Bonsoir,
Je viens valider la consigne suivante :
6. Puisqu’ils n’acceptent pas les nés-moldus
Lire un livre traitant de racisme, homophobie, sexisme…
Sexisme
** Inégalité hommes-femmes (société patriarcale - Moyen Âge) **
"Shaena" d'Aurélie Depraz
Je découvre Aurélie Depraz avec
"Shaena", une romance historique mêlant
Highlanders et
Vikings.
Avec une facilité déconcertante, l’auteur a réussi à me faire voyager dans le temps et à travers l’Histoire. Au fil des pages, les personnages prennent vie. Nous voici plongés en 1214, au Moyen Âge, à une époque où les archipels situés au nord de l’Écosse, les Orcades et les Shetland, mais également les Hébrides étaient encore aux mains des Norvégiens, les
"barbares" du Nord.
Depuis la victoire finale treize ans plus tôt à Scarfskerry, le Caithness, le Ross et le Sutherland avaient été arrachés aux Vikings. Pour la première fois depuis quatre cents ans, sur la façade nord de l’Écosse, les Vikings étaient relégués aux mers et aux archipels et n’avaient plus pied sur la terre ferme.
À la demande de son petit frère, Neil, Connor MacKay revient, après neuf ans d’un exil volontaire, le cœur lourd et meurtri au château de CastleWhite, sur les terres de son père, le seigneur de Caithness. À l’époque, il avait préféré fuir avec son meilleur ami, Sean, plutôt que d’être contraint d’épouser l’héritière de son ennemi juré, Jón Haraldsson, jarl des Orcades et des Shetland, qu’il juge responsable de la mort de son frère, Tormond, sur le champ de bataille de Scarfskerry. Épouser une fille de
"Norseman" ("Homme du Nord"), à plus forte raison la fille du jarl des Orcades et des Shetland, Shaena Jónsdóttir, représente pour Connor ni plus ni moins qu’une trahison envers ce frère, de huit ans son aîné, qu’il considérait comme son dieu, son héros.
Il retrouve un château à l’abandon, des frontières perméables, des rivages plus que vulnérables, une économie en déroute… Son père rongé par l’alcool et la maladie a peu à peu perdu le sens des réalités et avec lui des responsabilités depuis la mort de sa femme, et se meurt à petit feu. Tous les espoirs sont placés dans le retour du Connor, considéré comme le successeur du chef de clan des MacKay, âgé à présent de vingt-six ans.
Connor est un homme généreux, bourré de principes aussi justes que loyaux. C’est un homme bon, courageux et fier. Il est plein de délicatesse sous des airs farouches.
Shaena, alors qu’elle n’avait que neuf ans était tombée amoureuse au premier regard de son prétendant, Connor MacKay. Lui, alors âgé de seize ans était toujours endeuillé par la perte de son frère survenue quatre ans plus tôt, et éprouvait un profond ressentiment à l’égard de son peuple et l’avait considérée avec dégoût.
Les exigences de son père restent inchangées. Le pacte conclu entre son père et le jarl des Orcades et des Shetland est toujours en vigueur, son destin a été scellé neuf ans plus tôt…Pour maintenir la paix, il se doit d’épouser Shaena…
Pour devenir chef, Connor va devoir sceller des alliances, avoir des soutiens et se marier… Mais il est hors de question que sa femme soit norroise (scandinave). Il épousera une Écossaise…
Une rencontre inattendue avec Shaena va néanmoins bouleverser son existence.
Neuf ans se sont écoulés, Shaena est devenue une très belle femme. Le vilain petit canard s’est en quelque sorte transformé en un magnifique cygne… Shaena est passionnée, forte, sensible et fière. Elle a un grand cœur. Mais c’est également une femme de caractère qui n’a pas la langue dans sa poche. Le sang viking coule dans ses veines et ça se sent… C’est une combattante. Elle est restée éperdument éprise de Connor. Elle a attendu son retour et espère ne plus voir de dégoût dans son regard.
L’auteur reste dans un registre réaliste pour l’époque où malgré toute la détermination possible, Shaena ne peut échapper au rôle que lui prédestine son père puisqu’elle n’est qu’une femme dans une époque résolument patriarcale. Elle ne peut que subir…
– Je veux proposer à Connor une femme faite, accomplie, douée au lit. Une femme qui saura l’attirer dans sa couche, le tenir par les couilles et se faire engrosser.
