Un Royaume à Sauver [Fantasy, Aventure, Romance]

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ChloB

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Un Royaume à Sauver [Fantasy, Aventure, Romance]

Message par ChloB »

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UN ROYAUME A SAUVER

Voilà plusieurs générations que des femmes ont réussi à prendre le contrôle du pays pour échapper à la dur vie que leurs faisaient mener les hommes au pouvoir.
Elizabeth est une jeune princesse insouciante qui profite pleinement de son statut jusqu'au jour où sa sœur, la Reine actuelle, disparaît. Elle doit alors monter sur le trône et assumer le rôle de Reine à son tour mais il semblerait que le royaume ennemi, celui des hommes, en ait décidé autrement.
Elizabeth réussira-t-elle a sauver le Royaume des femmes du pouvoir des hommes ?


SOMMAIRE : N'hésitez pas à laissez un commentaire ou à m'envoyer un message pour me donner votre avis !
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ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Chapitre 1


J'avais pris cette fâcheuse habitude de descendre tous les matins, avant le levé de la cour, dans les cachots du château pour discuter avec l'un de nos prisonniers. Si cela venait à s'apprendre nul doute qu'on me punirait durement pour ce crime mais ma curiosité avait, comme toujours, eu raison de moi. C'était la toute première fois de ma vie que je pouvais discuter avec quelqu'un qui avait vécu en dehors de nos frontières, en dehors de notre royaume. Je pouvais enfin en apprendre plus sur l'autre monde, sur comment vivaient ceux des autres royaumes.

Un garde veillait à ce que personne ne remarque mon absence et avait été gracieusement payé pour m'avertir si quiconque venait à descendre dans les cachots. J'avais toute confiance en ce garde et je savais qu'il ne me trahirait pas alors je profitais pleinement de mes conversations. Il était peut-être interdit de s'entretenir avec des prisonniers pourtant je trouvais cela enrichissant et fort divertissant.

Je devais obligatoirement porter une cape pour descendre jusqu'ici afin de camoufler mon visage à la vue de toute personne susceptible de me reconnaître. Mais une fois arrivée devant la grille de la cellule en question je retirais toujours ma capuche et m'asseyais à même le sol, une torche à la main, dans l'attente de plus d'histoires. Aujourd'hui encore ne dérogeait pas à la règle.

- Qu'allez-vous m'apprendre aujourd'hui ?

Le prisonnier ouvrit difficilement les yeux et ne put retenir un grognement. Depuis plusieurs semaines maintenant j'étais devenue son réveil et il me détestait pour cette raison. Selon lui, un prisonnier devrait au moins avoir le droit de dormir jusqu'à ce que bon lui semble. Malheureusement pour lui je ne pouvais me permettre de me promener dans ces couloirs plus tard, je risquais déjà assez gros même en venant aussi tôt.

- Tu en sais déjà beaucoup, je n'ai rien de plus à te faire savoir.

Il se retourna sur sa couchette pour me faire dos. Depuis qu'il était arrivé ici, ses cheveux et sa barbe avaient drôlement poussé, jamais je n'avais vu un homme autant négligé. Ses habits, à force de vivre avec, devenaient noirs et commençaient à sentir fort. Pourtant cela ne me dérangeait pas vraiment, cet homme savait des choses que je cherchais à connaitre depuis des années, l'occasion était trop belle pour la laisser filer.

- Vous avez dit que chez vous aussi les femmes font de la politique mais peuvent-elles devenir reines également ?

- Hum... Nous n'avons pas de monarchie mais une république... Mais oui...

- Mais alors qui est « présidente » en ce moment ?

L'homme finit enfin par se lever, comprenant que je ne comptais pas le laisser tranquille pour aujourd'hui. Il bailla, s'étira et alla se passer de l'eau sur le visage.

- En ce moment, c'est un homme qui gouverne. Il a été élu par le peuple, des femmes aussi ont voté pour lui.

- Et avant lui ?

- Nous avions un Roi au pouvoir, mais le peuple a décidé qu'il était temps de changer d'ère...

- Y a-t-il eu un jour, au moins, une femme au pouvoir ? l'interrogeai-je.

- Non mais elles sont autorisées dans la vie politique tout de même.

- Quelle différence cela fait-il entre ne pas avoir le droit de faire de la politique et de pouvoir en faire sans jamais occuper de postes importants ?

Quelques jours auparavant il m'expliquait qu'autrefois les femmes n'avaient pas le droit de faire de politique mais que maintenant elles y étaient autant intégrées que les hommes. Mais alors pourquoi n'avaient-elles jamais eu le droit de gouverner leur pays ?

- Si je ne m'abuse dans d'autres pays des femmes dirigent, enfin il me semble... Mais qu'importe, chez moi au moins on ne vous exclut pas de la vie du pays. Chez toi, les hommes sont traités comme des moins que rien. Tu dis que vous vous êtes soulevées contre la dictature que vous faisaient subir les hommes mais aujourd'hui c'est vous qui en êtes à l'origine.

- Non, nous ne faisons que leur faire payer la monnaie de leur pièce.

- Parce que les hommes qui vivent parmi vous ont connu cette époque ?

- Heu... Non, ils sont beaucoup trop jeunes.

- Et tu oses dire que nous ne sommes tous que des monstres ? N'avons-nous pas évolué de notre côté ?

Voilà pourquoi j'aimais tant discuter avec lui, cela me permettait de comprendre notre monde, notre royaume, leur royaume et ainsi juger par moi-même qui avait réellement raison. Cela me permettait de prendre du recul sur ce que nos ancêtres nous avaient légué de cette époque où le royaume était encore aux mains des hommes.

Alors que j'allais tenter de lui répondre, j'entendis un garde accourir jusqu'à moi.

- Votre Altesse ! Sa Majesté vous fait chercher, elle vous demande à son chevet !

Je me relevai prestement et dépoussiérai ma robe.

- Eh bien, il semblerait que notre discussion ne s'arrête ici pour aujourd'hui. Je vous souhaite la bonne journée, Monsieur.

Le prisonnier sourit en entendant cette appellation et me fit un signe de tête pour me rendre la pareille. Je ne devais pas perdre de temps, si la reine me demandait je ne devais pas la faire attendre.



Voilà plusieurs jours que la reine était couchée dans son lit. Les médecins disaient que le mal qu'elle avait contracté devait la quitter sans pour autant la tuer. Il n'empêche que son état empirait de jour en jour et que tout le royaume commençait à s'inquiéter du devenir de sa souveraine. Pour ma part, j'étais sûre qu'elle serait vite remise sur pieds.

La reine fit sortir tout le monde de la chambre et me garda seule à ses côtés.

- Lizzy, j'aimerai qu'à partir de ce jour tu suives les réunions diplomatiques concernant le royaume.

Elle se mit à tousser violemment en tentant de reprendre son souffle. Je pris le linge posé sur son front et le remouilla avant de le lui remettre. Elle était encore bien plus pale que la veille et sa fièvre ne semblait pas avoir diminuée. Elle transpirait toujours à grosses gouttes, même ses draps étaient trempés alors qu'ils venaient tout juste d'être changés.

- Pour quelle raison ? lui demandai-je.

- Pour apprendre, ma sœur. Je suis faible et je sens que je n'en ai plus pour très longtemps. Tu es celle qui prendra ma place si je venais à mourir. Je veux que tu sois prête.

- Ne parlez pas comme ça ! Vous êtes la reine ne l'oubliez pas. Seule Déesse peut vous reprendre si tel est son désire. Les maladies humaines ne peuvent vous prendre, c'est pour cette raison que vous êtes sur le trône aujourd'hui, parce que vous êtes toute puissante.

Je lui fis mon plus beau sourire et pris ses mains entre les miennes. Elle était peut-être dans une mauvaise passe mais je savais qu'elle finirait par s'en remettre. Elle avait toujours guéri de tout, comme la fois où elle avait chuté de cheval et s'était cassé la cheville ou encore le jour où elle s'était étouffée en mangeant un fruit. Il lui arrivait toujours un millier de choses pourtant elle finissait à chaque fois par retrouver sa fougue et sa détermination.

- Je t'en prie petite sœur, ouvre les yeux. Regarde-moi et ose me dire que tu vois sur mon visage un signe de ma guérison. Tu dois prendre conscience de ta responsabilité et te préparer à agir en tant que reine. Ce n'est pas en sortant tous les matins discrètement pour te rendre dans les cachots échanger avec un prisonnier que tu gouverneras comme une grande reine.

- Comment... Enfin comment pouvez-vous être au courant ? J'ai pris toutes les précautions possibles pour ne pas être vue !

- Lizzy... Je ne suis pas encore morte et enterrée. Ceci est encore mon château et je sais toujours tout ce qui s'y passe, qu'on le veuille ou non.

Elle tenta de me sourire mais elle ne réussit qu'à se remettre à tousser. Cette fois je pus remarquer les quelques gouttes de sang qui s'échappèrent de sa bouche. Finalement elle était peut-être vraiment bien malade pour une fois...

- Peut-être que la Déesse a besoin de moi là-haut, me dit-elle en observant à son tour les petites gouttes de sang.

Je sentis mes yeux s'humidifier. Je ne m'étais pas imaginer, ne serait-ce qu'un seul instant, devoir remplacer Margaret sur le trône et encore moins, qu'un jour, elle finirait par mourir. Il m'avait toujours paru évident que je finirais sous terre avant elle. Pourquoi le ciel en déciderait-il autrement ? Je n'étais pas faite pour devenir reine, je n'étais pas faite pour toutes ces responsabilités. J'avais toujours eu peur qu'on m'annonce un jour que c'était à mon tour de prendre le relais. Je n'en étais pas capable. Je n'avais ni l'étoffe, ni les qualités, ni l'image d'une reine.

- Ma sœur, je vous en supplie, vous ne pouvez pas me laisser toute seule ! Vous savez bien que je ne pourrais jamais diriger ce royaume. Je vais le mener à sa perte. Dans le meilleur des cas, je serais forcée d'abdiquer...

Elle serra violemment ma main ce qui me fit taire aussitôt. Je levais mes yeux suppliant vers elle et la regardais tenter d'utiliser une dernière fois sa carrure de reine.

- Tu es la personne la plus légitime que je connaisse pour monter sur ce trône. Tu as beau avoir tes défauts je suis persuadée que c'est grâce à eux que tu agiras en tant que grande reine et que le peuple t'adulera. Tu es intelligente, réfléchie, tu sais prendre ton temps pour trouver la meilleure solution mais surtout tu as un grand cœur. Avec toi à la tête du royaume, le peuple sera toujours content et vivra heureux pendant de longues années mais surtout il vivra en paix.

- Je vous en prie...

Mes larmes commencèrent à couler le long des mes joues. Où trouvait-elle la force de dire de telles choses ? J'étais sûre qu'au fond d'elle, elle n'en pensait pas la moitié pourtant, pour la survie du royaume, elle essayait de me donner confiance en moi, elle tentait de me faire croire en mes capacités pour pouvoir régner aussi bien qu'elle-même l'avait fait pendant ces quelques années. Aucun doute que Margaret resterait dans les esprits comme ayant été l'une des plus grandes reines de ce royaume malgré son court passage sur le trône.

Elle avait remporté des batailles et avait sauvé le peuple d'une grande famine et des maladies ravageuses qu'avait apporté la guerre. Elle était un cadeau de notre Déesse, un merveilleux cadeau même. De mon côté, je ne voyais pas comment je pourrais relever le niveau. Je n'avais que très peu suivit l'éducation qu'on me réservait préférant mille fois aller courir dans les jardins en compagnie de mes cousines. Je trouvais mes leçons longues et ennuyantes, je les suivais de très loin. J'avais toujours pensé que Margaret régnerait jusqu'à la fin de mes jours, elle le méritait.

Moi, on ne m'avait pas vraiment prédestinée à monter sur le trône. Certes, s'il venait à arriver quoi que ce soit à la reine, comme à cet instant, j'étais la première dans la liste de succession au trône mais il n'empêche que très jeune Mère fit comprendre à mes professeurs qu'il ne servait à rien de forcer avec moi. Margaret était bien plus importante à leurs yeux parce qu'elle était assurée de devoir prendre la relève un jour alors que moi, les chances étaient infimes. Et pourtant, nous y étions presque.

