mais si tu veux en parler, je suis là... promis ». Il l'avait remercié avec un sourire. Comme toutes les personnes qui lui avaient proposé de parler, il sentait bien qu'Aileen était sincère. Pourtant, il savait qu'il n'arriverait pas à lui parler, pas plus qu'il n'y arrivait avec Hanna ou Leonidas ou même Matthew. Son rejet n'avait pas été aussi catégorique avec Noah... D'une certaine façon, lui aussi savait ce que c'était de ne pas avoir sa mère, il connaissait la douleur de l'absence. Mais même dans ce cas-là, la peine de Noah était différente. L'absence de sa mère n'avait pas le caractère absolu de la mort de la sienne. Et il n'était pas certain de réussir à dépasser ça.

Au moins, il était déjà soulagé que les choses se soient arrangées d'elles-mêmes avec Aileen et Liam, surtout parce qu'ils avaient tous les trois d'autres chaudrons sur le feu. Métaphoriquement et littéralement.

- Foutu camelote ! Ragea Liam. Non, non !

- Attention, tu vas le casser...

- Aileen, tu vas pas m'apprendre à mélanger une potion.

- Pas à mélanger une potion, non, mais j'ai récupéré le chaudron au fin fond d'une remise. Il n'est clairement plus tout jeune et c'est le seul qu'on a pour le moment ! Lui rappela-t-elle. Alors fais attention !

Elle ponctua son injonction d'un regard sévère. Julian resta en retrait contre le mur, mais n'en pensa pas moins. Ils étaient venus avant le début des cours pour jeter un œil à leur potion mise en route la veille. Le problème ? Si seulement il y en avait un seul... Le contre-rituel demandait un mélange de plusieurs potions pour former un philtre puissant, mais ils n'avaient réussi à récupérer qu'un seul chaudron dans une remise où s'entreposaient des objets cassés et inutilisés. Leur pauvre chaudron en étain devait avoir une bonne vingtaine d'année et avait pâle figure tandis que bouillonnait dans son ventre leur potion.

- Je ne suis même pas sûr qu'il soit aux normes, marmonna Liam. On a mesuré son fond ?

- Bon arrête de te plaindre. C'est déjà bien qu'on ait un chaudron alors accepte-le tel qu'il est.

- Oh pardon je ne voulais pas vexer Albert le chaudron, railla-t-il.

Julian se mordit la lèvre pour ne pas rire. Aileen, qui devait avoir des yeux derrière la tête, se retourna pour le fusiller du regard.

- Un commentaire ? Fit-elle en le pointant du doigt.

- Moi ? Non ! J'adore Albert, assura-t-il avec un entrain feint.

Ce fut à Liam de pouffer. Aileen soupira, même si un sourire amusé manquait de la trahir à la commissure de ses lèvres.

- Bon, peu importe. Combien de temps celle-ci va prendre ?

- Cette potion-là ? Elle devrait être prête dans une heure, jugea Liam en se penchant par-dessus le bord du chaudron. C'était la plus simple de toutes à faire d'après ce que les runes indiquent.

- Et les autres ?

- Ca va être un peu plus corser, grimaça-t-il. Il n'y avait qu'une seule possibilité pour celle-là, c'est une potion assez basique utilisée d'habitude pour l'engrais des plantes... Les autres sont plus sensibles, les runes ne donnent pas exactement leurs noms ou leurs compositions mais juste leurs effets. Va falloir faire des tests et des essais... Et il nous manque toujours la poudre de corne de licorne.

- Pas sûr qu'Albert tienne le coup pour tout ça, intervint Julian, soucieux.

- Mais arrêtez ! Protesta Aileen en faisant un grand mouvement du bras. On ne va pas sérieusement appeler notre chaudron Albert.

Liam haussa un sourcil, amusé.

- Pourquoi ? Rétorqua-t-il. Tu discrimines le prénom Albert ?

- Ce que je discrimines, c'est toi et tes idées.

- Tu dis ça parce qu'il est né-moldu ? Se moqua Julian. Comme par hasard...

- Ah ! Ah ! Merci, Ju'! S'exclama Liam d'un faux air indigné. Démasquée, McCallum !

Ils échangèrent tous les deux un regard complice. Plus les jours passaient et plus Julian se sentait à l'aise avec Liam et son humour qui lui rappelait Matthew. Incapable de réprimer son sourire, Aileen tenta quant à elle de donner le change en croisant les bras sur sa maigre poitrine et s'écarta d'eux.

- Vous êtes des imbéciles, tous les deux, se contenta-t-elle de dire. Et on aurait vraiment dû apporter des chaises, y'a vraiment rien ici, ajouta-t-elle après avoir tourné sur elle-même et réalisée qu'elle n'avait nulle part où s'asseoir loin d'eux.

- C'est vrai que des chaises seraient pas du luxe, on va passer du temps ici...

- On verra si on peut en trouver, promit Julian. Mais on ferait mieux d'y aller, le cours d'histoire commence dans cinq minutes.

Liam hocha la tête.

- On reviendra voir la potion avant le déjeuner, approuva-t-il en attrapant deux rouleaux de parchemin vierge qui traînaient.

- Eh ! Ceux-là, c'est pour mes brouillons de recherches de sortilèges, dit Julian.

Il tenta de les reprendre des bras de Liam, mais il l'évita et courut presque vers la porte d'entrée.

- Dommage, j'ai oublié les miens pour les cours. Ça fera l'affaire ! Merci, mec !

Et juste comme ça, il était déjà parti. Julian roula des yeux. A ce rythme, son stock de parchemins ne tiendrait pas longtemps et il faudrait qu'il demande à Isadora de lui en renvoyer. Il s'adressait peut-être plutôt à Leonidas. Ça devait bien rentrer dans ses obligations de parrain.

Son sac sur l'épaule, il referma la porte de la salle de classe vide et Aileen se chargea de jeter le sort pour la verrouiller avant qu'ils ne partent en direction de la salle d'histoire de la magie. Après maintenant plus deux mois à Ilvermorny, il n'avait plus aucun problème pour se repérer dans le château, mis à part l'étage des clubs et des options car il n'y allait que très peu. Aileen ne lui avait pas menti en début d'année : le journal ne lui prenait pas beaucoup de temps. Il la soupçonnait malgré tout de ne pas le solliciter pour des illustrations même quand elle aurait aimé en ajouter à l'édition du mois pour le laisser travailler sur ses cours et sur ses runes. Entre les deux, il devait bien avouer qu'il avait été occupé.

En entrant dans la salle de classe, il eut la surprise de voir que le professeur Perrot était déjà là. Il avait pour habitude d'arriver juste après les élèves et de commencer son cours avec quelques minutes de retard. Assis à son bureau, vêtu de son éternel gilet sans manche en tweed, il lisait son journal posé devant lui en ignorant l'agitation qui gagnait la classe. Julian fronça les sourcils.

- Qu'est-ce qui se passe ? Demanda-t-il.

Aileen haussa les épaules.

- Aucune idée. Eh Liam ! Appela-t-elle. Pourquoi... ?

- Venez voir !

Perché sur leur table habituelle, il avait lui aussi déployé la Revue du Nouveau Monde. Plusieurs élèves s'agglutinaient autour dont Othilia Fontaine, mais aussi Clémence Laveau ou Elicia Jauncey qui n'étaient même pas avec eux dans ce cours et même des septièmes années comme Zack Ledwell, le capitaine de Quidditch, et son cousin Archer.

- C'est au sujet d'Emilia ? Fit Aileen avec espoir. Les Aurors l'ont retrouvé ?

- Non, ça serait trop beau, marmonna Archer. C'est le MACUSA. Regardez, ils ferment les frontières.

- Ils quoi ?

Julian poussa presque Clémence Laveau pour accéder au journal. Elle poussa un cri indigné et il lui fit des excuses à voix basse, l'esprit déjà accroché par le titre de l'article qui annonçait en lettres capitales : GUERRE EN ANGLETERRE – FRONTIERES FERMEES.

La décision radicale du MACUSA : sécurité nationale ou repli national ?


La nouvelle est tombée ce matin à la sortie du Conseil du Congrès qui a rassemblé tous les Gouverneurs de Département. La Présidente, Belva Laker, a refusé de faire une quelconque déclaration à la presse et s'est contentée d'envoyer Wilbur Wilkinson, son Gouverneur des Relations Internationales, pour annoncer la nouvelle. Lors de sa conférence, le Gouverneur Wilkinson a ainsi révélé à la surprise générale ce que le Congrès venait de voter : une fermeture temporaire des frontières aux sorciers britanniques. Bien que cette situation ne soit pas inédite puisqu'elle avait déjà été mise en place pendant l'année 1945 avant la chute de Gellert Grindelwald, la mesure n'était ni attendue ni à l'ordre du jour.

Au nom de la présidente, le Gouverneur Wilkinson a déclaré que la décision n'avait pas été prise à la légère ni de gaité de cœur. Depuis plusieurs mois, l'opposition attendait un durcissement des politiques d'immigration et d'échanges avec le Royaume-Uni face à l'intensification des conflits qui font rage dans le pays d'Albus Dumbledore lui-même. Selon lui, et à demi-mots, la Présidente Laker n'aurait pas eu d'autres choix que de céder face à l'invective du mouvement lancé par Celestina Rappaport, Haute Secrétaire du Congrès chargée de la Protection des Sorciers Américains. Fervente militante pour le retour de la loi Rappaport instaurée par son ancêtre Emily Rappaport et abrogée en 1965, elle s'est notamment exprimée il y a plusieurs semaines sur les risques que les réfugiés britanniques faisaient courir aux Etats-Unis s'ils venaient à se faire repérer par les Non-Maj' et leurs autorités. Belva Laker s'était contentée de répondre à cette prise de parole par un commentaire lapidaire : « Elle ferait mieux de se charger de ses fonctions et de me laisser exercer les miennes ».

Un recadrage dans les règles diront certains, une affaire de femmes blessées dans leur ego répondront d'autres. Il est de toute façon de notoriété publique que Belva Laker et Celestina Rappaport ont eu plusieurs désagréments au cours des années, ce que le Gouverneur Wilkinson n'a pas voulu commenter. Interrogé par nos journalistes, le Chef du Bureau des Aurors, Hercules Fischer n'a pas souhaité nous répondre, tout comme son homologue anglais Alastor Maugrey. Il est utile de préciser que ce dernier vient tout juste d'accéder à cette fonction et n'était que le second en chef avant la mort le mois dernier d'Ambrosius Tremblay dans un incident que nous pourrions qualifier au mieux de suspicieux bien que le Ministère anglais se refuse à confirmer l'implication des partisans de la magie noire qui envahissent le pays.

Pour rappel, le Royaume-Uni est depuis près de quatre ans déchiré par des conflits aussi bien idéologiques que magiques. Un groupe de sorciers vraisemblablement liés aux mouvements sangs-purs, dont l'identité reste difficile à affirmer, prône la pureté du sang et la suprématie des sorciers sur les Non-Maj' (ou « moldus » selon le terme anglais). Ce groupe n'agit cependant pas sans leader. Autoproclamé Lord Voldemort, ce sorcier mystérieux et infiniment puissant sème la terreur par des actions volontairement brutales : le 23 juin dernier, un attentat aux Archives du Monde Magique à Londres faisait ainsi dix-sept victimes et presque autant de blessés. La marque des ténèbres, le symbole revendiqué par ceux qui se sont nommés « mangemorts » de façon éloquente, permet sans trop de doutes de relier cette tragédie à Voldemort. De même, plusieurs disparitions inexpliquées et soupçons d'infiltrations du Ministère circulent parmi les rumeurs entendues ces derniers temps.

De quoi inquiéter le MACUSA... Depuis un an, nombreux sont les sorciers et sorcières britanniques à fuir le pays par peur de représailles et l'Ambassade se trouve dépassée par les demandes de visas et de titres de séjour. Les employés refusent de s'exprimer eux aussi sur la question. Leonidas Grims – anciennement Grimsditch – n'a fait que proposer une cigarette à notre journaliste envoyé devant l'Ambassade en déclarant que « les frontières sont une question d'esprit lorsqu'on voyage par magie ». Nous n'en saurons pas davantage.

Ce que nous savons en revanche, c'est que ce que ce conflit commence à inquiéter la communauté magique quant au maintien du Code Internationale du Secret Magique. Si le gouvernement britannique assure que la situation est sous contrôle, les attaques et les disparitions répétées commencent à avoir un impact chez les Non-Maj' qui, bien qu'ils ne se doutent pas encore de l'existence de notre monde, seraient susceptibles de mener des investigations plus poussées. Or, c'est cela qui inquiète précisément le MACUSA. Si la présidente Belva Laker était partisane d'interagir et de prêter main forte au Ministère, Celestina Rappaport voulait à tout prix éviter que le conflit se transpose au sein de notre pays. La fermeture des frontières était dés lors, selon elle, une mesure préventive que la présidente a dû accepter après avoir essuyé un revers de baguette sec et ferme du Premier Ministre britannique, Harold Minchum. Ce dernier a en effet déclaré en conférence de presse hier que « l'Angleterre n'avait nullement besoin d'aide et avait su faire face à la menace Grindelwald auparavant et y parviendrait encore aujourd'hui avec Celui-Dont-On-Ne-Prononce-Pas-Le-Nom ». Une affirmation sans doute douteuse, mais qui ne laisse pas la place à la discussion. Seul le temps dira si elle s'avère véridique.

En attendant, Celestina Rappaport a gagné la bataille. Dès ce soir, minuit, les Etats-Unis fermeront leurs frontières pour une durée indéterminée sauf cas de force majeure. Comme disent les Anglais : God save the Minister !

Joe O'Brien


Julian resta un moment à fixer la page de journal après avoir terminé sa lecture. Il n'arrivait pas vraiment à comprendre et intégrer toutes les informations. Pour commencer, il dû se retenir de tressaillir en voyant le nom de Voldemort écrit en toutes lettres, ce qu'aucun journal anglais ne se serait permis. Autre preuve de l'origine toute américaine de l'article, il voyait déjà l'exaspération de Minchum en voyant que l'Angleterre avait été surnommée « le pays d'Albus Dumbledore ». Il en avalerait sûrement son insigne de Ministre de travers. Pourtant, ce n'était pas Minchum qui le préoccupait là tout de suite. Il ne savait pas jusqu'à maintenant qui était Celestina Rappaport, mais il la trouva profondément antipathique. Refuser de l'aide à des gens qui fuyaient un pays en guerre – des gens comme lui – sous prétexte qu'elle avait peur d'une menace potentielle pour le Code du Secret Magique lui semblait exagéré. Plus que tout, il songea à sa grand-mère Jeanne, à Matthew, à Hanna... Si les frontières fermaient, il ne pourrait pas les revoir pour noël.

A côté de lui, Aileen lui posa une main réconfortante sur le bras.

- « Une affaire de femmes blessées dans leur ego », cita soudain Othilia qui venait de terminer elle aussi sa lecture. (Elle secoua la tête, le visage crispé par une colère indignée). Ils n'ont vraiment honte de rien ! Ils n'auraient jamais écrit ça pour deux hommes !

- On n'est pas loin du « crépage de chignon », approuva Clémence Laveau, agacée.

- Ils le gardent sûrement pour leur prochain article, commenta Elicia Jauncey d'un rire sans joie. De toute façon, Belva Laker s'en prend plein le chaudron depuis le début de son mandat.

- En même temps, elle ne s'y connait clairement pas assez, rétorqua un garçon derrière elles.

Julian se retourna. Le garçon faisait partie de leur classe en Histoire. L'emblème des Serpents Cornus se détachaient sur son torse, mais il ne se rappelait plus bien de lui malgré leur appartenance à la même maison. Il devait être dans un autre dortoir de garçons de sixième année. Le nez légèrement épaté et les sourcils fournis, il soutint le regard d'Elicia Jauncey qui s'était rapprochée de lui, sa masse de cheveux blonds et bouclés mouvant à chacun de ses pas.

- Elle ne s'y connaît pas ? Répéta-t-elle, acerbe. Elle est Présidente du MACUSA !

- Par chance. Elle ne connaît pas les risques, ça se voit ! Pas comme Celestina Rappaport qui a le recul de sa famille ! Faut s'y connaître un peu en histoire pour se rendre compte que fermer les frontières était nécessaire.

Pendant une seconde, Julia se dit qu'il avait mal compris le sous-entendu, mais Liam se chargea de vocaliser ce qu'il pensait une seconde plus tard :

- T'es en train de dire quoi, Manfred ? Apostropha-t-il, bras croisés et l'air presque menaçant. Que Belva Laker est moins compétente parce qu'elle est née Non-Maj' alors que Celestina Rappaport aurait miraculeusement intégré tous les savoirs sorciers de sa famille à sa naissance ?

Le dénommé Manfred se contenta de relever le menton, défieur. De l'humble avis de Julian, Noah maîtrisait bien mieux l'expression.

- Ne me fais pas passer pour un raciste, contra-t-il. C'est juste du bon sens ce que je dis. Celestina Rappaport sait ce que la rencontre avec le monde Non-Maj' peut provoquer, son ancêtre était Présidente à l'époque des sorcières de Salem et du fiasco de Dorcus. Belva Laker ? Elle croit juste que tout ira bien alors que le Code n'est déjà pas assez strict !

- C'est toi qui déforme ce qu'elle a dit, protesta Othilia avec véhémence. Elle voulait juste aider l'Angleterre, pas distribuer des tracts aux Non-Maj' pour leur apprendre que la sorcellerie existe !

- Laisser les frontières ouvertes et prendre le risque que ce Voldemort arrive chez nous avec ses mangemorts, c'est aussi prendre le risque de briser le secret magique !

En entendant le nom de Celui-Dont-On-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom à voix haute, Julian eut un frisson. Ça avait l'air si simple pour eux, sans conséquence ni connotation. Pour lui, la sonorité lui faisait même étrange à l'oreille, comme lorsqu'il prononçait des gros mots enfant sans savoir ce qu'ils signifiaient, mais avec une impression de dangerosité en plus.

Autour d'eux, les autres élèves écoutaient le débat et il fut surpris de voir que plusieurs personnes hochaient la tête de concert avec les propres de Manfred. Clémence Laveau prit le relais en redressant ses lunettes rondes en fer sur son nez.

- Mais tu crois quoi ? Que Voldemort va être freiné par les lois ? Il a déjà bien l'air de passer au-dessus, s'il veut venir aux Etats-Unis il viendra. Là, on parle juste de personnes persécutées qui veulent fuir une guerre chez eux.

Mécaniquement, plusieurs regards se tournèrent vers lui. Il se sentit rougir et tenta de se soustraire à leur jugement derrière Aileen qui observait la scène, consternée. Elle lui fit un signe apaisant comme pour lui dire d'ignorer les autres. Manfred, lui, se leva finalement pour venir se planter directement devant les trois filles et Liam. Il ricana.

- Sérieux Laveau, ne sois pas naïve ! Tu crois que toutes les personnes qui viennent sont de bonne foi ? Ca se trouve, il y a des mangemorts dans le lot qui veulent implanter leurs idées ici et nous terroriser ! Et c'est pour ça que Celestina a raison !

Clémence, Othilia et Elicia le dévisagèrent.

- Mais tu t'entends ? S'exclama cette dernière, main sur la hanche.

- Il a raison, appuya une voix au fond de la classe que Julian ne parvint pas à repérer.

- C'est pas faux, c'est une possibilité... renchérit une fille au premier rang.

Manfred afficha un air suffisamment et pointa la classe du doigt :

- Vous voyez ! Je ne suis pas seul à avoir du bon sens, déclara-t-il.

- C'est quand même très peu probable, lui répliqua Archer, resté en arrière.

Julian lui coula un regard en biais, surpris. Il ne s'était pas attendu à ce qu'Archer participe à la conversation et encore moins pour être de son côté. Avec ses airs pompeux, il aurait cru qu'il se rallierait à Manfred, mais après tout il lui avait affirmé ne pas avoir de sentiment anti né-moldu le jour de son arrivée au manoir des Grims. Son cousin n'avait visiblement pas menti.

- Peu probable ne veut pas dire impossible, asséna Manfred avec conviction. Pour tout ce que t'en sais, tu pourrais accueillir un partisan de Voldemort chez toi en ce moment !

Pendant une seconde, il y eu un moment de flottement. Puis, Julian réalisa que Manfred parlait de lui et le désignait d'un mouvement vague. Archer blêmit mais il ne paraissait avoir tout à fait réaliser ce que Manfred impliquait. Ou plutôt qui il visait vraiment. Julian se figea, une boule douloureuse dans l'estomac. Il n'eut pas le temps de se défendre, abasourdi par les regards soudain suspicieux voire accusateurs de plusieurs élèves autour de lui. Liam, en revanche, passa à l'action. D'un pas, il franchit la distance qui le séparait de Manfred et le saisit par le col de son uniforme.

- C'est quoi ton problème ? S'écria-t-il, le visage si près de celui de Manfred que celui-ci trembla de peur. T'as lu l'article ? Sa mère était aux Archives de la Magie ! Tu crois vraiment qu'il serait un allié des mangemorts ?

Il le secoua brusquement. La tête de Manfred se retrouva ballotée d'avant en arrière et il lâcha un cri en se débattant. Julian se précipita vers eux. Fermement, il détacha Liam en le tirant en arrière. Manfred recula, chancelant.

- Liam, arrête !

- Non, laisse-moi lui apprendre à ce...

- Cooper ! Shelton ! Sullitzer !

Tout le monde se figea. Le professeur Perrot s'était levé de son bureau et les toisait de toute sa hauteur, mains à plat sur son bureau. Son visage si bienveillant était mortellement sérieux. Julian déglutit.

- Je peux savoir ce que vous faites au nom de Morgane ? Cingla-t-il d'une voix glacial. Où est-ce que vous vous croyez ?

- Professeur, vous avez entendu ! Se défendit immédiatement Liam, l'air fulminant. Il n'a pas le droit d'accuser les gens de... de ça !

- Et ça justifie de déclencher une bagarre dans mon cours ? Vous avez quel âge, dix ans ?

- C'est de l'oppression d'opinion, s'indigna Manfred, le cou marbré de plaques rouges. Cooper mérite une retenue !

- Vous êtes professeur maintenant, Sullitzer ? Vous croyez pouvoir donner des ordres ?

Manfred s'empourpra, mais de honte cette fois-ci. Tous les élèves avaient les yeux écarquillés, Aileen paraissait catastrophée et Zack Ledwell tentait de cacher le journal dans son dos comme pour faire disparaître l'objet de la discorde.

- Non, non, professeur... balbutia Manfred, désarçonné. Désolé...

- Vous faites bien. Et vous, Shelton, quelque chose à ajouter ?

Dans le fond de son esprit, Julian nota que c'était une des rares fois qu'un professeur américain l'appelait par son nom de famille. Mortifié, il secoua la tête sans répondre. Perrot avait toujours fait preuve d'une certaine familiarité et bienveillance à son égard, le changement de ton était dur à encaisser.

- Bien, allez, tout le monde à sa place. On va commencer le cours et je ne veux pas un bruit. Ceux qui n'ont rien à faire ici, je vous prierais de partir.

Sans demander leur reste, Elicia, Clémence, Archer et Zack Ledwell disparurent par la porte au pas de course tandis que lui-même regagnait sa place avec Aileen et Liam. Pour une fois, Othilia vint même s'assoir avec eux, juste à côté de lui. Il la laissa faire sans commenter et elle se pencha vers lui en sortant ses affaires :

- Manfred est un idiot, se contenta-t-elle de chuchoter. Fais pas attention à ce qu'il raconte.

- Merci...

Ils échangèrent un léger sourire, puis se reconcentrèrent. Perrot venait d'écrire au tableau d'un coup de baguette le sujet du jour : les Ratisseurs. Julian recopia le titre sur son parchemin et Othilia en fit de même. Il remarqua qu'elle avait mis des lunettes, un peu comme celles de Clémence Laveau à ceci près que la monture était plus ovale et d'une couleur dorée. Il ne savait même pas qu'elle en portait, mais il devait avouer qu'il n'avait pas fait très attention à Othilia jusqu'à présent. A part le fait que son père soit le professeur de Potions, qu'elle soit amie avec Théa et qu'elle sorte avec Noah ; il ne savait rien d'elle. Mais elle avait l'air intelligente : il n'oubliait pas que c'était elle qui lui avait expliqué l'histoire des sorcières de Salem et du bal des fantômes, ni son intervention il y a quelques secondes pour s'opposer à Manfred Sullitzer.

- Bien, commençons. Les Ratisseurs seront justement un sujet parfait pour rebondir les sorcières de Salem dont nous avons parlé au dernier cours brièvement. Quelqu'un peut me rappeler où est-ce nous nous en étions arrêtés ? (Perrot regarda la classe, expectatif, jusqu'à ce que Aileen lève la main). Miss McCallum, on vous écoute.

- Les sorciers anglais venaient d'arriver à Plymouth en 1620 avec le Mayflower, raconta-t-elle, ses yeux faisant la navette entre leur professeur et sa prise de notes. Mais ils avaient du mal à construire une société et faisaient face à des difficultés, surtout pour trouver des plantes et des cœurs de baguette mais aussi à cause de la persécution des puritains.

- Voilà, c'est cela, très bien, confirma Perrot avec un hochement de tête. 5 points pour Puckwoodgenie. (Il s'assit à moitié sur son bureau, nonchalant). Les immigrants Non-Maj' avaient non seulement commencé à mener une guerre contre les Indiens d'Amérique, ce qui avait affaibli la cohésion de la communauté magique, mais leurs convictions religieuses les rendaient également intolérants à toute forme de magie. Les puritains aimaient s'accuser entre eux d'activités occultes à la moindre trace de preuve, et les sorcières et sorciers du Nouveau Monde avaient toutes les raisons du monde d'être extrêmement méfiants envers eux. On ne va pas y revenir, mais les sorcières de Salem sont vraiment devenues un symbole un peu plus tard de cette persécution.

D'un air entendu, Manfred se râcla la gorge. Julian se crispa. Il comprenait parfaitement l'allusion sans mots de Manfred : le sort réservé aux sorcières de Salem pouvait très bien se reproduire aujourd'hui. Perrot, lui, se contenta de l'ignorer non sans un regard d'avertissement et Liam crispa si fort sa main autour de sa plume qu'il manqua de la briser avant qu'Aileen ne lui prenne littéralement les doigts pour les desserrer.

- Les Ratisseurs maintenant, reprit Perrot. Désolé d'avance, mais nous ne sommes pas en avance sur le programme, donc ce cours sera quelque peu magistral. Prenez bien des notes, vous serez interrogez en partie sur ces questions à la fin du semestre.

Il inspira un grand coup, histoire de leur laisser le temps de tous attraper leur plume, et commença :

- Comme je disais, le problème certainement le plus inquiétant rencontré par les sorciers tout juste arrivés en Amérique du Nord était les Ratisseurs. La communauté magique en Amérique du Nord étant petite, dispersée et discrète, elle n'avait pas encore de lois spécifiques en vigueur. Ceci laissa un vide juridique dans lequel s'engouffrèrent des groupes de sorciers mercenaires peu scrupuleux et de nationalités diverses. Ils formèrent un groupe particulièrement redouté qui s'était engagé à pourchasser non seulement les criminels notoires, mais également toute personne qui pouvait leur rapporter de l'or.

- Les Ratisseurs, devina Aileen.

- Tout à fait, miss McCallum, approuva Perrot d'un air entendu. Les Ratisseurs devinrent de plus en plus corrompus avec le temps. Loin de la juridiction du gouvernement magique de leur pays d'origine, beaucoup se complaisaient à faire preuve d'une autorité et d'une violence que leur mission ne justifiait pas. Ces Ratisseurs aimaient les bains de sang et la torture et allèrent même jusqu'à pratiquer la traite de leurs compagnons sorciers. Le nombre de Ratisseurs se multiplia à travers l'Amérique à la fin du XVIIe siècle et preuve fut faite qu'ils n'hésitaient pas à faire passer d'innocents Non-Maj' pour des sorciers afin de recevoir des récompenses de la part de membres crédules de la communauté non magique.

Julian grimaça. Il avait déjà croisé la notion des Ratisseurs dans ce qu'il avait lu avant de partir pour les Etats-Unis, mais il ne s'était pas douté que leurs méfaits étaient si graves. Il ne put s'empêcher de faire le lien avec les mangemorts. Si le but n'était pas le même – prôner la pureté du sang et s'enrichir sans scrupules – les deux organisations pourchassaient des gens innocents et faisaient régner la terreur.

