~ Chapitre 7 ~
Stupéfait, Demyan mit quelques secondes avant de réaliser ce qui était en train de se produire. Mais sitôt l’effet de surprise révolu, il répondit au baiser de Drake avec une fougue non contenue. Il ignorait ce qui était passé par la tête de son ami pour agir de la sorte, mais il s’en fichait pas mal. Bien au contraire, ravi de son initiative, il lui fit rapidement comprendre qu’elle était bienvenue.
Sa langue s’insinua entre les lèvres de Drake qui poussa un gémissement, tout en affermissant le contact de sa main sur la nuque de Demyan.
Ils s’embrassèrent longuement, cherchant à savourer au maximum cet instant.
Perdu au milieu de cet océan de sensations absolument divines, Drake parvint même à en oublier sa douleur. Cela faisait tellement longtemps qu'il avait fantasmé sur ce moment qu'il n'arrivait toujours pas à concevoir la réalité de leur étreinte. Il n’avait pas réfléchi lorsqu’il s’était jeté sur Demyan, et avait redouté qu’il ne le repousse. Mais constater qu’il n’en était rien lui fit bien plus de bien qu’il ne l’aurait imaginé.
Au moins, je crèverai comblé, songea-t-il.
Il sentit les mains de Demyan descendre le long de son torse, effleurant seulement sa peau. Il était conscient de l’état de Drake, et faisait son possible pour ne pas être trop brusque, même si, en cet instant, l’envie de lui arracher ses vêtements pour le prendre sauvagement était à son apogée.
Drake tressaillit sous les caresses de Demyan et il ferma les yeux lorsque ce dernier se détacha de ses lèvres pour mordre gentiment sa mâchoire, avant de venir tracer un sillon le long de sa gorge.
Il brulait d’envie de laisser ses crocs pénétrer sa chair, et dut se refréner. Drake était bien trop faible pour ça.
Sentant les mains de son ami descendre le long de son dos pour s’insinuer sous son tee-shirt, il releva la tête pour embrasser Drake de nouveau.
— J’ai envie de toi, murmura ce dernier contre sa bouche.
Le russe sourit, sans cesser de faire courir sa langue sur les lèvres de Drake.
— Je ne pense pas que tu sois en état.
— Tu serais surpris, répondit-il d’un air nonchalant.
— Ne me tente pas, souffla-t-il en descendant sa main toujours plus bas sur le corps de Drake.
Et sur ces derniers mots, ils s’embrassèrent de plus belle.
Drake avait toujours pensé qu’assouvir ses fantasmes ne servaient qu’à les gâcher, car la réalité était souvent bien en deçà. Mais ce n’était absolument pas le cas en cet instant. Carrément l’inverse même. Et bien meilleur finalement.
Ils se rendirent compte qu’ils avaient perdu la notion du temps, et de la situation, lorsqu’un cri se fit entendre derrière eux.
— Mais qu’est-ce c’est que ce bordel ?
Ils se séparèrent aussitôt, et le brusque mouvement de Drake pour s’extraire de l’étreinte de Demyan lui arracha un grognement de douleur – et de frustration.
Ce dernier se retourna pour apercevoir Eric, qui les dévisageait d’un air ahuri.
— On ne t’a jamais appris à frapper aux portes ? gronda-t-il, pas le moins du monde gêné d’avoir été pris en flagrant délit avec Drake.
— Je l’ai fait. Plusieurs fois. Mais personne ne m’a répondu. Je comprends pourquoi maintenant, rétorqua-t-il, un sourire au coin de lèvres.
Demyan se remit debout et toisa Eric d’un air sévère, mais celui-ci ne se laissa pas démonter et s’approcha de Drake. Il supposait que s’il était capable de batifoler avec Demyan, c’est qu’il n’était pas si mal en point, mais préférait s’en assurer malgré tout.
Lorsque, il découvrit l’étendue des blessures de son ami, il ne put réprimer un juron. Il était salement amoché, et les plaies semblaient profondes.
Son regard inquiet se posa sur Drake, qui lui offrit un petit sourire, comme pour le rassurer.
— Est-ce que ça va ? demanda Eric sans quitter Drake des yeux.
— Pas vraiment. Ça fait un mal de chien.
— On va arranger ça, répondit-il d’une voix qui se voulait ferme, mais sans y parvenir tout à fait.
Puis il se tourna vers Demyan qui les dévisageait sans mot dire.
— On en a choppé un. Il t’attend sagement en bas.
Le silence se fit pendant quelques instants, mais une lueur de soulagement apparut sur le visage de Demyan.
Au moins, il pourrait avancer. Il savait que faire parler un des membres du Cercle ne serait pas une mince affaire, mais s’il pouvait obtenir des informations sur le lieu de captivité d’Alexei sans se jeter dans la gueule du loup, ce serait déjà une bonne chose.