- Comment voulez-vous que je gouverne ? Je ne sais même pas quel rôle je dois avoir...

- Tu seras épaulée par le Conseil et puis en suivant les réunions sur la géopolitique tu comprendras très vite ce à quoi consistera ta tâche. Je ne te dicterai pas ta conduite, en tant que reine tu devras suivre ta propre voie et je suis certaine que tu choisiras la bonne.

Comment faisait-elle pour paraître si assurée ? J'étais certaine de mener le royaume à sa perte pourtant elle continuait de croire en moi. C'était peine perdue mais je la trouvais remarquable. Nous perdions incontestablement une grande reine.


La suite...


***


Cela fait des années que je n'ai rien posté sur Booknode alors j'espère que ça ressemble à quelque chose ! Je tiens à préciser que tout ceci est fictif, je n'ai pas prétention à vouloir retracer une quelconque réalité historique :D J'espère en tout cas que ce premier chapitre vous a donné envie d'en voir plus ou du moins ne vous a pas trop brûlé les yeux... Je suis preneuse de tous les conseils/avis que vous pourrez me donner, ça m'intéresse vraiment alors n'hésitez pas !
D'ailleurs est-ce que la longueur du chapitre vous convient ? Je peux m'adapter et faire plus long/court selon vos retours ;)
Merci par avance pour tout et surtout : bonne lecture !

PS : Dernière question et j'arrête de vous embêter promis ! Ca vous intéresse que je vous mette pour chaque chapitre une musique de fond à écouter pour vous mettre dans l'ambiance ? J'écris souvent en écoutant des musiques d'ambiance donc si jamais ça vous intéresse, laissez un petit message :D
Dernière modification par ChloB le jeu. 11 août, 2022 10:08 pm, modifié 2 fois.
ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Chapitre 2


Finalement elle finit par s'assoupir et je dus me résoudre à quitter la chambre royale... Celle que j'occuperai peut-être bientôt. Le Conseil m'attendait derrière les portes de la chambre, on me sollicitait déjà pour prendre part à une réunion. Bien que je mourrais d'envie d'aller prendre l'air, de partir me promener à cheval pour me changer les idées je dus tout de même accepter de m'y rendre. Je ne pouvais rien faire face à la volonté de la reine.

Le Conseil était constitué uniquement de femmes, les hommes ayants été bannis du pouvoir après la Guerre de Libération plusieurs décennies plus tôt. On disait que le royaume ne s'était jamais aussi bien porté que depuis qu'il était dirigé par des femmes. Pour ma part, moi qui n'avais jamais connu d'homme au pouvoir ni dans n'importe quel rôle un tant soit peu important, je me demandais si le fait de les avoir bannis de tous ces postes était une bonne chose. Nous n'avions qu'une vision féminine des choses et jamais nous n'avions l'occasion d'avoir un point de vue masculin.

Par exemple au château, les hommes étaient autorisés seulement pour les tâches les plus ingrates ou bien pour servir dans la garde mais une fois encore juste pour des postes de basse échelle. Pour avoir un poste important il fallait impérativement être une femme soi-disant pour une question de sécurité. J'avais souvent émis la remarque auprès de Margaret sur le fait qu'en agissant de la sorte nous ne faisions que répéter le comportement des hommes mais elle m'avait fait comprendre que ce genre de remarques n'étaient pas tolérables dans notre royaume et encore moins venant de la sœur de la reine.

Pourtant je ne pouvais m'enlever cette pensée de la tête. Et si nous commettions une grave erreur en refusant aux hommes une place digne de ce nom au sein du royaume ? Après tout ils avaient eux aussi une place importante à y jouer, non ? Nous ne pouvions les bannir définitivement pour la simple et bonne raison que sans eux nous ne pouvions mettre au monde de nouvelles générations alors pourquoi les négliger à ce point si leur présence était d'une si grande importance ? C'était en parti pour rechercher des réponses à toutes ces questions que tous les matins je prenais la route des cachots, j'avais l'espoir qu'en comprenant les hommes nous pourrions trouver un terrain d'entente et peut-être même mettre fin à la guerre.

Mais le Conseil, ainsi que tout le royaume, n'étaient pas disposés à répondre à ma requête. Pour eux, les hommes représentaient une menace qu'il fallait à tout prix contrôler. Mais n'était-ce pas en leur donnant tant d'importance dans notre peur que nous les rendions plus forts ? Sur ce point également le Conseil ne voulait rien savoir.

Finalement la réunion ne se déroula pas comme je l'aurais pensé. Cela ne fût pas si ennuyant et on me sollicita plusieurs fois ce qui me força à m'intéresser au plus près des sujets abordés. La Première Ministre souhaitait que nous « interrogions » au mieux les derniers prisonniers fait sur nos terres. Bien entendu elle sous-entendait par-là d'utiliser la torture.

- Nous devons absolument savoir pour quelle raison ces ennemis se sont introduits dans le royaume. S'ils cherchent à faire du repérage pour faire passer des troupes sur nos terres nous devons contre-attaquer !

La Première Ministre me paraissait bien remontée contre le pays voisin et l'idée de déclencher une bataille alors que la reine était mourante me paraissait des plus grotesques. Je pris donc la parole :

- Je ne pense pas que nous montrer hostiles face à l'ennemi nous sera bénéfique. J'ai déjà échangé avec l'un de ces prisonniers et je pense que la discussion, d'humain à humain, peut déjà nous permettre d'en apprendre plus sur leurs intentions. Si vraiment ils cherchent à préparer une bataille alors nous nous préparerons mais agir en se basant uniquement sur des soupçons me parait dangereux. Dois-je vous rappeler que la reine n'est pas en état de lutter sur deux fronts ?

Ma déclaration posa un silence autour de la table pendant quelques instants. Tout le monde prenait le temps de réfléchir et de peser le pour et le contre. Je pus apercevoir le sourire de Dame Laster, une doyenne de notre royaume. Je la connaissais depuis toute petite. Après la mort de Mère elle avait pris soin de nous et avait aidé Margaret à gouverner le royaume durant les premières années de son règne malgré l'état dans lequel elle héritait de ces terres. En dépit de son âge avancé aujourd'hui, elle siégeait toujours au Conseil et était toujours porteuse de sagesse lors de grandes décisions.

Très vite la Première Ministre reprit de son caractère :

- Si nous laissons cet acte impuni, nous laissons le court de la guerre aller en notre défaveur. Les hommes tenteront une fois de plus de nous réduire en esclaves et Déesse sait que je ne souhaite cela à aucune d'entre nous.

- Mais nous sommes encore affaiblies par la précédente guerre, nous en payons encore les conséquences, déclara Lady Burton . Je pense que Son Altesse a raison sur ce point, ne tentons pas d'aggraver la situation, surtout tant que Sa Majesté n'est pas encore rétablie.

Lady Burton siégeait également au Conseil. Son rôle principal était de s'occuper du bon fonctionnement des caisses du royaume. Elle gérait les dépenses occasionnées par la guerre mais également les rentrées que procuraient les impôts. La partie commerce étant assurée par la Première Ministre, le travail de Lady Burton était à la fois très important et très surveillé. L'équilibre interne du royaume reposait en quelques sortes sur le bon fonctionnement de leur travail.

La Première Ministre n'approuvait pas l'idée de Lady Burton, elle voulait à tout prix nous éviter de passer pour des faibles auprès des hommes du pays voisin mais nous n'avions pas le choix. Déclencher une bataille tout de suite nous mènerait à notre perte et nul besoin de siéger au Conseil pour savoir que notre royaume ne roulait plus sur l'or.

A l'unanimité nous votions pour la méthode pacifique auprès des prisonniers mais en envoyant tout de même une ou deux espionnes aux frontières, s'assurer que personne ne tentait d'y faire passer discrètement une armée.

- Très bien et qui se chargera des interrogatoires ? demanda la Première Ministre.

- Moi, répondis-je en me levant.

Toutes les personnes présentes firent de grands yeux et la Marquise de Beaulieu s'indigna de cette proposition décrétant que ses troupes pouvaient tout aussi bien s'en charger. Margaret n'étant pas une reine de guerre, elle avait placé le commandement des troupes à la Marquise de Beaulieu qui était issue d'une grande lignée d'officiers de guerre. Sa place au Conseil était incontestable et sa stratégie militaire incomparable. Néanmoins, je ne cédais pas.

- Je vous l'ai déjà dit, je suis rentrée en contact avec l'un de ces prisonniers, je pense pouvoir acquérir sa confiance et être ainsi la mieux placée pour tenter d'en apprendre plus sur nos ennemis.

- C'est trop dangereux ! s'offusqua la Marquise en tapant du poing sur la table. Je m'oppose formellement à cette idée.

- Pourtant je ne vous en laisse pas le choix. En tant que princesse de ce royaume et première prétendante au trône ceci n'est pas contestable, dis-je avant de me rasseoir calmement sur mon siège tout en gardant un sourire satisfait sur mon visage. De plus, Sa Majesté m'a personnellement demandé de trouver par moi-même quel devait être mon rôle et je pense que cela pourra me faire un très bon entrainement.

Finalement après cinq minutes de protestations, toutes ne purent que se résoudre à accepter cette condition. Le reste de la réunion fut moins passionnant mais j'y pris tout de même goût et je pris part à plusieurs votes concernant le peuple, les impôts, de nouvelles lois ou réformes et bien d'autres.

Le soir venu on me fit retourner auprès de la reine. Une fois encore elle fit vider la pièce pour nous laisser un peu d'intimité et commença aussitôt par me féliciter.

- Dame Laster est venue me faire un compte-rendu de la réunion et je tiens à te dire que je suis fière de toi. Elle m'a dit que tu avais pris part à chaque discussion et que tu avais su faire imposer ton autorité sur le Conseil. Toutefois je me joins à elles pour te mettre en garde quant à cette « mission ». Les hommes sont des manipulateurs et je refuse que tu mettes ta vie en danger pour eux. J'accepte que tu fasses tes interrogatoires si en contrepartie tu acceptes qu'une autre personne puisse y assister. A partir de ce jour tu ne devras plus descendre sans mon autorisation et sans être accompagnée, est-ce clair ?

- Oui, Votre Majesté, même si je pense que cela est totalement ridicule. Pour obtenir sa confiance il va me falloir du temps.

- Et nous n'avons pas ce temps. Si une nouvelle bataille se prépare réellement je te laisse moins d'un mois pour récolter toutes les informations nécessaires à notre victoire, auquel cas nous nous verrons dans l'obligation d'utiliser la manière forte pour arriver à nos fins.

Je vis ses yeux commencer à rouler en arrière et je compris que Margaret était à bout de force. Je retirai délicatement l'oreiller qu'on avait fait placer sous son dos pour la maintenir assise pendant notre échange et l'aidai à se rallonger sous ses draps.

- Si tel est votre désir ma reine alors je me plierai à votre volonté. Reposez-vous ma sœur, votre guérison doit se passer dans les meilleures conditions possibles. Je reviendrai vous voir plus tard.

Je déposai un baiser sur son front puis quittai la pièce pour la laisser dormir. Son état c'était encore dégradé en l'espace d'une demi-journée. Un miracle aurait été franchement le bienvenu.

*


La suite...


***


Je vous poste un deuxième chapitre dans la foulée pour faire un plus large avis sur ce début d'histoire ! J'ai hâte de lire vos retours en espérant sincèrement que cela vous donne envie de lire la suite :D
Dernière modification par ChloB le ven. 19 août, 2022 4:58 pm, modifié 2 fois.
petite_larme_bleue

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par petite_larme_bleue »

Salut,

Alors, je ne pense pas être en capacité de donner un avis aussi complet que certain, mais je vais faire de mon mieux car repérer les fautes d'orthographes, donner des conseils sur le style, etc, ce n'est pas trop mon fort. Alors bon, voici mon avis de lectrice, très premier degré... :D

Pour commencer, je trouve le contexte intéressant et assez intrigant. Je suppose que les informations arriveront au fur et à mesure de la lecture mais c'est vrai que cela donne envie d'en savoir plus. Déjà, je me demandais : cela se déroule-t-il dans le passé ? Le futur ? Est-ce que c'est une uchronie ? Une dystopie ? A moins, que cela ne se déroule tout simplement pas dans notre réalité ? Bref, j'ai hâte d'en apprendre plus. D'autant plus que le monde que tu as créé soulève plein de questions très intéressantes.

