J'avais beaucoup apprécié Princess Jellyfish, le premier manga de Akiko Higurashi à nous être parvenu en France. Si le dessin avait des faiblesses, le style graphique avait le mérite d'être personnel et, surtout, l'histoire était bien menée et intéressante. Donc, tout naturellement, quand une flopée de titres de cette mangaka hyper prolifique et à succès ont été annoncés en France à peu d'intervale, j'étais au taquet pour me les procurer.
Après avoir collecté quelques tomes, c'est sur Trait pour trait, dessine et tais-toi ! que je décide finalement de me pencher avec les trois premiers tomes. Pourquoi ? Parce que c'est un récit autobiographique où la mangaka retrace son parcours scolaire du lycée au club de dessin, en passant par les cours privés d'art, puis ses études aux beaux-arts, jusqu'à ses débuts de mangaka professionnelle. Un partage d'expérience qui a de fortes chances de trouver écho en moi puisque je fais partie des personnes qui ont fait des études mêlant art et créativité.
Le moins qu'on puisse dire en lisant ces 3 premiers tomes, c'est que l'autrice est très sévère avec la jeune fille qu'elle a été, allant jusqu'à se traiter d'idiote. Mais tout cela est fait avec une bonne dose d'autodérision qui fait sourire et parfois même rire tant ça va loin dans le ridicule (le coup de la radiesthésie pour réussir ses exams...
). Il y a beaucoup de nostalgie dans sa narration des souvenirs de cette époque et une pointe de regrets vis à vis des non-dits et des incompréhensions qui ont jalonné son parcours d'apprentissage. Notamment avec ce prof bourru aux méthodes peu orthodoxes (des coups de sabre en bambou, sérieux ?!) mais au coeur en or et à l'investissement sans faille qui l'a toujours tirée vers le haut et qu'elle considère à présent comme son mentor.
J'ai retrouvé dans ce début consacré essentiellement à sa scolarité l'assurance propre au jeune âge, qui flirte dangereusement avec l'arrogance et qui se retrouve rapidement mise à mal quand les désillusions s'enchaînent. Et des désillusions il y en aura pas mal sur le parcours de Akiko, pourtant sa prétention aura longtemps la peau dure
On a clairement envie de lui mettre des baffes parfois, pour lui remettre les idées en place ou lui faire dégonfler le melon, mais on reste tout de même dans l'indulgence de ceux qui ont été jeunes aussi et qui savent ce que c'est, comment on se sent avant d'apprendre la vie, la vraie.
Côté expérience artistique, ça a quelque chose de rassurant de savoir que tout le monde passe par les mêmes étapes de doute, d'auto-dévaluation des créations et de blocage. C'était aussi intéressant de voir comment, quelque part, la nana dévaluait les qualités nécessaires pour être dessinateur de manga. Globalement, on sent bien qu'on est encore dans cette période où le mangaka n'a pas encore le statut de "rock star" actuel qui peut gagner à millions, ce qui pousse Akiko à longtemps ne pas s'ouvrir sur son projet professionnel.
Graphiquement, j'ai trouvé ça mieux que Princess Jellyfish, mais j'ai été étonnée de retrouver des faiblesses de dessin. Comme quoi, faire les beaux arts ne fait pas tout !
En bref, une série autobiographique sans concessions, mais toujours dans l'autodérision, qui sonne juste et dont j'aurai plaisir à lire les deux derniers tomes quand ils seront parus, afin de découvrir les déboires propres à ses débuts de mangaka professionnelle.