- Les Ratisseurs rejoignent évidemment l'histoire des sorcières de Salem, poursuivit Perrot, toujours de sa voix si pédagogue. Nous le savons tous, les procès des sorcières de Salem intentés de 1692 à 1693 furent tragiques pour la communauté magique et les historiens s'accordent à dire que parmi les soi-disant juges puritains se cachaient au moins deux Ratisseurs connus qui se vengeaient de querelles initiées en Amérique. (Il se leva et se mit à arpenter les allées, vérifiant que tout le monde prenait bien des notes). Tous ces troubles – des Ratisseurs aux procès de Salem au manque d'organisation de la communauté sorcière – entrainèrent des conséquences. Dans un premier temps, de nombreuses sorcières et de nombreux sorciers fuirent l'Amérique, et bien plus encore décidèrent de ne pas venir s'y installer. Ceci entraîna des modifications intéressantes de la population magique d'Amérique du Nord comparée aux populations d'Europe, d'Asie et d'Afrique. Jusqu'au début du XXe siècle, la population américaine comptait moins de membres de la communauté magique que les quatre autres continents réunis. Les familles de sang pur qui étaient bien informées des activités des puritains et des Ratisseurs grâce aux journaux pour sorciers n'allaient généralement pas en Amérique. Cela signifie que le Nouveau Monde comptait un pourcentage bien plus élevé de sorciers nés-Non-Maj' que le reste du monde. Même si ces sorcières et ces sorciers se mariaient et fondaient leur propre famille magique, l'idéologie du sang pur qui tient une place importante dans l'histoire de la magie en Europe ne rencontre donc pas autant d'adeptes en Amérique.

Cette fois-ci, personne ne s'y trompa. Il regarda Manfred Sullitzer droit dans les yeux. Ce dernier baissa le nez sur son parchemin, gêné, et Julian en ressentit une certaine satisfaction. Perrot, lui, ne s'attarda pas et revint à son bureau.

- Mis à part ça, la conséquence la plus importante des évènements survenus à Salem fut peut-être la création en 1693 du Congrès magique des États-Unis d'Amérique, environ un siècle avant sa version Non-Maj, déclara-t-il en remettant ses lunettes, gardées jusque-là dans sa main. Le MACUSA conçut des lois spécifiques permettant la cohabitation des mondes magique et Non-Maj', à l'instar des pays voisins. La première tâche du MACUSA fut notamment de traduire en justice les Ratisseurs qui avaient trahi les leurs. Ceux qui étaient reconnus coupables de meurtres, de traite de sorciers et de torture parmi d'autres formes de cruauté furent exécutés pour leurs crimes. (Il soupira). Malheureusement, plusieurs des Ratisseurs les plus connus échappèrent à la justice et, alors même que des mandats internationaux autorisaient leur arrestation, ces Ratisseurs disparurent définitivement dans la communauté Non-Maj'. Certains se marièrent à des Non-Maj' et fondèrent des familles dans lesquelles les enfants sorciers semblaient avoir été abandonnés au profit d'une progéniture non magique, et ce, afin de préserver la couverture du Ratisseur.

A cette information, Julian releva la tête de stupeur. Il s'imagina un bébé déposé sur les marches d'une église simplement pour être né avec des pouvoirs magiques. Et encore, son image devait être fausse. L'apparition des pouvoirs se manifestait pendant la petite enfance. Les familles de Ratisseurs avaient dû attendre de voir leurs enfants grandir, puis décider en toute connaissance de cause d'abandonner leur enfant s'il se révélait sorcier pour échapper à la justice. Il ne fut pas le seul à se sentir indigné. Devant lui, Liam serrait les mâchoires. Il se rappela alors qu'Emilia avait été adoptée. L'abandon des enfants devait être un sujet sensible pour lui.

Perrot ne fit aucun commentaire, comme s'il voulait respecter la neutralité professoral, mais il n'était pas difficile de voir qu'il n'en pensait pas moins.

- Je crois que je vous en avais parlé l'année dernière, mais si ça vous intéresse l'historien de la magie américaine Théophile Abbot a identifié plusieurs de ces familles, indiqua-t-il en écrivant le nom au tableau. Chacune de ses familles croyait fermement en la magie et la détestait, comme les Bellebosse. Tous ces évènements ont eu des répercussions considérables sur la façon dont la communauté magique d'Amérique est aujourd'hui gouvernée ou l'a été par le passé.

Une crampe à la main, Julian termina de noter la fin du cours. Dans sa précipitation, son coude cogna contre celui d'Othilia dont la main dérapa sur quelques centimètres. Ce n'était pas la première fois que ça lui arrivait : en tant que gaucher, il avait eu des accrochages dans le même genre avec Matthew des dizaines de fois. Gêné, il avisa la rature sur la copie d'Othilia.

- Désolé, s'excusa-t-il.

Elle balaya ses excuses d'un geste.

- C'est rien, ça reste lisible, rassura-t-elle. Je l'enlèverai plus tard. T'as réussi à tout noter ?

- Pratiquement, oui.

Liam se retourna d'un coup.

- Génial, tu me passeras tes notes ? Mon parchemin est pire qu'un gruyère.

- Littéralement, commenta Aileen à son tour.

Elle leva le parchemin de Liam à leur hauteur. Il était criblé de trous.

- C'est à ça que te servent les parchemins que tu me voles ? S'offusqua Julian. Liam !

- Pardon, pardon ! J'ai jamais bien réussi à maitriser la pression avec les plumes ! Je préfère les stylos !

Julian roula des yeux. Il n'entendit pas le professeur Perrot mettre fin au cours, mais les autres commencèrent à se lever dans un raclement de chaises collectif. Il les imita.

- On doit passer au club de journal pour gérer l'impression, l'informa Aileen, son sac sur l'épaule. On se retrouve pour le déjeuner au Réfectoire ?

- Ouais, dit-il, à tout à l'heure.

Dans le couloir, Liam et Aileen partirent donc dans les étages et il se retrouva un instant démuni. Il avait une heure de libre. Il supposait qu'il pouvait aller à la bibliothèque pour commencer son devoir sur Isolt Sayre, celui que le professeur Perrot lui avait donné à faire pour la fin du semestre.

- Eh Julian ! L'appela Othilia, juste derrière lui.

Il se retourna. Elle s'était attachée ses cheveux blonds et fins, ce qui donnait un effet étrange comme ils étaient assez courts. Mais il n'y connaissait rien en matière de mode capillaire alors il évita de juger.

- Noah et Théa sont en Potions à cette heure-ci, dit-elle, l'air incertaine mais avenante. Ça te dirait de réviser ensemble ? Ou de traîner pour passer le temps ?

- Oh...

- Tu n'es pas obligé ! S'empressa-t-elle de dire, mains levées. Je me disais juste... Enfin, on n'a pas vraiment parlé depuis ton arrivée et je ne voulais pas m'imposer, mais je sais que ça va mieux avec Théa et que tu dessines parfois avec Noah alors...

Julian la contempla. D'un sens, elle avait raison. Ils avaient des lien au travers de Théa et Noah et ça serait sûrement logique qu'ils apprennent à se connaître. Il ne savait même pas pourquoi il n'avait pas l'effort avant, même si une certaine gêne persistait en lui. Incapable de trouver une bonne raison de refuser, il se décida à lui laisser une chance.

- Oui, pas de problème, accepta-t-il. La bibliothèque, ça te va ? On peut réviser et discuter en même temps ?

- Parfait !

Et sans s'assurer qu'il la suivait, elle se mirent route. Il lui emboîta le pas.

*******************************

Et voilà !

Eléments tirés du canon / Pottermore :

- Tout le cours d'histoire de la magie sur les Ratisseurs en vérité. J'ai eu la flemme de vraiment reformuler donc vous retrouvez dans ce chapitrer l'essentiel de l'article Pottermore consacré au sujet.

En revanche, l'article sur la fermeture des frontières est entièrement de moi. J'ai pris la liberté d'inventer le nom de la Ministre américaine de l'époque, Belva Laker, ainsi que sa rivale Celestina Rappaport. Je précise que la leçon d'histoire sur la loi Rappaport finira par arriver plus en détails pour ceux qui se posent des questions dessus ^^ Vous le verrez, mais certains éléments seront aussi repris dans le tome 3 de ATDM puisque ça couvrira l'année 1979 du côté anglais !

Prochain post : chapitre 20 - lundi 24 mai
cochyo

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par cochyo »

Génial ce chapitre !
Scandium

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Scandium »

Super chapitre ! J'ai hâte d'en apprendre plus sur Othilia !
HermioneSerdaigle

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par HermioneSerdaigle »

Hey ! Ce chapitre était juste génial ! Je trouve que c ets bien que Othilia se rapproche de Julian. Peut-être que au final Noah, Othilia, Théa, Julian, Aleen et Liam vont être tous amis ? Je me demande aussi si Liam et Noah vont finir par se réconciliés.....
A plussss
mythik

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par mythik »

Je suis en retard ! Et j'ai pas commenté depuis... des lustres ! Honte à moi :oops:

Bon, on va juste commenter les chapitres que j'ai rattrapé aujourd'hui, hein, sinon on est pas sortis de l'auberge. :roll:

Chapitre 18 :
J'ai A-DO-RÉ la réflexion de Ju' et Noah sur l'art et la fracture Moldus / sorciers au Moyen-Âge. Ça a tellement de sens !!!
- Toi, acquiesça Noah avant d'expliciter sans ambages comme à son habitude. Je te trouvais agaçant avec ton accent, ton air de premier de la classe et ta manie de tout ranger. C'est presque angoissant.
Mais tellement ! Touchez pas à mes affaires !! :evil:

Ju' et Noah sont trop mignons, ils se rapprochent trop et s'ouvrent, se confient c'est génial ! :D


Chapitre 19 :
Le cours d'Histoire de la Magie américaine était vraiment cool. Et en plus, il permettait de faire un joli pied de nez à Manfred (mais quel nom pourri en plus :lol: :lol: ). Et ouais, les gens ont fui les États-Unis à un moment parce que des sorciers mettaient le bazar. Comme en Angleterre... Et en plus, ya presque pas de Sang-Purs alors boum, dans ta face ! :mrgreen:

Othilia est trop sympa en fait ! Du coup, j'ai des sentiments ambigus : d'un côté je veux que Ju' et noah soient ensemble et de l'autre, je ne veux pas qu'Othilia souffre... Pourquoi tu l'as faite gentille elle, aussi ? C'est pas sympa ! :cry:



Bon, c'était encore génial !! Vivement la suite (promis, je la lirai quand elle sortira cette fois :D )
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Chapitre 20 : Le passé en première page

« Les événements eux-mêmes sont demandés comme une nourriture. S'il n'y a point ce matin quelque grand malheur dans le monde, nous sentons un certain vide. "Ils n'y a rien aujourd'hui dans les journaux", disent-ils. »

- Paul Valéry -


// 5 novembre 1979 //

La bibliothèque d'Ilvermorny n'avait rien à envier à celle de Poudlard. Dans un style plus industriel, elle était faite d'acier et de bois et des dizaines de rayonnages s'alignaient dans l'aile gauche du château. Comme dans le hall circulaire, un balcon courrait sur tout le deuxième étage et donnait accès à encore plus de livres. Assis à une table près d'un escalier en colimaçon en fer forgé, Julian ne pouvait s'empêcher de relever la tête toutes les deux minutes comme à chacune de ses visites. Othilia finit par le remarquer et sourit.

- Impressionnant, hum ? Commenta-t-elle. Ils l'ont entièrement refait en 1855 après un incendie. William, le concierge, en a gardé un léger traumatisme.

Discrètement, elle désigna le puckwoodgenie qui faisait ses rondes entre les tables tout en scrutant d'un œil acéré les élèves. Julian se rappela que Liam avait mentionné qu'il avait manqué de mettre le feu à la bibliothèque un jour. Pas étonnant que William ne leur fasse plus confiance. Pour éviter de croiser son regard, Julian se mit à sortir ses livres. Quand Othilia en fit de même, ils avaient entre eux une pile d'au moins six livres et se voyaient à peine. Si Liam avait été là, il les aurait traités d'intello. C'était agréable pour une fois de ne pas avoir à s'en préoccuper.

- Tu veux travailler quoi ? Demanda-t-elle en étalant un parchemin devant elle.

- Histoire de la magie je pense... J'ai toujours l'exposé à faire sur Isolt Sayre que Perrot m'a donné.

- Oh ça sera pas bien compliqué alors. Tu dois avoir une dizaine de livres dans la rangée là-bas qui retrace son histoire.

Il se retourna vers l'endroit qu'elle indiquait et hocha la tête. C'était bon à savoir.

- Merci, ça va m'aider. (Il désigna son espace de travail d'un geste). Et toi ? Tu veux avancer sur quoi ?

- Potions. J'ai un essai à rendre pour la fin de la semaine.

Elle tenta de le cacher, mais il aperçut la grimace qui lui tordit la bouche. Il se rappela brusquement que Algibert Fontaine, le professeur de Potions, était aussi son père. Il avait assez peu interagi avec lui depuis son arrivée. Généralement, il se mettait dans le fond de la classe sans faire de vagues et Fontaine se contentait de quelques commentaires lorsqu'il passait entre les rangs sans chercher à tisser plus de liens, comme s'il voulait maintenir une distance professionnel avec ses élèves. Julian devait avouer qu'il le trouvait plutôt impressionnant : il avait une haute stature, de larges épaules et une crinière blonde légèrement dégarni dont sa fille avait hérité même si son carré blond impeccable était d'une nature plus fine.

- Ce n'est pas étrange ? Osa-t-il demander après quelques secondes. Que ton père soit prof à Ilvermorny ?

Othilia le regarda un moment, sa plume suspendue dans l'air, puis elle dû juger qu'elle pouvait lui répondre avec sincérité car elle soupira.

- Un peu... Mais j'ai toujours su que ça serait le cas. (Elle commença à écrire son nom en haut du parchemin, penchée en avant). Comme il aime me le rappeler, il était professeur dans cette école avant que je n'en sois élève. Peu importe que ça soit étrange, je dois faire avec.

Elle ponctua sa phrase d'un coup de plume sec à la fin de son nom.

- Quand même, marmonna-t-il. Rien que pour les notes, ça ne doit pas être évident.

- Oh ne t'inquiète pas, il n'y a aucun favoritisme. Il est presque plus dur avec moi. La dernière fois, mon philtre de paix était un peu opaque alors qu'il aurait dû être transparent. J'ai perdu plusieurs points juste pour ça...

- Il veut sans doute que tu réussisse, suggéra-t-il en tentant de voir le positif.

- Sûrement... En quatrième année, les Potions devenaient même assez dures pour moi et il m'a laissé utiliser son bureau et sa réserve pour m'entraîner. C'est peut-être le seul passe-droit qu'il m'a accordé.

Immédiatement, Julian se redressa. Il n'y avait pas songé plus tôt comme il ne parlait pas souvent avec Othilia, voire jamais, mais elle devait effectivement avoir accès à la réserve de son père de manière privilégiée. Il se demanda un instant s'il pourrait trouver des chaudrons neufs dedans – plus neuf qu'Albert leur chaudron rouillé en tout cas – et possiblement de la poudre de corne de licorne, leur ingrédient manquant. Il fut vraiment tenté pendant quelques secondes de poser la question à Othilia, mais aucune justification pour une telle demande ne lui vint à l'esprit. Le silence devait commencer à devenir embrassant, car ce fut elle qui le brisa en tordant sa plume entre ses longs doigts fins.

- En fait, Julian, je voulais te dire quelque chose... dit-elle, l'air nerveuse mais déterminée.

L'espace d'un instant, une image de Noah s'imposa à lui. Peut-être qu'elle en avait marre qu'ils s'enferment tous les deux pour dessiner et parler plusieurs matinées par semaine.

- Non, en vérité je voulais plus m'excuser, se corrigea-t-elle avant qu'il ait eu le temps de paniquer. En mon nom mais aussi celui des autres.

- T'excuser ? Répéta-t-il, surpris. Mais... pour quoi ?

- Pour le soir d'Halloween. Le bal des fantômes. (Elle remit une de ses mèches blondes derrière son oreille et sa bague en or accrocha un rayon de soleil). J'y ai pas mal repensé depuis et... ce n'était pas correct ce qu'on a fait. Tu n'allais pas bien à cause de ta mère et tout le monde criait dans tous les sens. Liam et Aileen voulaient des réponses... Disons que ce n'était pas très délicat. Donc désolée. Je ne pense pas que Liam ou Noah soit du genre à s'excuser alors je voulais qu'au moins quelqu'un le fasse.

Cette fois, elle le regarda dans les yeux. Il remarqua pour la première fois qu'elle les avait très clairs, entre le bleu et le vert. Et surtout, son attention le toucha. La soirée du bal des fantômes remontait à cinq jours maintenant et il était passé à autre chose, même s'il ressentait toujours en écho le souvenir de sa respiration bloquée qui lui pesait sur la poitrine. Elle avait raison : personne ne s'était excusé, pas même Aileen. Il ne s'y était de toute façon pas attendu jusqu'à ce qu'Othilia le fasse à l'instant. C'était même étonnant de sa part : parmi leur groupe, elle avait été celle qui était restée le plus en retrait pendant sa crise de panique pour lui laisser de l'air. Il se demanda si elle savait que Noah l'avait rejoint ensuite et qu'ils étaient restés tous les deux plus de deux heures sur le toit d'Ilvermorny avec le ciel au-dessus de leur tête comme seul témoin. Pour une raison qui lui échappait, il sentit une pointe de contrariété le traverser à l'idée que Noah lui en ait parlé. Puis, il se fustigea. Noah avait le droit de raconter sa vie à sa petite amie. Ce n'était pas parce que lui-même avait l'impression de ne plus parler de choses importantes à Hanna que ça devait être vrai pour les autres.

Gêné, il se râcla la gorge et répondit après quelques secondes :

- Merci, articula-t-il avec honnêteté. Je ne m'attendais pas... Mais merci.

- C'est normal. Et... Je ne sais pas si ça se fait après plusieurs mois, mais toutes mes condoléances pour ta mère.

- Merci, répéta-t-il plus difficilement.

- Je... je ne prétends pas comprendre. Ma mère est morte quand j'avais à peine un an, je n'ai aucun souvenir et ma belle-mère m'a élevée comme si j'étais sa fille. Mais... je ne peux qu'imaginer ce que ça doit être.

Julian réussit à lui faire un sourire qui devait ressembler à une grimace. Il savait que sa remarque venait d'une bonne intention : elle lui avait prouvé sa compassion deux fois en quelques minutes en s'excusant pour le bal des fantômes et en lui présentant ses condoléances. Pourtant, elle ne pouvait pas savoir ce qu'il ressentait. Elle ne pouvait pas non plus l'imaginer. Il l'avait compris en le vivant, un deuil était personnel et personne ne pouvait comprendre ce qu'il impliquait avant d'avoir perdu quelqu'un. Surtout sa mère.

- Désolé, je ne savais pas non plus pour la tienne, avoua-t-il finalement. Ton père s'est remarié ?

- Oui... Un an après. Leur mariage allait déjà mal, je crois, et ils m'ont eu pour tenter de le sauver. Ils n'avaient pas prévu qu'elle attraperait une maladie. La dragoncelle. C'est souvent fatal chez les adultes. (Elle tripota à nouveau sa plume et quelques tâches d'encre tombèrent sur le bois de leur table). Ça a marqué mon père, mais il a rencontré Colleen assez vite. Elle est née Non-Maj', elle voulait retourner chez elle dans le Tennessee et reprendre sa vie. Elle me gardait juste un été pendant que mon père gérait des choses pour obtenir le poste de professeur de Potions à l'époque. Et voilà ! Elle n'est jamais repartie.

- C'est une belle histoire je trouve... Mais du coup elle doit se sentir seule pendant l'année, non ?

Othilia secoua la tête.

- Elle a pris un appartement au Village. Mon père va la rejoindre tous les soirs. C'est un des seuls qui a refusé un logement de fonction.

- Et toi ? Tu rentres aussi le soir... ?

- Non, la direction ne peut pas faire d'exception comme ça. Ilvermorny est un internat, je dois rester. C'est pareil pour Noah et Raphaël. Techniquement, ils pourraient retourner chez leur tante mais il restent ici.

Ce n'était pas surprenant. Après tout, Noah lui avait bien dit qu'il devait aller jusqu'à Grand Central pour partir de New York avec les autres élèves et revenir ici. Une question d'équité sûrement, ou juste l'application de règles archaïques qui défiaient le bon sens. De toute façon, il voyait mal Noah avoir envie de rentrer chez soi tous les soirs si sa tante était aussi revêche que tout le monde le disait. En repensant au regard bleu perçant d'Hilda Douzebranches, il frissonna.

- Tu l'as rencontré, c'est ça ? Hilda ? Se rappela Othilia en interceptant sa réaction. Tu as été dans son café à la sortie au Village.

- Je ne savais pas que c'était le sien, se justifia-t-il. Mais oui.

- Drôle de dame, hum ?

Il acquiesça d'un hochement de tête. Il ne savait pas ce dont il pouvait vraiment parler avec Othilia, mais elle reprit elle-même :

- Elle ne m'aime pas beaucoup, avoua-t-elle d'un ton contrit. Je crois qu'elle trouve que je ne suis pas assez bien pour Noah.

- Et je crois que d'après Théa, c'est Noah qui n'est pas assez bien pour toi.

La touche d'humour eut le mérite de faire rire Othilia avec sincérité. Son visage devint soudain plus expressif ; elle qui semblait toujours si contrôlée.

- Une question de point de vue donc, résuma-t-elle sans cesser de sourire.

- Sans doute... Mais ça doit pas être facile, non ? De supporter Noah et Théa en même temps ?

- Oh, ça vient avec l'habitude. Je suis sûre qu'au fond ils s'apprécient, mais ils ont juste besoin que quelqu'un tienne à eux de manière presque... exclusive ?

- Comment ça ?

Plus détendue, elle se redressa et se pencha en avant, les coudes sur la table. William le concierge passa près d'eux à cet instant et leur jeta un coup suspicieux alors que Julian poussait stratégiquement sa pile de livre pour cacher les tâches d'encre d'Othilia. Elle lui adressa un regard reconnaissant avant de répondre :

- Théa et Noah sont un peu pareils si on y regarde bien, expliqua-t-elle. C'est peut-être pour ça que je m'entends bien avec les deux, tu me diras. Mais penses-y : la relation entre Théa et sa mère et celle entre Noah et sa tante ont une chose en commun. Ils ont tous les deux manqués d'affection et de reconnaissance à cause d'un frère qui prenait toute la place. Alors bien sûr c'est pour des raisons différentes. Raphaël était juste plus calme et plus studieux, là où Théophilius... (elle buta sur ses mots et sa voix se réduisit à un murmure). Enfin... tu sais.

Un léger silence pesa à l'évocation de l'enfant décédé et Julian revit avec précision les deux dates inscrites sous son portrait dans l'arbre généalogique des Grims. Il n'arriverait sans doute jamais à oublier le sourire édenté du petit garçon.

- Peu importe, reprit Othilia en se râclant la gorge, gênée. Tout ça pour dire que Théa et Noah recherchent ce qu'ils n'ont pas eu dans leur famille : quelqu'un qui soit là pour eux sans condition. Et j'essaye de faire au mieux pour leur prouver que c'est possible. C'est juste pas évident de gérer les deux en même temps parfois.

Julian hocha la tête. D'une certaine façon, il comprenait ce qu'elle tentait de lui dépeindre comme situation. Il l'avait en partie vécu en tentant de tenir sa famille à bout de bras ou d'être toujours présent pour Hanna et Matthew. Sous ses airs de fille un peu lointaine issue d'une famille cultivée, Othilia avait bon cœur. Elle n'avait pas la personnalité douce et compréhensive d'Aileen, mais ça ne voulait pas dire qu'elle n'avait pas des points communs sous un certain angle.

Et alors qu'il la découvrait, il ne pouvait pas s'empêcher de l'apprécier. Othilia et lui avaient aussi des points communs. Le problème, c'est qu'il ne savait pas quoi faire de cette découverte. Il supposait qu'il avait décidé, sans doute inconsciemment au fond de son esprit, de ne pas apprendre à connaître Othilia pour justement ne pas l'aimer. Après tout, elle avait tout ce qu'il n'avait pas : une amitié profonde avec Théa alors même qu'elle était sa cousine à lui ; de bonnes notes en cours puisqu'elle n'avait pas à appréhender tout un nouveau système scolaire ; une relation avec Noah même si elle n'y connaissait rien en art...

Perturbé, il baissa la tête et joua avec le coin de son parchemin. Il se rendit compte qu'il ne voulait plus parler de Noah avec elle. Au lieu de ça, il décida d'orienter la conversation sur Théa.

- T'es amie avec Théa depuis la première année ?

- A peu près, oui. On était dans le même dortoir, les mêmes cours... Cette année-là, les Womatou et les Serpent Cornu étaient ensemble, c'est pour ça.

- Et... je peux te poser une question sur elle ?

Othilia haussa un sourcil et elle carra les épaules, défensive, mais hocha la tête.

- Je t'écoute

- Ce n'est pas vraiment sur elle en fait, nuança-t-il immédiatement pour ne pas la braquer. C'est juste que... depuis que je suis arrivé, j'ai l'impression que tout le monde sait des choses comme si c'était évident, mais personne ne m'explique rien. (Frustré, il se renversa un peu plus contre le dossier de sa chaise). Et justement... Quand j'étais au Village pour voir mon parrain, Théa a mentionné... son père.

A la décharge d'Othilia, elle savait maitriser ses expressions. S'il n'avait pas eu les yeux rivés sur elle, il n'aurait sans doute pas remarqué le tic nerveux qui agita ses traits une seconde, mais ce fut suffisant. C'était l'indice qu'il attendait.

- Tu sais ! S'exclama-t-il avant de baisser précisément la voix lorsque plusieurs têtes se tournèrent vers eux. Tu sais ce qui s'est passé avec son père ?

- Oui, je sais... Tout le monde sait. C'était dans les journaux.

- Quoi ?

Elle soupira.

- Attends ici.

Avant qu'il n'ait pu la retenir, elle se leva souplement et disparu entre deux rayons. Il se retourna pour tenter de la suivre du regard, mais elle devait être partit trop loin. Démuni, il ouvrit le premier livre devant lui pour se donner contenance avant de le refermer en se rendant compte qu'il venait de lire le sommaire deux fois sans rien retenir. Heureusement, Othilia revint après quelques minutes, deux journaux dans les mains.

- Tiens, déclara-t-elle en les posant devant lui. Les grandes lignes de l'histoire sont là-dedans. Avec Théa, on avait essayé de les cacher au fond des casiers à journaux pour éviter que d'autres personnes ne tombent dessus.

Surpris, Julian contempla les feuilles jaunies par le temps. Il attendit encore un peu, persuadé qu'Othilia allait lui demander s'il voulait vraiment savoir, mais elle se contenta de le toiser en croisant les bras. Elle le laissait prendre sa décision. Il l'apprécia encore davantage. Avec précaution, il ouvrit le premier journal daté du 2 avril 1969. Un simple encadré en première page indiquait :

Flash Info - Exclusivité

La nouvelle est tombée cette nuit. Ronan Graves, sorcier respectable de notre communauté et responsable d'équipe au Gouvernement des Finances et des Dragots, a été arrêté par les Aurors français et autrichiens à la prison de Nurmengard. Il tentait visiblement de faire évader Gellert Grindelwald qui y purge sa peine depuis son enfermement en 1945.

Cette tentative est aussi ratée qu'inattendue pour la prison tristement célèbre située dans les Alpes d'Autriche en Europe. Ronan Graves ne s'était pourtant jamais manifesté comme soutien de Grindelwald alors même que les sorciers croyant en son idéologie sont toujours présents dans notre pays plus de vingt ans après sa défaite contre Albus Dumbledore. A l'époque, le jeune Ronan Graves venait de sortir de l'école et n'avait sans doute pas eu le temps de se joindre au mouvement.

Au moment où nous bouclons ses pages, la raison de cet acte demeure inconnue. La femme de Ronan Graves, Cordelia Graves née Grims, n'a pas souhaité nous répondre. Nous savons simplement qu'elle est actuellement dans une clinique magique privée puisqu'il semblerait qu'un des enfants du couple ait des soucis de santé.

L'extradition de Ronan Graves requise immédiatement par le MACUSA devrait avoir lieu dès le début de la semaine prochaine en accord avec les autorités autrichiennes.


La brève se terminait ainsi. Julian releva la tête, l'esprit encombré de questions, mais Othilia fit glisser l'autre journal au-dessus du premier. Le nom de Ronan Graves lui disait vaguement quelque chose.

- Lis, ordonna-t-elle. Tu vas voir.

Cette fois, la date qui s'étalait en haut de la une était celle du 10 avril 1969 quelques jours plus tard. Son estomac se contracta lorsqu'il reconnut ce qu'elle signifiait : c'était le jour de la mort de Théophilius.

Le double drame de la famille Graves-Grims


Notre journal vous l'apprenait la semaine passée : Ronan Graves était arrêté à la prison de Nurmengard en Autrice après avoir tenté de libérer le criminel de guerre Gellert Grindelwald. Rapatrié aux Etats-Unis mardi dernier, il est en attente de jugement sous haute surveillance au Bureau des Aurors.