Je trouve que ce que tu donnes à voir des personnages est plutôt attrayant et promet de s'attacher aux personnages.
Est-ce que je commence déjà à avoir de l'affection pour l'héroïne principale ? Peut-être bien oui. :lol: En fait, j'apprécie sa curiosité et le fait qu'elle remette en cause le royaume dans lequel elle vit. J'ai bien l'impression qu'elle a du caractère et, ça, c'est vraiment appréciable. Je redoute la mort de sa sœur Margaret qui a l'air d'être quelqu'un de très sage et qui visiblement est née pour être Reine.

Concernant le prisonnier, je suppose qu'il aura un rôle plutôt important à jouer et j'ai hâte d'en savoir plus sur lui. Lui même semble très attaché à ses idées et prêt à les défendre. Espérons qu'Elizabeth et lui-même apprendront tout les deux l'un de l'autre.

Toute la partie sur la politique avec le Conseil était vraiment sympa. Ça permet de bien montrer les enjeux et l'état dans lequel se trouve le Royaume. Elizabeth en plus a pu s'affirmer ce qui semble plutôt prometteur.

Concernant la longueur des chapitres, je trouve ça personnellement très bien. Évidemment on voudrait, déraisonnablement, que les chapitres soient plus longs mais objectivement je trouve la longueur parfaite. Et pour la musique ça pourrait être sympa, surtout si tu as écris les chapitres avec ces musiques en fond. Ça permettrai d'enrichir l'expérience de lecture et de se mettre dans l'ambiance dans laquelle tu les as écrit ! :)

Sur ce, je n'ai que trois mots à dire : vivement la suite ! :mrgreen:
ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Avant toute chose merci infiniment pour ton message ! Ton avis est vraiment très intéressant et je suis très heureuse de voir que l'histoire ta plait et que tu as envie de découvrir la suite ! :D

Comme tu peux t'en douter je ne vais pas répondre à toutes tes interrogations, je ne voudrais pas te spoiler l'histoire :lol: Cependant j'espère que la suite pourra, au moment venu, répondre à tes interrogations et n'hésite à mentionner des points d'ombres qui persisteraient et pourrait gâcher la lecture !
Je crois quand même pouvoir te répondre sur un point, c'est vrai que je devrais peut-être le préciser dans la présentation, l'histoire se passe dans un monde fictif mais semblable au notre à la différence que cela se passe dans une époque plus ancienne. Je ne rajoute rien de plus, par peur de trop en dire :?
petite_larme_bleue a écrit : lun. 15 août, 2022 12:16 am Toute la partie sur la politique avec le Conseil était vraiment sympa. Ça permet de bien montrer les enjeux et l'état dans lequel se trouve le Royaume. Elizabeth en plus a pu s'affirmer ce qui semble plutôt prometteur.
Je suis vraiment contente que cette partie t'ait plu. J'avais peur que ça ne soit pas très agréable à lire et un peu brouillon, donc merci beaucoup pour ton retour !
petite_larme_bleue a écrit : lun. 15 août, 2022 12:16 am Concernant la longueur des chapitres, je trouve ça personnellement très bien. Évidemment on voudrait, déraisonnablement, que les chapitres soient plus longs mais objectivement je trouve la longueur parfaite. Et pour la musique ça pourrait être sympa, surtout si tu as écris les chapitres avec ces musiques en fond. Ça permettrai d'enrichir l'expérience de lecture et de se mettre dans l'ambiance dans laquelle tu les as écrit ! :)
Parfait pour la longueur des chapitres ! Je comprends c'est frustrant de ne pas pouvoir tout lire d'un coup mais j'essayerais d'être la plus régulière possible pour que l'attente ne soit pas trop longue, promis !
petite_larme_bleue a écrit : lun. 15 août, 2022 12:16 am Sur ce, je n'ai que trois mots à dire : vivement la suite ! :mrgreen:
Merci infiniment pour tout ! Ton message me fait vraiment plaisir et j'ai hâte de lire ton avis pour la suite de l'histoire !
Est-ce que tu veux que je te prévienne quand je poste la suite ?
ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Chapitre 3


Mon réveil ne fut pas aussi doux que d'habitude. A peine mes yeux s'étaient-ils ouverts qu'on me demanda de me rendre dans les appartements de la reine, le Conseil m'y attendait. Je ne pris donc pas la peine de me vêtir en bonne et due forme, si le Conseil m'attendait de sitôt cela ne pouvait être que pour m'annoncer une grave nouvelle. Mes dames de compagnie ne savaient rien de ce qui se passait au château, elles m'avaient averti que tout le monde s'agitait partout et que tout le monde semblait paniqué mais elles ne pouvaient m'en dire plus.

A mon arrivée, Dame Laster m'accueillit aussitôt. Elle avait l'air tout aussi paniqué que le reste de la cour.

- Ma chère enfant, il faut que vous gardiez votre calme...

Elle n'eut pas le temps de m'en dire davantage, la Première Ministre fit éruption et me demanda dans la chambre de la reine. Je m'attendais à y voir reposer le corps sans vie de Margaret, un corps froid et figé par la douleur de sa mort mais il n'en était rien. Le lit de la reine était vide.

- Votre Altesse, le lit de Sa Majesté a été retrouvé vide ce matin. Les gardes postés devant la porte ne l'ont point vu sortir et personne à la cour n'a revu la reine depuis que celle-ci est officiellement tombée malade...

- Où voulez-vous en venir Madame la Ministre ? l'interrogeai-je inquiète de sa réponse.

Elle prit une forte inspiration et ferma quelques instants les yeux afin de reprendre ses esprits. Jamais je n'avais vu cette femme perdre son mythique masque de marbre, c'était même d'ailleurs pour sa sagesse et son sang-froid que la reine l'avait nommé Première Ministre du royaume.

- La reine a disparu... Nous l'avons perdu. Personne ne sait où elle se trouve, ni même si elle est en danger ou si l'un de nos ennemis a réussi à la capturer pendant la nuit. Elle est introuvable.

Ma respiration se bloqua pendant un court instant mais assez pour me faire chanceler.

Ma tête me tournait et les mots de la Première Ministre résonnaient en boucle dans ma tête. La reine, ma sœur, avait disparu... Volatilisée, perdue... La reine.

Comment est-ce possible ?

- Hier encore elle...elle était mourante, comment une telle chose a pu se produire sans que personne ne s'en rende compte ? dis-je d'une voix tremblante.

- Nous ne le savons, Votre Majesté, mais la Marquise de Beaulieu a déjà envoyé ses troupes sillonner le royaume...

- « Votre Majesté » ? m'offusquai-je.

- Oui Madame, en l'absence de votre sœur sur le trône vous êtes celle nommée pour prendre sa place. En l'absence de descendance, la reine Margaret a fait de vous son héritière et aujourd'hui vous êtes la seule à pouvoir gouverner.

Pour le coup je dus réellement m'asseoir pour ne pas tomber malgré les mains que m'offrait Dame Cécile pour me soutenir. Mon plus grand cauchemar devenait réalité, on me plaçait à la tête du royaume, on faisait de moi la reine... Tout ce que j'avais toujours redouté arrivait enfin.

Toutes les personnes présentes dans la pièce s'inclinèrent alors devant moi. La peur redoubla d'intensité à l'intérieur de moi et je sentis mes mains et mes jambes trembler.

- Majesté, quels sont vos ordres ? m'interrogea Lady Burton.

Mes ordres ? Que pouvais-je bien ordonner dans une telle situation ? Des recherches, des enquêtes, des espionnes, des rondes, des fouilles... Je ne savais par où commencer. Une phrase de la Première Ministre me revint alors en tête. Elle avait exprimé l'hypothèse que cela pouvait être un coup de l'ennemi. Si tel était le cas, nous nous devions d'agir et vite pour pouvoir riposter au mieux contre notre assaillant.

- Madame la Première Ministre, je veux que chaque domestique soit interrogé, qu'on sache où chacun était et ce qu'il faisait avec une preuve de son activité. Que la Marquise de Beaulieu s'assure également qu'il n'y a pas eu de traitre parmi ses rangs. Quant à moi, je vais de ce pas commencer l'interrogatoire avec les derniers prisonniers arrêtés sur nos terres pour savoir si l'ennemi complote contre nous et si Margaret n'a pas été capturée par ces brutes.

Dame Laster me raccompagna jusqu'à ma chambre pendant que tous les autres se mettaient au travail. Son soutient m'était nécessaire et je voulais m'assurer d'avoir pris les bonnes décisions. Pour la première fois de ma vie tout le monde attendait de moi que je les guide et que je leur dise que faire dans une telle situation or je me retrouvais dans la même impasse qu'eux. Jamais on ne m'avait appris comment devenir reine ni comment savoir quoi faire lorsqu'une reine venait à disparaitre sans laisser de trace.

- Vous avez agi le plus dignement possible, même Margaret n'aurait su faire mieux.

- J'en doute fort, Margaret savait toujours tout, elle n'aurait pas eu besoin de faire des recherches pour savoir où trouver la reine disparue, elle l'aurait su d'elle-même.

- Elle l'aurait su avant même que la personne ne disparaisse.

Je ne pus me retenir de sourire. Dame Laster avait raison, Margaret savait toujours tout avant tout le monde, cela n'aurait même pas été étonnant qu'elle sache des choses avant même qu'elles ne se produisent. Mais alors pourquoi avait-elle disparu ? N'avait-elle pas pu prévoir sa propre disparition ?

Une fois de retour dans mes appartements, les pages de chambre se dépêchèrent de m'habiller et de me coiffer correctement pour que je puisse commencer au plus vite mon interrogatoire. Je ne perdis pas une seconde. Je faisais annuler le petit déjeuné et descendis directement dans les cachots suivis par deux gardes qui avaient l'obligation de m'accompagner, comme l'avait souhaité Margaret. Arrivée devant la cellule de l'homme je constatais avec étonnement que ce dernier était, pour une fois, déjà levé.

- Toutes mes condoléances Madame, m'accueillit-il.

- Pour ? m'étonnai-je.

- Le bruit court que la reine est morte durant la nuit, étant votre sœur je suppose que cela doit fortement vous affecter...

Je ne supportais pas la présence des gardes à mes côtés. La conversation que je menais avec l'homme n'était ni naturelle ni sincère, je ne pourrais pas obtenir d'information de sa part en restant dans ces conditions.

- Gardes, qui vous a donné l'ordre de rester ici ? leur demandai-je.

- La reine, Majesté.

- Et qui est la reine ?

Je vis l'incompréhension se former sur leur visage, le trouble pouvait se lire dans leurs yeux. La reine avait changé et les ordres n'étaient plus les mêmes pourtant Margaret avait « simplement » disparu, elle n'était pas forcément morte, ils ne savaient donc à qui ils devaient obéir. M'écouter ou suivre les ordres de la reine Margaret ? L'homme et la femme se dévisagèrent un long moment sans savoir quoi faire. Je pris les devants pour ne pas perdre plus de temps, la vie de ma sœur était peut-être en jeu après tout.

- Voici les ordres de votre reine, remontez immédiatement à l'étage et continuez les fouilles dans le château. Je veux que chaque pièce soit inspectée minutieusement. Si vous trouvez quoi que ce soit qui puisse nous être utile pour retrouver Margaret je veux en être aussitôt informée. Est-ce clair ?

- Oui, Votre Majesté.

Ils s'inclinèrent puis se dépêchèrent de remonter. Une fois seule avec l'homme je lâchai un long soupire. Je n'avais pas l'habitude de devoir me montrer froide et supérieur avec tout le monde. Devoir donner des ordres, me montrer digne de ma place et consciente de ma place était bien plus compliqué que je ne l'imaginais. Le prisonnier rit doucement en me voyant si tracassée.

- Le relais est dur à prendre ?

- A vrai dire c'est plutôt de devoir gérer cette situation qui est dur car comme vous avez dû le comprendre ma sœur n'est pas morte, elle a... disparu.