— Parfait. Tout le monde est rentré ? Personne n’est blessé ?
— Charlotte et Julian sont encore en route. Sven a quelques égratignures, mais Nikita est en train de s’occuper de lui. Tout le monde s’en est bien plus ou moins bien sorti.
Même si c’était le cas, la bataille avait été rude, en témoignait les traces de sang sur les vêtements d’Eric, et les ecchymoses sur son visage. Il était dans un sale état, ses longs cheveux roux étaient couverts de boue et son jean déchiré à certains endroits – mais, connaissant les gouts vestimentaires d’Eric, Demyan ne pouvait affirmer si ce n’était pas déjà le cas avant de partir.
Quoi qu’il en soit, il fut soulagé de constater que tout le monde semblait aller pour le mieux. Tout le monde excepté Drake, qui avait de nouveau fermé les yeux et dont le visage crispé reflétait une douleur intense.
— Puisque tu es là, tu vas pouvoir m’aider, décréta Demyan. Il a besoin de sang, et je lui en ai déjà beaucoup donné. Je ne peux pas lui en fournir davantage. Sans compter que je ne me suis pas encore occupé de son dos, dont la blessure est à peu près aussi profonde que celle de son torse.
Il aurait du, bien sûr, mais Drake ne lui en avait pas vraiment laissé le temps.
— Merde, jura Eric, mais qu’est-ce qui s’est passé dans ce club ?
— Ils étaient trop nombreux et il y avait beaucoup de civils. J’ai essayé de les faire sortir pour qu’on règle ça à l’air des regards, mais ces abrutis n’ont rien voulu entendre.
Drake les observait discuter, mais ne fait pas mine d’intervenir. D’une part parce qu’il se sentait bien trop faible pour ne serait-ce qu’avoir un semblant de conversation, mais surtout parce que son esprit était toujours dirigé vers le baiser qu’il avait échangé avec Demyan quelques minutes plus tôt. Il n’attendait qu’une chose, qu’Eric s’en aille pour pouvoir recommencer.
Mais il savait bien que le moment était bel et bien terminé et que cela ne se reproduirait plus. Il ne resterait bientôt plus que les regards embarrassés jusqu’à ce que l’un des deux se décide à en parler, bien qu’il fut certain que Demyan n’en ferait rien.
Mais très rapidement, la douleur le ramena à la réalité. Ses blessures le faisaient atrocement souffrir et il n’espérait qu’une chose, que cela cesse enfin. Ce qui n’était pas près d’arriver apparemment.
Avant qu’il puisse l’empêcher, un cri sortit de sa bouche, et les deux hommes reportèrent leur attention sur lui.
— Ça va bien se passer, assura Eric, on va prendre soin de toi.
Sur ces paroles, Demyan lui tendit un morceau de tissu et ils entreprirent de bander le torse de Drake. À deux, ils y parvinrent sans trop de mal, et une fois le pansement solidement fixé, ils l’obligèrent à se tourner sur le ventre afin de s’occuper de la deuxième plaie.
Là aussi, des échardes étaient incrustées dans la peau et Demyan reprit méticuleusement son travail. Pendant ce temps, Eric offrit son poignet à Drake, qui ne se fit pas prier pour le mordre. Au moins pendant que le plaisir de cet échange montait en lui, la douleur de son corps s’atténuait. Malheureusement, cela prit fin bien trop tôt à son goût, et il sentit bientôt ses tremblements refaire surface.
Il leur fallut plus d’une heure pour finir de le soigner, mais ils y parvinrent tout de même.
Drake aperçut alors le visage de Demyan à quelques centimètres du sien qui lui souriait doucement.
— Tu as besoin de te reposer. On a fait ce qu’on a pu, et je pense qu’on a évité le pire. Eric va rester avec toi, mais je dois m’occuper de notre invité. Tu tiendras le coup ?
Drake se contenta d’acquiescer mollement avant de fermer les yeux.
Demyan descendit les escaliers d’un pas rapide jusque dans la cave. Lorsqu’il pénétra à l’intérieur, il découvrit un homme ligoté à une chaise, et Julian– qui était finalement rentré - qui le surveillait, les énormes bras tatoués croisés sur sa poitrine.
— Est-ce que Charlotte va bien ? lui demanda-t-il tandis qu’il avisait les égratignures sur le visage de Julian.
— Tu la connais, c’est une vraie guerrière. Elle a été bien moins amochée que moi.
Demyan acquiesça en souriant légèrement.
— Il refuse de parler, l’informa Julian lorsque Demyan s’approcha de l’otage.
Ce dernier ne répondit rien et se posta juste devant l’homme assis. Son visage était tuméfié et un filet de sang s’écoulait le long de sa lèvre.