Malheureusement, ce n'est pas la seule tragédie qui touche la famille Graves-Grims en ce jour. Cordelia Graves, l'épouse de monsieur Graves, a été vu à la sortie de la clinique privée dans laquelle elle est retranchée depuis le début de l'affaire. Soutenue par ses parents, Gerbert et Isadora Grims, elle tenait à peine sur ses jambes. Nos journalistes ont ainsi pu recueillir l'information : l'enfant du couple, âgé de cinq ans, est décédé en début de matinée d'une maladie infantile qui le rongeait depuis plusieurs mois.

D'après les premiers résultats d'enquête, Ronan Graves, partisan en sommeil de Grindelwald, était persuadé que seul « le plus grand sorcier du siècle » selon ses termes pourrait guérir son fils. Il voulait le libérer pour que celui-ci lui apporte son aide. Geste désespéré d'un père ? Il semblerait donc. La justice se montrera peut-être clémente à la lumière de ses nouveaux éléments.

Interrogé par nos services, l'Auror en charge de l'affaire a reconnu le caractère exceptionnel des faits, même si rien ne pouvait être confirmé à ce jour. Le scandale est d'autant plus embarrassant qu'il éclabousse deux des familles les plus influentes de notre communauté. Les Grims et les Graves. Descendants de deux des douze premiers Aurors de notre pays, Gondulphus Graves et Robert Grimsditch, les deux familles se sont illustrées au cours des années. Les Grimsditch, dont le nom a été raccourci après la seconde guerre mondiale moldu en raison d'un sentiment antiallemand fort, a ainsi fondé sa fortune en investissant dans la finance. Les Graves, quant à eux, ont longtemps été affiliés au Bureau des Aurors. Triste revers du sort lorsqu'on voit aujourd'hui le destin de Ronan Graves.

Ce qui est sûr, c'est que l'enquête n'est pas prête d'être bouclée. Les Aurors vont devoir interroger toute la famille pour s'assurer que l'acte de monsieur Graves n'est qu'un acte isolé et non la face cachée d'une résurgence du mouvement de Grindelwald.

Nous adressons toutefois toutes nos condoléances et nos pensées pour la perte du petit Théophilius. Puisse son esprit et son corps retourner à la magie créatrice.

Une fois sa lecture terminée, Julian resta prostré de longues secondes. Il essaya d'intégrer toutes les informations qu'il venait d'apprendre, mais seul la tâche d'encre qui recouvrait le nom du mari de tante Cordelia sur l'arbre généalogique dansait devant ses yeux. Pas étonnant qu'il ait été effacé. Son emprisonnement et son affiliation à la magie noire devaient littéralement être une tâche sur la grandeur du nom de la famille : ils n'avaient fait que la retranscrire littéralement. Pourtant, il ne savait pas quoi penser de cet homme. De son oncle, en vérité. Oncle par mariage peut-être, mais oncle malgré tout. Était-il un père désespéré ou un criminel dangereux ? Même l'article semblait avoir du mal à trancher.

Othilia dut penser qu'elle lui avait laissé assez de temps car elle reprit le journal et le plia en deux pour cacher la photo en une représentant Cordelia, à moitié effondrée à la sortie de la fameuse clinique où était mort Théophilius.

- Voilà, c'était le père de Théa, énonça-t-elle d'une voix atone. Deux mois après la mort de Théo, il a été condamné à dix ans d'emprisonnement. Cordelia a demandé le divorce le jour même, mais ça a fait scandale. Des gens de leur milieu ne divorcent pas. Elle a retiré sa demande quelques jours plus tard, mais a repris son nom de jeune fille. Théa a fait pareil.

Il réalisa à cet instant que Théa s'appelait effectivement Grims et non Graves. Il ne pouvait pas vraiment l'en blâmer.

- Mais... s'il a été condamné à dix ans de prison en juin 1969, dit-il en calculant en même temps. Ça veut dire... ?

- Qu'il a été libéré en début d'été, oui. Il était sous surveillance, mais il y a des rumeurs qui disent qu'il a échappé aux Aurors et ne s'est pas présenté aux contrôles. En tout cas, il n'a pas tenté de reprendre contact avec sa famille... Ou alors Théa ne m'a rien dit. (Othilia se mordit la lèvre et marqua une pause, puis secoua la tête comme si elle trouvait l'idée absurde). Non, elle me l'aurait dit, assura-t-elle. Elle le déteste vraiment. Elle déteste tout ce qui touche à la magie noire de manière générale.

A nouveau, un souvenir sembla revenir des tréfonds de son esprit. Il revit sa tante Cordelia, le journal déplié devant elle pendant leur voyage en calèche volante jusqu'à Grand Central, qui le froissait ensuite de colère. Il avait juste eu le temps de lire les deux titres qui faisaient la une de l'actualité : l'affaire Emilia Cooper, avec sa photo de Joconde blonde mystérieuse, et Ronan Graves en cavale. Il comprenait mieux sa colère.

- Mais... Ce n'est pas dangereux ? Et s'il s'en prenait aux Grims ? A Cordelia ou à Théa ?

- Je ne crois pas que ça soit très probable. Il n'a jamais été violent d'après ce que je sais. Il avait juste des idées un peu...extrémistes. Les Aurors qui ont interrogé Théa lui ont apparemment dit que son père tenterait probablement de quitter le pays. Ils surveillent surtout les frontières.

- Il a bien choisi son timing alors, commenta-t-il avec ironie. Je veux dire, les frontières ferment...

- C'est l'inconvénient d'être en prison, t'as du mal à tenir au courant de la situation politique à l'étranger.

Le ton pince sans rire d'Othilia lui arracha un sourire. Sans rien ajouter, elle se leva à nouveau et remporta les journaux. Il se contenta de fixer sa place vite. En seulement une heure à ses côtés, il avait eu l'impression de la découvrir davantage qu'en deux mois. Son esprit oscillait entre cette nouvelle constatation et l'histoire de Ronan Graves. Il songea à la crispation de Théa lorsque son père avait été abordé lors de la visite de Leonidas. Il regroupa ce qu'il venait d'apprendre avec ce que son parrain lui avait révélé : Ronan avait rencontré Cordelia alors qu'elle était encore à Ilvermorny et lui plus âgé. Ils avaient été un couple fusionnel et venaient de se fiancer quand sa mère était partie après une dispute avec eux. Elle ne leur avait plus jamais parlé, même à l'annonce de la mort de Théophilius. Ce dernier élément l'intriguait plus qu'autre chose : il connaissait sa mère. Même si elle avait coupé les ponts avec sa famille, ça ne lui ressemblait pas de ne pas sortir du silence et de renouer les liens à l'occasion d'un évènement si tragique, surtout si Ronan n'était plus dans le tableau à ce moment-là. Il manquait visiblement une pièce du puzzle, une pièce qui s'était perdu dans les trames du temps.

Il ne put y penser davantage puisque Othilia revint et se rassit à côté de lui. Sur une impulsion, il prit alors une décision :

- Eh Othilia... Je peux te demander un service ?

- Oui ?

- Tu crois que tu pourrais me prêter un chaudron en état correct et m'aider à trouver un ingrédient rare pour une potion ?

**

*


- T'as fait quoi ? S'écria Liam dans un étranglement indigné. Mais... Pourquoi t'as fais ça ? Mais ça va pas !

- Parce qu'on avait besoin d'un chaudron et de vrais ingrédients, on allait droit dans le mur sinon !

- Mais non ! Albert tenait le coup !

Comme pour ponctuer la verve de Liam, une bulle gonfla à la surface du chaudron et explosa. L'étain se craquela un peu plus et Aileen s'empressa de jeter un énième sort de renforcement pour éviter qu'une fissure apparaisse.

- Liam, traduire les runes était une chose, briser un rituel de cette ampleur en est une autre ! On ne peut pas faire ça seulement à trois, rien que les philtres et les potions vont nous prendre des années si on a que Albert et des ingrédients bon marché au compte-goutte !

- Mais qu'est-ce que tu comprenais pas dans la lettre du corbeau ? Hurla Liam en retour. Il avait spécifié que personne ne devait être au courant sinon Emilia... elle... Rah !

De rage, il donna un coup pied dans le vide, frôlant leur chaudron de quelques centimètres. Il avait dû vouloir le viser avant de sûrement se rendre compte que le renverser serait contreproductif. Aileen se crispa.

- C'est fait maintenant, observa-t-elle d'un ton calme même si sa mâchoire crispée trahissait sa tension. Othilia pourrait effectivement nous aider... Qu'est-ce qu'elle t'a répondu ?

- Qu'elle pourrait nous fournir des chaudrons de rechange que son père garde dans une salle dans les sous-sols. Et pour la réserve, elle peut s'y introduire de temps en temps, mais elle ne peut prendre que les ingrédients dont l'absence ne se remarquera pas... Il va falloir s'organiser.

- Et elle demande quoi en échange ? Fit Liam, toujours sceptique.

Julian grimaça. Il devait reconnaître qu'Othilia avait été une négociatrice hors pair et n'avait pas accepté un simple « je ne peux rien te dire, fais-moi confiance » comme réponse. A sa décharge, ils ne se connaissaient pas si bien et lui aussi aurait voulu des explications à des demandes si étranges.

- Elle veut... être au courant, dit-il prudemment.

- Être au courant ? Qu'est-ce que ça veut dire ?

Il n'eut pas le temps de répondre. Comme si Othilia avait entendu la question de Liam, elle ouvrit la porte de leur salle de classe et Julian se contenta de la désigner, résigné. Elle entra tête haute, toujours aussi impassible que d'habitude. Juste derrière elle, Théa fit alors son apparition, l'air beaucoup moins calme et Julian écarquilla les yeux.

- Qu'est-ce que tu fiches ici ? S'exclama-t-il avant même que Liam ait pu s'insurger.

- Quel accueil, ça fait plaisir...

Il se retint de lui dire de justesse que question accueil, elle n'avait sans doute pas de conseil à donner.

- En plus, c'est toi qui embarques ma meilleure amie dans des trucs pas nets, lui lança-t-elle en croisant les bras. C'est plutôt moi qui devrait te demander ce que tu fiches ici. Et surtout de quel droit tu poses des questions sur moi dans mon dos !

- Quoi ? Je n'ai pas...

Il s'interrompit. Il n'avait techniquement pas posé de questions sur elle. Sn père en revanche...

- J'étais le seul à ne pas savoir, se défendit-il. L'affaire était dans les journaux, ce n'était pas un secret. (Il la pointa du doigt, nerveux devant son regard noir). C'est toi qui m'a dit que je devais trouver les réponses que je cherchais si je voulais !

- Je parlais des réponses au sujet de ta mère ! Pas mon père !

- Après ce que Leonidas nous a dit, tu crois pas que les deux sont liés ? Sérieusement ?

Théa ne trouva rien à objecter. Elle se contenta de serrer les dents en le fusillant du regard et Liam dut sentir que la crise entre eux venait d'être avortée et il prit le relais.

- Au risque de nous répéter : qu'est-ce que foutez là ? Rugit-il. Personne ne devait être au courant !

- On est là parce qu'apparemment, vous avez besoin d'aide, contra Othilia sans tressaillir. (Ses yeux tombèrent sur Albert et elle le jugea littéralement : si Julian avait été un chaudron, il aurait voulu disparaître sous terre). C'est ça que vous utilisez ? S'indigna-t-elle.

- Le « ça » s'appelle Albert, se vexa Liam. Il est utile et vaillant et je lui fais confiance... Pas comme à certains, ajouta-t-il avec un regard équivoque.

- Eh !

- Il a eu raison de me demander de l'aide, le défendit Othilia. Votre chaudron tiendra encore une journée maximum et encore. Donc va falloir me dire exactement la chose sur laquelle on travaille si vous voulez arriver à quelque chose.

Othilia avait beau être ferme, Julian voyait bien que Liam avait du mal à décolérer même s'il semblait prendre conscience qu'ils avaient raison. Il se tourna d'ailleurs à demi vers Aileen, comme pour lui demander son avis, et elle lui adressa un mouvement de tête imperceptible pour l'encourager.

- D'accord, céda-t-il. Admettons que tu peux nous aider... Pourquoi elle est là, elle ?

Théa parut sur le point de lui balancer une réplique cinglante, mais Othilia lui coupa le feu sous le chaudron. Littéralement : elle s'avança pour passer devant Théa et éteignit d'un coup de baguette les braises sous le ventre de Albert.

- Elle est là pour plusieurs choses : premièrement, elle m'a suivi parce qu'on ne peut pas dire à Théa Grims de ne pas se mêler de quelque chose si elle en a envie. Deuxièmement, vu ce que vous essayez de faire – et je ne sais pas encore exactement ce que c'est – vous allez avoir besoin de ses connaissances en Défense contre les Arts Obscurs. Et troisièmement, elle est là pour s'assurer que vous ne m'embarquez pas dans n'importe quoi juste pour récupérer des chaudrons et des ingrédients de Potions.

A chaque argument de sa meilleure amie, Théa hochait la tête avec un sourire satisfait. Vu son expression, elle savait très bien ce qu'elle faisait : elle narguait Liam. Julian se demanda s'il allait se remettre à crier, mais comme les dernières fois il sembla se rendre compte que ça ne servait plus à rien et ses épaules s'affaissèrent.

- Très bien, concéda-t-il. Au point où j'en suis... Vous pouvez rester.

- Magnifique ! Approuva Théa. Alors ? C'est quoi l'histoire ? On participe illégalement à un concours de potions ?

Julian échangea un regard avec Liam et Aileen. L'indécision était palpable : à qui revenait la le rôle d'expliquer la tâche dans laquelle ils s'étaient lancés ? Liam qui avait reçu la lettre du corbeau ? Aileen, leur supervisatrice implicite ? Ou lui-même qui avait déchiffré les runes et découvert ce qu'il fallait faire ? En constatant que les deux autres ne prenaient pas la parole, Julian décida de répondre à sa cousine.

- Non, c'est un peu plus complexe. Je vous dirais bien de vous assoir, mais on n'a pas de chaises...

- Mes oreilles fonctionnent même quand je suis debout, pas de problème.

- Ok... (Il inspira profondément et se jeta à l'eau). Alors, toute l'histoire commence par un corbeau début septembre et...

*************************************

Et voilà ! Quelques révélations dans ce chapitre, j'essaye de faire avancer au mieux l'intrigue ! J'espère que vous avez aimé ;) Trop contente de te revoir mythik !

Elements tirés du canon/Pottermore :

Rien je crois !

Prochain post : chapitre 21 - lundi 7 juin
cochyo

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par cochyo »

Aaaah génial !!!
Perripuce

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Perripuce »

annabethfan a écrit : lun. 26 avr., 2021 7:32 pm Merci énormément Charmi et Cochyo pour vos commentaires :D Le fait que vous soyez toujours là me fait tellement plaisir !

Chapitre 18: Le ciel pour seul témoin

« On aime d'abord par hasard,

Par jeu, par curiosité,

Pour avoir dans un regard

Lu des possibilités »


- Paul Géraldy -


//31 octobre 1979//

Le reflet des lumières bleutées sur le corps argenté des fantômes aveuglait Julian. A moins que ça ne soit les larmes qui pressaient contre ses paupières mais qu'il refusait de laisser échapper Oh mais choupinooou. Au fond de lui, il savait simplement que s'il laissait ses émotions sortir, il serait submergé. Et être submergé au milieu du bal des fantômes annuel d'Ilvermorny était bien la dernière chose qu'il voulait. L'estomac noué, il se fraya un chemin parmi la foule et bouscula Clémence Laveau au passage. Elle poussa un cri de surprise et ses cartes de tarot s'éparpillèrent autour d'elle. Il ne s'arrêta même pas pour s'excuser Bah alors mon ptit Djulianne? . Il voulait juste arriver au château le plus vite possible. Son corps avançait presque à l'instinct et seul la masse imposante du château à quelques mètres le guidait vraiment.

Le souffle comprimé au creux de la poitrine, il remonta l'allée principale. Plus il avançait, plus le bruit des conversations s'amenuisait. Il n'était même pas sûr que ça soit une bonne chose : le silence le laissait avec ses propres pensées. Pour éviter ça, il accéléra encore. Immédiatement, ses jambes protestèrent : visiblement, elles n'aimaient pas l'effort subi aujourd'hui entre sa remontée du Village jusqu'en haut de la montage et maintenant sa fuite effrénée à travers le parc Ah bah ça mon petit t'es pas un grand sportif. Pourtant, la douleur de ses jambes courbaturées était une distraction bienvenue. Ou du moins, elle le fut un temps. Très vite, son esprit le rattrapa et il visualisa les expressions accusatrices de ses amis. Il avait de toute façon toujours été incapable de faire taire son cerveau. Matthew aimait plaisanter en disant que c'était son côté Serdaigle. POUAHAHAHAH (je viens d'écouter ton vocal)

D'un côté, il comprenait Aileen et Liam. Depuis deux mois, ils passaient leur journée ensemble et Liam lui avait fait confiance avec la traduction des runes qui pouvait en théorie être la clé pour sauver sa sœur disparue. Le manque de réciprocité devait blesser A la fois je comprends aussi que Liam soit blessé. Mais il y a être blessé et trouver le bon moment pour le dire. Genre pas dans un moment où Djulianne est ouvertement bouleversé. . Il l'avait compris à force de le fréquenter : sous ses airs de garçon détaché et trublion, Liam pouvait être d'une honnêteté désarmante. Il prenait les réactions des autres à cœur, il fonctionnait à l'instinct et n'avait jamais peur d'affirmer ce qu'il pensait Et c'est aussi pour ça qu'on l'aime. C'était sans doute pour ça que sa relation avec Noah s'était si vite détériorée quand ils étaient plus jeunes. Quant à Aileen... Elle avait un côté doux et psychologue propice aux confidences. Mais Julian n'avait pas pu se résoudre à se confier sur quoique ce soit. Ni sur l'Angleterre qui lui manquait, ni sur son angoisse par rapport à Hanna, et encore moins sur la douleur sourdre qui ne le quittait jamais à cause du décès de sa mère. Et Merlin, même s'il savait qu'il aurait pu se confier à eux, il en leur en voulait aussi d'avoir réagi comme ça envers lui ce soir. Parce qu'après tout, il ne leur devait rien. Il gardait pour lui ce qu'il voulait. Il connaissait Aileen et Liam depuis seulement deux mois. Ils ne pouvaient pas remplacer Matthew juste en un tour de baguette. Oh cette phrase elle brise tellement le coeur ... Genre parfois t'as des amitiés comme ça où t'a pas forcément besoin de l'amour, juste de cette amitié.

Les émotions en bataille, Julian arriva enfin aux portes du château. Dans sa hâte, il faillit les ouvrir sans remarquer la créature au pied de la statue de Isolt Sayre qui nettoyait la pierre. Ce fut sa voix qui interrompit son élan.

- Eh bien, vous n'êtes pas au bal ? Qu'est-ce que vous fichez ici ? Vous allez salir ce que je viens de nettoyer ! Ouh, un coupain de Rusard.

Julian s'arrêta net. La créature lui arrivait à peine à la taille. Son apparence se rapprochait un peu de celle d'un gobelin, même si sa peau virait vers le gris et que deux grandes oreilles se dressaient de chaque côté de sa tête. Une touffe de cheveux clairsemés tirant vers le blanc couronnait sa tête.

- Pardon... répondit-il instinctivement. Je ne savais pas...

- Le bal est le seul moment où je peux nettoyer la statue d'Isolt sans avoir les sales gamins dans ton genre dans les pattes ! Quelle idée de revenir à cette heure !

- Je...

A nouveau ce soir, les mots lui manquèrent. Son esprit était trop surchargé par ses émotions vis-à-vis de sa mère pour réussir à appréhender les paroles de la créature. Non mais franchement il brise le coeur Faute de mieux, il se décida à demander, incertain :

- Excusez-moi mais... qui êtes-vous ?

- Moi ? Qui je suis ? Mon garçon, en voilà une question ! Je suis William ! Je vis ici.

- Ici ? A Ilvermorny ? Non, dans la statue d'Isolt Djulianne

- Non, en Arkansas ! Evidemment ici ! Ce château était à moi bien avant votre arrivée, espèce d'insolent.

- Ah...

Brusquement, Julian se souvint enfin. Liam lui en avait parlé : William, le puckwoodgenie concierge de l'école. Il le surnommait Willy le Pucky. Avec ça, ce n'était pas étonnant que William déteste les élèves. Ou alors c'était une règle universelle des concierges, ce qui expliquerait l'attitude de Rusard. Franchement quand est-ce qu'on aura un concierge bienveillant :lol: :lol:

- Je ne voulais pas vous déranger, dit-il finalement en retrouvant ses esprits. Je vais vous laisser...

- Et pourquoi tu es parti, hum ? Le bal n'était pas à ton goût ?

- Non... ce n'est pas...

Le puckwoodgenie le scruta intensément. Un voile léger troublait ses yeux, preuve supplémentaire de son grand âge. Il n'avait pas non plus l'air d'avoir trois cents ans comme les rumeurs le prétendaient, mais il n'était certainement pas tout jeune.

- Eh bien ? Parle ! Ou les sorciers ont-ils perdu le peu d'intelligence qu'ils avaient ?

- Non, ce n'était pas une question de goût, s'énerva-t-il. J'aurais juste voulu... Enfin, je m'attendais à voir une personne mais elle n'est pas apparue. C'est tout.

William l'observa, l'air de le juger, et il détesta le sentiment.

- Ah c'est un danger ça... Les morts et les vivants ne font pas bon ménage, petit. Parfois, il faut savoir dire adieu. Alors c'est beau cette phrase. Sincèrement, ça met des mots sur une pensée que j'ai réellement personnellement, qu'il faut savoir laisser les morts là où ils sont.

- Qu'est-ce que vous en savez ?

Il eut conscience d'être un peu trop agressif, mais il s'en fichait. Pendant un court instant, William parut sincèrement sur le point de lui répondre et une émotion étrange joua sur son visage. Mais le moment fut brisé avant même d'avoir lieu lorsqu'une voix héla derrière eux :

- Julian !

Il se retourna. Noah remontait vers le château. Sa cape ondulait autour de son corps au rythme de ses pas et ses boucles noires se confondaient presque dans l'obscurité ambiante, Ouh cette description hyper visuelle, genre je le vois vraiment émerger, une ombre dans l'ombre ... OK c'est assez sexy aussi. loin des lueurs tour à tour chaleureuses et bleutées de la colline des sorcières de Salem. Julian sentit sa gorge se fermer à mesure que Noah approchait. Il n'arrivait pas à décider s'il le maudissait de l'avoir suivi ou s'il était soulagé que tout le monde ne l'ait pas juste laissé partir. Il se trouvait étrangement démuni, seul. Et à choisir, il préférait être avec Noah qu'avec William le puckoowgenie.

- Qu'est-ce que tu fais là ? Demanda-t-il malgré tout lorsque Noah arriva devant lui.

-Je t'ai laissé un peu d'avance, c'est tout. Mais j'ai cru comprendre que tu ne voulais pas vraiment rester au bal, non ?

- Pas vraiment...

- Parfait, moi non plus. Viens. hihihihihihihihi

Julian fronça les sourcils.

- Où ?

- Tu verras, dit Noah d'un air mystérieux.

Il le narguait ouvertement. Julian débattu avec lui-même quelques secondes pour savoir s'il avait la force de s'opposer à Noah, mais il renonça.

- Je te suis, se contenta-t-il de dire.

Noah parut satisfait. Il commençait à comprendre que Noah aimait être aux commandes. C'est ce que j'étais en train de me dire, Noah il est mode "c'est bien il est à mes basques" :lol: :lol: Lors de leurs séances de dessin, c'est lui qui choisissait le thème la plupart du temps et Julian acceptait ses idées. Il devait avouer qu'elles étaient plutôt bonnes de toute façon. Alors que Noah ouvrait la porte du hall, il remarqua soudain que William avait disparu. Il tourna sur lui-même, fouillant le parc du regard, mais le concierge n'était nulle part en vue.

- Julian ?

- J'arrive, désolé...

Décidant d'oublier sa rencontre fortuite, il s'engouffra dans le hall. La chaleur l'enveloppa immédiatement et il fut encore plus ébloui que ce matin par les décorations. Sans la lueur du jour, les bougies dans les bouches des citrouilles ressortaient plus vivement et le jeu des ombres étaient saisissants Les jeux d'ombres et Marion ... . Même Noah s'arrêta une seconde.

- Ca ferait une belle peinture, jugea-t-il.

- Je trouve aussi...

Le visage de Noah se découpait justement dans la lumière et toute l'esthétique que produisaient les décorations le rendait plus fascinant que d'habitude, sûrement à cause de son physique aux traits fins et en même temps volontaires. Il haussa un sourcil en remarquant que Julian le dévisageait. Ah mais j'ai littéralement l'impression de le dévisager à travers le regard de Djulianne (quelle description encore une fois, magnifique)

- Je parlais du hall, précisa-t-il, rictus aux lèvres. :lol: :lol: :lol: très Noaesque

Julian sentit ses joues et son cou chauffer.

- Moi aussi, s'empressa-t-il de dire.

- Hum... Allez viens, Picasso. Alors Djulianne est un peu trop classique pour être Picasso

Et sans même s'assurer que Julian le suivait, il traversa le hall et pénétra dans le Réfectoire pour prendre les escaliers. C'était étrange de parcourir le château vidé de ses élèves : tout était plongé dans un silence angoissant et calme à la fois. Julian détestait ça. Il ne savait même pas d'où lui venait cette certitude viscérale, mais il tenta de s'imaginer Poudlard sans le bruit ambiant qui accompagnait sa vie quotidienne et n'y parvint pas. L'idée même semblait contre nature. Or, c'était exactement l'impression qu'Ilvermorny renvoyait. Une sorte de carcasse vide Quelle beauté de plume une nouvelle fois. . Heureusement, Noah faisait du bruit en marchant. Ses pas frappaient le sol avec assurance et l'écho se répercutait contre les pierre de grès. Au premier étage, Julian s'attendait presque à ce qu'ils se dirigent vers leur dortoir, mais Noah poursuivit sa montée. Et il n'arrêta pas, enchaînant les étages.

La respiration de plus en plus courte, Julian se força à rester silencieux. Le pauvre, il avait déjà mal aux jambes :lol: :lol: Il ne voulait pas paraître impatient ou pire apeuré. Noah savait ce qu'il faisait. Ou du moins il en avait l'air. Sa crise de panique tout à l'heure devant tous les autres était déjà assez embarrassante comme ça. Maintenant qu'il avait mis de la distance entre lui et les fantômes, ses émotions se rendormaient progressivement et il avait le sentiment qu'il en reprenait le contrôle Et c'est le plus important pour Djulianne . Il avait été juste idiot d'espérer. C'était évident que sa mère n'aurait jamais pu apparaître ici. Elle n'était même pas morte sur ce continent. La déchirure dans le voile entre le monde des vivants et celui des morts à Halloween avait ses limites. Rassure toi comme tu peux mon grand

Les poumons douloureux, il ralentit sur le pallier du quatrième étage et Noah lui jeta un coup d'œil par-dessus son épaule.

- Encore un effort, allez, l'enjoignit-il. On est bientôt arrivés.

- Arrivées où ?

Il grimaça instinctivement. Il s'était pourtant refusé à poser la question depuis plusieurs minutes.

- Tu verras bien. A moins que tu ais la trouille, Shelton ? Scared, Pottah?

Le défi était perceptible. Haut et fort. Julian tenta de se composer un visage neutre.

- Avance, se contenta-t-il de dire. J'adore comment Djulianne prend de l'assurance parfois au moment où on s'y attend le moins.

Noah émit un rire moqueur. Ils continuèrent leur ascension. Plus ils montaient, plus les escaliers se faisaient étroits et sombres. C'était évident que cette partie du château n'était pas destinée aux élèves. Il réalisa qu'il avait sérieusement perdu la main – ou plutôt le souffle – depuis l'année dernière. Il avait l'habitude de monter jusqu'en haut de la tour d'Astronomie. Ilvermorny était deux fois moins haut. Sans pouvoir s'en empêcher, penser à la tour d'Astronomie le fit penser à Hanna. Il la revoyait monter les marches presque deux par deux, pressée d'arriver en haut pour ne pas louper un phénomène céleste qu'elle avait calculé pendant la journée grâce à ses cartes du ciel et ses calendriers lunaires. Soudain, l'image d'Hanna lui donna la clé et il comprit.

- On monte sur le toit, c'est ça ?

- Ah l'esprit Serpent Cornu a encore frappé, déclara Noah, même s'il semblait déçu que Julian ait deviné. Et bien moi ça me fait bien plaisir que Djulianne le ramène un peu sur terre.

Il s'en voulu presque aussitôt d'avoir verbalisé sa découverte, mais sa curiosité le poussa à continuer :

- Mais... on a le droit ?

Cette fois, Noah ne prit pas la peine de répondre. Il lui renvoya simplement un regard équivoque comme s'il se moquait d'un élève plus jeune et innocent. Pour la énième fois, Julian rougit.

- T'as peur d'une retenue, Shelton ? Lança Noah.