- Comment est-ce possible ?

- Eh bien, là est toute la question. Il semblerait que par miracle elle est guérie et se soit volatilisée.

Il me dévisagea pendant quelques instants.

- Tu n'y crois pas.

- En effet. Vous savez qu'on pourrait vous faire tuer pour me manquer de respect ?

- Te manquer de respect ? dit-il avec un faux air d'innocent.

- Je suis devenue reine en l'absence de ma sœur.

Il se leva de sa paillasse et vint s'incliner devant moi de manière très exagérée.

- Veuillez m'excuser Votre Divine Majesté, mes manières de paysan ont eu raison de moi je ne voulais point vous offenser.

Je le regardais en souriant d'exaspération. Les hommes étaient des êtres têtus et méprisables sans nul doute mais celui- là avait quelque chose de particulier, il paraissait si fatigué et si lassé de la vie qu'à première vue il semblait faible et âgé. Mais sous sa barbe et son visage épuisé se cachait un homme d'une trentaine d'années tout au plus et encore plein de ressources dans sa tête.

Mais je ne devais pas m'égarer, ces enfantillages ne m'aideraient pas à savoir où était ma sœur ni à la ramener ici. Je devais en savoir plus sur notre ennemi et vite.

- Ecoutez, je ne suis pas venue ici simplement par recherche de distraction. J'ai besoin de certaines informations et j'espérais...

- Que je pourrais te les fournir. Je pensais avoir été clair pourtant en te disant que cela faisait très longtemps que je n'avais pas mis les pieds dans mon pays, je ne pense pas pouvoir t'aider.

- Mais pourtant vous savez beaucoup de choses, vous devez bien savoir s'il prépare une attaque contre nous.

Son visage avait retrouvé sa lassitude et avait même prit une teinte de noirceur que je ne lui connaissais pas. Il n'avait jamais voulu me dire pour quelle raison exactement il avait dû quitter son royaume et refusait à chaque fois d'aborder ce sujet. Au début j'avais cru qu'il souhaitait simplement cacher la vraie nature de son séjour chez nous pour éventuellement cacher une certaine mission que lui aurait confier son « président » mais maintenant, avec les semaines, j'avais du mal à voir en lui un ennemi potentiellement dangereux au service d'un quelconque gouvernement.

- Je vous en prie ne m'obligez pas à devoir en venir aux menaces, je ne souhaite pas vous faire de mal mais je dois absolument retrouver la reine, elle est mourante et qui sait dans quel état elle doit être en ce moment.

- Elle doit certainement être déjà morte vu comment tu parles d'elle, murmura-t-il.

Je ne pouvais cacher ma déception. Cela faisait des semaines que lui et moi avions l'habitude d'échanger sur un bon nombre de sujets divers et variés et le jour où j'avais le plus besoin de ses précieuses informations il refusait de coopérer. Je ne niais pas le fait que je ressentais un certain respect envers cet homme malgré le fait qu'il nous vienne tout droit du royaume ennemi et qu'il ait été capturé pour vol ainsi que pour non-autorisation de circulation dans notre royaume. Il n'avait jamais rien tenté de mal à notre égard et n'avait jamais manqué de respect ne serait-ce qu'aux gardes. J'étais persuadée qu'avec un peu de temps nous pourrions lui accorder notre confiance et lui permettre de vivre avec nous et peut-être même le faire travailler pour nous. J'avais de grands espoirs quant à ce que nous pourrions faire uni et j'espérais que cette mission pourrait le montrer au reste de la cour.

- Comment vous appelez-vous ? lui demandais-je des semaines après notre première rencontre.

- Henri et vous vous nommez Elizabeth, Princesse Elizabeth... Pardon Reine Elizabeth, sœur cadette de la reine Margaret et première prétendante au trône ainsi que reine en l'absence d'héritière de la part de votre sœur. Ai-je oublié quelque chose ?

- Heu... Non, vous êtes bien renseigné je dois dire que cela m'étonne même. De mon côté je ne sais rien de vous mise à part ce que vous avez accepté de me dire mais je suppose que vous devez avoir une famille qui vous attend quelque part.

- Non. Personne ne m'attend de là où je viens.

- Mais vous ne souhaitez pas retrouver votre liberté ? Ecoutez si vous m'aider à retrouver ma sœur et à en apprendre plus sur les intentions de notre ennemi je peux vous faire libérer et je peux même vous donnez un certain statut, vous ne manquerez de rien et vivrez convenablement pour le restant de votre vie. N'était-ce pas ce que vous étiez venu chercher chez nous ? Eh bien je vous l'offre à cette condition...

- Garde tes titres et tes honneurs, ce n'est pas ce que je cherche.

- Alors que voulez-vous ? Demandez-moi n'importe quoi et je vous l'offrrirai.

- Je souhaite simplement être oublié...

Il avait dit cette dernière phrase en chuchotant comme si elle cachait un bon nombre de sous-entendus que je ne pouvais comprendre. Son passé devait être très douloureux pour souhaiter une telle chose et alors je me rendis compte que cela, je ne pouvais le lui offrir. S'il nous aidait à retrouver la reine il deviendrait célèbre dans notre royaume et il était évident qu'on lui accorderait beaucoup de choses mais certainement pas l'oubli. Jamais le royaume ne voudrait oublier celui qui lui avait rendu sa reine.

Je ne savais que lui répondre ni comment arriver à mes fins, certainement que Margaret aurait su comment gérer une telle requête mais pour ma part il me semblait que cela était impossible. Et puis je ne connaissais même pas l'histoire de cet homme comment pouvais-je alors lui venir en aide ? Et malheureusement je n'avais pas non plus assez de temps pour faire une biographie sur lui.

- Je vous en supplie Henri, j'ai besoin de votre aide. Elle ne peut être partie d'elle-même et je le sens au fond de moi qu'elle est en danger, j'ai réellement besoin de vous.

- Et je ne peux rien pour toi.

A bout de patience je poussai un hurlement de frustration et donnai un coup contre la grille du cachot. Il ne pouvait me rabrouer de la sorte et après tout je commandais ce royaume en l'absence de ma sœur et il était sur mes terres, il me devait obéissance comme chacun de mes sujets.

- C'est un ordre !

- Parce que tu penses avoir ce pouvoir là sur moi ? Je ne suis pas de ce royaume, j'obéis à la loi de mon pays.

Je décidais de partir maintenant avant de perdre plus patience. J'étais écœurée par ce manque d'humanisme, ne voyait-il pas que ma sœur risquait de mourir à tout instant ? Furieuse je remontais prestement les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée. Je devais savoir si les recherche à travers le royaume donnait ne serait-ce qu'un début de piste et je devais également convoquer les quatre duchesses qui contrôlaient les terres du royaume. Puisque en effet le royaume était divisé en quatre parties. Le Nord, le Sud, l'Ouest et l'Est. Certes les noms n'étaient pas forcément très originaux mais en instaurant une telle division cela permettait de satisfaire au mieux le peuple. Lors des regroupements annuels les duchesses nous faisaient part des choses qui devaient être changées ou améliorées selon leur territoire et ainsi nous pouvions agir de la meilleure des manières pour le peuple.

Je me rendis dans le cabinet de la reine pour commencer à rédiger des lettres. Je devais faire venir les duchesses au plus vite pour que nous puissions agir aussi rapidement que possible. Dans mes lettres je leur faisais part de la situation actuelle, leur expliquais la disparition de la reine, le début de nos recherches et leur demandais de venir à la cour dès la réception de ce message pour pouvoir préparer un plan d'action. Je les mettais également en garde contre une possible attaque de l'ennemi, non pas pour les inquiéter mais pour qu'elles se tiennent prêtes en cas de déclaration de guerre de la part du royaume voisin. Je fis ensuite venir ma messagère et lui donna l'un de mes chevaux de mon écurie personnelle, l'un des plus rapides, et lui demanda de livrer ces messages au plus vite en lui faisant comprendre que l'avenir du royaume dépendait de la rapidité de livraison. Elle partit aussitôt sans demander son reste.

Je reçus également une lettre de la part de ma cousine qui me faisait part de ses inquiétudes et m'annonçait qu'elle était en chemin pour venir me soutenir dans cette épreuve. La Princesse Marie était la cousine dont nous étions les plus proches ma sœur et moi, cela ne m'étonnait pas d'apprendre qu'elle souhaitait être à mes côtés et comme à chaque fois qu'elle faisait quelque chose pour nous je ne pouvais que l'en remercier.

Durant l'après-midi, je décidais de passer du temps dans la chambre de ma sœur. Peut-être avait-elle laissé un indice quelque part, un message qu'elle aurait pu recevoir, des menaces venant de l'ennemi ou ne serait-ce qu'un morceau de papier qu'elle aurait écrit avant son départ m'expliquant la situation ou du moins m'indiquant une adresse pour la retrouver. Elle qui savait toujours tout devait forcément savoir que quelque chose allait se produire malgré le fait qu'elle soit faible, malade et au bord de la mort. Margaret ne laissait jamais aucun détail lui échapper même mourante, j'étais persuadée que ses espionnes lui avaient annoncé que quelque chose se préparait.

Cela me fit alors réaliser que nous n'avions pas interrogé ses espionnes. Je me tapai le front du plat de la main de ne pas avoir pensé à commencer par cela. Il semblait pourtant que c'était le plus important puisque c'est elles qui connaissaient chaque menace qui pesait sur la reine. J'avais encore beaucoup de choses à apprendre avant de devenir une vraie reine... Pour l'avenir du royaume il valait mieux que ma sœur soit vite retrouvée.

Je me rendis dans les couloirs dans l'espoir d'y croiser quelqu'un du Conseil et je fus pour une fois heureuse de tomber sur la Ministre. Son si dur visage paraissait inquiet aujourd'hui et cela me fit de la peine pour elle car il était vrai que ma sœur et la Ministre étaient de très proches amies en dehors de leurs obligations royales. La disparition de ma sœur devait doublement l'attrister.

- Madame la Ministre, je vous cherchais.

- Que puis-je faire pour vous Majesté ? dit-elle en s'inclinant devant moi.

- Où sont les espionnes de ma sœur ? J'aimerais les interroger pour savoir si elles avaient été mises au courant de quelque chose qui pouvait mettre en danger Margaret.

- Eh bien... Je pensais qu'on vous avait mise au courant mais il semblerait que les espionnes aient également disparu, Madame.

- Que dîtes-vous ?

Alors ça c'était la meilleure. Si on ne me donnait pas toutes les informations comment étais-je censée mener à bien les recherches ? Je soupirai d'exaspération et tentais de garder mon calme. Cela ne devait pas être la faute de la Ministre ni de personne, j'avais pour ma part complètement oublié les espionnes je ne pouvais donc en vouloir au Conseil d'avoir omit de m'informer à leur sujet. Et puis c'était une journée particulière, je devais me montrer tolérante pour ne pas faire paniquer tout le monde et assurer un bon déroulement des choses.

- Veuillez m'excuser Votre Majesté, je vais de ce pas faire en sorte qu'on envoie des troupes à leur recherche également...

- Laissez, cela ne sert à rien. Ce sont des espionnes, si elles souhaitent ne pas être retrouvées nous ne les retrouveront pas même avec nos meilleurs éléments. Restons concentrés sur ma sœur.

- Oui vous avez raison Majesté, je vais prendre des nouvelles auprès de la Marquise de Beaulieu.

- Faîtes les moi parvenir lorsque vous en aurez.

- Bien évidemment, Madame.

Je retournais dans les appartements de ma sœur. Cette journée me paraissait sans fin et plus elle se prolongeait plus je sentais la peur s'agripper à mes tripes. Cela ferait bientôt dix heures que personne n'avait eu de nouvelle de ma sœur et que plus personne ne l'avait vu. Comment une reine pouvait-elle si facilement passer inaperçue ? En fouillant son bureau, je tombai sur une lettre qui retint mon attention. Elle n'était pas écrite de la main de ma sœur. En commençant à lire je compris que je ne pourrais rien en tirer car tout était codé et n'ayant pas la clé je ne pouvais comprendre ce qui y était dit. Mais ce qui me surprit le plus était de constater qu'elle était signée d'un homme.

