Avec Arwen dans l'allée des Bungalows
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- A quoi je pensais, sérieusement ? J'aurais du être sur mes gardes, j’aurais dû m'y attendre, j'aurais même dû deviner qu'elle tramait quelque chose. C'était d'une évidence déconcertante. La vérité c'est qu'elle n'a même pas cherchée à cacher son impatience en venant vers les Bungalows à se pincer les lèvres, silencieuse, le sourire de biais. Tout en elle aurait dû me mettre en alerte, elle aurait pu porter une pancarte lumineuse "Attention blague à venir, tenez vous prêt" ça aurait fait la même chose. Le problème c'est que j'étais focalisé sur moi, comme un idiot. A avoir trop baigné dans un monde de diplomatie, j'ai perdu la main, à aucun moment je me suis dis qu'elle commencerait dès le début à jouer avec mes nerfs. Soit parce que j'avais un peu d'espoir de pouvoir souffler, de reprendre mes sourires petit à petit. Trop fatigué, je me suis dis, toujours aussi bêtement, qu'elle me laissé le bénéfice du doute. Mais non, c'est Arwen, je la connais, elle ne va pas m'épargner, elle ne va pas m'accorder un moment de répit, elle bornée, tétue, incapable de se raisonner, et ça commence dès maintenant. Bravo Arwen, belle introduction, deux minutes en ta compagnie, et tu m'as déjà prise au dépourvu. C'est presque un record. En même temps, afficher des photos d'elle absolument partout, imprimé en A5, c'est une première.
Les mains sur les hanches, elle me regarde avec un sourire rayonnant. Ses yeux illuminés par la fierté. J'hausse un sourcil à sa réplique, comprenant que c'est pour se venger qu'elle a fait ça. Avec autant de photos d'elle, c'est sur que maintenant impossible de tourner le dos et de l'ignorer. Elle est partout ou je dois être. Je vais même pas pouvoir m'allonger sur mon lit, sans être obligé de la contempler. Et m'endormir, laissons tomber, je vais forcément rêver d'elle. Elle va me regarder de ses yeux malicieux absolument tout le temps. Et après elle ose me demander si je n'aime pas la voir partout ? Entre nous, c'est se foutre de la gueule du monde. Déjà parce qu'elle est la seule dans cette foutue colonie avec qui je partage autant de choses, alors elle devrait se sentir privilégiée et s'en contenter au lieu de rappeler à mon esprit sa présence dans ma vie h24.
-Ce n'est pas tout à fait ça. Si tu penses que je vais te répondre maintenant que tu t'es affiché en A5 partout, c'est qu'il y a méprise, j'en ai assez de te voir pendant une année entière à ce tarif.
Je détourne les yeux pour soupirer bruyamment, en tentant de faire abstraction aux la petite bande qui s'est formé autour de nous. Le Bungalow de Dionysos jubile presque autant qu'Arwen, ils n'ont aucune contenance. Et ils regardent leur cheffe comme ci elle avait réussi le meilleur coup de l'année. Quant à mon Bungalow, ils s'amusent bien de me voir dans une situation délicate. Je comprend tout à fait pourquoi ils l'ont aidés, faire sortir de sa zone de confort leur propre chef, habituellement si constat, c'est sur que c'est tentant. Je ne peu pas leur en vouloir.
Décontenancé, je ne réagis pas lorsqu’elle s'approche pour me murmurer à l'oreille. J'essaie vainement de me concentrer pour garder mon calme, pour me forger un masque paisible. Mais en vérité, j'ai envie de hurler. Et ce n'est même pas par agacement, parce que c'est du jeu, elle a jouée, et elle a gagnée. C'est juste qu'elle est la, à me regarder comme ci j'étais la personne la plus importante de son existence, un mélange d'admiration et d'envie, alors que je ne peu rien lui rendre à sa juste valeur. Elle trépigne, son regard flamboyant rivés de temps à autre sur moi, en attendant patiemment mes réactions. Elle voudrait que je me fâche, que je sorte spontanément de mon territoire, abaissant les barrières. Elle veut me voir m'exprimer avec violence, envie et gratitude. Pourtant je ne fais rien de tout cela, je reste de marbre, incapable de me lâcher, en tentant vainement de lui sortir une réplique cinglante ou un sourire faussement amusé.
Je prend une bouffé d'air et j'allais lui répondre quelque chose du style: c'est bon, t'as gagnée, salut. Un truc simple, court, efficace. Et je m'en serai allé. Sauf qu'elle se détourne de moi, légèrement troublée, et je ne peu retenir mon rire cristallin de sortir. D'un coup, tout mon corps se détend, et je rigole, l'espace de quelques instants; absolument émerveillé par sa gêne.
-Sérieusement Arwen, tu viens t'afficher sur tout les murs qui entourent mon lit avec ce genre de photos (je lui tends le cliché ou elle envoie des bisous imaginaires), et c'est parce que je n'ai pas de t-shirt que les gens vont jaser. C'est toi qui devrais te tenir tranquille, pas moi.
Quelqu'un se racle la gorge, un gamin, d'à peine 14 ans, tout sourire, les cheveux en pétards, qui tend une photo d'Arwen à Arwen:
-Je peu avoir un autographe.
C'en est trop. Brume se met à grogner et se frotte à Arwen. Pour ma part, instinctivement, je prend le gamin par le col en arrière et le traîne vers son Bungalow en grommelant:
-Toi aussi t'as le balai à passer le mioche.
Une fois à l'abri, je me dirige vers mon lit ou se trouve un amas de jeunes pré-pubères qui débattent visiblement, eux aussi sur les attributs de ma camarade.
-Bon, vous avez quoi avec vos hormones aujourd'hui ? Déguerpissez d'ici, sinon je demande expressément au bungalow de Dionysos de vous prendre en otage pendant une soirée. Vous serez plus capable de mater quoique ce soit à votre réveil.
Sur mes mots, tout le monde se volatilise. Je me débarrasse de mes chaussures et de mon pantalon en toile pour l'échanger contre un jean et des baskets tandis que mon camarade de lit s'amuse avec les feuilles volantes. J'enfile un t-shirt rapidement et une fois mon arme à ma ceinture, je ressors, quelque peu calmé. Arwen m'attend, tout aussi fière qu'il y a 5 minutes.
-Alors, heureuse de ton coup bas ?, je lui lance, quelque peu arrogant.