Sur ordre de son père, le jarl des Orcades et des Shetland, Shaena sera contrainte
de se faire déflorer et de subir des viols répétés par le meilleur de ses guerriers, Rurik, pendant un mois.
– Rurik va te déflorer. Ensuite, il va t’enseigner tout ce qu’une fille de ton âge devrait savoir faire depuis longtemps.
– Je sais que tu voulais te réserver pour ton futur mari. Enfin, pour Connor. Mais la plaisanterie a assez duré, et de ce que m’ont rapporté mes informateurs de Huna, Connor a connu pas mal de femmes dans les Highlands et il les aime libres et sensuelles. Il n’aura que faire d’une gourde sans expérience ou d’une vierge effarouchée. Et tu n’auras pas le droit à l’erreur, Shaena.
Shaena ne peut que se soumettre… Son père a tout pouvoir sur elle.
Elle ne représente qu’un vulgaire pion sur l’échiquier politique. Elle n’est pas maître de son destin.
A cette époque, il était plus facile pour un homme de se soustraire à son devoir. Plutôt que d’être contraint à un mariage forcé, Connor a préféré abandonner tous ses privilèges en s’exilant volontairement. Pour subvenir à ses besoins, il lui suffisait de louer ses services de mercenaire au clan MacKinnon. En tant qu’excellent guerrier, c’est à prix d’or qu’on s’était offert ses bras et ses claymores. Mais le devoir a fini par le rattraper… De par sa naissance, Connor a des obligations envers son peuple. Il n'est pas maître de son destin. Que ça lui plaise ou non, en tant que successeur de son père, futur chef de clan, il est moralement tenu de faire prospérer son clan et de le protéger de ses ennemis. Si un mariage arrangé peut amener la paix, il n’a pas le droit de s’y opposer, que la promise soit belle ou non, qu’elle soit issue d’un clan ennemi ou allié.
L’avenir de son clan prime sur ses désirs personnels !
Extraits :
[ Craig MacKay – chef de clan des MacKay ]
– […] La guerre exige des sacrifices. La paix en exige d’autres !
– […] Le comte des Orcades était enfin disposé à nous céder définitivement le Caithness, le Sutherland et le Ross, à renoncer à toute prétention sur ces terres et à s’en tenir à ce statu quo si nous scellions une alliance avec lui. Son roi voulait la paix. Notre roi voulait la paix.
– Son père est puissant, Connor ! Terriblement puissant ! Tant qu’il restera un ennemi potentiel, nous n’aurons jamais la paix sur ces terres ! Ni nous, ni les Keith, ni les Gunn, ni personne ! Et avec les MacLeod ralliés aux Hébridais, nous serions pour ainsi dire seuls pour lui résister, si l’envie lui prenait de reposer le pied de ce côté-ci du détroit !
– Si tu comptes devenir chef ici, Connor, il va te falloir des alliances. Des soutiens. Un mariage !
[ Connor MacKay – Craig MacKay ]
– Cela fait près de quatre siècles que ces pillards ravagent nos côtes ! Que les Orcades leur servent de premier point de chute, d’escale, d’étape, de station de ravitaillement dans leurs expéditions, qu’elles viennent de Bergen, des Shetland ou de Stavanger ! Qu’ils ne nous laissent quasiment aucun répit entre deux raids, que leurs confrères des Hébrides infestent nos côtes et se livrent à toutes sortes de contrebandes ! Qu’ils font et défont les alliances, donnent et reprennent leur paroles, qu’ils lorgnent nos terres et refusent d’y renoncer une bonne fois pour toutes ! leurs rois n’ont cessé de venir mettre leur nez dans nos affaires, de mener des coups de force jusqu’en Irlande, de venir rappeler leur autorité à coups de flottes et d’expéditions punitives, Harald, Magnus, Eysteinn, Sverre Sigurdson, tous, ils ont tous cherché à nous soumettre, à nous voler des terres, à prendre nos femmes, à nous donner leurs filles ! Et maintenant, vous voudriez que je prenne l’une des leurs ? Que je leur facilite la tâche ? Que je leur ouvre toutes grandes les portes de Caithness ?