Ma sœur avait toujours refusé tout mariage et disait attendre de trouver celui qui ferait battre son cœur. Elle souhaitait un mariage d'amour mais pour ma part je pense plutôt qu'elle ne souhaitait pas se marier, elle détestait le royaume voisin et n'avait pas confiance dans les hommes. Tout son entourage était constitué de femmes et elle aimait à dire qu'ainsi elle pouvait avoir confiance en tous ses sujets. Selon elle, les hommes étaient tous mauvais par nature et ne méritaient qu'on ne leur apporte ni confiance ni importance. Tous aussi mauvais les uns que les autres, telle était sa devise. Avait-elle raison ? Je ne le sais mais une chose était sûre, elle n'était pas près d'avoir une héritière pour le trône.

Je fis appel à l'une des expertes de la cour pour tenter de déchiffrer la lettre. Non pas que je sois curieuse de la correspondance de ma sœur mais il était rare qu'on utilise des lettres codées pour cacher une simple petite discussion. Elle prit peur au départ car dans l'esprit de tous Margaret restait notre reine mais pour le bien des recherches elle n'avait pas le choix et puis en ce moment j'étais sa reine et comme tout le royaume elle me devait obéissance.

La soirée se déroula tristement. Aucun divertissement n'accompagna le dîner, toute la cour chuchotait et murmurait des rumeurs toutes aussi grotesques les unes que les autres à propos de la disparition de la reine. J'assistais à leur conversation de loin et lançais des regards noirs à quiconque osait remettre en doute ma sœur. Pour ma part, j'étais certaine que cela ne pouvait être qu'un coup de l'ennemi. Jamais Margaret n'aurait pu d'elle-même disparaître, elle avait toujours été dévouée à son royaume et avait passé sa vie à se battre pour lui.

Je finis par me rendre dans les cachots ne supportant pas l'ambiance du château. Je devais prendre une décision concernant le prisonnier et malgré le fait que je m'étais habituée à sa présence je devais prendre certaine mesure si celui-ci refusait de coopérer.

- Henri, l'appelai-je pour le réveiller.

Il grogna, comme à son habitude mais ne bougea pas de sa paillasse.

- Tu ne respecteras donc jamais mes heures de sommeil ? se plaignit-il.

- Je n'ai que faire de vos plaintes. Je suis venue vous laisser une dernière chance de nous aider. Les informations que vous possédez pourraient nous permettre de retrouver la reine et de la sauver. Mais dans le cas d'un refus de coopération, cela serait traduit comme un acte de rébellion et donc de trahison de votre part.

Il prit enfin la peine de se lever. Ces quelques mots lui avaient fait comprendre que je n'étais pas venue ici en amitié. Je tenais à me montrer ferme et déterminée, je ne voulais pas être abusée par un simple prisonnier et s'il le fallait je mettrais tout en place pour imposer mon pouvoir. Je devais me montrer à la hauteur de mon statut et ce n'était pas un prisonnier qui allait me manquer de respect et remettre mon ordre en doute.

- Je te l'ai déjà dit Elizabeth, je ne peux t'aider.

- Veuillez-vous adresser correctement à votre reine.

Je gardais un visage froid et fermé avec un ton hautin dans la voix. Si je voulais qu'il coopère il devait me craindre. La gentillesse, la patience et l'amitié n'avaient pas d'effet sur lui je me devais donc de passer à l'étape supérieur qu'importe ce que je devrais faire pour parvenir à mes fins.

- A quoi joues-tu ? Je ne crains pas ton autorité, je ne suis pas de chez toi alors tu peux exiger ce que tu veux de moi, je n'ai ni le devoir ni l'obligation de t'écouter.

- Je vous laisse une dernière chance, Henri.

- Sinon quoi ?

- Vous serez exécuté demain en place public. Le peuple raffole des exécutions surtout lorsqu'il s'agit d'ennemi masculin.

Je vis dans son regard quelque chose passer comme de la déception ou bien de la douleur. Il essayait de capter mon regard pour m'amadouer et me faire prendre pitié de son sort. Mais je ne pouvais me permettre d'être généreuse avec quelqu'un comme lui. Certes, il avait un lourd passé et cachait plus de choses que je ne pouvais l'imaginer, il n'empêche qu'il était toujours l'ennemi et qu'il refusait de m'obéir.

- Tu ne le feras pas. Si je suis ici c'est qu'on me considère comme un prisonnier de valeur sinon on m'aurait tout simplement enfermé dans une simple prison en attendant mon exécution. J'ai du mal à croire que tu te débarrasserais de moi maintenant sur un simple coup de tête.

Intérieurement je souhaitais de tout mon cœur qu'il change d'avis et qu'il me livre les informations qu'il avait en sa possession. Cela me faisait de la peine de devoir déjà ordonner l'exécution de quelqu'un surtout quand il s'agissait d'une personne avec qui j'avais longuement échangé durant plusieurs semaines.

- Henri...

Une faiblesse me prit et je me retiens au dernier moment. Je voulais le supplier, lui promettre richesse, respect et tout ce dont il désirait mais je ne devais pas, je ne pouvais pas. Je fermai les yeux et expirai fortement pour garder mon calme et resté majestueuse dans ma décision.

Que la Déesse me vienne en aide, je vais condamner quelqu'un.

Je fis venir les gardes et annonçai le jugement devant eux.

- Pour trahison, espionnage sur nos terres, refus de coopération et irrespect envers votre reine, en vertu des pouvoirs qui me sont conférés et selon la volonté de notre Déesse, je vous condamne à la sentence qui s'applique à toute trahison envers la couronne.

Je pris une pause pour prendre le temps d'observer longuement Henri. Je me devais de retenir son visage, sa personne, celui qu'il était. Je devais me souvenir de celui que j'allais condamner, faire tuer. Je ne voulais pas prendre cette décision sur un coup de vent, cela devait être réfléchie et assurée. Je devais m'en souvenir et pouvoir réfléchir à mon geste sans éprouver de regret ni de honte. Je devais agir parce que telle était la volonté de la Déesse et non pas par simple vengeance.

Je perdis mon regard dans le sien et en retenant du mieux que je le pouvais le tremblement de ma lèvre inférieure, je repris la parole :

- Je vous condamne à mort.

Le visage du prisonnier m'apparut alors différent. Derrière son masque de douleur et de souffrance apparut le vrai Henri. Il ne parut plus aussi vieux qu'il en donnait l'air mais comme l'homme d'à peine trente ans qu'il était réellement. Une vague de peur traversa son regard sans pour autant donner l'impression que cette sentence l'effrayait vraiment. Il paraissait à la fois plus fragile et plus fort qu'il ne l'avait été durant toute sa période dans cette cellule. Il prenait conscience de ce que je venais de lui dire et commençait à faire le vide dans sa tête.

Mais je pus lire autre chose sur son visage, quelque chose que je lisais depuis le premier jour sur cet homme et ce pourquoi j'avais commencé à échanger avec lui. Il y avait toujours ce même mystère et ces mêmes secrets qui restaient en lui et sur lui comme un habit qu'il ne pouvait retirer, comme un masque collé sur lui et qui ne pouvait plus s'enlever. J'eus de la peine pour lui et ressentis pendant une fraction de seconde tout le malheur qu'il portait sur ses épaules depuis plusieurs années maintenant.

Il murmura quelque chose dans sa barbe que je ne pus comprendre puis repartit se coucher dans sa paillasse sans adresser une phrase de plus. Je demandais au garde de faire réunir le Conseil demain à la première heure sachant qu'à une heure aussi tardive je ne pourrais regrouper personne. J'attendis que les gardes aient quitté le couloir pour laisser une petite partie de ma peine s'échapper.

Je posai ma main sur les barreaux puis mon front.

- Vous ne m'avez pas laissé d'autre choix... chuchotai-je plus pour moi-même que pour Henri.

Il ne répondit pas. Qu'aurait-il pu me répondre de toute manière ? Il refusait de nous livrer des informations et était pleinement conscient de sa condition, il devait s'y être préparé, il devait s'attendre à ce qu'un jour une telle condamnation lui tombe dessus. Du moins, je l'espérais.

Je me repris et quittais, non sans un dernier regard pour Henri, son couloir pour remonter dans mes appartements. Au dernier moment j'entendis sa voix résonner dans le fond de sa cellule.

- J'espère que le croire te permets d'alléger ta conscience.

Horrifiée par ses mots je me dépêchais de remonter et regagner mon lit.

Je venais de condamner une personne, je venais de tuer un homme.


La suite...


***


Hello, j'espère que ce nouveau chapitre vous a plu ! N'hésitez pas à me laisser un commentaire, ça m'aiderait énormément ! :D
Dernière modification par ChloB le mer. 08 nov., 2023 10:50 pm, modifié 3 fois.
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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

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Chapitre 4


Le plan du prisonnier touchait enfin au but. Il avait réuni tout ce dont il avait besoin pour se sortir d'ici. Que ce soit le bout de bois, le morceau de tissu ou le pot de miel il avait utilisé chaque jour passer dans sa cellule pour sympathiser avec les gardes, les soudoyer pour obtenir ce dont il avait besoin mais également réunir quelques informations auprès de la princesse sur la situation actuelle. A vrai dire il la trouvait réellement intéressante et d'une gentillesse rare pour une femme. Elle était réfléchie et curieuse, elle l'avait divertie durant tout son séjour entre ces quatre murs et il devait bien avouer qu'il commençait à la considérer comme autre chose qu'une simple ennemie à son pays.

Mais cette nuit, l'heure n'était pas à la distraction. Il avait enfin réussi à trouver le dernier outil pour pouvoir mettre son plan en marche et il n'avait plus de temps devant lui pour se permettre une dernière journée ici. Il devait agir cette nuit ou bien il perdrait sa tête. Une simple petite épingle volée sur la princesse lui donnait enfin la possibilité de sortir d'ici.

La garde de nuit était assise dans l'entrée du couloir mais s'était endormie sur sa chaise. L'homme prit soin d'ouvrir le plus discrètement possible la porte de son cachot et avança lentement jusqu'à la garde. Il réfléchit pendant quelques instants sur le fait de la tuer ou simplement lui faire perdre connaissance puis il se dit qu'elle serait mieux morte plutôt que de survivre à ce qui allait suivre. Par pitié il tua la pauvre garde dans son sommeil, elle ne se sentit même pas mourir.

Il retourna ensuite dans sa cellule emportant avec lui le corps de la femme. Il était le seul prisonnier dans tout le couloir. La reine n'avait pas pour habitude de garder quelqu'un bien longtemps ici mais comme sa sœur s'était prise d'amitié pour lui il avait bénéficier d'une espérance de vie plus longue que la moyenne. Il plaça le corps de la femme sur la paillasse dans la même position que si cela avait été lui en train de dormir. Si jamais son plan ne fonctionnait qu'à moitié, on devait le croire mort.

Il prit ensuite le pot de miel et en étala sur toutes les poutres en bois du couloir et même sur le sol et dans les endroits qui lui parurent stratégiques. Il en mit ensuite sur le tissu qui enroulait le bout de son bout de bois et y mit le feu à l'aide de la torche que la garde avait laissé à ses pieds près de la chaise. Il mit feu à tout le miel qu'il avait étalé dans le couloir.

Tout alla très vite, comme il l'avait préparé puisque la fumée fut très vite dense et insoutenable. Il remonta jusque dans le château camouflé par la fumée. Les flammes avaient déjà traversé le sol, les murs et la fumée se répandait partout dans les couloirs et les pièces. Le château commençait petit à petit à brûler.

Le prisonnier assomma les quelques gardes qui lui barrèrent la route et réussi à trouver le couloir où se trouvaient les appartements de la princesse. Le château entier dormait encore, personne n'avait eu le temps d'avertir de la fumée. Il s'était procuré l'uniforme d'un garde après l'avoir assommé pour se fondre dans la masse. Il ne pouvait malheureusement pas prendre le temps de couper ses cheveux et sa barbe, ni passer un coup d'eau sur son visage mais il passa quand même sans problème devant les gardes. Il leur criait qu'un feu s'était déclaré dans les cachots et qu'ils avaient pour mission d'aller l'éteindre. Il ne prenait pas la peine de s'arrêter pour discuter plus longuement avec les gardes, c'était beaucoup trop dangereux. Il préférait jouer le rôle du soldat paniqué qui se chargeait de faire passer les consignes et cela marcha comme convenu.