- Non... mais un peu quand même

- Parfait. Alors bienvenu dans l'envers du décor.

Et d'un coup d'épaule, il ouvrit la porte qu'ils venaient d'atteindre après avoir gravi une dernière volée de marche poussiéreuse et biscornue. Le plafond, qui s'était fait de plus en plus bas, laissa place à l'infinité du ciel. Julian passa l'embrasure, incertain. Devant lui se déployait un vaste belvédère : la terrasse s'élançait au-dessus du vide au milieu des tours et des tourelles du château qui perçaient le firmament. Le vent soufflait encore plus fort ici et produisait un bruit implacable, comme s'il cherchait à compenser le silence du château vidé de ses élèves. Julian avança lentement jusqu'au parapet. En contre-bas, il avait une vue imprenable sur le parc éclairé par les fantômes et les lumières de sort. Ses camarades formaient des points minuscules qui se mouvaient de loin. Marion. Marion, je vais me répéter pour la 200e fois, je suis jalouse de ta plume pour les decriptions. Genre vraiment celle-ci est encore très jolie je trouve, à la fois visuelle et sensorielle.

- C'est incroyable... souffla-t-il. Comment... ? Comment tu savais ?

- Je viens souvent ici, révéla Noah en s'accoudant à la balustrade à côté de lui. Fleming laisse toujours la porte ouverte quand elle vient fumer. Je pense qu'elle en avait marre de la fermer et de l'ouvrir à chaque fois. (Il haussa les épaules). Pas de chance pour elle, j'ai tendance à traîner là où je devrais pas, ajouta-t-il non sans une certaine fierté. :lol: :lol: :lol:

Julian tenta de s'imaginer sa nouvelle directrice de maison et professeur de sortilèges en train de fumer seule sous les étoiles. L'image avait quelque chose de poétique et triste à la fois. Très poétique

- Et t'es sûr qu'elle va pas débarquer ce soir ?

- Elle est au bal à superviser les fantômes et les autres, assura Noah. Le toit est à nous !

D'un geste grandiloquent, il écarta les bras comme pour englober tout l'espace et Julian se surprit à sourire, ce qu'il n'aurait pas crut possible il y a trente minutes. Noah sembla le remarquer car il le pointa du doigt, tête inclinée sur le côté.

- T'as une meilleure tête, commenta-t-il. et avoue t'es fier de l'avoir provoqué

- Pas très dur, rétorqua-t-il, embarrassé. Désolé pour tout à l'heure, ça a dû vous paraître bizarre... C'était idiot...

- Quoi ? De vouloir revoir ta mère ? Plutôt normal, si tu veux mon avis... Et lui il a des réactions hyper gentilles quand on s'y attend le moins

Il haussa les épaules et plongea la main dans sa poche pour en sortir un paquet de cigarette. D'un geste, il en sortit une du paquet et la porta à sa bouche avant de l'allumer du bout de sa baguette. Julian, qui avait déjà dû subir l'odeur du tabac avec Leonidas, fronça le nez.

- Tu fumes ? Dit-il.

Immédiatement, il se trouva ridicule à énoncer l'évidence et il aurait voulu pouvoir ravaler sa phrase.

- Perspicace. Et toi tu serais pas anglais ? Rétorqua Noah avec sarcasme avant de tendre le paquet vers lui. T'en veux une ?

- Non...

- Laisse-moi deviner. T'as jamais essayé ?

- Pour faire comme tout le monde ? Non merci, je suis pas intéressé That's my boy . J'ai déjà du mal à monter les escaliers jusqu'ici, mes poumons ont pas besoin de ce genre de trucs.

Au moins, la réponse lui était venue facilement. Il était sincère, il détestait l'idée de fumer. Matthew avait essayé quelques fois l'année dernière pendant des fêtes, mais il n'avait eu l'air d'apprécier et la réaction de son meilleur ami l'avait conforté dans son choix. Noah parut apprécier sa réponse car il tira une bouffée, le coin de la bouche relevée.

- Je fume seulement de temps en temps, expliqua-t-il au bout de quelques secondes. Pour me détendre.

- Et comment tu les trouves ? Ta tante tient un marché noir en plus de son café ?

- Morgane, non. Ça serait bien la dernière chose qu'elle pourrait faire. Non, je les achète à Grand Central à la rentrée. J'en prends plusieurs paquets pour le semestre.

- A Grand Central ? S'étonna Julian. Tu dois quand même aller à New York pour prendre le train ? Mais... tu vis littéralement au pied du château !

- Avancer, revenir en arrière, retour à la case départ, énuméra Noah en prenant un air philosophe. L'histoire de ma vie ! Rôh Anna. Très symbolique en effet.

Sur le coup, Julian ne sut pas quoi faire de cette remarque. Comme souvent, il n'arrivait pas à déterminer si Noah faisait de l'humour ou non et il ne le connaissait pas encore assez pour savoir s'il disait la vérité. Faute de mieux, il se contenta de secouer la tête en souriant.

- Tu devrais dire ça à la directrice, elle y réfléchirait peut-être.

- Hicks ? Tu parles... Elle est perchée dans sa tour d'ivoire. Ou du moins elle l'est quand le MACUSA n'est pas là.

D'un geste, Noah désigna le parc du château en contrebas. De là où ils étaient, ils ne pouvaient pas distinguer précisément les silhouettes, mais Julian se souvenait parfaitement de la directrice qui discutait avec les hommes au logo du MACUSA brodé fièrement sur leur robe de sorcier. Plus il l'observait, plus il remarquait que Noah avait un problème avec l'autorité : la directrice, les professeurs, sa tante... Il passait son temps à les fuir ou à leur répondre et il ne comprenait pas pourquoi. Aucun d'eux n'avait pourtant paru hostile envers lui. Les professeurs, comme Fleming au club de duel, l'encourageaient même à exploiter ses capacités.

- Pourquoi tu ne les aimes pas ? Eut-il le courage de demander sur un coup de tête, enveloppé par l'obscurité. Les profs ou la directrice.

- Quoi ? Je devrais faire des soirées pyjama avec eux ?

- Je n'ai pas dit ça, protesta-t-il en riant. Mais ils ne m'ont pas semblé si mal depuis que je suis arrivé.

- T'es là depuis deux mois, c'est pour ça, dit Noah avant de de porter sa cigarette à ses lèvres et d'en exhaler la fumée. Je sais pas... reprit-il finalement après avoir réfléchi quelques secondes. Je crois que ce qui m'agace chez la plupart des adultes, c'est leur esprit fermé.

Julian fronça les sourcils.

- Comment ça ? Dit-il, intéressé.

- Je veux dire... Prends le dessin par exemple. L'art en général même. Ça ne t'énerve pas que personne ne s'en soucie ? Ah mon cher Noah. Pourquoi on arrive à voir quelque chose qu'ils n'arrivent pas à voir ? (Il marqua une pause avant de répondre à sa propre question). Parce qu'ils ne prennent pas le temps de s'y intéresser ni de regarder. Si ça n'a pas un intérêt direct, comme une bonne note, un métier à la clé ou de l'argent à gagner, ça ne les intéresse pas. Ma tante dit que le dessin ne me mènera nulle part. Et ça pour le coup, c'est valable côté sorcier et moldu.

Julian pencha la tête. L'amertume de Noah, il la ressentait en écho au fond de lui. Il n'y avait peut-être jamais prêté attention, mais maintenant qu'il posait des mots sur cette impression, il sentit s'agiter en lui aussi un sentiment d'injustice : tout le monde l'avait toujours encouragé à travailler les sortilèges à cause de ses pré dispositions en la matière, mais à part sa mère personne n'avait considéré le dessin comme quelque chose de sérieux. C'est super intéressant de travailler cet aspect, complétement vrai, complétement applicable à tellement d'entre nous. Instinctivement, il voulut la défendre.

- Pas tous les adultes, nuança-t-il. Ma mère aimait l'art, elle trouvait que c'était important. Quand elle m'emmenait pas aux Archives magiques, on allait à des expositions. Je m'ennuyais au début, mais elle me montrait toujours des tableaux avec des personnages à la tête bizarre. Ça me faisait rire.

- T'avais quel âge ?

- Je ne sais plus... Huit ou neuf ans.

Noah eut un sourire tordu.

- Le prodige en tout, s'exclama-t-il. Laisse-moi deviner, tu reproduisais du De Vinci à dix ans ? LEONARD <3

- N'importe quoi...

Piqué au vif, il détourna le regard. Il avait aussi remarqué ça sur Noah : il mettait derrière ses blagues apparemment anodines une pointe ardente qui atteignait toujours sa cible, comme s'il changeait d'humeur ou ne pouvait s'empêcher de se servir de sa langue acérée pour éviter de se dévoiler. Un bon mécanisme de défense Pourtant, incapable de supporter le silence, il reprit :

- Je me suis déjà demandé pourquoi les sorciers ne s'intéressaient pas à l'art, tu sais. Je pense que c'est plus une question de mentalité que d'adultes. Je veux dire, les moldus s'y intéressent eux. Ouais mais encore une fois dans une moindre mesure cela dit. Les musées, je suis encore frustrée. Genre c'était difficile d'établir des gestes barrières et jauges dans les musées ... En crise, la culture c'est la première chose qu'on sacrifie.

- Les moldus, répéta Noah en faisant rouler les sonorités anglaises, l'air amusé.

- Les Non-Maj', c'est pareil, se corrigea-t-il d'un geste de la main impatient. Bref, je pense que c'est pour des raisons historiques. Tout nos attributs sont hérités du Moyen-Age : les plumes, les parchemins, nos architectures les plus importantes... Well well ... ça me rappelle quelque chose. C'était justement l'époque où on interagissait encore avec les moldus – les Non-Maj' pardon mais ne t'excuse pas, revendique ta différence ! – et que la magie faisait partie du quotidien, même si elle faisait peur. Avec le Code du secret magique, les interactions se sont arrêtées. La société moldu a continué à avancer techniquement pendant qu'on prenait du retard. La plupart des sujets de nos tableaux datent d'il y a plusieurs siècles... On n'a même pas commencé à investir le cinéma ! POUAHAHAH quel discours, tu as si raison mon Djulianne

Noah, attentif, hocha la tête même si Julian voyait bien qu'il ne savait pas ce qu'était le cinéma.

- J'aime bien ta théorie, approuva-t-il malgré tout. J'ai toujours trouvé ça idiot qu'on n'ait pas de musée d'art. Hilda refusait que j'y mette les pieds chez les Non-Maj'.

- Les sorciers ne voient de la beauté que dans la magie, c'est pour ça... C'est si beau et si vrai comme phrase. Regarde la photo ou la peinture, ça n'a d'intérêt pour eux que s'ils les ensorcellent.

- Eux ? Ou nous ?

Julian lui accorda le point. En tant que sang-mêlé, il avait toujours été entre deux mondes, même si la magie faisait partie intégrante de sa vie. Il avait juste appris à cloisonner pour certaines choses. En ce qui concernait l'art, il avait clairement choisi son camp.

- C'est juste que... Les sorciers travaillent tellement la magie, ils l'ont poussé et en ont repoussé les limites. La magie est l'équivalent d'un art pour eux. leur seul art Pourquoi ils auraient besoin d'autres choses ?

- Parce que l'art exprime quelque chose de la vie que la magie ne pourra jamais faire, répondit Noah sans hésitation.

Julian acquiesça. A nouveau, l'absolu exprimé par Noah raisonna en lui.

- Je pense vraiment que le Code du secret a tout changé, reprit-il, pensif. Ça a marqué la fracture symbolique et politique avec le monde moldu. L'art s'est délité chez les sorciers et le gouvernement devait avoir peur que des moldus tombent par erreur sur des peintures qui bougeaient, des dessins ensorcelés... Ca aurait été dur à expliquer.

- T'imagines ? Railla Noah. John-Mr-Tout-Le-Monde qui rentre du travail et se fait provoquer en duel par une peinture de chevalier ? Coucou le Chevalier du Catogan :lol: :lol: :lol:

- Tu serais capable de faire ça, je suis sûr.

- Quoi ? Ensorceler un dessin pour qu'il provoque les autres en duel ?

- Non, ensorceler un dessin pour rendre la vie impossible à Liam par exemple. Ah mais complétement :lol: :lol:

Noah éclata de rire. Il avait un rire étonnement grave et la fumée de sa cigarette tournoya dans l'air, informe. Il n'avait pas le talent de Leonidas pour lui donner des formes en tous genres.

- N'empêche, même si le gouvernement avait peur, je trouve que c'est des conneries qu'on nous apprenne rien d'artistique, s'agaça Noah, vindicatif. Je veux dire, on comprend assez facilement par nous même comment animer un dessin, mais la technique pour peindre un portrait en donnant une âme à un sujet, ça c'est intéressant.

- Tu pourrais apprendre, suggéra-t-il. Après Ilvermorny. Il doit y avoir des instituts de magie supérieure qui propose ça...

- Comme si Hilda me laisserait. Aucune chance Mais genre t'as besoin de sa permission. . Avec elle, je dois finir au MACUSA ou reprendre le café. « Faire quelque de ta vie, mon garçon », imita-t-il d'un ton sec assez proche de celui de sa tante.

- Mais Raphaël... Elle le laisse faire du balai à haut niveau, non ?

Noah émit un rire étouffé et cynique.

- Seulement parce que les recruteurs s'intéressent à lui depuis quelques mois. Sinon, elle n'aurait jamais changé d'avis.

- Un trait de famille, peut-être ? Suggéra Julian innocemment. :lol: :lol: Observateeeur

Il l'avait bien constaté, Noah n'était pas la personne la plus souple au monde et ses avis étaient souvent tranchés.

- Eh ! Protesta-t-il. Je peux changer d'avis : je l'ai fait sur toi.

- Moi ?

Etonné, il se tourna vers Noah pour lui faire face. Il n'avait pas eu l'impression que son camarade de dortoir l'ait traité différemment ces deux derniers mois : depuis le début, Noah se contentait de se moquer de lui à ses heures perdues et de lui imposer sa présence dans le dortoir lors de ses séances de dessin. Leurs séances de dessin en vérité désormais.

- Toi, acquiesça Noah avant d'expliciter sans ambages comme à son habitude. Alors
Cette réplique "Toi - Moi? - Toi." ça fait très réplique de film romantique alors j'imagine Noah le regard enamouré sur un Djulianne complétement perplexe avant un baiser. Pardon, je reprends.
Je te trouvais agaçant avec ton accent, ton air de premier de la classe et ta manie de tout ranger. C'est presque angoissant.

- Angoissant ? S'amusa-t-il, moitié vexé moitié surpris que Noah ait relevé ce genre de détails à son sujet. Excuse-moi de vouloir retrouver mes affaires. Si je ne fais pas ça, je peux passer une heure à rechercher mes crayons avant de les retrouver sous ton lit !

- Je sais toujours très bien où je les laisse, assura Noah. Complétement Team Noah : ON SE RETROUVE DANS NOTRE BORDEL

- C'est ça...

Julian secoua la tête, peu convaincu. Vivre au quotidien avec Noah, Liam, Enjolras et Wilde n'était pas la chose la plus facile. Il ne comptait plus les fois où il avait trébuché sur un accessoire de Quodpot qui traînait par terre ou retrouvé ses affaires déplacées. Il avait failli faire une crise de nerf lorsque Wilde avait bougé son écharpe de Serdaigle sans le prévenir et qu'il l'avait cherché pendant une heure. *se frappe le front du plat de la paume* Vu son regard, Noah s'en souvenait aussi car il tendit la main et attrapa le bout de la dite écharpe avant de tirer doucement dessus. Je viens d'avoir un fucking gloussement

- C'est celle de Poudlard, c'est ça ?

- De Serdaigle, se sentit-il obligé de préciser.

- J'aime bien les couleurs.

- Moi aussi... De toutes les maisons, le bleu et le bonze ont toujours été mes préférées. Ça énervait Matthew et sa foutue fierté de Gryffondor.

- Matthew... Le meilleur ami, hum ?

Noah fixait à nouveau le parc en contrebas et Julian n'arriva pas à distinguer son visage, mais quelque chose dans sa voix le fit tiquer. LA JALOOOUSIIIIE Il se contenta d'acquiescer.

- Ouais... Matthew Bones.

- Et ta copine ? Sarah ?

- Hanna, corrigea-t-il en grimaçant.

- Ah oui, elle... Alors ? Tu lui as écrit finalement ?

- Oh oui, ça fait un moment... On s'envoie des lettres, ça va mieux. T'avais raison, le dessin était sans doute une bonne idée pour rétablir le contact. Ça me faisait juste bizarre de lui reparler, mais c'est passé je crois.

- Et pourquoi ça te faisait bizarre ?

Toujours sans le regarder, Noah écrasa sa cigarette sur la balustrade du parapet. La lueur grésillante qui avait faiblement éclairé son visage jusque-là disparu et Julian se concentra sur ses mains. Il hésita pendant un court silence à révéler à Noah ce qu'il avait enfin compris cette après midi en discutant avec son parrain, mais le poids des mots fut finalement trop lourd dans sa poitrine et il s'en déchargea :

- Tu vas trouver ça tordu mais... On ne s'étaient pas revus elle et moi après... la mort de ma mère.

Si Noah fut surprit, il ne le montra pas.

- Tu pensais qu'elle ne comprendrait pas ? Dit-il.

- Non, c'est pas ça... Hanna est une fille empathique, elle m'aurait soutenu, je le sais. Mais... Elle aurait été là trop tard. Je sais que ce n'est pas de sa faute si elle n'était pas là, personne n'aurait pu prévoir. Mais le temps qu'elle revienne, l'enterrement avait déjà eu lieu, j'avais été au Ministère subir les discours des politiques sur le drame que l'attentat avait été pour notre communauté et toutes leurs conneries... C'était idiot de lui faire un résumé de ce que je ressentais depuis des semaines. Je ne savais pas quoi lui dire, ni comment lui dire... non et puis la subir elle. Parce qu'elle serait probablement coupable de ne pas avoir été là et en aurait fait des tonnes devant un Djulianne qui a fait quand même du chemin et n'a pas envie de se replonger là-dedans. C'est humain, compréhensible et parfaitement travaillé par petite Anna, je trouve que tu gères incroyablement bien le deuil de Djulianne.

- Et maintenant ? Avec le recul ? Tu trouves quoi dire ?

Julian baissa la tête, l'estomac lourd.

- On évite le sujet on va dire, avoua-t-il. On parle de plein de choses comme d'habitude, de ce qui se passe à Poudlard et ici, mais pas de ma mère... C'est sans doute plus simple comme ça, je ne veux pas lui imposer...

- Comme tu n'as pas voulu l'imposer à Aileen et Liam ? Non mais lui il est incroyable pour appuyer là où il faut. Pas forcément où ça fait mal, mais là où il faut.

Le ton n'était pas accusateur, mais Noah le mettait clairement et volontairement face à ses choix. Presque embarrassé, il se tordit les mains et repéra des tâches de fusain noire sur sa peau. Il les frotta mécaniquement.

- Liam avait assez à gérer avec la disparition d'Emilia, se justifia-t-il. Et Aileen a déjà fait beaucoup pour moi depuis que je suis arrivé au château, je ne voulais pas ajouter ça en plus...

- Le « ça » en question te pèse plutôt pas mal pourtant. A juste titre.

Cette fois-ci, Noah laissa filtrer une certaine compréhension dans ses paroles et Julian se souvint brusquement de ce qu'il lui avait dit sur sa propre mère : il savait ce que c'était de ne plus en avoir une parce que la sienne avait décidé qu'elle ne voulait pas de ses fils. La curiosité le poussa.

- Qu'est-ce qui s'est passé avec la tienne ? Pour que tu vives chez ta tante ?

- T'essayes de détourner la conversation de toi ?

- Non, je veux vraiment savoir. C'est toi qui en a parlé une fois. Et ouais, si on peut éviter de parler de moi ça m'arrangerait, quand même.

Noah le fixa longuement, comme s'il tentait de le percer à jour et voir s'il disait la vérité. Il soutint son regard et Noah soupira. Avec un dernier coup d'œil au bal des fantômes en bas, il se retourna puis se laissa glisser au sol, dos contre le muret et jambes repliés devant lui. Une position de repli. De défense. Julian l'imita. Assis par terre, ils ne subissaient plus l'assaut du vent et il sentit les muscles de son corps se détendre. Il avait mal partout, surtout au niveau du torse. Sa crise de panique de tout à l'heure lui avait coupé le souffle douloureusement et il en ressentait encore les effets.

- C'est compliqué et simple à la fois, commença à raconter Noah d'une voix désincarnée. Ma mère a toujours été un peu spéciale. T'as vu ma tante ? Imagine l'exact opposé. Hilda a toujours eu un esprit assez terre à terre, elle a conscience des choses je pense... Ma mère ? Elle aime vivre. Elle n'a pas besoin de l'approbation des autres, elle n'aime pas les convenances. Avec Raphaël, quand on était petits, elle nous laissait faire ce qu'on voulait. On pouvait partir en vacances à l'improviste et revenir des jours plus tard. Hilda détestait ça : elle disait qu'on ne devait pas louper l'école et qu'on devait faire ce qu'elle disait parce qu'elle était l'adulte. Il a eu deux mamans en somme.

Julian se retint d'intervenir. A ses yeux, les revendications de Hilda paraissaient légitimes. Il comprenait mieux le portrait que lui avait dressé Théa lorsqu'elle lui avait raconté que Heather Douzebranches ressemblait à une adolescente sur le tard. Et ça ne l'étonnait pas non plus que Noah, au vu de sa personnalité, oscille entre colère et admiration pour elle. Parce que dans le fond, il ne paraissait pas bien différent. Il lui donna raison en poursuivant : Ouais sauf que lui est vraiment adolescent

- Elle nous laissait souvent chez Hilda enfants... Parfois, elle pouvait décider de partir avec des amies ou en voyage et elle pouvait pas nous emmener. Elle nous laissait sur le pas de la porte du café et Hilda nous récupérait à l'ouverture C'est chaud quand même ... . Dès qu'elle nous voyait, elle avait l'air en colère. Je la revois encore se figer à chaque fois quand elle ouvrait le rideau. Et puis elle ouvrait la porte d'un coup de baguette comme si on venait de foutre en l'air sa journée. On était un peu un fardeau pour les deux, j'imagine. C'est franchement atroce de se sentir rejeté comme ça ...

A nouveau, Julian s'empêcha d'intervenir pour ne pas couper l'élan de Noah maintenant qu'il s'était décidé à parler. Mais s'il avait dû faire une hypothèse, il n'était pas sûr qu'Hilda ait été en colère après les deux enfants déposés devant sa porte. Sa sœur en revanche... Exactement. Il analyse bien notre cher Djulianne Il supposa que la nuance avait dû être dure à percevoir pour un petit garçon balloté entre deux maisons et que, même aujourd'hui, la vision de Noah était trop influencée par son ressenti enfant pour être complètement objectif.

- Mais y'avait du bon aussi... continua Noah, insensible à ses pensées. (Il leva les yeux vers les étoiles). Hilda nous faisait toujours à manger, elle n'oubliait jamais si on avait un contrôle ou un mot à signer pour le lendemain. Elle nous lisait des histoires. Raphaël voulait toujours celle des Trois Frères... Je ne sais pas si vous la connaissez en Angleterre ?

- Si, si, elle est connue... Le père de Matt lui lisait souvent, je crois, se rappela-t-il. *se met en PLS* Non sérieux je t'ai donné une arme redoutable avec les Trois frères

- Hum... Enfin bref, un jour Hilda en a eu assez. Elle s'est mise à dire les quatre vérités à ma mère et elles se sont disputées. Ma mère disait qu'elle n'avait jamais prévu de nous avoir, qu'elle ne savait juste pas comment mais qu'elle allait faire mieux maintenant. Qu'elle allait nous emmener à Chicago pour tout recommencer.

- A Chicago ?

Noah déglutit. Ses doigts se crispèrent, comme s'il avait envie de reprendre une cigarette.

- C'est là où habite mon père, lâcha-t-il en regardant droit devant lui. Aux dernières nouvelles du moins...

- Oh...

C'était idiot, mais Julian n'avait pas songé un instant où pouvait bien être le père de Raphaël et Noah dans le tableau Comme quoi parfois il peut manquer une figure parentale sans que ça ne choque . Hilda remplissait très bien le rôle de deuxième parent et naïvement il s'était imaginé que le mari d'Heather était mort aux alentours de la naissance des garçons.

- Ils ont divorcé ? Demanda-t-il après quelques secondes.

- Ils n'ont jamais été mariés, corrigea Noah. Là encore, c'est compliqué et simple à la fois. Une histoire vieille comme le monde : elle était amoureuse de lui et lui se fichait d'elle. Leur histoire a duré par intermittence. Elle a tenté de lui faire deux enfants pour le retenir, mais il l'a quitté à chaque fois. Ça ne l'empêchait pas de vouloir nous emmener à Chicago en espérant qu'on vive en famille. C'était assez paradoxal, elle ne voulait pas d'une vie classique, mais elle se disait justement qu'avec lui elle pourrait continuer à être libre, mais qu'on aurait un père... Un gars à qui laisser les enfants.

- Ca n'a pas fonctionné, devina Julian.

- Non, pas du tout. La dernière fois qu'on s'est pointé chez lui, il a dit qu'il voulait bien nous donner un peu d'argent mais pas nous laisser rester.

Sous l'éclairage du ciel nocturne, les traits de Noah paraissait plus figés que jamais. Ses boucles noires prenaient un reflet argent et ses mains s'étaient repliées en poings contre ses genoux. Julian n'arrivait pas à détacher ses yeux du portrait qu'il offrait. petit gloussement. Il sentit une vague de colère monter en lui envers les adultes de la vie de Noah : la mère irresponsable qui n'avait pas su être mère alors que deux petits garçons en avaient fait les frais, la tante qui s'était vu imposée un rôle qui n'était pas le sien sans essayer prendre en compte leurs émotions, le père qui n'avait pas assumé ses actes... ouais pas étonnant que Noah en veuille aux adultes.

- Qu'est-ce qui s'est passé alors ? Souffla-t-il. Pour que vous restiez chez Hilda ?

- Comme je disais, ma mère et elles se sont engueulées. Hilda a accusé ma mère d'être incapable de s'occuper de nous et ma mère s'est vexée. Elle nous a demandé avec laquelle on voulait vivre...

- Elle a... quoi ? Mais vous aviez quel âge ?

- Six et quatre ans, dit Noah avec un rire amer. Je te laisse imaginer ce qui passe dans la tête de deux gamins quand les deux seules femmes qui s'occupent d'eux leur demandent de choisir... Oh la la c'est d'une cruauté ... c'est égoïste. J'ai pas les mots.

- Merlin...

Il ferma brièvement les yeux. Quand il les rouvrit, il s'aperçut que Noah s'était enfin tourné pour lui faire face. Il déglutit. Dans la nuit, ses yeux bleus se confondaient avec l'obscurité.

- Vous avez choisi qui ? Osa-t-il demander, hésitant.

- Raphaël a choisi Hilda. Ils sont toujours mieux entendus, tous les deux. Moi... j'ai hésité. J'aimais la vie avec ma mère. C'était toujours drôle, imprévu... Elle peignait beaucoup, version Non-Maj'. Ça rendait mes grands-parents dingues apparemment quand elle était plus jeune. Elle me laissait peindre avec elle. On mettait nos mains dans la peinture et on faisait des toiles comme ça. Je suis sûre ça peignait sur les murs et ça devait être extraordinaire

Julian sourit devant l'image. Il n'avait pas de mal à imaginer Noah et son aversion pour les règles s'épanouir dans ce genre d'environnement créatif et libre. Plus que tout, ça lui faisait penser à sa propre mère et à leur matinée à dessiner ensemble. Il eut l'impression que le lien qui l'unissait à Noah par le dessin se renforçait soudain : ils ne devaient pas leur passion à eux-mêmes, mais à leur mère. Je viens de me faire exactement la même réflexion et c'est BEAU COMME TOUT Et même si elles étaient radicalement différentes l'une de l'autre, elles avaient été habitées par la même énergie.

- Alors tu l'as choisi ? Ta mère ?

Noah se mordit la lèvre. L'attente parut interminable et quand il ouvrit la bouche, sa voix se réduisit à un murmure.

- Non...

- Tu... Tu as choisi ta tante...

- Non plus. Je n'ai rien dit. Je n'ai pas réussi... (Il s'étouffa à moitié et se râcla la gorge avant de reprendre). Alors ma mère a attrapé sa cape et elle est partit. Juste comme ça. Elle nous a laissé chez Hilda. Donc c'est elle qui a choisi, Noah, tu n'as pas à te sentir coupable

Agité, il se passa une main dans les cheveux et tira sur une de ses boucles. Julian eut envie de l'arrêter, mais il n'osa pas le toucher.