– Ce ne sont pas les portes du Caithness que tu leur ouvrirais, Connor. Ce sont celles des Orcades qui s’ouvriraient à toi, à nous. Jón n’a pas de fils et il a perdu sa femme il y a deux ans. S’il meurt sans héritier mâle, c’est toi qui hériteras à la fois des Orcades et des Shetland !
– Et deviendrai vassal du roi de Norvège ? Hors de question !
– William est pour. Il pense que de mettre des comtes écossais à la tête des Orcades, même sous la coupe du roi de Norvège, c’est un premier pas vers la récupération de ces îles. Il est toujours favorable à ce mariage.
– C’est absurde ! Etre vassal du roi d’Écosse ici, et vassal du roi de Norvège de l’autre côté du détroit ?
– On a déjà vu pire.
– Vous nagez en plein délire, père !
– Pas du tout. William pense que les Norvégiens envisageront plus facilement de lui revendre ces îles par la suite, si nous les repeuplons peu à peu, si nous apportons du sang celte, notre langue… Si nous nous mêlons à…
– Jamais, vous m’entendez, jamais je n’aurai pour femme l’une de ces sauvages ! Si je mets un pied de l’autre côté du firth, ce sera pour les bouter hors de tout l’archipel, un à un, par la voie des armes, vous m’entendez ? Jamais je ne mêlerai mon sang au leur ! Jamais je ne trahirai Tormond !
– Tormond aurait voulu que tu vives en paix pas que sa mort te hante jusqu’à la fin de tes jours.
[ Jarl des Orcades et des Shetland ]
– […] J’ai autant besoin de cette alliance pour sécuriser les eaux du Pentland Firth, de nos îles et des Shetland que son père la veut pour renforcer l’autorité de son roi sur le nord. Nous avons tous assez guerroyé et cela fait dix ans que ni notre roi ni le sien ne veulent de nouveaux conflits dans la région. Les Hébridais se chargent bien assez comme ça de faire du grabuge et Inge en assez de ces querelles : William d’Ecosse a accepté de reconnaître une fois de plus son autorité sur toutes les îles, les Orcades, les Southern Isles, l’île de Man, tous les archipels, y compris ceux aux mains de clans écossais, comme les MacLeod, tant que Inge reconnaît que toutes les terres du Caithness à la péninsule de Kintyre, toute la terre ferme, des Highlands au Galloway et des côtes ouest aux plaines des Lowlands sont sous domination écossaise. Ils sont enfin d’accord. Au roi de Norvège les îles, au roi d’Écosse la terre ferme, ses rivages, ses criques et ses péninsules. Nous avons été contraints de céder le Caithness, le Ross et le Sutherland, mais mon autorité sur les Orcades et les Shetland ne saurait plus être contestée. Et puis, John d’Angleterre a fait comprendre à Inge qu’il ne traiterait pas avec lui en matière commerciale si les rapports entre la Norvège et l’Écosse ne s’apaisaient pas davantage. Inge veut un moment de répit. William d’Écosse aussi. John d’Angleterre également. Craig MacKay veut mourir en paix – et faire la nique aux MacLeod, au passe. Grand bien lui fasse. Bref ! Nous avons tous besoin de cette alliance.
[ Sean ]
– […] Après tout, Tu veux ce qu’il y a de meilleur pour le Caithness, non ? Pour le domaine, pour tes gens ?
– […] les Orcadiens disposent de la plus grande puissance militaire de toute la région. Plus de sept mille guerriers, mobilisables à tout instant. D’excellents débouchés commerciaux. Une économie florissante autour du kelp (macroalgues brunes). Un approvisionnement en baleine du Groenland. La possibilité de pêcher l’orque et le marsouin depuis leurs îles des Shetland. Des traitements de faveur de la part des Scandinaves d’Islande et des marchands de la mer Baltique. Leurs foires de Kirkwall et de Stromness sont les plus populaires de tout le secteur et ils ont une flotte plus belle que celle de William. Enfin, ce sont les meilleurs marins de toute la mer du Nord et les seuls capables d’écraser les Norvégiens des Hébrides et les MacLeod de Lewis s’il le fallait – et tu le sais.
