Nadia974 a écrit :Merci (d'avance) pour vos réponses
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Cyberpunk
Le cas du cyberpunk m'a appris beaucoup de choses. Il questionne ce que nous appelons un genre. Par quel concours de circonstances une poignée de romans de la fin des années 80 ont-ils été baptisés un genre ? Au départ, Neuromancien, Lumière virtuelle, le Samouraï virtuel, Mona Lisa s'éclate et quatre ou cinq autres romans ..
Ressorts narratifs :
- des univers virtuels très immersifs (
cyber) devenus des hobbies courants dans un futur proche,
- dans des sociétés dystopiques. D'où
punk : il y a 40 ans, c'était l'apogée de cette panoplie vestimentaire du jeune rebelle qui voulait se la jouer anti-social.
Le mix a produit une poignée de romans remarquables avant de se tarir. Si le cyberpunk a été un genre, alors ça a été un genre mort-né.
Mais c'est là que l'histoire commence vraiment. Rebondissement, le marketing multimédia s'empare du terme dans les années 90. Le mot cyberpunk est alors instrumentalisé pour faire paraître plus profondes et vendre des oeuvres diverses en dehors de la littérature. Des BD, des jeux, des films médiocres. C'est ça qui est bien avec un genre qui n'est pas défini. Du moment qu'il y a une prise neurale ou un quartier mal famé, c'est du cyberpunk, pas vrai ? Les publicistes s'en sont donnés à coeur joie pendant quelques années et le terme est passé dans la culture ambiante. Il faut croire que ça marchait. Ça tendrait à confirmer que les gens les plus sensibles aux étiquettes de genre sont ceux qui n'en lisent pas. Ça tombe bien parce qu'ils sont très nombreux. Quoiqu'il en soit, à défaut d'être un genre, le terme cyberpunk aura fait une belle carrière dans la comm.
Questions
- À partir de quel niveau de production littéraire peut on parler de genre littéraire ?
- Faut il que le genre existe un nombre minimal d'années ?
- Doit-il englober un nombre minimal d'oeuvres ? D'auteurs ?
- Quel degré minimum de cohérence thématique et de spécificité thématique doit-il présenter ?
En ce qui me concerne, j'ai toujours considéré qu'une étiquette de genre était inutile, sauf pour donner une vague idée du bouquin dans une conversation écourtée. Mais l'étiquette cyberpunk est probablement l'étiquette la plus vide de sens et la plus inutile que je connaisse.
Des dizaines d'auteurs ont écrit un roman où on retrouve un (et un seul seul) des ingrédients du cyberpunk. Ça ne veut pas dire pour autant que le genre cyberpunk existe. De même, des milliers de romanciers ont écrit sur la thématique de la vie déshumanisante en entreprise - aliénation + formatage + cruauté - et ça n'en fait pas un genre pour autant.
Pour moi, un genre est un carrefour thématique prolifique. Si
Heroic Fantasy,
Policier,
Dystopie ou
Romance sont des étiquettes légitimes en dépit du flou à leurs frontières, c'est parce que leurs codes narratifs sont
- spécifiques
- nombreux
- présents ensemble dans des quantités d'oeuvres.
Et la poignée de véritables romans cyberpunk ? Oui, ils ont des codes narratifs spécifiques. Mais créer un micro concept de genre sur si peu de titres, c'est pas du suréquipement conceptuel ? Des sites compilent le terme cyberpunk et d'autres étiquettes douteuses du même tonneau. Ils contribuent à les répandre. Booknode accepte sans filtre les étiquettes des membres avec
278 titres cyberpunk, dont 260 n'ont aucun rapport ni de près ni de loin avec le cyberpunk. En gros, s'il y a un androïde, c'est du cyberpunk. Si c'est du futur proche, c'est du cyberpunk.