- Je lui ai couru après, Jules... J'ai essayé de la rattraper, mais elle m'a repoussé. Elle a dit que je devais rester avec ma tante et que c'était mieux comme ça... Voilà, c'est tout. OK j'ai envie de lui faire un gros câlin mais je vais laisser ça à Julian

Dans cette fin abrupte, Julian entendit tout ce que Noah ne disait pas : les sentiments chaotiques qu'avaient dû ressentir un petit garçon de six ans, les années suivantes avec ce qui s'était passé entre ce fameux jour et aujourd'hui, comment tout ça avait forgé sa vision du monde qui l'entourait... Pourtant, il tiqua sur autre chose et haussa un sourcil.

- Jules ? Répéta-t-il.

- Plus court que Julian, se défendit Noah en accentuant de façon exagérée son accent américain pour faire sonner son prénom étrangement.

Il retint une grimace, puis laissa le surnom résonner dans sa tête avant de l'essayer à voix haute :

- Jules... J'aime bien. T'as intérêt à bien aimer mon garçon

- Charly avait déjà pris « Ju' ».

- Tout le monde a déjà pris « Ju' ». Matt, Lottie, mes parents... Ma mère m'appelait comme ça quand j'étais petit, c'est pour ça...

Et il réalisait à cet instant qu'il était reconnaissant envers Noah de ne pas utiliser ce surnom. C'était la marque de son nouveau départ aux Etats-Unis, celui qu'il ressentait depuis son arrivée dans le nouveau monde.

- Tu pourras me parler d'elle un jour si tu veux... proposa soudain Noah avec une prudence peu coutumière chez lui, les doigts crispés sur ses genoux.

- De ma mère ?

- Hum... Vraiment en parler, je veux dire. Pas juste quand il faut annoncer ce qui s'est passé aux autres comme ce soir.

Avec force, le rappel de Liam et Aileen qu'il avait planté au bal lui revint à l'esprit et il contrôla son anxiété avant qu'elle ne s'empare à nouveau de lui. Il pourrait gérer ça demain. Derrière la proposition de Noah, il percevait aussi surtout sa vulnérabilité à s'être confié et sa tentative pour le pousser à en faire de même, comme pour être à nouveau sur un pied d'égalité.

- Je le ferai... promit-il, la gorge obstruée. Juste... pas ce soir, ok ?

- Pas ce soir, répéta Noah en hochant la tête. Ce soir, c'est juste toi et moi. Je viens de t'avoir une de ses réaction putain. AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH

Julian eut un léger sourire. Il aimait cette idée. Juste Noah et lui sur le toit d'Ilvermorny le temps d'un soir.

Après tout, les fantômes ne pouvaient pas les atteindre ici.

*************************

Ce chapitre marque un peu un tournant dans la fanfic : le lien entre Noah et Julian commencent vraiment à naître. Au passage, je remercie les trois autres filles du Quatuor Infernal pour leurs idées sur l'art chez les sorciers, ça m'a énormément aidé ! Et dernière précision : je précise que l'idée de Noah qui doit choisir entre sa mère et sa tante m'a été fortement inspiré par le film Nowhere Boy que je conseille à tous!

Eléments tirés du canon/Pottermore:

- William le concierge puckwoodgenie

Prochain post : Chapitre 19 - Lundi 10 mai

C'ETAIT MAGNIFIQUE PUTAIN
Franchement j'ai pas les mots. Découvrir l'histoire de Noah, sa fragilité, sa blessure, c'était juste très juste et surperbement écrit. Quel débat sur la place dans l'art, à la fois dans le monde et dans le monde sorcier, très intéressant et bien travaillé !
Et ce rapprochement, ces liens qui se tissent petit à petit et qui continueront de se tisser ... POUAHAHAH on attend la suite :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
HermioneSerdaigle

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par HermioneSerdaigle »

Hey ! C'était génial ! On commence à connaître un peu mieux Othilia et Théa du coup. Franchement super chapitre ! J'ai hâte de savoir la réaction de Théa et Othilia !
A la prochaine !
mythik

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par mythik »

Bon, je m'y attendais pas à ce que le père de Théa ait voulu faire évader Grindelwald :o
J'aime de plus en plus Othilia (pourquoiiiiii ?? :cry: après on va être tristes quand Noah va se mettre avec Ju'...)
En tout cas, le "secret" de Liam va finir par plus du tout être un secret à ce rythme :lol: :lol:
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Merci pour vos commentaires !! :D

Chapitre 21 : Thanksgiving Day

« Celui qui suit la foule n'ira jamais plus loin que la foule qu'il suit. Celui qui marche seul peut parfois atteindre des lieux que personne n'a jamais atteint ! »

- Albert Einstein -



// 22 novembre 1979 //


Depuis des années, Julian n'avait plus besoin de réveil. Son cerveau semblait s'être câblé sur les minutes qui s'égrenaient et il arrivait à se lever à l'heure pour les cours. Son arrivée aux Etats-Unis l'avait détraqué un temps : il avait subi les effets du décalage horaire de plein fouet. Aujourd'hui, tout était rentré dans l'ordre et, ce matin-là, il ouvrit les yeux à huit heures, l'esprit encore brumeux de sommeil. Il roula sur lui-même et enfouit son visage dans son oreiller. Ce n'était pas parce qu'il arrivait à se réveiller qu'il parvenait à sortir de son lit avec facilité.

En soupirant, il se maudit pour avoir veillé si tard la veille. Il était resté jusqu'à deux heures du matin avec Liam, Aileen, Théa et Othilia à surveiller la potion et à faire des essais pour briser les strates de sortilèges que mentionnaient les runes traduites. En deux semaines, Théa et Othilia s'étaient révélées d'une aide inestimable. Il avait eu raison de leur demander de l'aide et même Liam s'en était rendu compte. Avec Othilia, ils formaient un duo de potionistes redoutables et avançaient plus vite que prévu sur les parties mineurs de divers élixirs nécessaires. Ils avaient en revanche dû recommencer la potion principale, trop endommagée par Albert leur chaudron défectueux qui avait rendu l'âme une semaine auparavant. Une telle longévité poussait quand même au respect et ils l'avaient entreposé dans un coin de la pièce, comme une mascotte bienveillante. Aileen, quant à elle, se chargeait des recherches théoriques et avalaient les livres le plus vite possible pour trouver des traces de ce rituel ancien, sans succès. Lui et Théa travaillaient la partie des sortilèges. Certains lui donnaient un mal de tête pendant des heures tant ils étaient complexes, composés de maillages si entrelacés que les démêler pour en comprendre le fonctionnement s'avérait être presque impossible pour des élèves de sixième année. Pour la dixième fois au moins, Julian se demanda pourquoi le corbeau les avait choisis eux pour une tâche si compliquée et non des briseurs de sorts ou des professeurs chercheurs en sortilèges reconnus. Ce contre-rituel était d'un niveau rarement observé d'après ce que Aileen avait lu sur le sujet. Ce qu'il servait à garder ne pouvait avoir qu'une valeur à la hauteur de sa complexité. Un objet ? Un endroit ? Un élément naturel aux propriétés magiques ? Ils l'ignoraient pour le moment et le corbeau n'avait plus donné signe de vie. Au fond de lui, Julian en était soulagé. Soit il n'était pas au courant que Liam s'était entouré de personnes pour l'aider à percer le rituel, soit il le savait mais laissait faire. Julian espérait que c'était la deuxième option.

Alors qu'un faible rayon de soleil perçait les rideaux pour le frapper dans l'œil, il se décida finalement à se lever. Dès qu'il posa le pied par terre, il manqua de trébucher sur une cravate abandonnée et il retint un juron pour ne pas réveiller ses camarades de dortoir. Il se levait souvent en premier ou après Enjolras. Le lit de ce dernier était d'ailleurs vide, tout comme celui de Wilde, ce qui était plus surprenant. Il allait dépasser un Liam profondément enfoui sur sa couverture quand une voix sur sa gauche perça la pénombre :

- Pourquoi tu te lèves si tôt ?

Julian sursauta et se figea en même temps, à l'image de ce que son cœur venait de faire dans sa poitrine.

- Merlin Noah ! jura-t-il en reconnaissant sa voix.

A moitié redressé sur son matelas, il distingua la silhouette de Noah et surtout celle de ses boucles en bataille. Il s'approcha à pas légers.

- Pourquoi t'es déjà debout ? répéta Noah en chuchotant.

- Parce qu'on a cours comme chaque jeudi ? répondit-il sur le ton de l'évidence et sûrement avec une touche de condescendance qui le fit grimacer lui-même.

Noah ne s'en formalisa pas. Il se contenta de le regarder avec un rictus, comme s'il se moquait de lui.

- Quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?

- Jules, on est le quatrième jeudi du mois.

- Et... ?

- Du mois de novembre, ajouta Noah comme si cette précision expliquait tout.

- Je sais quel mois on est, s'impatienta-t-il. Et alors ?

- Alors, monsieur l'intello anglais qui ne s'est pas renseigné sur nos coutumes, c'est Thanksgiving aujourd'hui. On n'a pas cours.

- Oh...

Il se sentit soudain idiot. Les autres en avaient parlé en début de semaine. Othilia avait fait la remarque en disant qu'elle était contente d'échapper au cours de Potions de son père et Théa et Liam avaient programmé des parties d'échecs pour s'entraîner avant leur tournoi de fin de semestre.

- Je n'avais pas réalisé...

- Je vois ça, se moqua Noah en retombant sur son oreiller. Alors qu'est-ce que tu vas faire de ta journée ? A part manger de la dinde et de la purée ?

La question était légitime. Rationnellement, il savait qu'il devrait continuer à avancer sur l'analyse des sortilèges, même si les autres avaient peut-être prévu autre chose. Aileen lui tiendrait probablement compagnie. Pourtant, rien qu'à l'idée de s'enfermer à nouveau des heures dans leur salle de classe vide avec Albert le chaudron, il retint un soupir. Puis, il avisa Noah qui le toisait toujours, allongé de tout son long dans son lit et il parla avant de vraiment réfléchir :

- Une idée à proposer ?

- Pour passer ta journée ? Quelques-unes... Ca dépend de si tu veux être seul ou non. Je suis sûr que Liam et Aileen resteront avec toi sinon...

- Je crois qu'ils sont occupés aujourd'hui.

C'était une vérité arrangée, il en avait conscience. Liam n'allait pas jouer aux échecs toute la journée et il ne savait pas ce que Aileen avait prévu. Mais il voulait voir ce que Noah allait proposer. A part leurs séances de dessins, ils ne s'étaient pas retrouvés seuls depuis le soir sur le toit.

- S'ils sont occupés, tu peux toujours rester avec moi, suggéra-t-il avec nonchalance sans qu'il arrive à déterminer si elle était feinte ou non.

- Pourquoi pas...

Vu le sourire de Noah, sa nonchalance à lui devait manquer de conviction. Il se sentit rougir.

- Parfait, j'ai une idée, dit-il en se levant d'un bond. Rejoins-moi près du stade dans vingt minutes.

- Du stade ?

- T'inquiète, tu ne monteras pas sur un balai. C'est juste le point de rendez-vous. On va aller... autre part.

- Où ?

Mais comme la dernière fois, Noah se contenta de lui adresser un rictus mystérieux sans répondre.

**

*

L'hiver dans le Massachussetts valait l'hiver en Ecosse, jugea Julian en traversant le parc. D'une main, il resserra sa cape qui glissait sur ses épaules et frissonna. Le soleil pâle de novembre avait du mal à percer la couche de nuages, plongeant l'atmosphère dans une sorte de lumière blanche et plombante. Le froid n'avait pas incité les élèves à investir les pelouses et il ne croisa presque personne sur son chemin. Il avait juste laissé un mot sur la table de chevet de Liam pour lui dire qu'il serait en balade une partie de la journée, mais qu'il rejoindrait les autres pour continuer à travailler le contre-rituel plus tard. Si Thanksgiving était férié, il supposait qu'il pouvait bien prendre sa journée lui aussi. Matthew serait sûrement jaloux quand il lui dirait qu'il n'avait pas cours grâce à cette fête typiquement américaine et il se promit de lui écrire ce soir. Sa dernière lettre remontait à une semaine.

Alors qu'il s'approchait du stade, il se demanda où Noah avait décidé de l'emmener cette fois-ci. Une partie de lui pria pour que l'endroit en question, ou l'activité choisie, respecte le règlement. Il ne voulait pas avoir de problèmes. Le soir d'Halloween, sur le toit, avait été un moment particulier : il avait voulu échapper aux regards des autres et aux fantômes. Noah lui avait offert un refuge temporaire. Mais il savait que si Flemming ou un autre professeur les avait surpris, il aurait été collé ou aurait fait perdre des points aux Serpents Cornus.

Dans le ciel, au-dessus du stade, il distingua quelques silhouettes perchées sur des balais. Peut-être que Enjolras et Wilde étaient partis s'entraîner tôt ce matin. Peut-être que Lottie était aussi sur le terrain. La connaissant, c'était même probable. Pendant une seconde, il songea à dire à Noah qu'il n'était finalement plus libre et aller passer la journée avec sa sœur qu'il voyait de moins en moins. Mais il abandonna vite l'idée. Lottie avait sûrement prévu autre chose et surtout il n'avait pas envie de faire faux bond à Noah.

Adossé au mur du stade, il attendit donc en se maudissant de ne pas avoir pris de gants et enveloppa son écharpe de Serdaigle plus fermement autour de son cou. Il ne pouvait pas la porter en cours durant la semaine, mais il supposait que Thanksgiving était considéré comme un jour férié suffisamment important pour qu'il fasse une entorse à l'uniforme protocolaire d'Ilvermorny.

- T'as l'air à deux doigts de te transformer en bonhomme de neige, commenta Noah avec sarcasme en arrivant à sa hauteur.

- A qui la faute ? Je pouvais t'attendre dans le hall, mais non, il a fallu que je fasse le pied de grue ici.

- Désolé, s'excusa-t-il sans avoir l'air désolé du tout. Ça ne va pas s'arranger en plus.

- Pourquoi ? On va où ?

Noah parut fier de lui et tendit le bras vers un point lointain.

- Là-bas, annonça-t-il.

Julian suivit la direction du regard. Il ne vit que le flanc de la montagne d'en face, celle qui formait la vallée avec le mont Greylock sur lequel était construit Ilvermorny.

- Le mont des Errants ? se souvint-il. Mais Aileen a dit...

- Qu'il était interdit aux élèves ? Précisément. On est sûrs que personne ne nous dérangera.

- Pourquoi ? Tu comptes jeter mon corps du haut de la falaise ?

Une étincelle brilla brièvement dans les yeux bleus de Noah, comme s'il se retenait de sortir une repartie dont il avait le secret, et Julian aurait aimé pouvoir lui arracher les mots de la gorge. Il n'aimait pas lorsque Noah faisait ça. Il avait l'impression de passer à côté d'une blague ou qu'il se moquait de lui. Heureusement pour lui, Noah sembla abandonner sa retenue :

- Crois-moi, ce n'est pas ce qui m'intéresse avec ton corps aujourd'hui.

Julian écarquilla les yeux. Son esprit sauta immédiatement au double sens de la phras et il sentit son visage devenir écarlate malgré le froid. Noah laissa échapper un rire railleur.

- Je parlais de tes mains, précisa-t-il. J'ai pris tout notre matériel à dessin. Tu vas voir, la vue est incroyable là-haut. Encore mieux que le toit. (Il lui donna une tape sur l'épaule pour le mettre en mouvement). Prêt ?

- Hum, oui... Mais on peut sortir d'Ilvermorny ? Pour Thanksgiving ?

- Officiellement ? Non.

- Noah...

- Officieusement ? Oui. Allez, viens Jules !

Et il se remit en marche, ne laissant d'autre choix à Julian que courir pour le rattraper. Il ne le dépassa en revanche pas, restant un pas en arrière sciemment pour pouvoir l'observer. En plein jour, Noah n'avait plus rien à voir avec le garçon qu'il était dans l'obscurité à raconter son histoire familiale ou loin des yeux de ses camarades aux lueurs de l'aube pendant leur matinée de dessins. Il marchait d'une certaine façon, comme s'il défiait les autres de venir l'arrêter ou de se mettre en travers de son chemin.

Ils traversèrent tout le parc, dépassant les serres et les écuries en longeant le cours d'eau qui finissait sa course sous le rocher. Julian ne pouvait pas se sortir la phrase de Noah de la tête. C'était juste une blague. De mauvais goût, sans doute, mais juste une blague. Pourtant, la plupart des garçons qu'il connaissait n'aurait jamais osé la prononcer dans un contexte pareil. Au milieu d'une fête, entouré par un groupe de personnes, pourquoi pas. Mais dans une conversation à deux ? Jamais. Même Matthew, qui pouvait parfois avoir un humour repoussant un peu les limites, n'aurait pas osé. Les rumeurs commençaient avec ce genre de remarques.

Arrivé devant le mur d'enceinte, Noah se baissa pour être à la hauteur d'une rangée de pierres de grès et commença à appuyer dessus, paumes à plat.

- Qu'est-ce que tu...

- Regarde et apprends, coupa-t-il. Tout château a des passages secrets. Faut juste apprendre à les connaître.

Il appuya contre plusieurs pierres dans un ordre qui semblait aléatoire et en même temps qui était trop précis pour l'être. En quelques secondes, une ouverture se créa dans le mur d'enceinte d'Ilvermorny.

- C'est comme le Chemin de Traverse, s'enthousiasma Julian.

- Le quoi ?

- Le... Laisse tomber. Comment... comment tu savais ?

Il réalisa qu'il lui avait demandé la même chose le soir sur le toit. Une déformation professionnelle de Serdaigle, ce besoin de tout savoir, se serait moqué Matthew.

- Ma mère me l'a expliqué il y a plusieurs années, expliqua Noah sans rentrer dans les détails. Après toi.

Il s'effaça pour le laisser passer et Julian s'engouffra dans le passage sans réfléchir. C'était aussi simple que cela. En une seconde, il se retrouva en dehors de l'école avec Noah Douzebranches, prêt à s'attaquer à l'ascension du mont des Errants. Il espéra vraiment que personne n'aurait la bonne idée de le chercher partout et qu'ils seraient revenus avant que leur absence ne soit remarquée. Il n'osa pourtant pas vocaliser ses doutes. Noah, lui, n'avait pas l'air inquiet du tout et il se demanda s'il s'échappait souvent du château. Peut-être avec Othilia... L'idée le mit mal à l'aise.

- Quoi ? fit Noah en remarquant son expression.

- Rien... éluda-t-il. On devrait commencer à monter si on veut arriver vite.

Il le dépassa pour éviter qu'il puisse insister. Ensemble, ils descendirent le chemin de terre qui menait au creux de la vallée. De part et d'autre s'étendait la Sylve Argentée qui embaumait l'air d'une odeur de pin. Toutes les plantes commençaient à perdre leurs feuilles et leur éclat, sauf les grandes arbres qui formaient une masse insensible au passage des saisons. Quand ils atteignirent enfin le Village, ils le contournèrent sans prendre la peine de le traverser. Julian avait le pressentiment que Noah voulait éviter tout risque de tomber sur sa tante par accident.

- C'est quoi exactement Thanksgiving ? demanda-t-il pour briser le silence.

- Une fête inventée au départ pour être reconnaissant des récoltes de l'année, un truc comme ça... Je ne sais pas trop, faudrait demander à Othilia. Ça a été inventé par les Non-Maj', les sorciers l'ont repris pour se fondre dans la masse, mais ça a moins de sens pour nous je crois.

Julian hocha la tête, se retenant de mentionner qu'il n'avait aucun envie de demander à Othilia. Il l'avait assez embêté comme ça entre ses questions sur les sorcières de Salem, sur le père de Théa et sur les potions du contre rituel.

Très vite, la pente sous leurs pieds s'accentua et son souffle se fit plus difficile. La montée en haut de la tour ne lui avait pas servis de leçon, il aurait vraiment dû travailler son endurance. Heureusement pour sa fierté, Noah n'était pas non plus athlétique, et ils montèrent en silence pour économiser leurs forces. Plus ils montaient, moins Julian osait regarder le paysage, préférant fixer ses pieds. Le toit d'Ilvermorny avait été une chose : le sol était stable et il y avait eu un parapet. Ici, le bord du chemin se terminait en précipice et il avait horriblement conscience de la vallée qui rétrécissait à vue d'œil.

- Tu vas faire cette expression toute la journée ? lança soudain Noah d'un ton mordant.

Il redressa la tête, pris par surprise, et entraperçu le vide qui s'étendait près de lui. Il déglutit.

- Désolé... c'est juste...

- Quoi ?

- Le vertige...

Noah mit visiblement une seconde à comprendre. Ses yeux firent la navette entre lui et la vallée en contrebas avant que son expression ne se fasse moins butée.

- Mais... A Halloween ? Sur le toit ?

- C'était pas pareil... Je n'ai pas vraiment regardé et...

Et il n'avait été dans son état normal. Malgré tout, il se garda bien de rappeler son attaque de panique à Noah et serra les poings contre son corps pour leur éviter de trembler.

- Il n'y a aucun risque, Jules. Le chemin est large.

- Parce que le vertige est rationnel, oui, grommela-t-il même si Noah ne dut pas l'entendre à cause du rugissement du vent. Avance, je suis juste derrière.

Il ne voulait pas paraître incapable de monter une simple montagne. Noah hésita une seconde, mais il le laissa faire son choix et reprit son ascension. Julian veilla à marcher en ligne droite derrière lui, décidant de prendre la tête de Noah comme point d'ancrage pour éviter de regarder sur le côté. Sous les assauts du vent, ses boucles noires s'agitaient et dansaient, toujours en mouvement. Résolument, il s'accrocha à cette vision et continua sa route. Ils marchèrent comme ça une bonne demi-heure jusqu'à arriver sur un plateau : une sorte de grande clairière recouverte d'herbes et de bruyères. Au loin, le ciel était toujours aussi plombé, mais Julian ne s'approcha pas du bord de la falaise pour voir davantage le paysage.

- Morgane, Jules, on dirait que tu vas te transformer en fantôme.

A la mention de fantôme, il tressaillit un peu plus. S'il le remarqua, Noah ne commenta pas et se contenta de s'assoir sur le sol et d'étaler par terre tout leur matériel à dessin.

- Si tu me perds un seul crayon... râla-t-il en l'imitant.

- Mais non, on a déjà établi que je savais très bien où je mettais les choses. Arrête de t'inquiéter, on dirait Hilda.

- Comparaison sympathique...

Noah se contenta d'afficher un sourire en coin et d'attraper son carnet pour dessiner. A nouveau, Julian l'imita. En ce moment, il aimait travailler le fusain pour explorer les effets que ça pouvait rendre, mais sa main resta suspendue au-dessus de sa page blanche. Il avait vu sûrement des centaines d'arbres en montant jusqu'ici et autant d'espèces de végétaux. En face, il pouvait distinguer la silhouette d'Ilvermorny qui se découpait à flanc de montagnes. Ses hautes tours perçaient l'horizon et le château semblait toiser toute la vallée à ses pieds. Pourtant, Julian n'arriva pas à être saisi par le spectacle. Pas alors que le vent ne cessait d'emmêler les boucles de Noah.

Le premier coup de fusain s'esquissa sans qu'il réfléchisse. Presque aussi noir que les vraies boucles, le trait était courbé et fugace. Il commençait très foncé avant de s'estomper et Julian songea que c'était à l'image de Noah lui-même : présent mais insaisissable.

- Ça va ? Le vertige ?

- Hum ? Oh... oui, oui. Du moment que je m'approche pas du bord.

Noah hocha la tête, puis se reconcentra sur son dessin. Julian se retint de s'approcher pour voir ce qu'il dessinait. Pendant leurs séances matinales, il se contentait souvent de faire des caricatures ou des esquisses irréalistes d'Ilvermorny où la façade du château devenait un visage grotesque. Le seul dessin sérieux que Julian l'avait vu réalisé avait été sa main qui tenait un crayon avec force le jour de leur première conversation dans le dortoir.

Et il ne voulait pas l'admettre, mais ce dessin restait son préféré. Il y avait une intimité dans ce que Noah avait réussi à capturer, une précision paradoxalement fuyante puisque le trait de Noah était toujours ainsi. Il avait montré en une seule esquisse la précision avec laquelle il tenait souvent ses crayons, la pression qu'il avait exercé ce jour-là, tendu par sa joute verbale avec Noah, mais surtout il avait capturé des détails que seule une observation sans faille avait pu fournir. En vérité, il fallait un œil aiguisé pour réussir à saisir les éléments nécessaires aussi bien pour ce type de dessin que pour les caricatures.

- Tu penses trop, Jules.

Perdu dans ses pensées, il manqua de sursauter.

- Quoi ?

- T'as touché à aucun crayon et tu fixes le vide depuis cinq minutes, dit Noah en repliant une jambe devant lui. Tu penses trop donc.

- Désolé...

Immédiatement, il se fustigea. Il ne savait même pas pourquoi il s'excusait. Avec une pointe de nervosité, il reposa son fusain pour attraper un crayon et le fit tourner entre ses doigts. Noah le fixa un moment, l'air blasé, puis il posa son carnet à coté de lui dans l'herbe.

- J'ai une idée, annonça-t-il en se penchant en avant, habité par une énergie nouvelle que Julian avait appris à reconnaître. On va faire un jeu.

- Un jeu ? répéta-t-il, surpris.

- Exactement. Je te pose une question et tu dois répondre. Après, c'est à mon tour et ainsi de suite. Le premier qui n'arrive pas à répondre a perdu.

Julian le dévisagea. Il comprenait parfaitement le sous-entendu : « ne pas y arriver » revenait à « ne pas vouloir répondre » et donc abandonner. Le problème, c'est qu'il savait que Noah ne le laisserait pas se défiler. Il était le genre de personne qui allait jusqu'au bout des choses et un simple jeu pouvait vite devenir dangereux. Il hésita quelques secondes – assez longtemps pour que Noah lui jette une œillade impatiente pleine de défi – et il décida qu'il n'avait rien à cacher.

- D'accord, accepta-t-il. Mais je commence.

- Pourquoi ?

- Je suis plus jeune, énonça-t-il sur le ton de l'évidence.

Noah secoua la tête. Ses boucles s'agitèrent et Julian retint l'impulsion de reprendre son fusain pour essayer de reproduire le mouvement.

- Très bien, mon petit, dit-il en imitant un accent paternaliste d'une voix profonde. Commence ! Et Jules, ajouta-t-il en reprenant son sérieux, si ta première question c'est ma couleur préférée, je te pousse vraiment du haut de la falaise.

- Eh !

Il tenta de prendre un air indigné sans avouer que la question lui avait effectivement traversé l'esprit.

- Hum... Tu dessines depuis quand ? Vraiment dessiner, je veux dire.

Noah se retint visiblement de rouler des yeux, mais Julian soutint son regard. Il préférait commencer sur un terrain neutre.

- Je me souviens plus vraiment..., dit-il. Vers mes onze ans je crois. Quand je suis arrivé à Ilvermorny. On m'a fait entrer dans le journal et j'y ai fait des illustrations pendant un an et demi avant d'arrêter.

- Pourquoi ? Pourquoi t'as arrêté je veux dire ?

- Ah, c'est pas comme ça que le jeu fonctionne, Jules, se moqua Noah avec délectation. A mon tour. (Il prit quelques secondes pour réfléchir sans détourner le regard). Si tu devais choisir entre l'Angleterre et l'Amérique, qu'est-ce que...

- L'Angleterre, répondit-il sans même lui laisser le temps de terminer.

Noah porta la main à son cœur dans un geste faussement blessé.

- Le thé anglais doit vraiment être meilleur que le nôtre.

- Je n'appelle même pas le vôtre du « thé », rétorqua-t-il en plissant le nez. A moi. Pourquoi t'as arrêté le journal ?

- Je ne m'entendais plus avec ses membres.

- Mais...

- T'as eu ta question. A moi de...

- Non ! protesta-t-il, frustré. Tu n'as pas...

- Fallait être plus précis, se déroba Noah sans aucun remord. Hum... Dis-moi quelque chose que tu n'as jamais avoué à personne. Ni tes parents, ni ta sœur, ni Matthew, Aileen ou Liam...

Julian le gratifia d'un regard agacé. Il savait que le jeu prendrait vite ce virage, mais il ne s'était pas attendu à ce qu'il le prenne si rapidement. Mais Noah n'était pas caractérisé par sa patience. Pendant une brève seconde, il s'interrogea sur le vrai sens de la question. Pourquoi est-ce que ça lui important tant que personne ne soit au courant ? Pour qu'ils partagent quelque chose juste entre eux ? Ils l'avaient déjà fait. Jusqu'à Halloween, Noah avait été le seul à savoir pour sa mère. Et même si ce n'était pas vraiment un secret, la place que ce simple fait avait pris dans sa vie soulignait la confiance qu'il avait placé en Noah au moment de lui avouer.

- Ce n'est pas une question, finit-il par objecter, l'esprit vide. Le jeu ne fonctionne pas comme ça.

En se voyant renvoyer ses propres mots, Noah émit un rire étouffé.