Arrivé devant les appartements de la princesse, les gardes qui surveillaient la porte ne se laissèrent pas si facile berner. Les deux femmes le regardèrent avec insistance et lui demandèrent son nom et son poste. Le prisonnier tenta du mieux qu'il pouvait de jouer le rôle du paniqué mais cela ne joua pas en sa faveur.

- Je ne t'ai jamais vu par ici, ta barbe et tes cheveux me sont inconnus, dit la première garde.

- Tu m'as l'air bien sale pour un soldat, d'où viens-tu ? l'interrogea la seconde.

Il tenta une dernière fois de mettre tout cela sur le compte du feu mais elles comprirent alors qu'il n'était autre que le prisonnier vivant dans les cachots de la reine. Malheureusement pour elles, l'homme était habile et n'avait rien perdu de sa fougue durant son enfermement. Au contraire il avait continué son entrainement et avait minutieusement préparé son plan. Personne ne pourrait l'empêcher t'atteindre son but.

Déjà la fumée atteignait ce couloir, il ne devait pas perdre de temps. Il frappa la première femme en plein visage avec une telle force qu'elle perdit aussitôt connaissance et il arriva en quelques secondes à neutraliser la seconde. A l'aide de ses deux mains et d'un coup sec, il lui brisa la nuque ce qui la tua instantanément. Il prononça une prière à voix basse pour elle et s'excusa de son geste si violent mais nécessaire.

Il entra enfin dans la chambre de la princesse. Elle dormait paisiblement dans son lit, elle souriait dans son sommeil et ne semblait pas avoir été perturbée une seconde parce qu'il venait de se passer devant sa porte. Le prisonnier eu un sourire moqueur pour elle en la découvrant ainsi. Il se demande comment la princesse pouvait aussi bien dormir, à sa place il aurait déjà été réveillé et sur le pied de guerre avant même que quelqu'un ne franchisse la porte. Il étouffa la femme qui dormait dans la pièce d'à côté, une servante très certainement, puis retourna s'occuper de la princesse.

Il fronça les sourcils en constatant qu'un nuage de fumée se formait déjà dans la pièce, il devait se dépêcher d'agir avant de finir asphyxier. Très délicatement il souleva les couvertures de la princesse et lui déplaça avec le plus de précaution possible les mains pour les placer juste à côté l'une de l'autre. Avec un morceau de tissu qu'il avait découpé dans un linge, il noua les poignets de la jeune fille ensemble et fit de même avec ses pieds.

Alors enfin la princesse ouvrit les yeux mais n'eut pas le temps de crier. L'homme lui mit aussitôt un mouchoir en tissu dans la bouche puis le maintint ainsi avec un lien. Ligotée de la sorte la jeune fille ne pouvait plus rien faire et encore moins se débattre bien qu'elle tenta tout de même de libérer ses pieds et ses mains. Pendant ce temps le prisonnier nouait des draps entre eux pour en faire une corde solide et longue. Il ouvrit la fenêtre et l'attacha aux barreaux du balcon pour pouvoir descendre facilement jusqu'au sol.

La chaleur devenait suffocante dans la chambre et la fumée lui brûlait les poumons. De son côté la princesse commençait à manquer d'air, il devait agir vite pour ne pas perdre connaissance avant d'avoir trouvé un endroit à l'abris. La chambre de la princesse donnait sur l'arrière du château avec une magnifique vue sur la forêt qui dominait la terre sur des kilomètres, c'est par là qu'il comptait s'enfuir. Il attrapa la princesse, la contorsionna pour faire passer ses mains dans son dos et la bloquer ainsi entièrement.

Il la bascula sur son épaule et se dirigea vers le balcon. Lorsque la princesse comprit ce qu'il comptait faire elle se débâtit encore plus violemment. Elle réussit à tomber sur le sol mais le prisonnier était plus fort et bien plus entraîné qu'elle ne pouvait l'être. Sans aucune pitié il lui pinça le nez pour lui bloquer la respiration. Il arrêta seulement lorsqu'elle perdit connaissance. Décidément il ne s'était pas imaginé devoir assommer autant de personnes aujourd'hui, il retrouvait ses bonnes vieilles habitudes et son habilité de tueur. Et frisson le parcourut lorsque des images lui revinrent à la mémoire, il les chassa d'un clignement de ses yeux mais ne put chasser la sensation étrange qui grandissait en lui. Il devait se dépêcher à descendre.

Il la remit sur son épaule et bascula sur sa corde de fortune. Il avait confiance en son travail et savait qu'elle ne lâcherait pas, pourtant il eut tout de même en instant d'effroi lorsqu'il commença sa descente avec la jeune fille inconsciente contre lui. Il se brûla les mains contre le tissu mais ne s'arrêta pas, il ralentit à peine sa descente malgré l'envie irrésistible de tout lâcher, il avait connu bien pire par le passé.

Une fois au sol, il récupéra l'épée de son uniforme qu'il avait dû lancer à terre avant de descendre. Son plan lui indiquait maintenant d'aller voler un cheval mais la tâche ne s'avéra pas si facile qu'il ne l'avait prévu. Il du tuer les gardes présentes dans les écuries de la princesse et assommer celles qui s'occupaient des chevaux. Il avait laissé la princesse attachée à un arbre, cachée par des plantes mais il ne pouvait se permettre de perdre plus de temps. Qui sait ce qu'elle pouvait faire durant son absence surtout qu'elle était maligne, elle risquait certainement de trouver un moyen de s'échapper.

Il prit un cheval au hasard, le sella et s'enfuit aussitôt pour récupérer la princesse. Comme il s'y attendait elle avait déjà trouvé un moyen de se libérer. Il descendit de cheval et la menaça avec son épée. Elle leva les mains en l'air et le supplia de la laisser en paix.

- Partez maintenant avec ce cheval si le cœur vous en dit, je protégerais vos arrières, personne ne saura que vous avez essayé de m'enlever...

Il ne lui répondit pas, il ne devait pas perdre de temps, il devait agir vite et ne pas laisser de place aux sentiments ou à la pitié. Il avait une mission à accomplir et de la route à faire. Il s'approcha d'elle, posa sa main sur son cou et quelques secondes plus tard elle tombait inconsciente dans ses bras. Il lui rattacha les mains et lui bâillonna la bouche puis l'installa sur la selle. Il se plaça derrière elle pour être sûr de la garder sous contrôle à tout moment. Ils purent alors enfin partirent à toute vitesse vers la forêt qui leur permettrait de fuir discrètement. Si le château brûlait bien on croirait bientôt que le prisonnier et la princesse étaient morts. Il avait placé le corps de la garde sur sa paillasse et le corps de la servante dans le lit de la princesse. Cela leur permettrait de gagner un temps précieux et d'atteindre leur objectif plus facilement. Du moins il l'espérait.

La suite...


***


Je pense poster deux chapitres par deux chapitres pour vous donner un peu plus de lecture, dîtes-moi si ça fait trop d'un coup ou pas ! :)
Dernière modification par ChloB le mar. 14 nov., 2023 7:07 pm, modifié 3 fois.
Je_sappelle_Groot

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par Je_sappelle_Groot »

Bonjour !

Je ne sais pas si tu écris toujours cette histoire, mais le début est prometteur !

J'ai repéré trois (toutes) petites erreurs 😉 :
- une dans l'introduction → "Elizabeth réussira-t-elle a sauvé" c'est à sauver
- une dans le chapitre trois → "Je fis appelle à l'une des expertes de la cour pour tenter de déchiffrer la lettre." On dit faire appel ...
- une dans le chapitre quatre → "L'homme lui mit aussitôt un mouchoir en tissue dans la bouche." C'est un mouchoir en tissu ...



L'idée d'un royaume dirigé par des femmes est originale, mais je pense que tu pourrais encore plus l'exploiter...
En ajoutant des descriptions par exemple : tu pourrais décrire la vie quotidienne d'Elizabeth, en parlant d'objets fabriqués par la marque dirigée par Madame ..., comment cela va de soi que les hommes soient exclus (par de petites remarques qu'Elizabeth entend), quel est le comportement des femmes (les gardes par exemple → elle se croient meilleures mais font en fait comme les hommes, sauf qu'elles ne le savent pas) ...

Il y a beaucoup de dialogues, rajouter des descriptions pourrait étoffer les décors, nous permettrait de mieux se représenter les personnages (les Conseillères par exemple...).

Dans le chapitre 4, on suit le point de vue d'Henri, ce qui nous donne un autre point de vue... Tu pourrais peut-être exploiter ce point de vue en expliquant le point de vue d'Henri sur ce royaume dirigé par les femmes et sur les femmes en général...

Petit bémol à mon goût (mais peut-être est-ce voulu ?) : on ne sait rien d'Elizabeth. Comment est-elle physiquement ? Mentalement ? Qu'aime-t-elle faire ?

Dans les chapitres, on voit un peu ce que ça implique un royaume dirigé par les femmes, mais perso j'en demande encore 😋 (j'adore voir toutes ces différences).
Par exemple sur la Déesse : est-ce que les femmes ont créé cette religion de toutes pièces ? Est-elle seulement le pendant féminin de l'ancienne religion d'avant que les femmes prennent le pouvoir ? Est-elle la femme de l'ancien dieu, oubliée de tous mais portée aux nues pas les femmes ? Y a-t-il des rites et prières particuliers ? Existe-t-il un ordre religieux, et dans ce cas comment sont les prêtresses ? les hommes sont-ils admis dans cette religion ?
Est-ce que les femmes ont changé la manière de diriger en arrivant au pouvoir ?
Comment est vu le mariage ?
Quel est le degré de discrimination des hommes ?


De toute manière, ce ne sont que des petites remarques, des petites améliorations à mon sens, mais qui ne collent peut-être pas avec ton style d'écriture ou avec ce vers quoi tu t'orientes...

En tout cas je trouve ce début très bien (en tout cas meilleur que ce que je pourrais produire), et je te remercie beaucoup pour tout ce beau travail ! 😍
ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Hello ! Merci beaucoup pour ton message ! Ca me fait vraiment très plaisir ! 😍

J'ai bien pris note pour les fautes, merci beaucoup, c'est parfois un peu dur de se corriger seule, je m'en excuse...

Pour ce qui est de tes remarques, saches que la plupart de tes question trouveront une réponse au fur et à mesure de l'histoire. C'était intentionnel de ma part de ne pas trop en donner dès le début, déjà pour ne pas perdre tout le monde dès le premier chapitre mais aussi pour laisser un petit peu de mystère. Mais effectivement il y a surement trop de dialogues et pas assez de descriptions, je vais essayer de revoir ça ! Personnellement j'aime bien pouvoir m'imaginer moi-même les personnages quand je lis mais ce n'est pas le cas de tout le monde et il est vrai qu'un peu plus de descriptions ne ferait pas de mal ici !

Et oui je travaille toujours cette histoire, je n'avais pas continué à la publier parce que je ne pensais pas que ça pourrait intéresser, mais j'ai globalement entière rédigé l'histoire, j'essaye de l'améliorer surtout maintenant, c'est pour ça que des commentaires comme le tien me sont très précieux donc merci encore à toi d'avoir pris le temps et j'espère te revoir encore pour la suite ! :D
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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par Je_sappelle_Groot »

ChloB a écrit : mer. 08 nov., 2023 10:59 pm J'ai bien pris note pour les fautes, merci beaucoup, c'est parfois un peu dur de se corriger seule, je m'en excuse...

Personnellement j'aime bien pouvoir m'imaginer moi-même les personnages quand je lis mais ce n'est pas le cas de tout le monde et il est vrai qu'un peu plus de descriptions ne ferait pas de mal ici !

Et oui je travaille toujours cette histoire, je n'avais pas continué à la publier parce que je ne pensais pas que ça pourrait intéresser
C'est tout à fait normal de faire des fautes, et c'est plus difficile de se relire que de corriger le travail de qqn d'autre.