La condition de la femme écossaise à cette époque n’est pas des plus enviables… La femme doit obéissance à son époux et pour arriver à ses fins, certains d’entre eux n’hésitent pas à recourir à la violence en battant leur femme et ne s’en cachent pas. Au contraire, ils jugent cette "méthode" totalement appropriée, justifiée et vont même jusqu’à la recommander ! Ça donne froid dans le dos !
– Je la battais, mais je l’aimais, Connor.
– Tu sais, il n’est pas de mauvais ton pour un mari d’être craint par sa femme. C’est ainsi qu’on est le mieux obéi. Tu devrais retenir la leçon, Connor.
– Je ne voudrais pas d’une femme qui me craigne. Ni qui soit toujours d’accord avec moi, d’ailleurs.
– Et comment t’y prendras-tu pour te faire obéir ?
– Nul besoin d’être obéi lorsque l’on est aimé. Ou, a minima, estimé.
– De bien belles paroles, mon fils. Nous en reparlerons lorsque tu auras une femme à dresser. Au moins ta mère avait-elle fini par connaître sa place. Et par savoir ce qui était bon pour elle.
Et dire que les Écossais traitent les Vikings de
"barbares", de
"sauvages" !
Les descriptions des paysages sont grandioses. L’auteur décrit si bien les personnages, tant physiquement que psychologiquement, qu’elle leur donne vie sous nos yeux. Elle m’a littéralement embarquée dans un tourbillon d’émotions et de sensations…
Shaena m’a profondément émue et je l’ai admirée. Elle a une force de caractère peu commune. Malgré ce qu’elle a été contrainte d’endurer, elle est loin d’être une faible femme sans défense…
J’ai eu un terrible coup de cœur pour Sean, le compagnon et fidèle ami de Connor. Pas un instant il n’a hésité à l’accompagner dans son exil. Sean était orphelin et avait été recueilli six ans plus tôt au château. Il était destiné à devenir l’écuyer de Connor. Avec lui, il avait fait les quatre cents coups. Au travers du récit, on ressent très fort le lien qui les unit. Sean est doté d’une imagination sans bornes, d’un bagou incroyable et d’un charme irrésistible… Il n’hésite pas à asséner ses quatre vérités à son ami, à le bousculer, quitte à le froisser ou même à le faire enrager, pour qu’il réagisse. J’ai adoré son franc-parler, son humour, son insolence, ses réparties cinglantes ! Sean est incontestablement mon personnage préféré. Et quel personnage !!!
Dans les moments difficiles du récit, ses interventions ont apporté une certaine légèreté… Pour moi, il représente bien plus qu’un personnage secondaire. Et j’ai succombé à son charme... Il mérite lui aussi sa propre histoire d’amour…
Au travers de ce récit on sent qu’Aurélie Depraz est passionnée d’Histoire… Elle a effectué un spectaculaire travail de recherche pour coller au plus près de la réalité. Dans ce récit, les aspects liés à l’histoire, la géopolitique et l’architecture sont extrêmement bien documentés. Les us et coutumes de cette époque sont également décrits avec précision. De plus, certains passages sont écrits en gaélique ou en norrois, ce qui apporte une touche d’authenticité au récit et le rend encore plus vivant et… fascinant... En fin de tome, de nombreuses références sont détaillées.
Pour profiter pleinement du livre, l’auteur nous offre quelques bonus :
– les cartes géographiques pour localiser les archipels et les îles repris dans le roman :
https://aureliedepraz.com/2019/05/06/sh ... es-cartes/
– les coulisses du roman :
https://aureliedepraz.com/2019/05/09/shaena-coulisses/
– l’histoire des Orcades et des Shetland :
https://aureliedepraz.com/2019/04/24/pe ... -shetland/
J’ai pris plaisir à me plonger dans le fruit de ses recherches et d’en apprendre plus sur ce pan de l’Histoire.
Le voyage était superbe… mais bien trop court…
J’attends avec impatience le roman qui sera consacré à Sean… Aurélie Depraz nous l’a promis ! Elle en fera son héros et le personnage central d’une prochaine romance dans le genre
"Les Highlanders du Nord"... Il n’y a plus qu’à s’armer de patience ! (Facile à dire !)
Harry Potter