- L'esprit Serpent Cornu, comme d'habitude, observa-t-il d'un air entendu et une touche de fierté. Bien. Je reformule : quel est le secret que tu n'as jamais avoué à personne ? Pas même tes parents, ta sœur, Matthew, Hanna, Liam ou Aileen.

Cette fois-ci, Noah haussa un sourcil, attendant la réponse avec provocation. Julian arracha nerveusement plusieurs brins d'herbe près de son pied. Il nota que Noah avait ajouté Hanna dans sa question, renforçant la difficulté. En vérité, il n'avait jamais eu de grand secret. Du moins, aucun qu'il n'avait fini par avouer au moins à Matthew et Hanna. Le secret des runes et du corbeau n'en était plus un, la mort de sa mère non plus... Soudain, un souvenir surgit du tréfond de sa mémoire et il laissa échapper un grognement mortifié.

- Oh, quelque chose à avouer, Jules ? exulta Noah, conspirateur.

- Tu ne le répètes à personne... menaça-t-il en levant un regard entendu vers lui.

- Je le jure sur la tombe de Morgane en personne.

Dans le fond de son esprit, Julian se demanda si Morgane avait bien une tombe, mais il ne s'y attarda pas. Il se contenta d'arracher une autre poignée d'herbes et de faire grandir le petit monticule qui commençait à s'élever près de lui.

- Bien... Hum... Ca concerne mon vertige. La raison pour laquelle j'ai le vertige plus précisément.

- Parce que y'a une raison ?

- Embarrassante et oubliable, mais oui, confirma-t-il avec gêne. C'était y'a deux ans... J'étais en quatrième année. Il y avait un groupe de garçons à l'école. On les appelait les Maraudeurs, ou ils s'appelaient eux-mêmes comme ça, je n'ai jamais réussi à savoir. Faut que tu comprennes le contexte : les Maraudeurs étaient... populaires. Genre, les gars les plus cools de l'école, en septième année. Des Gryffondor.

- Des quoi ?

Julian sourit. Parfois, il n'arrivait pas à réaliser que ses nouveaux camarades ne connaissaient pas ce qui lui semblait évident, mais il supposait que l'inverse était vrai aussi. Mais il trouvait ça incroyable que Noah ne comprenne pas ce que Gryffondor signifiait à l'échelle de Poudlard. Gryffondor, c'était la maison que tout le monde admirait. Celle qui faisait la fierté des parents, celle qui dévoilait le courage de ses élèves. Mais c'était aussi elle qui exigeait de ne pas décevoir. Être Gryffondor demandait de répondre à des attentes. La même chose était sans doute vraie pour les autres maisons. Merlin seul savait qu'on avait toujours attendu de lui qu'il soit bon élève juste parce qu'il portait le blason bleu et bronze. Mais la pression qu'exerçait Gryffondor était de nature différente : soit vous vous éleviez à sa hauteur, soit vous bruliez en essayant. Cette rage de réussir, Julian l'avait vu plus d'une fois dans le regard de Matthew. Son meilleur ami pouvait bien porté le nom Bones et avoir une attache presque filiale à Poufsouffle, il était avant tout le fils de sa mère. Cassiopée Bones avait tout d'une Gryffondor, elle l'avait même toujours fait penser à une lionne : féroce, intransigeante, mais aussi une mère protectrice qui ferait tout pour ses enfants. Julian suspectait que sa carrière d'Auror était autant dû à sa personnalité volontaire qu'à sa formation dans la maison Gryffondor. Le problème, c'est qu'il avait l'impression que Matthew avait du mal à trouver sa place au milieu de toutes ses attentes. Oh, ça ne faisait pourtant aucun doute qu'il appartenait à la maison rouge et or. Après tout, le Choixpeau ne l'y avait envoyé qu'après quelques secondes, confirmant la certitude de tout le monde qui avait connu Matthew depuis l'enfance d'après sa tante Amelia. Et Julian avait appris à reconnaître ce que les autres avaient vu : Matthew était buté, légèrement orgueilleux sur les bords, tête brûlée à ces heures perdues, mais plus que tout fier. C'était à cause de cette foutue fierté que Julian s'était retrouvé avec le vertige.

- Gryffondor est une des maisons de Poudlard, expliqua-t-il avec une touche de nostalgie dans la voix. Généralement, on l'associe aux courageux et aux déterminés. Matthew est aussi à Gryffondor.

- Ah... Donc le meilleur ami est brave en plus ? comprit Noah d'un ton que Julian trouva étrange sans réussir à déterminer vraiment pourquoi.

Il décida de ne pas s'y attarder. S'il interrompait son récit, Noah était bien capable de l'accuser de ne pas avoir répondu à sa question et de le déclarer perdant.

- On peut dire ça, confirma-t-il donc en rassemblant son tas d'herbes avec minutie. Le truc, c'est que Matthew fait partie de l'équipe de Quidditch depuis la troisième année. Il est même capitaine maintenant, mais il est avant tout gardien. Il l'était à l'époque en tout cas. Et devine qui faisaient aussi partie de l'équipe ?

- Les fameux Maraudeurs ?

Il hocha la tête.

- Deux d'entre eux étaient dans l'équipe en fait, précisa-t-il. James Potter et Sirius Black. (Il ne savait pas pourquoi il donnait les noms, ce n'était pas comme s'ils allaient parler à Noah). Potter a été nommé capitaine et Matthew avait peur pour son poste en arrivant en quatrième année. Il pensait que Potter pouvait le remplacer. Alors avant les essais, il m'a demandé si je voulais bien l'aider à s'entraîner.

- Toi ? se moqua Noah. Sur un balai ? Jules, t'as eu peur dans une montgolfière.

- Eh ! s'offusqua-t-il en rougissant. Merci, je sais... Mais Matt avait besoin de moi alors je me suis dévoué. Avec le recul, je me dis que j'aurais dû demander à Charlotte. Bref, je suis donc remonté sur un balai pour la première depuis les cours de Vol en première année parce que j'en avais pas eu l'occasion depuis. Je devais envoyer le souafle vers Matt pour qu'il s'entraîne à garder les buts.

- Et ça s'est mal passé ?

- On peut dire ça... Apparemment, je n'étais pas assez doué, je ne lançais pas correctement. Matthew m'a mis la pression, mais seulement parce qu'il l'avait lui-même. (Il sourit avec indulgence en revoyant Matt, perché sur son balai, ses cheveux roux frappés par le soleil). Tu sais ce que j'ai dit ? Sur les Maraudeurs ? Il y avait de quoi avoir la pression quand James Potter était ton capitaine. Ce gars aurait pu passer professionnel s'il l'avait voulu, je pense.

Il se demanda bien ce que devenait justement Potter et sa bande, deux ans après avoir quitté Poudlard. Peut-être qu'il s'était effectivement lancé dans le Quidditch et qu'il n'en savait rien. Il se fit une note mentale pour demander à sa sœur si elle en savait plus, elle qui lisait les magazines spécialisés.

- Tout ça pour dire que Matt était stressé, reprit-il en se râclant la gorge. Il m'a demandé de tirer plus fort, mais j'étais épuisé. Ca faisait une heure qu'on y était. Alors j'ai... hum...

- Allez, crache le morceau.

- J'ai fait semblant de perdre l'équilibre. Je me disais qu'en voyant que j'en avais assez, Matthew nous laisserait rentrer au château.

En face de lui, Noah plissa les yeux. Julian vit le moment où il comprit avant même qu'il n'ait eu à s'expliquer.

- Mais t'es vraiment tombé, c'est ça ? devina-t-il alors que ses lèvres s'étiraient en un sourire amusé. Morgane, Jules, t'es vraiment tombé !

- Oui, bon, ça va ! Je suis tombé ! Je ne pensais pas que le balai serait si instable, j'ai mal calculé mon coup et avant que je comprenne ce qui m'arrivait je faisais une chute de quinze mètres.

Rien qu'au souvenir de son corps qui tombait en chute libre, il sentit son cœur s'accélérer et il veilla à ne pas regarder en direction du bord de la falaise. Il pouvait presque encore sentir la force du vent contre sa peau et son bruit assourdissant qui lui emplissait les oreilles, réduisant son champ de vision et saturant ses sensations. Pourtant, alors que Noah se couvrait le visage des mains pour réprimer un nouvel éclat de rire incrédule, il se surprit à sourire en retour, amusé par la vision que devait peindre son histoire.

- Matthew m'a rattrapé au dernier moment heureusement. Je l'ai rarement vu aussi paniqué, à part peut-être quand Spencer – son petit frère – a fait une sortie de route sur son vélo et a fini dans un buisson de ronces. C'étaient nous qui étions chargés de lui apprendre à en faire sans les petites roues.

En repensant à la colère de Cassiopée à la vue de son fils couvert d'égratignure, il grimaça. Noah, lui, l'observa en secouant la tête.

- Mais du coup... si c'est un secret, ça veut dire que tu n'as jamais dit à Matthew que ta chute n'était pas complètement accidentelle ?

- Non... avoua-t-il en se remettant à arracher l'herbe cette fois de la main droite. Il culpabilisait pas mal de m'avoir donné le vertige, mais au moins je n'ai jamais eu à remonter sur un balai. Et tu veux la meilleure ?

- Vas-y.

- Potter ne lui a pas fait repasser les essais. Il l'a repris dans l'équipe en disant qu'il connaissait sa valeur en tant que gardien et qu'il n'avait pas besoin de plus.

Noah roula des yeux, toujours amusé. Il plongea sa main dans sa poche et en ressortir son paquet de cigarette avant d'en piocher une pour la coincer entre ses lèvres. Julian suivit le mouvement, distrait.

- Maintenant que tu t'es bien foutu de moi, à mon tour, décréta-t-il en se souvenant soudain du jeu. Pourquoi t'as arrêté de dessiner pour le journal ?

Noah lui jeta un regard exaspéré et il lui renvoya un rictus innocent. S'il croyait qu'il avait oublié sa question du début de partie, il l'avait clairement sous-estimé. Il pouvait être deux à jouer à celui qui pousserait le plus l'autre. Surtout, sa curiosité vis-à-vis de Noah semblait augmenter chaque jour. Il avait bien compris que quelque chose s'était passé quand il était plus jeune et que, comme tous les secrets d'Ilvermorny, tout le monde avait une vague idée de ce dont il retournait sauf lui.

- A cause de Liam, répondit finalement Noah de manière laconique en allumant sa cigarette d'un coup de baguette. A mon tour.

- Quoi ? Non, c'est pas juste ! Tu peux pas juste dire « Liam » comme si ça suffisait.

- Pourquoi ? Liam est tellement agaçant que c'est bien une raison en soit, je trouve.

Julian se contenta de le regarder d'un air sévère. Il s'attendait presque à ce que Noah l'envoie balader, mais il soupira et se passa une main dans ses boucles. A nouveau, Julian suivit le mouvement des yeux pour tenter de le graver dans sa mémoire. Il pourrait toujours tenter de le reproduire plus tard.

- Très bien, céda-t-il. Tu veux vraiment toute l'histoire ? Parce que c'est vraiment tordu.

- Aussi tordu que le nez de Wilde après que tu lui aie cassé ?

Visiblement, Noah ne s'attendait pas à ce qu'il soit au courant de cette partie et il eut un mouvement de recul surpris. Il ressentit une pointe de satisfaction à l'idée de ne pas être celui pris au dépourvu pour une fois.

- Qui t'as dit ça ?

- Théa, révéla-t-il avec honnêteté.

Noah émit un rire désabusé et tira une bouffée de sa cigarette.

- Evidemment, marmonna-t-il, qui d'autre...

- Mais elle a refusé de m'expliquer pourquoi, s'empressa-t-il de la défendre. Elle savait que c'était un sujet sensible, j'imagine...

- Je n'allais pas lui casser le nez à elle, si c'est ta question.

Même avec l'espace qui les séparait, Julian pouvait sentir la tension qui émanait de Noah par vague et il envisagea de laisser tomber une seconde avant que sa curiosité ne revienne le tirailler. Il connaissait bien ce sentiment. Si Matthew était un Gryffondor dans l'âme, il supposait qu'il l'était autant en ce qui concernait Serdaigle. Et il savait que Noah pouvait comprendre ce sentiment comme Matthew ne l'avait jamais compris. Son meilleur ami vivait pour l'action, pour l'immédiat, pour la sensation d'exister avec conviction. Julian, lui, aimait découvrir les choses et les penser en même temps. Il aimait analyser le monde qui l'entourait, ralentir pour mieux comprendre et être guidé par curiosité vers des choses improbables. Sur ces points, les Serdaigle et les Oiseau Tonnerre n'étaient pas si différents. C'était une question de regard sur le monde. Et Noah et lui avaient le même regard.

- Si tu ne veux pas me raconter... commença-t-il, mal à l'aise.

- Ce n'est pas ça... mais... Tu vas la juger si je te raconte. Tout le monde le fait...

Il fronça les sourcils.

- La juger ? Juger qui ?

- Tu te souviens de ce que je t'ai raconté ? demanda Noah sans répondre à sa question. Le soir d'Halloween ? Sur Hilda et pourquoi on vivait avec elle mon frère et moi ?

Julian acquiesça. L'histoire aurait été difficile à oublier : la mère des garçons Douzebranches, frivole et éprise de liberté, ne s'était jamais véritablement occupée d'eux et les avait laissés à sa sœur aînée Hilda jusqu'à l'ultime confrontation où les deux femmes avaient demandé aux enfants de choisir entre elles. Il revoyait la main tremblante de Noah qui tirait sur ses boucles alors qu'il lui avouait à voix basse qu'il n'avait pas réussi à choisir contrairement à son frère.

- Je ne l'avais jamais raconté à personne, souffla Noah sans rencontrer son regard. Pas cette partie de l'histoire. Tout le monde connait le reste, mais... mais pour une fois je voulais raconter le début. Celui que personne ne connaissait.

- Oh...

- Je suppose que ça changeait pour une fois. Mais peut-être que tu comprendras mieux le reste maintenant...

A nouveau, Noah s'interrompit. Il lui laissa le temps de remettre de l'ordre dans ses pensées. Il savait qu'une confession n'était jamais facile à extérioriser, il connaissait la sensation des mots qui prenaient forme dans l'esprit avant de s'écraser et de mourir contre la barrière des lèvres.

- J'étais en deuxième année, j'avais rencontré Liam et Aileen au club du journal et on était vite devenus amis même si on avait un an de différence, entonna-t-il soudain d'une voix monocorde, trop détachée pour paraître vraie. Tout se passait bien. Raphaël n'était pas encore le prodige sur balai et j'avais plutôt de bonnes notes. Hilda me disait qu'Ilvermorny avait réussi à me « canaliser » et qu'elle était fière de moi. Tout allait bien donc... A ceci près que je voyais à peine ma mère. (D'un geste moins assuré que sa voix, il tira à nouveau sur sa cigarette qui se consuma presque d'un quart). Elle n'avait le droit de nous voir que quelques jours pendant les vacances. C'était Hilda qui lui avait imposé ça pour ne pas nous perturber selon elle. Rien n'avait été fait juridiquement, c'était un accord entre elles. Raphaël avait l'air de bien le vivre, mais moi...

- Ta mère te manquait, compléta Julian sans pouvoir s'en empêcher.

Merlin, il connaissait bien le sentiment. Il aurait aimé ne pas le connaître.

- C'est ça, confirma Noah. Alors un jour... je lui ai envoyé une lettre. Juste pour lui proposer de venir à la sortie au Village, histoire qu'on se voit quelques heures. Elle habitait pas loin, ça ne serait pas difficile de se fondre dans la masse d'élèves et on pouvait se retrouver à l'autre café de la ville. Hilda n'avait même pas à le savoir. Mais...

Agité, Noah s'humecta les lèvres, puis leva les yeux vers le ciel. Au-dessus d'eux, les nuages se chargeaient de plus en plus et Julian pria pour qu'il ne se mette pas à pleuvoir avant qu'ils ne redescendent dans la vallée.

- Mais quand ma mère est arrivée, j'ai compris que quelque chose n'allait pas, continua-t-il d'une voix sourde. Elle était enthousiaste, trop enthousiaste. Elle n'arrêtait pas de répéter que je lui avais manqué. Elle m'a demandé d'aller chercher Raphaël chez Hilda sans me faire repérer pour qu'on soit vraiment en famille. Je l'ai écouté. Je ne voulais pas la contrarier alors qu'elle avait l'air si contente de nous revoir et on a passé une super journée. Elle nous a acheté des milkshakes, elle nous avait ramené des cadeaux... C'était comme quand on était petits. Mais plus l'heure du couvre-feu approchait, plus elle devenait nerveuse. Et au moment de rentrer... (Noah soupira). Elle nous a dit de venir avec elle. Qu'on allait à Chicago retrouver notre père et qu'on pourrait enfin être ensemble. Elle disait qu'elle n'avait plus envie de nous laisser.

Le mauvais pressentiment qui s'était emparé de Julian depuis plusieurs minutes se confirma soudain. Il n'avait jamais vu Heather Douzebranches, mais son esprit visualisa une femme plus jeune que Hilda, les cheveux bruns et bouclés comme ses fils volant dans le vent, qui tenait deux petits garçons par la main tout en jetant des coups d'œil nerveux par-dessus son épaule. Noah, lui, releva le menton comme pour le mettre de défi de faire un commentaire et il garda le bouche fermée, résolu à écouter.

- On avait douze et dix ans, on n'a pas protesté. On est parti avec elle.

Derrière ces mots, Julian comprit surtout ce que Noah ne disait pas : il n'avait pas écouté sa mère, il avait cru en elle. L'amertume qui filtrait dans sa voix aujourd'hui s'expliquait par cette nuance.

- J'imagine que les professeurs ont remarqué votre absence assez vite, devina-t-il.

- Non, assez étrangement. Je pense qu'ils ne l'auraient pas remarqué avant plusieurs heures si quelqu'un n'était pas venu leur dire que j'avais prévu de voir ma mère ce jour-là.

- Qui aurait... ?

Il se tut. Noah lui envoya un regard équivoque et il comprit brusquement.

- Liam... souffla-t-il.

- Liam Cooper en personne, oui. (Avec un peu trop de violence, Noah écrasa sa cigarette dans la terre). Il n'a même pas attendu de savoir qu'on ne revenait pas. Il a tout été balancer à Hilda sous prétexte que ma mère faisait apparemment quelque chose de mal en nous voyant sans son autorisation. Comme s'il était lui-même un enfant de cœur qui suivait les règles ! Aileen, encore, je crois que je m'y serais attendu... Mais lui ? Je lui avais fait confiance. Et il a dénoncé ma mère comme si c'était une criminelle qui nous avait enlevé.

Julian tressaillit. Il sentait toute la colère de Noah, même des années après. Soudain, sa rivalité avec Liam prit un nouveau sens. C'était une histoire de confiance brisée qui impliquait une mère absente. Une potion vouée à exploser.

- Mais du coup, qu'est-ce qui s'est passé ? pressa-t-il, tendu. Hilda vous a retrouvé ?

Avec une pointe de fierté, Noah eut un rictus et secoua la tête.

- Non, elle n'a pas eu le temps. Ma mère avait déjà transplané avec nous chez elle et on avait pris la voiture direction Chicago. Hilda avait beau avoir prévenu les Aurors, ils étaient incapables de nous retrouver comme on voyageait façon Non-Maj'.

- Ta mère avait le droit de conduire ? Elle avait son permis ?

C'était sans doute un détail trivial, mais la question lui échappa. Il était rare que des membres de familles sang-purs prennent la peine d'apprendre à maîtriser un moyen de locomotion moldu.

- Aucune idée, répondit Noah, imperturbable. Je ne crois pas non, mais on est quand même arrivés à Chicago.

- Chez ton père... Mais t'avais dit qua la dernière que tu l'avais vu, il avait refusé de vous voir et... (il se sentit soudain idiot et ferma brièvement les yeux). Oh... réalisa-t-il.

- Ouais, « oh », se moqua Noah avec bravade. Il n'a même pas voulu nous parler à Raph' et moi. Avant qu'on comprenne quelque chose, on était juste sur le trottoir avec les 50 dollars qu'il nous avait filé et c'est tout. Il ne sait même pas qu'on est sorciers, ma mère n'a jamais eu l'occasion de lui dire la vérité. Elle voulait le faire ce jour-là. Tu parles...

Désabusé, Noah étendit ses jambes et donna un coup dans le tas d'herbes que Julian avait construit avec précision. Sans savoir comment réagir, il se contenta d'observa les brins verts éparpillés et il vit une métaphore assez parlante de l'histoire que venait de lui raconter Noah. Il comprit soudain sa première remarque. « Tu vas la juger si je te raconte. Tout le monde le fait ». Il comprenait mieux. Ce n'était pas difficile de juger Heather Douzebranches, mère à la dérive qui abandonnait puis reprenait ses enfants sur un coup de tête. Pourtant, il lut dans les yeux de Noah ce que l'histoire ne disait pas : elle avait cru à sa rédemption autant qu'il avait cru en elle. Ce n'était sans doute pas négligeable.

- Bref, j'abrège la fin : les Aurors nous ont retrouvé dans un motel à la sortie de Chicago cinq jours plus tard. Quand on est revenus, Hilda a traité ma mère d'irresponsable. Elle était furieuse. Une action en justice a été lancée et elle a officiellement perdu son droit de garde. On ne peut la voir qu'un week-end pendant les vacances sous supervision du MACUSA. Avec tout ça, j'ai redoublé.

- Je suis désolé...

- Pourquoi ? rétorqua Noah avec verve. Ce n'est pas toi qui a décidé de prendre deux enfants dans un autre Etat sans prévenir personne, ce n'est pas toi qui a été balancer aux adultes, ce n'est pas toi qui a appelé les Aurors et c'est encore moins toi qui a pris la décision qu'elle n'avait plus droit d'être mère. C'est tout, c'est comme ça...

Il haussa les épaules. Visiblement, son moment confession était passé et sa façade se remettait en place. Julian ne l'en blâma pas. Il comprenait même. Pourtant, au fond de son esprit, il ne put s'empêcher de le trouver injuste avec Liam qui du haut de ses onze ans avait juste voulu défendre un ami qu'il pensait en danger.

- Et donc tu as juste arrêté de parler à Liam... ?

- Je ne voulais plus traîner avec quelqu'un à qui je ne pouvais pas faire confiance, c'est tout, claqua-t-il. Je n'aime pas les gens qui se mêlent de ce qui ne les regardent pas. Wilde et son nez l'ont compris à ses dépens.

- Parce que Wilde avait fait une remarque sur ce qu'avait fait ta mère ?

- Sur ça et sur le fait que Liam et moi on auraient dû se reparler. Fin de l'histoire.

Au ton définitif de Noah, Julian comprit qu'il n'en dévoilerait pas plus, mais ce n'était pas nécessaire. Tout avait été dit. Il ressentit une certaine tristesse à se dire qu'Heather Douzebranches avait sûrement plus endommagé son fils qu'elle ne croyait. En voulant réparer les choses, elle les avait brisées de manière définitive. Et puis soudain, Julian se rappela que c'était faux. Rien n'était définitif dans cette histoire. La mort de sa mère était définitive et irrévocable, sans aucun retour en arrière. C'est ce qui faisait si mal. Noah, lui, avait encore la possibilité de voir de nouveaux chapitres s'ajouter à son histoire et il espéra intérieurement que ces chapitres impliquaient qu'un jour il puisse revoir sa mère normalement ou reparler avec Liam sans luisauter à la gorge.

- Merci... murmura-t-il finalement. De m'avoir fait confiance.

- Ne me remercie pas trop vite, Jules. C'est à mon tour de poser une question, lui rappela Noah, une lueur narquoise dans les yeux.

- Merlin...

- T'inquiète pas, ça reste facile. Pour l'instant.

Julian grimaça et fit un geste de la main, comme pour l'exhorter à poser sa question.

- J'écoute, dit-il, résolu.

- Jusqu'où t'as été avec Hanna ?

Il mit une seconde à appréhender la question, puis encore une autre avant de vouloir étrangler Noah. Immédiatement, il manqua de s'étouffer et son visage s'embrasa alors qu'il se redressait à moitié.

- Non, décréta-t-il. Je refuse de répondre, on y va espèce d'imbécile. Il va pleuvoir.

- Allez, Jules !

Mais il était déjà sur ses pieds.

- Facile, tu parles, grommela-t-il trop bas pour que Noah l'entende. Aide-moi à ramasser les crayons.

- Très bien, mais t'as perdu !

- C'est ça...

Les joues encore rouges, il se baissa pour rassembler leur matériel à dessin, horriblement conscient de sa page presque blanche sur laquelle il n'avait tracé qu'un semblant d'esquisse et des mains de Noah qui frôlaient les siennes tandis qu'ils ramassaient chaque crayons.

- Tu parles d'une matinée productive...

- Et alors ? Tu ne voulais pas t'approcher du bord, ça n'aurait servi à rien de dessiner le paysage. Au moins, tu pourras dire que t'as vu le mont des Errants et qu'il n'est pas hanté !

- C'est ça...

Il empoigna son sac. Alors qu'il allait se remettre en route, il se retourna brusquement et Noah manqua de lui rentrer dedans.

- Je peux poser une dernière question ? demanda-t-il.

- Ca ne fonctionne pas comme ça, t'as perdu le jeu, objecta Noah.

- Juste une.

Noah plissa les yeux. Il tenta de prendre son air le plus innocent possible et il finit par soupirer avant d'hocher la tête.

- Vas-y, j'écoute.

- C'est quoi ta couleur préférée ?

- Oh Morgane, Jules !

En éclatant de rire, Noah le repoussa et Julian se contenta de sourire, fier de lui. Il n'osa pas avouer qu'il aurait quand même voulu connaître la réponse...

*************************************

Allez, je suis d'humeur généreuse ce soir, je vous offre le chapitre avec un peu d'avance ! C'est un peu celui que j'ai baptisé "début du Nolian" haha!

Elements tirés de Pottermore/canon :

Rien ^^

On se retrouve dans deux semaines ! Prochain post : chapitre 22 - 21 juin.
mythik

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par mythik »

Ahhhhhh ils sont trop chouuuuuu <3<3
Et Noah qui pose des petites questions... :roll:

Tu m'as illuminé la soirée, merciii !! :D :D
HermioneSerdaigle

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par HermioneSerdaigle »

Ouiiiiiiiiiiiiiiiii un nouveau chapitre ! *saute partout et crie de joie (s'attire des regards bizarre de ses parents) et se rassoit finalement*
Un chapitre génial ! J'ai beaucoup aimé ce chapitre, c'est l'un de mes préférés ! Noah se révèle de plus en plus et je crois bine que c'est mon personnage préféré !
J'ai hâte d'être au 21 ou 22 Juin !
A la prochaine !
cochyo

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par cochyo »

Sympathique chapitre.
Scandium

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Scandium »

Yes super chapitre sur la lancée des précédents ! J'ai pas vu passer le temps ! Enfin on a le pourquoi du comment Noah et Liam se sont disputés ! En vrai c'est chaud mais c'est rattrapable, j'ai hâte qu'ils se réconcilient !
La couleur préférée de Noah ? Vu que c'est le profil du mec ténébreux, d'instinct je dirais le noir. Mais c'est trop facile ... Peut-être une couleur qui lui rappelle sa mère du coup ?
Hâte de lire la suite !
Cazolie

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Cazolie »

HellOOOOOOOOOOOOOOOOOO

vive les voyages en train

Chapitre 13, Allons-y Alonzo
Son corps accueillit la chaleur des murs avec joie.
Genre parfois il fait chaud à Poudlard
..... Comme je sors de O&P j'ai même pas réalisé qu'on était PAS censé être à Poupou
QU EST CE QU ON FAIT LA ????
- J'attends depuis presque trois mois qu'il me parle, Matt ! Alors non, je ne veux pas attendre.
J'avoue que j'en veux vraiment à Julian pour ça
Et maintenant je veux que Matt et Hanna finissent ensemble (bon okay, il vaudrait mieux qu'il reste seul)
- Pas aussi géniaux que ceux de Charity Burbage par contre, non ?
Tain elle aura pas eu une vie folichonne Charity, si elle était effectivement avec Matthew
Elle secoua Matthew par les épaules et ils se mirent à sauter sur place comme des idiots, incapables de se retenir.
Okay ils sont trop choux hahahha

Attends Connelly... Y en a pas un chez Perri ?