Alors effectivement tu peux ne pas décrire ton personnage (de même que certain auteurs ne donnent pas de nom à leur personnage) pour qu'on puisse s'imaginer à quoi ils ressemble... Mais peut-être pourrais-tu approfondir Elisabeth côté caractère, qu'on puisse s'identifier un peu plus à elle...

Je pense que, même si ça n'intéresse que peu de monde, ça pourrait être une bonne expérience pour toi de publier qqch. Comme ça tu te sentiras "obligée" de rendre un "bon" travail, de l'approfondir et de te dire que tu a écrit une histoire pour de bon. Moi en tout cas ça m'intéresse de la lire... Si tu pouvais me mentionner sur le discord quand tu publieras (si tu publie ;) ), ça m'arrangerait, comme ça je pourrais venir voir... (mon pseudo discord est le même que sur book node)

Au plaisir de lire la suite 🤩.
ChloB

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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Chapitre 5


Une heure après notre réveil nous avions déjà repris la route. L'homme ne voulait pas que nous nous attardions trop longtemps de peur de croiser trop de villageois et que ceux-ci me reconnaissent. Malheureusement pour moi, je n’avais jamais voyagé dans les campagnes du royaume. Avec la cour, nous nous rendions seulement de grandes villes en grandes villes et je n’avais jamais trouvé cela divertissant de rencontrer des paysannes qui travaillaient dur toute l’année dans leurs champs ou avec leur élevage alors que de notre côté, nous leur donnions des impôts toujours plus élevés à payer.

Le royaume se portait mieux maintenant mais les traces des maladies et des guerres se faisaient encore sentir et notamment chez le petit peuple. Les familles paysannes avaient beaucoup perdu et vivaient, malheureusement, avec des miettes de ce qu’ils avaient pu avoir à une meilleure époque. Mais le peuple ne s’en plaignait pas car la paix était revenue sur nos terres et les maladies avaient fini par s’éteindre.

Mais le pays ennemi n’avait jamais accepté sa défaite et refusait depuis des générations de laisser notre royaume tranquille. Alors que nous pensions qu’ils allaient une fois de plus envoyer des troupes à nos portes, ils avaient agi plus subtilement pour une fois. Nous n’avions pas vu le coup arriver et au grand jamais, je n’aurais pu imaginer me faire enlever dans mes propres appartements. Je ne savais pas si Margaret avait tout prévu de son côté mais moi je me retrouvais complètement dépassée par la situation.

L’homme souhaitait que nous changions de vêtements pour rester le plus discret possible. Et effectivement, une robe de chambre blanche, bien que tâchée depuis le début de notre route, n’était pas la tenue la plus idéale pour traverser le royaume sans attirer les regards. Dans une maison perdue au milieu de vastes champs, l’homme remarqua que du linge était étendu dehors à sécher. Malgré ma réticence à voler de telles choses à mon peuple, il ne me laissa pas le choix. Il vola une chemise blanche pour lui ainsi qu’un pantalon mais garda la tunique royale.

Il ne trouva rien qui puisse être à ma taille. Je lui assurais que cela pouvait attendre le prochain village où nous pourrions peut-être trouver des vêtements plus « honnêtement » mais une fois encore il ne m’écouta pas. Il ne m’écoutait jamais. D’une main habile, il crocheta la serrure de la maison. Il n’y avait personne à l’intérieur. Il se rendit aussitôt dans les armoires pour y chercher quelque chose à ma taille sans grand succès. La femme du foyer était bien plus gourmande que moi et chacune de ses tenues étaient bien trop larges.

Pourtant, après plusieurs recherches, nous trouvâmes tout de même une robe adéquate. Cela n’avait rien à voir avec mes tenues habituelles et je devais bien avouer que je ne me sentais pas du tout à l’aise dedans. Je quittais donc ma robe de nuit, qui était l’un des seuls éléments que je possédais qui pouvait m’aider à me faire reconnaître. Je n’étais donc pas vraiment enjouée à l’idée de me changer, bien que ma robe de nuit soit dans un état pitoyable. Pour une fois, j’aurais mille fois préféré rester sale que jeter ma tenue. Mais en tant que « prisonnière docile » je ne fis aucune remarque et obéis sans contester. Ainsi vêtus, nous pûmes reprendre notre route.

*


Intérieurement, je ne pouvais faire taire cette voix qui criait vengeance à chaque instant. Durant tout notre chemin, je ne pouvais me sortir de la tête toutes les manières que je connaissais pour venir à bout de quelqu’un mais un obstacle m’empêchait de passer à l’action. L’homme m’avait menti depuis le début et je ne savais pas qui il pouvait bien être mais à sa manière d’agir, je ne pouvais que remarquer qu’il était bien plus fort que moi. Il maniait sa dague comme jamais auparavant je n’avais vu quelqu’un l’utiliser et sa force m’impressionnait chaque jour un peu plus. Si besoin était, il n’hésitait pas à me transporter tel un vulgaire sac de blé sur son épaule, sans faillir un seul instant et ce malgré son séjour en prison qui aurait dû lui faire perdre en force.

Déesse savait que j’avais rêvé, chaque nuit, de l’étouffer voire de l’égorger discrètement dans son sommeil. Ces nuits passées à l’observer dormir en s’imaginant poser mes mains sur son maudit cou, saisir discrètement sa dague pour la retourner contre lui. J’aurais aimé en avoir la force, pouvoir me débarrasser de lui mais à dire vrai, je ne faisais rien par peur. Malgré ma haine, ma colère et ma fougue, je ne pouvais nier que j’étais également terrifiée.

Je ne trouvais, d’ailleurs, pas le sommeil la nuit parce que je m’imaginais des milliers de scénarios qui me faisaient tous plus peur les uns que les autres. Ne sachant quelle était notre destination, ni ce qu’il comptait faire de moi, mon cerveau inventait des choses plus tordues les unes que les autres. Je l’imaginais me vendre au plus offrant dans son pays maudit, je me voyais être vendue sur un marché d’esclaves et me faire humilier publiquement par ces hommes à cause de mes origines.

J'étais terrifiée au plus profond de moi-même, mais à l'extérieur, je devais faire comme si toute cette situation ne m'atteignait pas. Je devais garder la tête haute pour ne pas me ridiculiser devant cet homme, je devais me montrer constamment supérieur à lui malgré ma position actuelle. Je devais imiter au mieux le rôle qu’aurait tenu Margaret à ma place. Elle serait restée forte jusqu’au bout, n’aurait pas eu peur de se sacrifier à chaque instant, affrontant son destin d’une noblesse éblouissante et procurant le respect même de la part de ses pires ennemis.

Mais j’étais loin de ressembler à Margaret… Moi je tremblais à longueur de journée, pleurais dès qu’il avait le dos tourné et m’imaginais le tuer chaque seconde sans pour autant faire quoi que ce soit. J’aurais pu m’enfuir, partir loin pendant la nuit mais pour aller où ? J’étais déjà complètement perdue dans toutes ces forêts, ces campagnes. Je ne savais pas d’où l’on venait et je ne savais pas où nous allions. Partir était ainsi risqué, j’avais une chance sur deux de finir par retomber sur lui. Ou pire.

Alors, je jouais la princesse modèle. J’acceptais ma condition en façade et tentais d’apprendre le plus de choses possibles pendant cette épreuve. Petit à petit, l’homme commençait à m’enseigner deux ou trois trucs qu’il avait lui-même appris plus jeune. J’appris, notamment, à crocheter des serrures, à voler dans les marchés, à voler dans les poches, à me cacher dans des endroits complètement insolites. Après trois semaines de voyage, l’homme avait retrouvé toute la force qu’il avait perdue derrière les barreaux et me paraissait également beaucoup plus jeune qu’à notre départ.

Mais je le détestais toujours autant. Pendant ces trois semaines, je ne pus m’enlever de la tête que, pendant tout ce temps, Margaret était quelque part, morte ou vivante, guérie ou au bord de la mort. Quelque part dans ce vaste royaume, ma sœur reposait, un cœur battant ou pas, sans moi. Pendant trois semaines, je ressentis sa peine, sa colère, sa solitude, sa douleur, son amour, sa haine. J’avais l’impression de ressentir un coup de poing chaque fois qu’elle quittait mes esprits quelques secondes, j’avais l’impression de la trahir une fois de plus. Mais ce sentiment me permettait de garder la tête droite et haute. J’avais conscience du poids qui pesait sur mes épaules, des responsabilités que j’abandonnais et cela me permettait de ne pas me laisser aller à l’abandon.

*


Alors que nous avions dû marcher toute la nuit parce que nous n’avions trouvé aucun endroit où nous reposer, je commençais à avoir quelques hallucinations. Nous ne pouvions plus nous déplacer à cheval, le pauvre était tout aussi épuisé que nous, mais marcher n’arrangeait pas vraiment notre situation, surtout que les nuits se faisaient de plus en plus froides à mesure que nous avancions vers le nord et que l’hiver approchait.

La lune était pleine et éclairait légèrement notre route. Je manquais cruellement de sommeil et ne sentais plus vraiment mes jambes, elles avançaient toutes seules au rythme de notre marche. J’avais un jour entendu dire qu’il existait un endroit dans le royaume, un endroit sacré où seuls les plus fidèles de la Déesse pouvaient espérer tomber. On disait de ce lieu que la Déesse elle-même y avait élu domicile sur notre terre. Les légendes autour de ce lieu et de ses miracles étaient nombreuses, on disait, par exemple, que les plus malades guérissaient miraculeusement après avoir trouvé ce lieu. Par tradition, nous continuions tous à faire exister ces mythes pour laisser l’espoir à nos petites filles qu’un jour le monde entier vivrait dans la paix et l’entente grâce à ce lieu sacré. Tous les ans, des centaines de femmes partaient à la recherche de cet endroit sans savoir réellement quoi chercher. Une fontaine ? Une maison ? Un temple ? Une statue ? Un arbre ? Selon les histoires, le lieu prenait différentes formes mais jamais la même, c’est ce qui faisait sa légende.

L’homme marchait avec le cheval légèrement en avant de moi. J’avais l'impression d’avoir bu de très grandes quantités de vins tellement ma tête me tournait alors que j’avais à peine eu le droit de boire quelques gorgées d’eau depuis que nous avions quitté le précédent village. Nous avions, encore une fois, dû emprunter une forêt pour pouvoir avancer. L’homme refusait catégoriquement de nous faire passer par de grandes villes. Là-bas, nous aurions été aussitôt repérés et les gardes nous auraient arrêtés sur le champ.

De plus, nos couvertures étaient encore attachées sur notre cheval et le froid rendait la tâche encore moins agréable. Je grelotais, faisais de gros nuages avec ma bouche et avais du mal à garder mes yeux ouverts. Finalement, ne tenant plus, je me laissai tomber à terre. Mes jambes ne me portaient plus et le froid mordait chaque petite parcelle de mon corps. C’était bien plus que ce que je ne pouvais supporter. L’homme ne se rendit pas tout de suite compte que je ne le suivais plus. Lui aussi commençait à être à bout de force mais faisait tout pour ne rien laisser paraître devant moi, pour ne pas me laisser l’espoir que je pourrais bientôt utiliser cette faiblesse contre lui.

Quand, enfin, il ne me vit pas à ses côtés mais bel et bien à terre, il revint aussitôt à ma hauteur pour me porter dans ses bras et ainsi continuer à avancer. Alors que je me sentais partir, l’homme trébucha et s’effondra au sol. Notre chute fut lourde et douloureuse. Aucun de nous deux ne trouva la force de se relever et finalement nous commençâmes notre nuit à même le sol. L’homme me blottit contre lui pour me garder à sa portée mais également pour que nos deux corps, l’un contre l’autre, produisent une chaleur qui pourrait nous maintenir en vie. Je l’entendis alors murmurer quelques mots à mon oreille :

- Reste en vie Lizzy, j’ai besoin de toi vivante…

Son souffle était faible et il semblait user de ses dernières forces pour me dire ces quelques mots. Je pris alors conscience que si je continuais comme cela, je ne passerais pas la nuit. Je pris sur moi et me retournai pour faire face à celui qui me retenait prisonnière.