L'
article de Wikipedia, fait encore pire et classe en cyberpunk Robocop, Le cinquième Élément, Chappie, Max Headrom, Minority Report, Carbone Modifié, mais aussi Greg Bear (à cause de 'la musique du sang' qui n'a pourtant rien à voir avec le cyberpunk mais qui est souvent rattaché au genre), Brian Aldiss, Ballard, Brunner, Norman Spinrad .. Partout sur le net, chacun y va de sa liste et aucun n'a une définition du genre. Mission impossible de toutes façons vu la variété des oeuvres que tout le monde attribue à ce supposé genre indéfiniment élastique. Ce type de situation est inévitable quand les gens discutent d'une chose sans qu'aucun des intervenants n'en ait une définition. Comme les discussions sur l'intelligence ou sur les preuves de l'existence de Dieu (débats athées vs croyants). Le désir de s'exprimer court-circuite l'étape de la définition.
Je pense que c'est comme ça qu'un terme meurt et disparaît. Dépouillé de son sens, employé à tort et à travers, entraînant tellement de malentendus et de difficultés de communication qu'il finit par décourager son emploi. Ce qui justifie l'existence d'un mot, c'est son aptitude à véhiculer de façon compacte un sens qui est le même pour tout le monde. Dans ce cas, c'est un raccourci pratique, une aide précieuse à l'échange d'idées. Au contraire, quand tout le monde lui donne un sens différent, il devient une perte de temps.
Anticipation
Pendant un temps, le terme anticipation a lui aussi été une source de malentendus et de déceptions pour beaucoup de gens en quête de recommandations littéraires. Même mécanisme : un terme employé pour dire des choses différentes, avant que cette utilisation élastique ne le vide de tout sens.
- Anticipation a parfois désigné des romans de nature prospective. Un coup d'oeil sur un futur proche, à quoi notre société pourrait ressembler demain. La hard science est un genre qui se livre à cet exercice de prospective en se basant sur des percées technologiques. C'est pourquoi des romans de hard science sont parfois qualifiés de romans d'anticipation. En particulier, des romans de hard science écrits avant que le terme hard-science n'existe (par exemple Jules Verne)
- Wikipédia donne une
définition incohérente de l'anticipation. Les contributeurs de la page commencent par dire que les récits d'anticipation se déroulent dans le futur et sans avancée technologique majeure. Mais la moitié des exemples qu'ils donnent enfreignent cette définition (Terminator, 2001, Alien, Avatar, A.I., Time Out, Total Recall)
- Une
autre page wikipedia définit l'anticipation comme la SF écrite avant l'apparition du terme "Science-fiction" (1930). Cette définition non thématique revient à affirmer : "l'anticipation, c'est de la SF sous un autre nom". De plus, leurs exemples enfreignent la date limite (1930).
- Le Larousse définit un roman d'anticipation comme un roman se déroulant dans le futur. Définition sans intérêt car elle engloberait la majeure partie de la SF.
L'expression "roman d'anticipation" est tombée en désuétude et les gens qui l'emploient encore le font de façon imprévisible. Il vaut mieux s'assurer de ce qu'ils entendent par là avant de leur répondre.
Dans un monde idéal, on se contenterait d'étiquettes réellement utiles pour parler de nos lectures. Pour cela, une étiquette de genre doit recouvrir une combinaison unique et parfaitement reconnaissable de plusieurs codes narratifs (tropes), combinaison qu'on retrouve dans un grand nombre de romans. Par exemple, le terme bit lit a été inventé par l'éditeur français Bragelonne . Juste pour booster commercialement des récits basiques de nanas couchant avec/chassant des vampires-loups garous-nécromanciens-sorcières & co. Faire du neuf avec du vieux. Juste un trompe-couillon marketing qui a bien marché (du moins je l'espère pour Bragelonne) sur sa cible d'adolescentes dans les années 2000.
Les pays anglo-saxons n'ont pas de terme pour différencier le Fantastique de la Fantasy. Ils parviennent à parler de leurs lectures aussi bien que nous. Allons y mollo avec les étiquettes de sous-genres.
Tout ceci ne reflète que mon opinion et n'engage que moi. Je peux parfaitement me tromper.
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Je recherche des romans avec ces 4 qualités /
Ma présentation