J'ai adoré la description du dessin! C'était trop mignon cette petite scène
Elle se laissa emporter par la foule, le bruit de la musique raisonnant en écho dans son corps. // Julian sentit le bruit faire vibrer son corps
Cette TRANSITION ANNA

Julian est tellement un stressé de la vie, ça me tue :lol:
D'un coup, ils contractèrent leur corps et se lancèrent en arrière dans un salto parfaitement coordonné. Ils retombèrent pile sur le manche de leur balai.
Tu verrais ma tête
Je suis terrifiée
Mais je le soupçonne de le faire pour faire plaisir à Clémence
Quel gentleman :') J'irais pas faire de l'acrobatie sur balai pour mon mec moi
un espèce de casque en bronze avec une grande antenne sur la tête.
Quoi :lol: :lol: :lol:
Julian se contenta d'applaudir poliment
J'ai visualisé Dumbledore qui tapote le haut de sa main quand Serpentard marque
Il se demanda brusquement ce qu'était celui des Serpents Cornus
"Les serpents cornus aiment se balader nus"

Bon du coup étant moi aussi une non-américaine inculte j'ai lu attentivement les règles mais je crois que j'ai pas compris :lol:

C'est quoi ce sport super violent :lol: :lol: Ils sont tous suicidaires en fait :lol: :lol: Okay ça fait deux fois que je fais la même réflexion que Julian, trois lignes trop tôt. Je dois être un peu anxieuse moi aussi :lol:
Mais c'était trop génial et...
Bientôt elle va réclamer une peluche géante plus grande qu'elle
jusqu'à ce que leur père sorte carrément de son bureau.
Ce critère :lol:
La question est réglée : tu changes de club.
J 'ai envie de lui fracasser le crâne par terre, à Ju :lol:
Bon okay c'est triste. MAIS IL MA SAOULEE

Trop contente d'avoir découvertle Quodpot haha ! Et cette scène avec Lottie c'était tristounet,mais j'espère qu'il va être gentil maintenant peuh
Liam m'a tuée eeeeeeeeeeet j'ai trop aimé le petit passage à Poudlard !
Cazolie

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Cazolie »

J'arrive directement de chez Perri et j'ai failli commenter ton chapitre sur son sujet haha ça aurait été pas très malin

Chapitre 14 !
(oh la vache, il date du 1er mars :lol: :lol: J'avais pas réalisé que j'avais 3 mois de retard :lol: )
Avant que Julian n'ait vraiment compris comment c'était arrivé, il avait passé presque deux mois à Ilvermorny
Ah ça y est tu t'es résolue à une ellipse conséquente :lol:
Ou du moins ils s'étaient mis à le faire après son troisième regard noir dans leur direction dès qu'ils faisaient craquer le parquet sous leur poids.
SYMPA la nouvelle addition au dortoir :lol:
Les ailes avaient été coloriées en noir et orange et lorsque Julian l'avait déplié, une citrouille en fumée avait surgi du papier
Bah Clem qu'est-ce que tu fais là
Nan plus sérieusement c'est trop chou leur petit jeu héhéhé
- Tu ne veux vraiment pas du café ?

- Non, dit-il, buté.

Il porta sa tasse de thé à ses lèvres
Funfact, il paraît qu'il y a plus de caféine dans le thé que dans le café
Apparemment, Ilvermorny comptait autant de salles vides que Poudlard
Je me tape une barre :lol: Le grand mystère des fanfics
Je sais que vous vous êtes disputés après le match de Quodpot
Est-ce que j'ai commencé par lire Quidditch ? Parfaitement
Il ne s'était pas rendu compte que les autres avaient perçu sa tendance à couver sa sœur.
"tendance" ?
Pour se donner une contenance, il termina sa tasse de thé
En vrai il la sort d'où sa tasse ? :lol:
Il m'a dit qu'il me rejoindrait au Deux Souafles.
C'est un café britannique ou bien ? :lol:

Oh c'est hyper intéressant l'idée du rituel !!
- Au moins trois ou quatre mois...

- Quoi ? Non !
Petite remarque Anna', il l'a dit plus haut haha

Liam est tellement impulsif
Exposer des faits et des découvertes ? Il en était capable. Gérer la détresse d'un frère qui voulait retrouver sa sœur ? Il devait avouer qu'il se sentait de plus en plus dépassé
Il fait genre il est saoulé par son père mais il est pas beaucoup mieux :lol:
- Donc on va aider une personne potentiellement dangereuse à briser un rituel lui aussi potentiellement dangereux pour quelque chose qu'on ne connaît pas ? S'inquiéta Aileen.
J'avoue que présenté comme ça, ça paraît pas être une très bonne idée haha
- Je ne me suis pas amusé à traduire les runes pour arrêter maintenant, dit-il sur le ton de l'évidence. Par contre, je te préviens. Je ne brille pas en potions.
J'avoue ça me paraissait évident aussi :lol:
Un chaudron de compétition hahaha

C'est trop stylé l'idée de Salem ! Hâte de découvrir ça aussi :mrgreen:
- Il raison, ajouta Aileen, merci pour les explications. Tu ferais un super prof !
J'espère que mon jury me dira ça LOL

Oooooh la description du hall était trop stylé ! Ca fait rêver !
encore un peu plus loin se trouvaient Noah et Othilia, main dans la main.
Okay la réaction de Julian me rassure, moi non plus j'avais pas capté qu'ils étaient ensemble :lol:
Dans sa poche, l'avion en papier orange et noir que Noah lui avait envoyé la veille pesait lourdement.
Et pourquoi donc ? 8-) 8-) 8-)

C'est toi qui a inventé le nom de la forêt ? Je le trouve trop joli !
J'ai trouvé les explications très claires, et l'idée ouf ! J'ai hâte de voir la rencontre avec Leonidas !
annabethfan

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par annabethfan »

Bonjour à tout le monde ! J'espère que tout va bien, surtout pour les personnes qui passent le bac en ce moment. Force à vous et bon courage ! N'hésitez pas à me tenir au courant ;)

Bonne lecture !

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Chapitre 22 : Forcer la porte

« Le culot force les portes pour arriver à ses fins. Le talent passe par celle de derrière. »

- Damien Berrard -


// 25 novembre 1979 //

- Eh Julian, tu peux venir voir deux minutes ? appela Théa. J’arrive pas à comprendre un truc dans ce chapitre.

- Je termine de ficher mon cours de Droit Magique, j’arrive.

Pour seule réponse, Théa agita la main et Julian se replongea dans sa lecture. Il avait l’impression qu’il était assis sur le sol dur et froid de leur salle de cours vide, baptisée Alberta en l’honneur de leur vieux chaudron tombé au combat, depuis des heures. Sans doute parce que c’était le cas. Entre le déchiffrage des couches de sortilèges qui composaient le contre-rituel avec Théa, il prenait des pauses révision qui faisaient lever les yeux au ciel à Liam à chaque fois. « Qui prend une pause pour travailler ? » disait-il à voix haute, l’air incrédule. La plupart du temps, Othilia réussissait à le faire taire en lui donnant des ingrédients de potion à couper. Pour ne pas risquer de perdre un doigt, il devait se concentrer un minimum et Julian était tranquille.

Le Droit Magique, l’option qu’il avait pris en début d’année, était peut-être la matière la moins familière pour lui depuis son arrivée à Ilvermorny. Il ne l’avait jamais étudié à Poudlard. Grâce aux Bones, historiquement une famille de juristes, il avait acquis les bases du système juridique britannique : comme tous les éléments composant le monde sorcier, la Justice et son système étaient regroupé dans un même département au sein du Ministère, le Département de la Justice Magique. Dans ce dernier évoluaient conjointement plusieurs Bureaux et Services, comme le Magenmagot – le tribunal sorcier – les Aurors, la Brigade de Police Magique, ou encore le Service des Usages Abusifs de la magie. Chacun avait un Directeur ou un Président à sa tête et le Département lui-même était dirigé par un Haut Directeur pour s’assurer du bon fonctionnement de l’ensemble. Il savait que la tante de Matthew, Amelia Bones, était actuellement en poste au service administratif du Magenmagot mais que son ascension était déjà discutée dans les cercles concernés. Ce n’était sûrement qu’une question de temps… Le père de Matthew, Edgar, était lui-même Haut Juge au Magenmagot et sa mère, Cassiopée, était Auror sous l’autorité d’Alastor Maugery en personne. Pour compléter le tableau, son oncle, Bartemius Croupton Sr était Directeur du Département. En repensant à cet homme distant et protocolaire qui lui avait serré la main le jour de la cérémonie organisée en l’honneur des disparus de l’attentat des Archives, il frissonna. La seule autre personne qu’il connaissait à la justice était évidemment Dumbledore lui-même puisqu’il était, en plus de sa fonction de directeur de Poudlard, Président-Sorcier du Mangenmagot. L’organisation du tribunal, plus haute instance juridique du monde sorcier, laissait cependant à désirer comparée à celui américain. Ça lui faisait mal de le reconnaître et pourtant il en avant la preuve sous les yeux.

Le Magenmagot était composé d’une cinquantaine de membres, choisis parmi les plus vénérables des sorciers et leur moyenne d’âge était de 87 ans. Autant dire que ce n’était pas encourageant. Leur élection était également loin d’être transparente : certains étaient choisis par le Ministre en personne, d’autres par le Président-Sorcier qui présidait le tribunal, et d’autres encore par cercle d’influence. Julian trouvait même étrange que Dumbledore puisse cumuler sa fonction de directeur de Poudlard et celle de Président du Magenmagot. En presque trois mois d’étude, il en avait assez pris pour comprendre que la justice du Magenmagot était une justice aristocratique, ce qui créait quelques problèmes, comme le fait que les conflits politiques et extérieurs pouvaient se retrouver traiter au sein du tribunal sans neutralité juridique. Le dernier exemple en liste – il l’avait lu dans un exemplaire de la Gazette qu’il avait reçu – avait été la libération Lucius Malefoy, accusé de soutien à la magie noire. Il était ressorti du tribunal au bras de sa jeune femme, triomphant, et Julian se souvenait encore de la tête patibulaire d’Alastor Maugrey en arrière-fond. Il n’avait ensuite plus suivi l’affaire, mais même si les journalistes ne disaient rien, il n’était pas difficile de comprendre que l’influence de Malefoy avait suffi à le faire innocenter. Contrairement aux Etats-Unis, aucune présence d’avocat professionnel n’était requise non plus et Julian n’arrivait pas à comprendre comment le système juridique sorcier avait pu continuer à évoluer sans intégrer cette fonction primordiale. Pourtant, un accusé avait le droit de faire assurer sa défense par n’importe qui avec des connaissances en droit. Lucius Malefoy ne s’en était pas privé en prenant à ses côtés Caesar Yaxley, redoutable homme d’affaires qui connaissait les subtilités juridiques comme personne.

Chez les Américains, tout était différent. Ils avaient bien plusieurs Départements au sein du MACUSA et chacun avait à sa tête un Gouverneur, mais ce dernier était indépendant du pouvoir exécutif. Le Président du MACUSA ne pourrait ainsi jamais siégé à une audience du Tribunal Suprême, tout comme ses secrétaires d’Etat. Les Gouverneurs de Département n’avaient pas non plus le droit de cumuler les mandats et devaient se retrouver lors de trois sessions par an, appelées le Conseil des Gouverneurs, pour mettre en commun les retours, les idées, et les problèmes de leur Département respectif. Et même si leur système n’était pas parfait ni aussi élaboré que celui des moldus, il était déjà plus égalitaire.

Annotant un passage dans la marge d’une écriture serrée, Julian sauta le chapitre suivant sur les différences mineures entre les Etats Américains et parcourut le récapitulatif des plus grandes lois en vigueur. La loi Rappaport, même si elle n’était plus appliquée, avait le droit à un chapitre entier et il se fit une note mentale pour y revenir plus tard. En attendant, il tenta de retenir la liste sous ses yeux.

1689 : Instauration du Code International du Secret Magique dans le monde.

1693 : Création du MACUSA et du Département de la Justice suite à l’affaire des sorcières de Salem.

1694 : Grand Procès des Ratisseurs durant lequel cent trente huit Ratisseurs furent condamnés collectivement par le Tribunal Suprême et son jury populaire.

1701 : Entrée en vigueur de la primauté du Code de Lois National sur les législations instaurées dans les Etats fédéraux.

1710 : Ouverture du droit de vote à tous les sorciers non issus des Douze Familles Fondatrices.

1722 : Premier Accord avec le Ministère de la Magie du Royaume-Uni assurant la nationalité américaine immédiate aux immigrants.

1735 : Création du Bureau des Aurors sous sa forme connue actuelle.

1742 : Deuxième Accord avec le Ministère de la Magie du Royaume-Uni assurant la libre disposition des terres sorcières aux Etats-Unis.

1750 : Reconnaissance officielle de la peine de mort en tant que sentence juridique par le Tribunal Suprême.

1783 : Déclaration d’Indépendance du MACUSA par rapport au Royaume-Uni et au pouvoir du Ministère de la Magie.

1784 : Nomination du premier Président du MACUSA dont l’autorité plénière est reconnue sans ingérence de la part du Ministère de la Magie britannique.

1790 : Loi Rappaport [cf. chapitre III].

1801 : Loi des Bonnes Mœurs interdisant le divorce, les pratiques sexuelles déviantes, les publications ou représentations à caractère pornographique.

1863 : Traité de neutralité voté par le Tribunal Suprême pendant la guerre de Sécession.

1875 : Reconnaissance du Dragot comme monnaie unique américaine.

1901 : Loi Wilkinson en faveur de l’accueil des immigrés irlandais.

1908 : Droit de vote accordé aux sorcières.

1914 : Traité anglo-américain de non-intervention dans la Grande Guerre Non-Maj’.

1917 : Rupture du Traité et envoie d’aides en Europe dans le respect du Secret Magique.

1921 : Ouverture d’Ilvermorny aux pays frontaliers des Etats-Unis ayant ratifié la Convention de New York.

1929 : Krach boursier et chute du Dragot entraînant un plan de relance économique sur dix ans.

1932 : Autorisation du divorce.

1942 : Fermeture des frontières américaines en raison des diverses menaces – Non-Maj’ et sorcières – en Europe.

1943 : Signature du Traité de Washington pour établir une coopération entre le MACUSA et le Ministère britannique dans la lutte contre le nazisme et le mage noir Grindelwald.

1950 : Dépénalisation des pratiques sexuelles déviantes, aussi connues sous le terme Loi des Mauvaises Mœurs. L’homosexualité est désormais considérée comme un trouble mental par le Conseil National des Guérimages.

1965 : Abrogation de la Loi Rappaport.

1971 : Abolition de la peine de mort pour les délits par le Tribunal Suprême. L’emprisonnement à perpétuité est désormais requis en tant que peine la plus lourde. Elle demeure en vigueur pour les crimes les plus importants.


De la pointe de sa plume, Julian suivit les différentes lignes pour essayer de mieux les mémoriser. Presque inconsciemment, il ralentit son geste au niveau de la date de 1950. Le loi des Mauvaises Mœurs… Elle faisait directement écho à celle des Bonnes Mœurs qui avait interdit sous peine judiciaire le divorce ou les relations homosexuelles – personne ne s’y était trompé, c’était bien ce qu’avait désigné le terme « pratiques déviantes ». Elle aurait dû être considérée comme une amélioration. Julian ne savait pas vraiment quoi en penser. Sous des termes différents, la même pratique judiciaire était en vigueur en Angleterre, même s’il s’agissait davantage d’une culture commune que d’un véritable texte légal. Pourtant, à mesure que ses yeux s’attardaient sur la ligne, il sentit un sentiment de malaise et d’angoisse monter en lui.

Préférant mettre son cours de Droit Magique de côté, il se leva pour aller rejoindre Théa.

- Désolé, c’est bon, dit-il d’une voix au timbre étrange en se penchant par-dessus son épaule. (Il s’éclaircit la gorge). T’avais besoin de moi ?

- Non, j’ai résolu le problème. Je m’étais trompée dans un déchiffrage de runes, c’est tout. Par contre, je crois qu’eux ont besoin d’un coup de main.

Elle désigna Othilia et Liam de la pointe de sa baguette. Ils étaient tous les deux penchés au-dessus de leur chaudron, sourcils froncés, Othilia tournait frénétiquement les pages de son carnet. Aileen dû sentir l’agitation depuis son côté de la pièce :

- Qu’est-ce qui se passe ? fit-elle en relevant la tête. Un problème ?

- Non.

- Oui.

Les réponses de Liam et Othilia se télescopèrent et ils échangèrent un regard.

- Possiblement, nuança-t-elle après quelques secondes.

- Mais encore ? pressa Théa, bras croisés.

- Il se pourrait qu’on ait sous-estimé la capacité d’absorption de l’algue péruvienne… La potion a du mal à réduire. Ça devrait aller plus vite normalement.

- Et alors ? Qu’est-ce que ça fait si ça ne va pas assez vite ?

- Les ingrédients ne se mélangent pas complètement et perdent de leurs effets, expliqua Liam, l’air soucieux. Si ça loupe, on devra la recommencer. Encore.

Dans ce simple mot, Julian entendit toute sa frustration et il ressentit un élan de pitié pour lui.

- Et vous ne pouvez pas ajouter plus d’algues péruvienne ? suggéra-t-il. Pour renforcer l’absorption ?

- On aimerait bien, acquiesça Othilia. Mais c’était notre dernière plantation.

- Quoi ? Plus personne n’en a dans son nécessaire à Potion ?

Liam et Othilia secouèrent la tête de concert. Pendant un instant, le silence flotta entre eux, rempli d’incertitudes. Julian contempla le chaudron qui bouillonnait sur le feu. S’ils échouaient à nouveau à réaliser cette potion, leur retard commencerait vraiment à devenir préoccupant. Il ne savait pas combien de temps il pouvait convaincre Liam de rester calme et d’accepter leur aide avant qu’il ne soit reprit de cette colère sourdre qui l’habitait et il ne pouvait pas le lui reprocher. Incertain, il s’adressa à Othilia.

- Et… la réserve de ton père ? dit-il avec espoir. Tu crois qu’on pourrait… ?

- Non, on ne peut pas juste aller voler des ingrédients. J’ai déjà pris dans ce qu’il m’avait donné pour réviser. On ne peut pas piocher dans sa réserve.

- Pourquoi ? protesta Liam.

Othilia lui jeta un regard incrédule.

- Parce qu’il s’en rendrait compte ? dit-elle sur le ton de l’évidence.

- Il se rendrait compte du manque de deux ou trois algues péruviennes ? intervint Théa avec scepticisme.

- Je ne sais pas… mais sûrement.

- Sûrement ce n’est pas certain !

- Liam…

- Il n’a pas tort, soutint Aileen. Ça peut être notre seul moyen. Ou notre seul moyen rapide du moins. On ne peut pas attendre la prochaine sortie au Village.

Pendant une seconde, Julian considéra de leur parler du passage secret dans le mur d’enceinte, mais il ravala ses mots avant même d’y avoir vraiment songer. Il ne voulait pas avoir à expliquer comment il connaissait ce passage alors même qu’il venait d’arriver à Ilvermorny, ni que Noah lui avait montré quand ils avaient passé Thanksgiving ensemble. Ce qu’il n’avait raconté à aucun de ses amis… Heureusement, personne ne parut remarqué son moment d’hésitation et l’attention resta focalisée sur Othilia.

- Je n’ai pas les clés de la réserve, soupira-t-elle. On ne pourrait même pas y entrer.

- Ton père est en cours à cette heure-ci, non ? Il les a peut-être laissés dans son bureau ?

- Peut-être ce n’est pas certain, répliqua-t-elle en renvoyant sans compassion ses propres mots à la figure de Liam.

Julian ne put que l’admirer. Par soutien pour Liam, il garda pourtant une expression neutre en le voyant grimacer.

- Mais ça vaudrait le coup d’essayer, soutint Aileen. Qui ne tente rien n’a rien, non ?

- Forcer la réserve du prof de Potions qui se trouve être le père d’Othilia pour réaliser une potion potentiellement illégale sur les instructions d’un mystérieux corbeau ? résuma Théa. Vous allez faire voler en éclat mon image de fille de bonne famille en deux minutes ! (Un lent sourire se dessina sur ses lèvres). J’en suis !

Othilia soupira. Elle se passa une main sur le visage, sourcils froncés, et Julian pouvait presque voir les rouages de son esprit tourner à plein régime.

- Très bien, céda-t-elle finalement. Faisons ça. Théa et Julian, vous venez avec moi. On fait ça tous les trois.

- Quoi ? Non, je veux venir ! opposa Liam.

- Certainement pas. Tu es incapable de subtilité, Cooper. Je prends Julian avec moi, il sait réfléchir lui au moins. T’es trop investi émotionnellement dans toute cette histoire.

La pique était presque méchante, mais il ne pouvait pas s‘empêcher d’être d’accord avec elle à ceci près qu’il aurait placé Aileen dans cette mission de vol de réserve. Son seul fait d’arme en matière de transgression de règlement avait été de dépasser le couvre-feu une ou deux fois avec Hanna pour observer les étoiles ou d’utiliser le terrain de Quidditch réservé aux joueurs d’équipe pour aider Matthew. Vu comment le dernier cas s’était soldé par une chute de quinze mètres, il n’appelait pas ça une réussite.

- Et Théa ? Elle sait être subtile peut-être ? protesta Liam en la désignant d’un doigt accusateur.

- Oh si tu savais, répondit-elle, énigmatique.

Il lui décocha un regard agacé.

- On ne va pas passer trente ans à tergiverser, intervint Aileen. Les cours se terminent dans vingt-cinq minutes, vous devriez y aller maintenant pour récupérer la clé. On reste pour là pour continuer. (Elle se mordit la lèvre, l’air inquiète). Faites attention quand même…

Julian hocha la tête et lui fit un sourire pour tenter de la rassurer. Il ne parut réussir qu’à moitié. Sans plus attendre, ils attrapèrent leur baguette et ressortirent dans le couloir. Par réflexe, il se plaça derrière les deux filles et les laissa prendre la tête puisqu’il ne connaissait pas le chemin. De dos, elles offraient un contraste étrange : l’une longiligne et blonde, l’autre petite et brune. Pourtant, elles marchaient presque au même rythme avec une proximité que seule une longue amitié pouvait apporter. Il remarqua qu’Othilia serrait et desserrait les poings nerveusement le long de son corps.

- Ca va aller ? demanda-t-il en se sentant soudain coupable de l’entraîner là-dedans.

- Hum ? Oh oui, oui… Juste pas rassurée, mais ça ira.

Elle détourna la tête pour regarder droit devant elle. Pris par la curiosité, il hésita seulement quelques secondes avant de poser la question qui le taraudait depuis deux semaines :

- Pourquoi vous avez accepté ? De nous aider, je veux dire. Je sais que vous ne vous entendez pas vraiment avec Liam et Aileen, vous ne connaissez pas vraiment…

Othilia et Théa échangèrent un regard devant lui. Elles eurent l’air de se comprendre sans rien dire, comme il pouvait le faire parfois avec Matthew. Il n’avait pas réalisé à quel point cette manie pouvait être dérangeante quand on en était l’observateur extérieur.

- Je ne sais pas exactement, avoua Othilia avec honnêteté. Tu es venu me voir pour me demander de l’aide alors qu’on ne se connaissait presque pas, mais je savais que Noah t’appréciait et que Théa commençait à t’apprécier. (Elle donna un coup de coude à sa cousine quand celle-ci fronça le nez, indignée d’être ainsi dénoncée). Tu m’as fait confiance et je voulais en être digne, je pense.

- Oh…

Etrangement touché, il se retrouva à court de mots. Sous ce ressenti, il distingua pourtant aussi une touche de malaise dont il ne savait pas quoi faire et il se tourna vers Théa pour éviter de s’y attarder.

- Et toi ? relança-t-il, avide de réponse.

- Liam fait ça parce qu’il a perdu sa sœur. J’ai beau ne pas vraiment le porter dans mon cœur, je connais le sentiment. L’aider à la récupérer est la moindre des choses si les Aurors continuent à être incompétents.

D’un air aussi altier que son surnom de « reine des glaces » le suggérait, elle releva le menton pour planter son regard dans le sien et il frissonna. Comme à chaque mention de Théo, il ressentit la sensation d’une pierre au fond de l’estomac. Là encore, il ne trouva rien à répondre et il ralentit pour se retrouver à nouveau derrière elles. Heureusement, il ne leur fallut que quelques minutes pour arriver devant le bureau du professeur Fontaine et Othilia se glissa à l’intérieur avec la clé que son père lui avait donné. Comme il était un des rares professeur à ne pas habiter dans le château même, puisqu’il partait retrouver sa femme au Village chaque soir, il avait transformé ses appartements en double bureau pour qu’Othilia puisse travailler au calme. Une clé pour ouvrir une porte, mais aussi une clé pour la réussite donc. A travers cette simple action, Julian visualisait assez bien quel genre de père pouvait être Fontaine : exigeant et entrepreneur. Exactement comme Othilia l’avait décrit à la bibliothèque le jour où ils avaient parlé. Dès qu’elle ressortit du bureau, elle afficha un sourire et brandit un trousseau de clés.

- Je l’ai, annonça-t-elle avec soulagement.

- Génial, on se dépêche ! Allez !

Au pas de courses, ils remontèrent le couloir. Le bruit de leurs pas contre les dalles de pierre en grès et le tintement des clés semblaient résonner contre les murs. Ils s’arrêtèrent au bout devant une porte en bois à la banalité affligeante. Si les filles n’avaient pas été avec lui, il n’aurait jamais deviné que la réserve de potion se trouvait ici.

- Bon, maintenant faut trouver la bonne…

Pendant qu’Othilia se battait avec le trousseau, Julian et Théa se postèrent de chaque côté pour voir si personne n’arrivait. Le déclic de la serrure se fit entendre.

- Dix minutes, décompta Théa.

Ils se précipitèrent à l’intérieur. La réserve n’était pas grande, une dizaine de mètre carré tout au plus, mais elle était rangée avec soin de telle sorte qu’aucun espace ne soit perdu. De larges étagères couvraient les murs et sur ces dernières s’alignaient diverses fioles, bocaux, boîtes et récipients soigneusement étiquetés.

- Les végétaux doivent être par-là, marmonna Othilia. Algue d’eau douce, algue rouge du Mexique, algue marine… Là ! Algue péruvienne !

Elle s’empara du bocal et souleva le couvercle pour piocher plusieurs morceaux d’algues qu’elle fourra dans ses poches sans cérémonie. Julian retint une grimace devant leur aspect visqueux.

- On peut y aller ? dit-il, nerveux et étonné de la rapidité de l’opération.

- Attends, le retint Théa, l’air d’avoir soudain eu une révélation. T’as bien dit hier qu’il manquait aussi de la poudre de licorne, non ?

Elle se mit à tourner sur elle-même sans attendre la réponse. Julian survola les étagères du regard en même temps. La poudre de corne de licorne était rare et peu utilisée dans les potions scolaires. La probabilité pour que le professeur Fontaine en possède…

- Là-haut !

Il fit volte-face. Comme indiquait Théa, une boîte en bois ouvragée, perchée sur la dernière étagère, se détachait nettement grâce à son illustration de licorne en nacre brillant. Une étiquette indiquait en-dessous « poudre de licorne ».

- On a besoin de combien de grammes ? s’inquiéta Othilia. S’il se rend compte qu’il lui en manque…

- A peine dix grammes, il ne verra rien ! assura Théa, confiante. Julian, vas-y, fais léviter la boîte jusqu’à nous.

Son ton était tellement directif qu’il ne chercha pas à protester. Il sortit sa baguette et se racla la gorge :

- Wingardium Leviosa.

Rien ne se passa. Ils restèrent figés quelques secondes, attendant que la boîte s’envole, mais elle n’eut même pas la décence de frémir. Il rougit en sentant les regards des deux filles se vriller sur lui.

- Alors ? T’es pas censé être un prodige en sortilèges ? accusa Théa, sourcil dressé. C’est du niveau junior !

- Je sais jeter un sort de lévitation, la rabroua-t-il sèchement. Wingardium Leviosa. !

Il accentua bien son mouvement de baguette pour faire bonne mesure, mais encore une fois rien ne se passa. Théa émit un claquement de langue plein de jugement et il s’empourpra un peu plus, piqué au vif, avant de soudain comprendre.

- Fontaine a dû jeter un sort de blocage, ragea-t-il, frustré. Certains sorts peuvent modifier ou endommager les ingrédients, mais de là à bannir un sort de lévitation…

- Comment on fait alors ?

- Si on ne peut pas faire descendre la boîte jusqu’à nous, on montera jusqu’à elle, décida Théa d’un ton docte.

- Quoi ?

- Porte l’une de nous !

Il écarquilla les yeux.

- Quoi ? répéta-t-il avec un manque d’éloquence certain.

- Oh allez, on ne pèse pas lourd, sois un homme Julian !

- Ça n’a rien à voir…

- Othilia doit être un peu plus grande que moi, elle arrivera à atteindre l’étagère. Allez !

Mal à l’aise, il se tourna vers Othilia et avisa son corps menu. Théa avait raison, elle ne devait pas peser bien lourd, mais elle était presque aussi grande que lui et il savait qu’il ne brillait pas par sa force physique ni par ses muscles. Il aurait peut-être dû accompagner Matthew à ses séances sportives plus souvent…

- Comment… je veux dire…

- Je pense que ça sera plus simple si je monte sur tes épaules, dit Othilia, l’air bien loin de sa zone de confort.

