Bonjour tout le monde, j'ai apprécié vous lire, car je me rend compte d'à quel point nous, lecteurs, pouvons être différent dans notre approche de la chose.
Déjà, nos critères sont différents. Mais au-delà de ça, quand on lit notamment tes messages, theyoubot, on sait qu'on ne produit pas des réponses aussi construites sur le sujet sans y avoir sérieusement réfléchit en amont. Alors que pour ma part, je ne m'étais absolument jamais penchée sur la question avant de tomber sur ce sujet

Je n'avais jamais essayé de mettre des mots sur mes critères, d'en faire une liste précise. Alors que bien entendu que j'ai des critères ! Dans une librairie, il y a bien quelque chose qui fait que je me tourne vers un livre plutôt qu'un autre ou après lecture il y a bien quelques choses qui fait que je classe en liste or ou lu aussi, même si je ne l'avais jamais verbalisé
Je vais donc m'essayer à l'exercice, votre indulgence pour ma spontanée, car je vous dis vraiment les choses comme elles me viennent à l'esprit
La première chose à laquelle je pense (mais sans pour autant que ce soit mon critère numéro 1, il ne faut pas forcément y voire un classement) c'est
le style. Ça a indéniablement de l’importance pour moi. Mais j'ai surtout envie de réagir à cela :
J'ai remarqué que l'intérêt pour le style n'est jamais motivé par le plaisir à la lecture. Il y a un intérêt spécifique pour l'écriture. C'est une relation avec la littérature qui n'est pas basée sur la simple recherche d'un divertissement.
Déjà, je trouve un peu dommage de venir "opposer" deux critères, le style d'une part, le plaisir de lecture d'autre part. Ça donne l'impression qu'ils ne peuvent être complémentaires, et aussi et surtout, qu'il faut les classer, dire que l'un est plus important que l'autre. Alors que bah... Non.
Par ailleurs, je ne suis pas forcément d'accord.
Pour ma part, cela peut être vrai lorsque je lis un classique ; il y a en tout cas des classiques qui m'ont éblouit par leur qualité d'écriture. Par exemple,
Cyrano de Bergerac est une pièce de théâtre où aussi bien en tant que lectrice que spectatrice, j'ai pu rester complètement baba devant des tournures de phrase que je trouvais sublimes.
Peut-être que c'est un mauvais exemple, car c'est aussi une pièce que je trouve distrayante, dont les thèmes et le personnage principal me touchent... Mais il y a aussi indéniablement des classiques que j'ai aimé presque uniquement pour leur style, que j'apprécie finalement pour des raisons assez "intello", et où l'intrigue, les personnages et la distractions passent complètement au second plan. Par exemple, j'ai toujours pris plaisir à lire les livres de Zola, même quand je trouvais l'intrigue pas terrible.
En revanche, je crois que ça ne me l'a fait qu'une seule fois sur un roman contemporain :
Les collines d'eucalyptus de Duong Thu Huong ; que j'ai classé en liste or presque uniquement pour son style sublime, et pas pour son intrigue que j'ai trouvé assez moyenne. Dans une moindre mesure, il y a Yasmina Khadra, qui à mon sens écrit superbement bien, mais dont je n'ai jamais été complètement séduite par les intrigues - mais je ne l'ai cependant jamais classé dans une liste or ou diamant.
Le reste du temps, quand je lis un livre contemporain, si le divertissement a une place bien plus prépondérante dans mon appréciation globale, le style conserve toujours de l'importance pour moi, mais pas de la même façon. 90% du temps, en terme de style, je suis en fait bien plus sensible aux défauts qu'aux qualités. Je n'ai pas d'exemple de livre que j'estime mal écrit que j'ai classé très haut dans ma bibliothèque (style quelconque oui, mais mal écrit non).
Par exemple, je n'apprécie pas particulièrement Amélie Nothomb, car dans ses livres que j'ai lus, il y a avait systématiquement un nombre incalculable de répétitions qui, à un moment, me crispent complètement et m'empêchent de passer un moment plaisir, agréable ou distrayant. C'est viscéral, c'est comme un acteur qui joue mal dans un film, même si le film est bon, ça gâchera forcément mon plaisir.
Autre exemple, j'ai récemment déterré de ma PAL un livre qui y traîne depuis 10 ans et qui ne m'inspirait strictement aucune confiance :
Les âmes vagabondes de Stephenie Meyer. Il m'a fallu DEUX paragraphes pour comprendre que je trouvais le style absolument nul et que ça allait gâcher ma lecture. Et ça n'a pas loupé : même si j'ai trouvé d'autres qualités au livre, je n'ai pas pu le classer ailleurs que dans ma liste lu aussi.
*** interlude ***
J'anticipe d'avance une objection, car j'ai bien vu theyoubot que tu as dis cela :
Dans ce topic, je prefère qu'on cite des choses qu'on aime. Plutôt que de l'absence de choses qu'on déteste.
Sauf que, ne le prend pas mal, mais je fais ce que je veux

Tu as créé le topic, et je t'en remercie, mais ce n'est pas le tien pour autant. A partir du moment où tu l'as mis à notre disposition, c'est le nôtre. A chacun de se l'approprier comme bon lui semble. Donc si j'ai envie de parler de ce que je n'aime pas, car j'estime que c'est un critère qui a de l'importance pour moi, et bien je le fais
*** interlude ***
Du coup,
divertissement ou pas dans mes critères ? (là encore, ce n'est pas parce que c'est le 2ème que je cite que c'est le 2ème plus important pour moi)
Je ne sais pas, car comme je viens de l'expliquer, ce n'est pas un critère indispensable pour que j'aime un livre. Alors que sur le style, on se rapproche plus de la science exacte pour moi.