Son tee-shirt était maculé d’hémoglobine et son pantalon déchiré.
— Vous n’y avez pas été de main morte, constata-t-il sans cesser de parcourir le corps de l’homme des yeux.
— Il semblerait que ce ne soit pas encore assez, se contenta de répondre Julian.
Demyan s’agenouilla devant le prisonnier et ancra son regard dans le sien. Aucune peur n’émanait de lui, juste de la douleur, et de l’agacement.
— Où est Alexeï ?
L’homme resta silencieux. Apparemment il lui en fallait plus pour se laisser convaincre de parler.
Les membres du Cercle n’étaient pas comme le commun des mortels. Ils étaient plus forts, plus puissants, plus endurants, et plus prompts à guérir.
Pour une seule et unique raison, ils étaient dopés au sang de vampire.
C’était le meilleur moyen qu’ils aient trouvé pour les combattre. Utiliser leurs propres armes.
Mais, comme tous les vampires, ils pouvaient être blessés.
Demyan dégaina le revolver qu’il avait glissé dans la ceinture de son pantalon et d’un geste sûr, il appuya le canon du Beretta sur le genou gauche du prisonnier en prenant soin d’ôter le cran de sécurité.
— Où est Alexeï ? répéta-t-il tout aussi calmement.
L’homme leva ses yeux émeraude vers lui et cracha.
C’en était trop pour Demyan. Sans préambule, il tira. L’inconnu poussa un hurlement tandis que le sang se déversa le long de sa jambe.
— Enfoiré, maugréa-t-il en crachant de nouveau à ses pieds.
À ces mots, le vampire lui décrocha un coup de poing en pleine mâchoire. La tête de l’homme vrilla sur le côté, et il mit quelques secondes à reprendre ses esprits.
— Écoute-moi bien. Vous me vouliez ? Me voilà. Maintenant, dis-moi où il est que je puisse aller m’occuper de tes potes.
— Va crever, gronda l’otage.
Demyan avisa l’autre genou et haussa un sourcil en direction de l’homme.
— Tu crèveras avant moi, sois-en certain. La seule chose que tu puisses faire, c’est de choisir si tu souhaites une mort rapide, ou une mort lente et douloureuse. Parce que crois-moi, si tu ne me donnes pas ce que j’attends de toi, elle sera très lente, et extrêmement douloureuse.
À ces mots, une lueur de détresse passa dans les yeux du prisonnier. Il semblait réaliser que le vampire était très sérieux.
— Je te laisse trois secondes.
La deuxième détonation brisa la rotule de l’homme lui arracha un cri de douleur.
— Toujours pas ?
L’homme haletait maintenant, et son visage était tordu en un rictus de souffrance atroce.
Le vampire se pencha vers lui, et sans prévenir, enfonça ses crocs dans sa gorge.
— Arrêtez ! hurla l’homme. Par pitié, arrêtez ! Je vais vous le dire.
Satisfait, Demyan se retira, et après s’être redressé, le détacha avant de balancer la chaise d’un coup de pied, laissant le membre du cercle s’écraser sur le sol.
Ce dernier tenta de ramper, mais sa tentative s’avéra vaine.
Voir son ennemi à terre, incapable de se relever, lui procura un sentiment de jouissance absolue. Ces connards allaient payer. Pour avoir enlevé Alexei. Pour avoir presque réussi à tuer Drake.
Il s’approcha de l’homme rampant pour le faire se retourner. Braquant le canon de son arme dans sa direction, il demanda calmement, non sans pouvoir effacer ce petit rictus de satisfaction de son visage.
— Je t’écoute.
— Il est enfermé dans la maison qui fait l’angle sur la dix-huitième, finit-il par avouer, les lèvres tremblantes.
— Tu vois, ce n’était pas si compliqué.
— Ils vous tueront, cracha-t-il. Tous autant que vous êtes.
Demyan devait saluer le cran de cet homme. Aux portes de la mort, il parvenait tout de même à le menacer.
— Je serai curieux de voir ça, répliqua-t-il, amusé.
— Va te faire foutre, sale monstre.
Même s’il l’ignorait, ces mots furent les derniers qu’il devait prononcer.
Sans attendre davantage, Demyan s’assit à califourchon sur lui, et, sans le lâcher du regard, colla le canon de son arme sur son front. Il sourit, un sourire sans joie, et lorsqu’il estima s’être assez délecté de la peur immense dans les yeux de son ennemi, il appuya sur la détente.
L’homme s’effondra, inerte, une flaque de sang s’élargissant autour de son cadavre.
Pour ceux que ça intéresse, une romance toute mignonne que j'ai commencé il n'y a pas longtemps...
Une semaine pour s'aimer...