- Mes… Ah oui, oui…

Maladroitement, il se baissa pour être à hauteur et fixa le sol. Il tenta de ne pas se crisper alors qu’elle s’approchait et passait une jambe par-dessus son épaule gauche. Il sentit son déséquilibre et attrapa sa jambe instinctivement pour l’aider tandis que Théa tendait un bras vers elle. Othilia s’y accrocha puis passa sa deuxième jambe. Dès qu’il tenta de se redresser, il la sentit à nouveau partir en arrière et il raffermit sa prise en remontant ses mains : l’une sur son genou, l’autre sur sa cuisse. Il pria pour que le manque de luminosité couvre le rouge qu’il lui était monté au visage.

- Tu verrais ta tête, se moqua pourtant immédiatement Théa. Qu’est-ce t’as ? Jamais touché une fille d’aussi près ?

- Théa ! s’indigna Othilia.

- Si je peux plus me moquer de mon cousin.

Julian tenta de lui décocher une œillade assassine du mieux qu’il put, mais il ne devait pas être très convaincant en tanguant sur ses jambes. Il commençait à préférer l’époque où Théa ne lui parlait pas.

- Avance un peu, le guida Othilia. Encore. Voilà, ne bouge plus !

Elle se pencha en avant. A nouveau, son corps protesta contre l’effort et il serra les mâchoires. Théa posa ses mains sur la taille de sa meilleure amie pour l’empêcher de tomber. Il essaya de lever la tête légèrement pour voir si Othilia avait enfin réussit à saisir la boîte, mais le mouvement le déséquilibra. Il partit sur le côté, trébuchant, et Othilia poussa un cri en se rattrapant à la seule chose disponible : ses cheveux.

- Aïe ! protesta-t-il.

- Arrête de bouger !

- Fais un peu plus vite !

- Je pourrais si tu arrêtais de bouger !

- Mais qu’est-ce que vous faites par Morgane ?

Julian se figea. Une brève seconde, il ferma les yeux, le cœur affolé, puis il se tourna vers la porte. Appuyé contre l’embrasure, Noah se tenait devant eux, bras croisés et un rictus narquois aux lèvres. Le spectacle devait être étrange : sa copine perchée sur ses épaules avec Théa qui soutenait le tout. Son regard balaya leur petit groupe alors que personne ne répondait.

- Je dois m’inquiéter de quelque chose ? ajouta-t-il en les désignant, lui et Othilia.

Horriblement conscient de leur position – et de sa main sur sa cuisse – il s’empourpra à nouveau violemment.

- Si on te parle d’un corbeau et d’un chaudron qui s’appelle Albert, tu trouverais ça moins étrange ? lança Théa.

Julian manqua de s’étouffer. Il aurait voulu se jeter sur sa cousine pour la faire taire, mais il avait trop conscience du poids et des jambes entrouvertes d’Othilia au-dessus de sa tête pour la lâcher. Noah, lui, fronça les sourcils et se redressa du chambranle.

- Essayez toujours, défia-t-il.

**

*

- Essaie encore !

- Je ne fais que ça d’essayer !

- Et bah essaie plus ! Je veux que ce souafle passe dans les buts adverses comme les sorciers à travers le murs du quai 9 ¾ ! Et ton rôle à toi, c’est d’attraper le vif d’or aussi vite que possible dès qu’on sera en position de gagner !

- Compris, capitaine !

Adrian Connelly ponctua sa remarque d’un tour de balai ferme et d’un salut moqueur. Matthew, lui, serra les mâchoires. Perché sur son balai sous un vent écossais particulièrement virulent, il pouvait sentir des courbatures commencer à se former partout dans son corps. Pourtant, ce fut le ton d’Adrian plus que la fatigue qui fit monter une vague d’agacement en lui. Il savait qu’il n’était pas vraiment en colère contre son attrapeur, mais plutôt tendu à cause du match contre Serdaigle qui approchait. La saison venait à peine de commencer, mais il voulait la commencer fort. Il avait encore en travers de la gorge leur défaite de l’année dernière à cause de Regulus Black et de son coup de génie qui avait réussi à attraper le vif d’or pour donner la victoire à Serpentard. Mary McDonald, alors capitaine après le départ de James Potter, en avait pleuré de rage et Matthew se revoyait encore la réconforter dans les vestiaires. D’un geste absent, il frôla du bout des doigts son brassard et soupira. L’insigne n’aurait même pas dû lui revenir. Adrian était le plus âgé de l’équipe, le plus expérimenté… Il aurait dû être capitaine si la pression des ASPICS ne lui avait pas fait renoncer au poste. Et Matthew, comme la tête brûlée qu’il était, avait accepté sans réfléchir à la responsabilité que ça impliquait. Aujourd’hui, à quelques jours du premier match de Gryffondor, il commençait à comprendre.

- Eh Bones ! appela Olympe Belby, leur poursuiveuse. Desserre les mâchoires, ça va bien se passer !

- Hum…

- Oh Merlin, il est pire que Potter, se moqua Adrian.

- Non, impossible. Potter nous aurait fait faire des tours de terrain pendant une heure !

- C’est pas faux ! Vous ne savez pas ce que c’était, vous les nouveaux ! ajouta-t-il en pointant les deux batteurs et deux poursuiveurs recrutés cette année.

Matthew se tourna vers eux. Il avait dû renouveler presque entièrement l’équipe à cause de départ de l’école ou de départ de l’équipe tout court et son choix avait été difficile. Aucun talent ne s’était spécialement distingué pendant les sélections. En batteurs, il avait pris deux garçons de cinquième année, Edward Leswell et Niall Epstein. Ils ne brillaient pas pour leur assurance en vol, mais ils avaient tous les deux des épaules larges et une bonne force de frappe, ce qui était un bon début pour repousser les cognards. Pour les postes de poursuiveurs aux côté d’Olympe, il avait décidé de prendre deux de ses camarades de dortoir, Haley et Cassandra, pour qu’elles soient plus à l’aise ensemble.

- Allez, un peu de sérieux, les rappela-t-il à l’ordre. Connelly, je te rappelle que tu vas affronter Artemisia Meadowes. Elle n’arrête pas de s’améliorer !

- Crois-moi, je ne risque pas de l’oublier… Elle hante mes nuits !

Devant la formulation à double sens, Matthew haussa un sourcil alors qu’Olympe prenait un air indigné.

- Non ! Pas dans ce sens-là ! protesta Adrian. Vous me prenez pour qui ?

- Pour un imbécile !

- Eh ! Reviens ici, Belby !

Dans un éclat de rire, Olympe fila sur son Feuopoudre dernier modèle, Adrian dans son sillage. Matthew secoua la tête. Il se souvenait encore d’Olympe à l’époque où elle était timide avec un accent français plus prononcé. Elle avait bien évolué sous l’aile protectrice de Mary McDonald.

- Bon allez, entraînement terminé, déclara-t-il, fatigué. Tout le monde au vestiaire !

Ses joueurs ne se le firent pas dire deux fois. Ils piquèrent tous vers le sol dans un même mouvement et Matthew suivit plus lentement. Il posa pied à terre sur le sol boueux du terrain.

- Eh, capitaine, lança Adrian en lui donnant un coup de coude. Tes admiratrices sont là !

Il leva les yeux. Assises dans les gradins, Hanna Faucett et Charity Burbage se serraient l’une contre l’autre pour échapper au vent. Il ressentit une sensation étrange en les voyant côte à côte. Jusqu’à récemment, elles ne parlaient presque jamais ensemble : elles appartenaient à deux cercles de sa vie différents. Hanna était l’amie d’enfance, celle qu’il connaissait même avant Poudlard et qui formait avec Julian leur trio infernal. Charity était sa camarade de classe, celle qui avait toujours gravité autour de lui. C’était une attraction comme pouvait le subir les planètes qu’aimait tant observer Hanna. Ils se tournaient autour sans jamais entrer en collision, chacun à un pôle distinct, avançant dans un sens opposé sans jamais non plus arrêter la rotation qui régissait leur vie. Pourtant, dernièrement, il avait l’impression que le départ de Julian avait laissé un vide, un véritable trou noir qui aspirait tout le cosmos autour de lui. Et là où Hanna dérivait toujours plus loin, Charity se rapprochait. Ça lui faisait mal de l’admettre. Il ne voulait pas perdre Hanna, mais il avait moins de temps pour la retrouver à cause de leur emploi du temps. La plupart de ses cours était en commun avec les Poufsouffle, pas les Serdaigle, et il ne pouvait évidemment pas la retrouver pour les repas. Leurs seuls moments ensemble se réduisaient aux heures d’études et à leurs balades dans le parc les week-end.

Décidant de saisir l’opportunité, il dévia sa trajectoire vers les gradins en donnant une tape amicale dans le dos d’Adrian.

- A plus tard, Connelly ! Et entraîne-toi contre Meadowes !

- Bien, capitaine !

Sur cette dernière recommandation, Matthew pressa le pas. Il arriva devant les gradins desquels les deux filles étaient descendues et il sourit en arrivant à leur hauteur.

- Mesdames ! salua-t-il en ouvrant grand les bras. Alors ? Ebahies par l’équipe ?

- Serdaigle va vous écraser, déclara Hanna avec assurance.

- Calomnies, Faucett !

- Allez, juste pour faire plaisir à Julian quand on lui enverra notre prochaine lettre !

- Comme si Julian s’intéressait au Quidditch. Laisse-le déjà comprendre le Quodpot qu’on rigole.

Hanna éclata de rire. D’une main, elle repoussa sa masse de boucles châtains emportés par le vent. Charity avait été plus prévoyante : elle avait attaché les siens, longs et blonds, avec un ruban. Ils lui tombaient presque jusqu’à la taille. Mécaniquement, Matthew tira une mèche et l’enroula autour de son doigt. Elle lui donna une tape réprobatrice.

- Laisse mes cheveux tranquille, Bones.

- Tu ne les attaches jamais d’habitude, remarqua-t-il, une question muette dans la voix.

- Tu ne me vois jamais quand je les attache, nuance, corrigea-t-elle. Si tu savais le nombre de fois où ils se sont pris dans des ronces quand je vais me balader en forêt… Au bout d’un moment, j’ai compris le message.

- La forêt ? répéta Hanna en fronçant les sourcils. Genre, la Forêt Interdite ?

- Fais pas ton indignée, se moqua Matthew. Y’a que les Serdaigle pour avoir peur de briser les règles comme ça. Vis un peu !

- Parce que t’y vas aussi ? Dans la Forêt Interdite ?

- Je parlais de la forêt près de chez moi à Canterburry vous savez, intervint Charity pour essayer de couper court au débat.

- Une ou deux fois, répondit Matthew en l’ignorant, tourné vers Hanna. J’ai arrêté après être tombé dans un nid de fées. Les petites pestes m’ont bourdonné dans les oreilles jusqu’à ce que je ressorte de là.

Rien qu’en racontant l’anecdote, il pouvait encore entendre en écho le bourdonnement au fond de ses oreilles et il secoua la tête.

- Bon allez, arrête un peu de raconter n’importe quoi, dit Charity, l’air blasé. Tu te douches ici ou au château ?

- Pourquoi ? Tu veux m’accompa… ?

- Pour savoir si on t’attend dans ce froid glacial ou pas, imbécile, coupa Hanna en lui donnant un coup dans le bras pour faire bonne mesure.

Il supposait qu’il l’avait mérité. Pourtant, il ne regretta pas sa blague en voyant les pommettes de Charity s’empourprer et il sourit, amusé. C’était devenu un jeu entre ses dernières semaines : faire plier l’autre par des remarques de ce genre. Il savait qu’il avait dû ressembler à une bannière de Gryffondor qui aurait attrapé un coup de soleil quand, après avoir confié à Charity qu’il s’était fait une entorse au poignet à cause d’un souafle mal réceptionné, elle lui avait suggéré d’arrêter de penser à elle le soir. Frottant son bras endolori, il finit par ramasser son balai et indiqua le vestiaire.

- Je vais me changer ici, ça sera plus pratique. Les préfets utilisent toujours la salle de bain privée à cette heure-ci. On se retrouve après ?

- On se retrouvera à l’intérieur alors ! s’exclama Hanna en commençant à s’éloigner. Je gèle !

- Comme si c’était pas dix fois pire en haut de la tour d’Astronomie ! Où, je le rappelle, tu adores aller !

Hanna lui sourit en marchant à reculons, rieuse.

- Tu crois vraiment que t’es aussi brillant à regarder qu’une étoile, Bones ? Fais dégonfler ta tête !

De manière très mature, il lui tira la langue. Hanna éclata de rire à nouveau et leur adressa un signe de la main avant de se retourner et de partir. Matthew coula un regard en direction de Charity.

- Et toi ? demanda-t-il en tentant d’avoir l’air le plus neutre possible.

- Aucune idée. Va te doucher et vois si je suis toujours là quand tu ressors !

- Très drôle, Burbage.

Pourtant, quand ils atteignirent les vestiaires, elle s’adossa au mur et fit mine de tapoter une montre imaginaire. Comprenant qu’elle était sérieuse, il roula de yeux et s’engouffra à l’intérieur au pas de course. Il n’était pas assez cruel pour la faire attendre longtemps dans le froid glacial de novembre. A l’intérieur, aucun de ses joueurs n’était présent. Ils avaient dû tous repartir au château et il en profita pour prendre la douche la plus grande, celle dont le jet d’eau avait le débit le plus fort. Il enleva sa tenue d’entraînement en quelques secondes, laissant les vêtements abandonnés à même le sol. Sa mère aurait hurlé. Contrairement à beaucoup de familles de sang-pur, ils ne possédaient pas d’elfe de maison et elle se battait contre lui à chaque vacances pour qu’il range correctement ses affaires. En repensant à l’état de sa chambre cet été, il ne put s’empêcher de se dire que ce n’était pas concluant. Heureusement, ses parents avaient des emplois prenants. Peut-être trop. Être Auror et Haut Juge au Mangenmagot demandait de l’investissement. Au moins, ils n’étaient pas toujours derrière son dos pour le reprendre sur ses pratiques de rangement, ni sur son langage fleuri appris en traînant avec les enfants de Terre-en-Landes, et encore moins sur ses activités.

Depuis l’arrivée de Spencer et surtout Simon, la vieille chouette Mrs. McDougal était mise à contribution pour les garder quand ses parents étaient au travail. Une façon pour eux de lui montrer qu’il voulait bien le laisser respirer un peu et ne pas lui imposer systématiquement le baby-sitting de ses benjamins. Techniquement, il devait rester avec elle et l’assister si besoin. Dans les faits, il s’était souvent échappé cet été pour battre les chemins de campagnes, respirer, se libérer… Il culpabilisait le plus souvent au bout d’une heure et rentrait en vitesse pour vérifier si Spencer ne s’était pas fait une entorse au cerveau à force de faire ses puzzle de mille pièces ou si Simon avait bien eu son biberon à l’heure. L’année dernière au moins, il pouvait inviter Julian. Ils faisaient du vélo ou allaient trainer au terrain de foot voir les enfants plus âgés jouer à ce sport moldu qu’il n’avait jamais bien compris. Cette année, il n’avait pourtant pas osé passer de coup de cheminée…

Il se rappelait encore ce soir de juin fatidique lorsque sa mère avait passé la porte, les traits tirés et le visage figé. Il était en train de descendre les escaliers quand il l’avait vu franchir la porte. Il connaissait sa mère : elle ne s’effondrait pas. Sa détresse se manifestait toujours subtilement dans des détails. C’était sa posture moins droite que d’habitude, le feu dans ses yeux un peu moins vif. Elle lui avait annoncé d’une voix professionnelle, quoique légèrement tremblante, qu’un attentat avait eu lieu à Londres aujourd’hui. Pendant une seconde, il s’était inquiété pour son père, pas encore rentré. Mais il savait que si ça avait concerné son père, même elle n’aurait pas maintenu aussi bien sa façade, toute femme inflexible qu’elle était. Et puis la nouvelle était enfin tombée : l’attentat avait été perpétué contre les Archives Magiques. Aurélia Shelton faisait partie des victimes.

Il en était resté sonné, incapable de vraiment comprendre la caractère inéluctable de sa disparition avant l’enterrement. Il s’était tenu un rang derrière Julian. Il avait fixé ses épaules tendues, sa tête baissée, son bras passé autour des épaules de sa petite sœur secouée de sanglot. Lui n’avait pas versé une larme. Matthew s’en était aperçu en rentrant, l’esprit embrumé pendant que ses parents discutaient derrière lui de l’intervention des Aurors lors de l’attentat. Maugrey, le supérieur de sa mère, avait apparemment fait sortir Bathilda Tourdesac lui-même du bâtiment. Il était arrivé avec des renforts que personne n’avait bien identifié dans le chaos mais Matthew savait qu’il devait s’agir du fameux Ordre du Phénix dont son père refusait de reconnaître l’existence mais dont la rumeur autour gonflait à mesure que les mois passaient. Aujourd’hui encore, il ne savait pas quoi en penser.

Immobile sous le jet d’eau brûlant, il laissa ses muscles se détendre doucement puis attrapa le savon et effaça les traces de l’entraînement qu’il venait de se faire subir. Quand il ressortit, il veilla à ne pas glisser sur ses vêtements et repassa dans le vestiaire général. Il se maudit d’avoir oublié d’allumer une boule de feu avant de prendre sa douche en sentant l’air frais l’entourer. Il s’empressa de passer son uniforme : son pantalon, ses chaussettes, et sa chemise. Il venait de fermer le premier bouton quand la porte principal s’ouvrit brusquement. Il se figea en plein mouvement.

- Tu prends toujours autant de temps pour te préparer ou t’es juste noyé sous la douche ? lança Charity en entrant.

- Quoi ? Mais… comment… ? J’avais fermé la porte !

- Ce bout de bois là ? Oh Matt, j’ai assez de ressources pour vaincre ça quand même.

Il fusilla la porte du regard comme si elle l’avait trahi personnellement. Quand il reposa les yeux sur Charity, il vit les siens s’attarder non pas sur son visage mais plus bas. Il prit soudain conscience qu’il se tenait toujours devant elle, chemise ouverte et torse découvert.

- Eh ! s’indigna-t-il en croisant les bras devant lui.

- C’est des abdos comme ça que tu caches sous ton uniforme tous les jours ? s’exclama-t-elle entre ravissement et amusement.

- Mais arrête de mater !

- Tu te serais gêné, toi ?

- Non ! Enfin, je veux dire oui… s’embrouilla-t-il. Non, je n’aurais pas fait ça, ma mère m’a élevé dans les respects de femmes je te ferais dire !

- Des filles ou des femmes ?

- Les deux ! C’est la même chose !

Charity se mordit la lèvre, un geste qu’elle faisait quand elle était nerveuse. Elle baissa le regard et il eut l’impression de voir sa jolie prestance envolée d’un coup.

- Et moi ? Tu me vois dans quelle catégorie ? murmura-t-elle avec retenue.

- Je… quelle catégorie ? Oh, je…

Incapable de former une phrase, il se tût par peur de se ridiculiser. Les pans de sa chemise pendait toujours de chaque côté de son corps, mais ses mais étaient trop engourdies pour qu’il songe à la refermer correctement. Il resta focalisé sur Charity alors qu’elle avançait lentement jusqu’à lui. Il remarqua qu’elle avait détaché ses longs cheveux blond clair qui se balançaient au niveau de ses hanches dessinées. Charity avait pris des rondeurs au début de l’adolescence, notamment au niveau de la poitrine et de la taille, mais il trouvait que ses formes lui allaient bien. Elles allaient avec son visage en forme de cœur, ses lèvres pleines et ses joues rebondies qui lui donnaient une image chaleureuse. Ses yeux bleus, eux, tranchaient avec cet aura bienveillante : ils reflétaient sa force, son envie d’aventures, sa curiosité et son esprit acéré. Tout ce qui l’attirait chez elle.

- Charity… souffla-t-il.

- Je veux juste… tenter quelque chose. Si tu veux bien…

Il déglutit.

- Maintenant ?

- Rien de tel que l’instant présent, non ? répliqua-t-elle, une étincelle dans les yeux.

- Miss Burbage, j’aime votre façon de penser.

Un sourire rieur se dessina sur ses lèvres quelques secondes avant qu’elle ne vienne les poser contre les siennes. Matthew sentit son souffle lui échapper sur le coup. La sensation était étrange et grisante. Il ne pouvait pas nier qu’il l’avait déjà imaginé, seulement la vivacité du touché – du vrai, pas celui conjuré par son esprit comme une pâle copie – rendait l’expérience différente. Parce que c’était de cela dont il s’agissait : une expérience. Une expérience physique qui faisait exploser des émotions dans sa poitrine impossible à décrire. L’adrénaline se diffusa dans ses veines et ses mains se mouvèrent par instinct pour venir envelopper la taille de Charity. Elle sursauta doucement, surprise, puis se laissa aller contre lui.

Leurs lèvres s’entrouvrirent, s’écrasant ensemble dans un mouvement désordonné qui n’avait de sens que par le plaisir qu’il procurait. Grisé, Matthew l’attira plus près et elle remonta sa main le long de son torse, lui arrachant un frisson involontaire, avant qu’elle ne referme son poing sur le col de sa chemise. Il pouvait sentir sa poitrine pressée contre lui et la sensation lui provoqua un désir familier au niveau du bas ventre. Il laissa échapper un souffle haché, avalé par la bouche de Charity qui fit glisser sa langue timidement contre ses lèvres pour lui en demander l’accès. Il décida de reculer une seconde.

L’air perdu, Charity cligna des yeux. Il remarqua pour la première fois qu’elle avait une petite tâche brune en périphérie de sa prunelle. A cet instant, cette dernière était dilatée, tout comme sa jumelle, et il se doutait qu’il devait être dans le même état.

- Alors ? dit-il d’une voix rauque. Cette expérience ?

- Concluante… murmura-t-elle, la main toujours crispée à son col, les yeux accrochés au sol.

Elle était plus petite que lui et, proches comme ils l’étaient, il pouvait sentir son souffle contre sa clavicule.

- Et pour toi… ? osa-t-elle demander après un court silence en renversant sa tête légèrement en arrière pour le regarder.

- Oh concluante aussi, miss Burbage.

Et il sourit en l’embrassant à nouveau, animé par le désir de retrouver à nouveau cette nouvelle sensation. Ils n’avaient pas besoin de poser des mots sur ce qu’ils étaient. Ils n’étaient même rien, juste une expérience. Une aventure dans le sens premier du terme et Merlin seul savait ce qu’il aimait l’esprit aventureux de Charity Burbage.

**********************************************

Pas mal de choses dans ce chapitre ! Le grand retour de Matthew Bones déjà parce qu'il m'avait manqué (et Poudlard aussi). Je précise que son couple avec Charity Burbage a été imaginé par Perripuce à la base - elle en a fait un OS que vous découvrirez un jour - pendant que moi j'écris leur relation depuis le début jusqu'à la fin de Poudlard !

Ensuite, prenez moi pour une sociopathe, mais j'ai imaginé moi-même toute la liste des lois américaines sur deux siècles et demi haha ! Ca a été long mais j'ai adoré le faire en collant au mieux à l'Histoire des Etats-Unis ^^ N'hésitez pas à me dire ce que vous en penser !

Elements tirés de Pottermore/canon:

- La date de la loi Rappaport sur laquelle je reviendrais ne vous inquiétez pas.

On se retrouve dans deux semaines pour le dernier chapitre avant ma pause estivale de juillet-août ^^ Prochain post : chapitre 23 - 5 juillet
mythik

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par mythik »

Coucou !
Allez, petit commentaire rapide :)
Du Droit Magique ? Mais pourquoi l'école nous veut autant de mal... :cry: :cry: (j'ai fait un semestre de droit alors que j'étais en informatique... ça a piqué :cry: )
Matthew est le neveu de Barty Croupton ? :shock: Le pauvre !!
Waw ce travail que tu as fait sur la justice magique ! :o Chapeau !! Je crois que j'aurais pas eu le courage :lol:
Cazolie

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Cazolie »

THIS IS HALLOWEEN
HALLOWEEN !! HALLOWEEN !!

Allez je suis en "vacances" pré-oraux, j'en profite pour rattraper (rien qu'écrire cette phrase, ça m'a tordu le ventre de stress)

J'adore la citation de MacBeth :lol: Les sorcières me tuent
Les rues et ruelles étaient presque alignées parfaitement, formant des blocs sur le modèle newyorkais, et une rue principale coupait la ville en deux
Oh waouh, j'avoue qu'en lisant "le Village", je m'attendais pas du tout à ça :lol:
Le soleil voilé par quelques nuages était haut dans le ciel et éclairait le Village d'une lueur dorée mais pâle qu'il adorait.
Franchement, j'aime trop tes descriptions inspirées de l'oeil d'artiste de Julian :mrgreen:
Cette constatation lui fit étrange.
Mooow ils sont déjà super potes :')
Les Trois Balais étaient trop ancien pour en avoir une.
En vrai les Trois Balais on dirait vraiment une gargotte infâme du Moyen-Age :lol:
SPOOKY
Son parrain était assis en terrasse
Lui aussi fait des terrasses
On sait qu'elles étaient tes préoccupations quand tu as écrit ce chapitre :lol: (ou plutôt tes aspirations vu la date à laquelle il a été posté)
Sa sœur a eu un bébé il n'y a pas longtemps.
Je suis pas sûre d'avoir tout pigé à la généalogie; Simon ??
Son faible pour les bébés, c'est trop chou :lol:
Julian réalisa que ce qu'il venait de dire était idiot. Un bébé n'avait pas pu envoyer une lettre.
:lol: :lol: :lol: A fortiori s'il n'était pas né
« Salut tonton », je me suis douté qu'il se passait quelque chose. Morgane, ce gamin est agaçant. Je lui ai dit trente fois de ne pas m'appeler comme ça.
Ca m'a tuée :lol: :lol: :lol: :lol: :lol: :lol:
Ils ne se disaient pas des choses aussi personnelles.
C'est mal mais j'ai dans l'idée que les conversations de mecs se résument souvent à des trucs débiles type blagues, insultes et histoires absurdes :lol:
La dernière fois qu'il avait vu Hanna, il avait encore une mère.
C'est triiiiiste mais très bien analysé :'(

Ca me fait trop bizarre parce que Leonidas est hyper sympa ici alors que chez Perri y a une aura de méfiance un peu autour de lui haha
Bref, je l'aime bien
Elle avait des pommettes hautes et des yeux bleus qui lui rappelaient quelqu'un, mais il n'aurait pas su dire qui. Sur son nez droit étaient perchées des lunettes en demi-lune
C'est une cousine de Dumby ? :lol:

Gênaaaaaaaaaaaaant cette conversation avec Hilda
- On a du thé à la menthe ou à l'orange, confirma Hilda. Ou alors... (Ses yeux perçants se vrillèrent soudain au-delà de leur table). Raphaël !
Ces Américains... C'est comme leur hérésie de servir le vin avec des GLACONS
NON
NON NON NON

Bon, c'est pas la cousine de Dumby du coup :lol:
- Je ne peux pas aujourd'hui. J'avais promis à Charly de lui montrer le point de vol près de la réserve. S'il te plait !
Je crois qu'on en a déjà parlé, mais si les deux Shelton se mettent en couple avec un Douzebranches, ça va être vraiment marrant
tu as intérêt à passer me voir avant le couvre-feu.
Dans 50 ans, un étudiant en lettres étudiera tes fanfics et fera une partie sur "l'influence du covid sur les écrits contemporains"
Lysa est persuadée qu'il vend des plumes en contrebande.
.... Quoi :lol: :lol: Mais des plumes de quoi ? Du derrière d'un phénix ?
Je l'ai même emmené voir Central Park au début du mois.
Un chercheur sauvage dans la nature !
En comparant nos souvenirs, on s'est rappelés qu'elle n'arrêtait pas d'aller aux toilettes dès qu'elle buvait un verre de jus d'orange pendant que nous buvions nos coupes de champagnes. Lysa devait l'aider à se relever du canapé à chaque fois.
C'est pas une description qui fait rêver et pourtant j'ai trop hâte d'être enceinte :lol: J'ai un souci

C'est hyper chou que la famille ait aidé Ethan à s'en tirer, parce que quand on les a rencontré ils donnaient pas trop l'impression d'être sympa haha
Mais du coup Théa aime bien Leonidas ? Elle voulait juste pas voir Julian ? :lol:
- Et pourtant tu as accepté, rétorqua Leonidas
J'avoue que je me demande bien pourquoi :lol:

Yayy c'était un super chapitre ! J'ai trop aimé cette discussion avec Leonidas, et c'était cool de découvrir le Village, et Hilda, et d'étoffer un peu la famille Douzebranches
Bref, c'était un chouette moment :mrgreen:
Scandium

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Re: L'héritage d'Ilvermorny [Harry Potter]

Message par Scandium »

Super chapitre ! Oh, je savais pas qu'on aurait des PDV de Mathiew ! Trop cool !

Ah la la, j'aime trop voir les petites interactions entre Julian, Aileen, Liam, Othilia, Théa et Noah ! J'ai hâte de voir à quel point ils vont devenir proches !
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