Mais il est également certain que je préfère ne pas avoir un livre qui me tombe des mains d'ennui à la lecture.
Et le fait est aussi qu'il y a des livres contemporains qui allient une intrigue qui me plait et me distraie très sincèrement, et un style d'écriture qui m'éblouit. Pour citer mon dernier exemple en date,
Chanson Douce de Leïla Slimani m'a bluffé par la maîtrise de son style, mais aussi par l'audace, la qualité et le côté addictif de son intrigue. D'ailleurs, la quasi totalité des livres qui sont tout en haut de ma bibliothèque cumulent pour moi ce double critère style/distraction.
Bon, on va dire critère, mais avec pondération. Genre 2/3 pour le style, et 1/3 pour le divertissement.
Next, j'innove, car personne n'a parlé de ce critère jusqu'à présent :
la nationalité de mon auteur et/ou le lieu de l'action. (ce n'est pas parce que c'est le 3ème que je cite que blablabla)
Je suis un peu l'inverse de Manounette : sans forcément fuir les auteurs francophones, ce ne sont
généralement pas ceux qui me touchent le plus. J'ai une appétence toute particulière pour les auteurs d’Extrême-Orient, Japon en tête, mais je trouve aussi mon compte en Corée ou en Chine. Et d'une façon générale, pour les livres contemporains, je me sens plus à l'aise avec la littérature étrangère que française. Pour deux raisons principales :
- Le style toujours le style ! La mondialisation n'y fait rien, on n'écrit pas de la même manière en occident qu'en orient, au nord qu'au sud. Les langues asiatiques ne se construisent pas de la même manière que les européennes, elles permettent, je pense, une plus grande force d’évocation et une plus grande poésie. Je suis incapable de les lire en VO, mais même après le filtre de la traduction, j'y trouve une saveur et une ambiance que je ne trouve pas dans les romans européens et nord-américains.
D'ailleurs ce prisme de l'étranger déconstruit, ou au moins change la perception qu'on peut avoir de certains critères cités par d'autres sur ce sujet. Je pense notamment à la cohérence : il y a souvent plein de choses incohérentes dans les romans japonais. Des évènements fantastiques qui ne trouvent pas d'explication, par exemple. Mais de ce point de vue, ce n'est pas un défaut, c'est au contraire, je pense, un peu de ce qu'on vient chercher dans ces livres (si vous n'avez jamais appréhendé la littérature japonaise, je vous conseillerais un seul exemple extrêmement connu
Kafka sur le rivage de Haruki Murakami : si vous y voyez la moindre logique ou cohérence, téléphonez-moi)
- Le dépaysement et c'est pour ça que j’élargis au lieu de l'action. La lecture me permet très souvent de découvrir des lieux ou des cultures qui me sont étrangères. Il n'est pas rare par exemple qu'avant de partir en vacances à un endroit ou au retour de mes vacances, je me plonge dans la littérature de cet endroit. Et le dépaysement peut-être là même si l'auteur est étranger de cet endroit (Eric Faye écrit par exemple très bien sur le japon, alors qu'il est français).
Le dépaysement peut aussi être dans l'imaginaire, je rejoins un peu Syracuse sur ce point, c'est ce que je vais chercher principalement d'un livre SFFF. Sauf ce n'est pas mon genre de prédilection. J'en lis, j'aime assez la SF, mais je ne me sens pas de légitimité particulière pour débattre de ce sujet.
Bon on le compte comment ce critère ? Un ou deux ?
S'il en faut encore un, plutôt que le personnage / le héros, qui ont été cités plusieurs fois, je me dirigerais plutôt vers l'originalité... Ou même vers
l'audace. Oui, je crois que je préfère cette notion. (ce n'est pas parce que c'est le 4ème que blablabla)
C'est surement mon critère le plus impalpable et subjectif.
C'est à dire que je ne vais pas forcément rechercher qui est le premier auteur à avoir abordé tel sujet, ou à l'avoir traité de telle manière. C'est ça que j'appellerais l'originalité.
Je vais plutôt chercher l'auteur qui va nous amener là où on ne s'y attendait pas. L'auteur qui ne va pas suivre les modes, ou les schémas préétablit d'intrigue. L'auteur, qui d'un sujet, même classique, va aboutir à une conclusion ou à un traitement surprenant. C'est ça que j'appellerais l'audace.
Exemple positif : j'ai été bluffée par
La séparation de Christopher Priest, qui sur le papier cumule pourtant les thèmes sans aucune originalité : la Seconde guerre mondiale, les relations entre frères, la vie de couple,... Mais le traitement et surtout la construction hors norme de l'intrigue en fond un chef d’œuvre pour moi.
Exemple négatif : si je n'ai pas aimé
Twilight, ce n'est pas parce que les histoires de vampires ça n'a rien de nouveau et ce n'est pas original, mais c'est parce que traiter une histoire de vampires de cette façon, avec un triangle amoureux bateau et des personnages ultra stéréotypés, ça n'a aucune audace.
Quand ce n'est pas audacieux, j'ai un peu le sentiment que tout le monde perd son temps. L'auteur qui écrit un truc qui ne laissera aucune empreinte dans l'histoire de la littérature et le lecteur qui lit un truc sans saveur qu'il oubliera dans deux jours. C'est le fast-food du livre, quoi.
Je ne sais pas comment terminer mon message, je vais donc simplement remercier ceux qui l'auront lu jusqu'au bout