- Nous devons…

Je n’eus pas le temps de finir ma phrase. L’homme posa ses lèvres sur les miennes avec une telle fougue que cela me fit sursauter et m’envoya une dose d’énergie par la même occasion.
Que venait-il d'oser faire ?

La suite...



***


Chapitre un peu long, je ne mets qu'un seul chapitre pour cette fois !
Merci beaucoup pour les quelques retours que j'ai pu avoir, vraiment ça m'aide énormément donc n'hésitez pas à commenter ou m'envoyer un mp !

Je suis également présente sur le Discord sous le pseudo Chloe, si vous souhaitez échanger avec moi, ça serait avec plaisir !
Dernière modification par ChloB le mar. 09 avr., 2024 3:52 pm, modifié 1 fois.
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Re: Un Royaume de Femmes [Fantasy, Aventure, Action]

Message par ChloB »

Chapitre 6


Je tentais de le repousser, mais mon manque de force ne jouait pas vraiment en ma faveur. Il posa ses mains sur mes hanches et m’attira au plus près de lui. Je me débattais de mon mieux, mais je ne pouvais que constater l’inutilité de mes gestes. La panique me gagna petit à petit et alors toutes traces de fatigue et de froid me quittèrent. Pour la première fois depuis le début de ce cauchemar, je m’autorisais à pleurer à chaudes larmes. L’homme s’écarta légèrement de moi.

- Je fais cela uniquement pour nous maintenir au chaud, en vie.

- Il y a d’autres moyens bien moins barbares… chuchotais-je toujours en train de pleurer.

- Je vous écoute.

Il s’éloigna enfin de moi. Ma première réaction fut de serrer le col de ma robe contre moi et de tenter de respirer calmement. Habituellement, je cherchais à ne pas lui montrer à quel point il me terrifiait, mais à cet instant précis, je ne pouvais effacer la vision de son regard si déterminé et à la fois complètement détaché qu’il posait sur moi. Comme s’il n’était plus vraiment lui et qu’une autre personne avait pris le contrôle de son corps pour l’aider à survivre à ces conditions. Il paraissait à la fois insouciant et conscient de ce qu’il était en train de faire, à la fois acteur et spectateur de ses gestes.

Alors que je repassais la scène dans ma tête pensant à ce que j’aurais dû faire pour me libérer et lui dire pour le blesser, quelque chose attira mon regard. En fait, la forêt tout entière attira mon regard. Je n’avais pas pris la peine d’observer ce qui nous entourait avant, d’une part à cause de la nuit et d’une autre à cause du froid qui m’empêchait de lever la tête et de profiter pleinement du paysage. Je remarquai la pleine lune qui éclairait merveilleusement les arbres et leur feuillage. Je remarquai les lucioles qui volaient un peu partout autour de nous. Je remarquai la beauté des lieux et oubliai presque aussitôt le froid qui m’entourait. Quelque chose s’éveilla en moi et me donna la force de me relever et de marcher un peu plus loin. Je me sentais comme attirée par quelque chose comme si derrière ces quelques buissons se trouvait un objet que j’avais désiré pendant des années. J’entendis à peine la faible voix de l’homme me menacer et m’ordonner de revenir à ses côtés. Je ne prêtais d’attention qu’à cette étrangeté qui m’attirait inévitablement à elle.

En passant à travers les buissons, je découvris alors le lieu le plus époustouflant qui m’ait été permis de voir dans ma vie. Devant moi, se dressait une magnifique fontaine avec, en son centre, une statue représentant une très belle femme vêtue d’un simple voile, portant des cheveux d’une longueur ahurissante. Elle me faisait vaguement penser à une nymphe tombée sur terre et transformée en statue. Elle tenait entre ses mains une sorte de vase duquel se déversait de l’eau jusqu’à un petit bassin qui se tenait à ses pieds. Je pouvais voir la chaleur de l’eau même au travers la nuit, un petit nuage de fumée s’élevait au-dessus de l’eau telle une bougie à la mèche encore chaude et fumante. L’endroit me paraissait être à la fois un mirage et une oasis. Tout, autour de moi, semblait briller telles des étoiles dans le ciel. La pleine lune donnait l’impression que les racines des arbres s’éclairaient dans le sol, se rejoignaient et prenaient leur source au même endroit, c’est-à-dire, sous la fontaine. Les lucioles continuaient d’éclairer l’endroit et permettaient de voir encore plus de détails sous cette pleine nuit. Les fleurs, qui entouraient les lieux, n’étaient pas non plus communes. Elles aussi donnaient l’impression de descendre tout droit de chez les Déesses.

Au-dessus de ma tête, le ciel remplit de milliards d’étoiles et d’une lune plus brillante que le soleil en plein été se donnaient en spectacle. J’avais le souffle coupé par tant de beauté et je ne comprenais toujours pas comment nous avions pu passer à côté d’un tel endroit. Mais ce moment de magie fut perturbé par l’arrivée brutale de l’homme. Ce dernier se jeta sur mon bras et me tira vers lui avec une telle violence que je perdis l’équilibre pendant un instant.

- Si tu t’écartes encore…

Cette fois, ce fut moi qui ne le laissa pas finir sa phrase. Je lui pris le visage du bout des doigts et orientai sa tête vers la fontaine qui se tenait dos à lui. Il parut complètement perdu dans un premier instant puis la réalité le frappa enfin.
Où sommes-nous ? me demanda-t-il les yeux pétillants, remplis d’admiration.

- Je n’en ai aucune idée. Un paradis sur terre, je suppose, lui répondis-je.

Je vis ses yeux se poser et languir vers l’eau chaude qui se dressait devant nous. Je lui fis signe de s’y approcher à mes côtés. Nous trempâmes le bout de nos doigts et notre réaction fut immédiate. L’eau était aussi chaude qu’elle nous paraissait. Ni une, ni deux, l’homme retira ses bottes, son pantalon et sa tunique, ne gardant ainsi que sa chemise, puis entra dans la fontaine. Son soulagement se vit aussitôt. Il paraissait avoir récupéré toute son énergie et sa lucidité. Je retrouvais sous mes yeux l’homme amical et drôle que j’avais connu au château. Poussée par une folle envie de me réchauffer dans cette eau à mon tour, je retirai ma robe et mes chaussures pour me retrouver simplement en linge de corps. Je me sentis premièrement très gênée de me dénuder de la sorte devant un homme, mais l’appelle à la baignade fut plus forte que la gêne et, alors, j’entrai à mon tour dans cette magnifique eau.

Jamais je n’avais ressenti une telle sensation auparavant. C’était comme si tous mes maux s’étaient envolés, comme si je n’avais jamais connu la douleur, la peur, la colère. Tout mon corps était apaisé, mon esprit était calme. Des papillons de nuit d’une beauté sans égale, que je n’avais encore jamais vus de ma vie, vinrent se poser sur nous. Ils étaient noirs avec des points lumineux sur leurs ailes, ils brillaient de mille feux.

L’homme regardait le décor qui nous entourait avec autant d’ébats que moi. Nous étions comme paralysés devant une telle beauté, tous nos problèmes envolés. Même notre cheval trouvait de quoi se ressourcer avec la végétation environnante.
C’est alors que je sentis le regard d’Henri sur moi. Il avait retrouvé une certaine beauté, son visage ne paraissait plus aussi dur et méchant. Il semblait rajeuni, plus fort, plus séduisant et plus gentil.

- Que dirais-tu de passer la nuit ici ? me demanda-t-il affichant un merveilleux sourire sur ses lèvres.

- Avec plaisir.

Je ne ressentais plus aucune haine contre lui. J’étais troublée, comme si rien ne s’était passé quelques instants auparavant. Je ne parvenais plus à ressentir ne serait-ce qu’une once de colère que je portais avec moi durant ces dernières semaines. Il se déplaça un peu dans la fontaine en nageant. Il avait l’air aussi libre que le vent, aussi heureux qu’un enfant à qui on avait offert le plus beau des cadeaux, il semblait être sur une autre planète ou dans un paradis.

Je me déplaçais à mon tour pour pouvoir détendre mes muscles fatigués, mais non-douloureux. Je m’arrêtai juste devant Henri pour ne pas lui rentrer dedans. Il me fit face et alors un nouveau sourire illumina son visage. Jamais je n’avais vu quelqu’un resplendir à ce point. En comparaison, l’aura de ma sœur avait encore beaucoup à apprendre.

Il se rapprocha encore plus près de moi et me prit par la taille. Tout doucement, il commença à m’entraîner dans des pas de danse, une danse que je ne connaissais pas, mais qui ressemblait vaguement à l’une de chez nous. Prise dans ses pas, je me laissais guider et le suivais tout en profitant au maximum de ce merveilleux moment. L’eau autour de nous nous empêchait de bouger plus vite, mais la chaleur qu’elle nous procurait rendait la danse encore plus agréable. Debout de la sorte, l’eau m’arrivait au niveau de la taille, je pouvais donc tout de même me déplacer aisément.

Il prit ma main et me fit tourner d’un demi-tour puis me bloqua, dos à son torse. Il enroula ses bras autour de moi et nous restâmes ainsi quelques minutes à observer l’imposante statue qui se dressait face à nous. Il retira l’un de ses bras pour dégager les mèches de cheveux collées sur mon cou. Très délicatement, je le sentis embrasser ma nuque avec autant de précautions que s’il touchait de la porcelaine. Des frissons me parcoururent le corps et un gémissement de plaisir m’échappa tandis que je fermais les yeux tout en prenant appui sur lui.

Je savais qu’une partie encore consciente de moi hurlait de douleur, me suppliait de cesser cela tout de suite, mais j’en étais incapable. L’atmosphère était enivrante et je devais bien avouer que j’aimais ce qui était en train de se produire. Ses mains, musclées contre ma peau, me rassuraient, son odeur corporelle me mettait en confiance et la douceur de ses lèvres contre mon cou me faisait perdre la tête. À cet instant, il était à mes yeux, l’homme le plus attirant que j’eus rencontré jusqu’ici et j’aurais tout fait pour que ce moment ne s’arrête jamais.

Portée par cet instant, je me retournai pour lui faire face et posai mes mains contre son torse dénudé. De son côté, il passa ses doigts sur mes joues puis dans mes cheveux. Jamais des doigts ne m’avaient paru si doux.

- Me permets-tu ? me demanda-t-il dans un murmure.

Sous mes mains, je sentais son cœur battre si fort et si vite que pendant quelques secondes, j’eus peur qu’il lui arrivât quelque chose, mais je compris que c’était un tout autre sentiment qui le faisait battre de la sorte.
Oui, m’entendis-je souffler comme réponse.

La partie au fond de moi qui refusait cet échange se mit à hurler de plus belle. Je sentais la vraie moi vomir de honte, me gifler pour me faire prendre conscience de la réalité, mais je devais déjà être partie trop loin, car lorsqu’il posa, enfin, ses lèvres sur ma bouche, je ne pus que renforcer encore plus notre baiser. Je brûlais d’envie pour lui, je ne pouvais plus me le cacher. Depuis le premier jour, il était le seul homme avec qui j’avais eu de telles discussions, voire une simple discussion tout simplement. Jamais auparavant, je n’avais eu l’occasion d’apprendre à connaître quelqu’un du sexe opposé et encore moins aussi intimement.

Je posais mes bras sur ses épaules tandis qu’il me soulevait tout en faisant passer mes jambes autour de sa taille. À ce moment, mon cœur battait aussi vite que le sien et tout mon corps appelait le sien. Je ne pouvais m’imaginer une seconde de plus sans lui et je ne pouvais me détacher de ses bras. Je lui aurais tout donné pour qu’il reste auprès de moi quelques heures de plus.
Je n’eus pas besoin de le lui prier. Il désirait autant que moi continuer sur notre avancée. Je ne le retins pas et au contraire, je me laissais même faire. Pour la première fois de ma vie, je m’offrais à un homme. Je laissais tomber des années d’éducation à faire passer l’homme comme l’ennemi premier. À mes yeux, Henri était loin d’être le méchant. Tout mon corps était d’accord pour dire que jamais auparavant je n’avais pris autant de plaisir.

Ainsi se déroula notre nuit dans cet étrange endroit.


La suite...
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