Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Postez ici tous vos écrits qui se découpent en plusieurs parties !
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Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

RAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH

Je suis perduuuuue
Ok Léna est clairement devenue tarée. ET QUELQU UN VA ESSAYER DE TUER LUCAS BORDEL parce que pas d'Antoine = pas de marque = corbeau pas content
ARGH
Beuh
Callie m'énerve
Mais je suis contente que Danny et Léo soient plus ou moins réconciliés du coup
MEME SI C EST POUR D ATROCES RAISONS
Ah et c'est cool qu'on sache enfin pour Grispoil et Danny héhé
(non je ne suis pas hystérique)
JE VEUX LA SUITE EUUUUH
Marie-A

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Marie-A »

Comme tous les autres, j'ai une envie folle de lire la suite !!
Mais il faut que tu te concentre sur tes concours avant tout et je comprends tout à fait que tu ne puisses pas nous dire quand tu vas la mettre. Ne tarde pas trop quand même... :(
Très bonne première partie de chapitre. C'est trop ouf ce qui arrive. Franchement, je ne m'attendais pas du tout à ça. J'espère qu'Antoine va bien... Faut pas qu'il meurt !!!!!!!!!!!
Quant à Callie, je lui aurais bien arraché les yeux de la tête si j'avais été à la place de Léonie !
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 18 (2/3). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

LIBEREE ! DELIVREE !
LES CONCOURS SONT TERMINEES !!
LIBEREE ! DELIVREE !
FINI LA PREPA JE M'EN VAIIIIIIIS !


Ahahahahahaha, les amis comment c'est tellement trop la fêêêêête ! Je suis euphorique, heureuse, extatique et tout les synonymes possibles et imaginables ... !
Je me suis fais un PLAISIR en sortant de Grec, ma dernière épreuve, d'acheter tout les livres que je me retiens d'acheter depuis un an ! Quelle jouissance, si vous saviez !

BREF, j'arrête avec mes conneries, et je passe à la mauvaise nouvelle : dernière partie du chapitre 18. Ce qui veut dire ... Ce qui veut dire ...
Bien, qu'après il ne reste plus qu'un chapitre.
Deux postes.
Deux semaines.
Et la fin.

ARGH, je suis tellement triste de dire ça ... Mais bon, haut les coeurs !

BON, vous l'auriez deviné, c'est un passage important. Pour autant :
1) Je le trouve bizarre
2) Mes amis le trouvent bizarre.
3) Nous le trouvons bizarre.
DE CE FAIT : j'aimerais savoir si vous aussi vous le trouvez bizarre :D s'il vous plait, un max d'avis sur cette partie, c'est l'une de celles sur laquelle je suis le plus indécise ...

BREEEEF. Bonne lecture :)

Chapitre 18 (2/3) : Le Break, 2.0.


Je tenais à préciser qu’Alex, c’était mon idée

Après cette épouvantable observation, nous avions laissé Salomé s’occuper de la blessure du pégase et tracer jusqu’au château. Callie avait été longue à convaincre, mais Danny avait usé de l’argument imparable qu’était son intuition. Le scénario envisagé était pour lui une quasi-certitude, et ce n’était pas la meilleure de nouvelles de la journée : Antoine avait dormi dans l’écurie, et Léna l’avait su. Après les révélations de Callie, elle avait été le débusquer. Grispoil avait tenté de défendre son camarade, mais Léna l’avait blessé en emmenant Antoine. A présent, nous n’avions plus aucun doute sur la validité de cette scène. Même Callie avait plié. Non, en réalité, il restait deux questions sans réponses :
1) Comment Antoine, si puissant, si habile à l’épée, avait-t-il pu être emmené par une fille aussi frêle que Léna ?
2) Pourquoi Léna avait-elle fait ça ?

A la première question, notre principale réponse au terme des délibération faites dans la chambre d’Alex était la surprise. Une attaque éclair à laquelle Antoine ne s’attendait pas. Le point délicat était la seconde. Callie soutenait que c’était par vengeance, parce qu’elle n’avait pas supporté qu’Antoine ait gravé les sigles, l’ait mis en danger, et ait potentiellement tué Geoffrey et Elodie Renaud. Mais je trouvais qu’il y avait quelque chose qui ne collait pas. En apprenant l’implication d’Antoine, je m’étais attendue à ce que Léna sorte les crocs, et le secoue comme un prunier pour qu’il dise tout ce qu’il savait. Mais le kidnapper ? Blesser le roi de Sappho en la personne de Grispoil ? ça me paraissait relativement extrême. D’autant plus que Léna était assez lucide et intelligente pour savoir qu’Antoine n’y était pour rien dans la mort de Geoffrey : il était beaucoup trop jeune à l’époque. Le silence de Danny sur cette question nourrissait mes doutes. Il y avait autre chose derrière le comportement de Léna. Une carte à laquelle nous n’avions pas accès. J’espérais simplement que ce n’était pas celle qui me hantait depuis que j’avais constaté la disparition d’Antoine.

Danny et Callie avait étonnement refusé en cœur d’aller voir quelqu’un de l’administration pour lui raconter tout ce qui se passait. Ça m’avait grandement étonné de la part de Callie, qui était plutôt du genre à aller se cacher derrière les jambes des plus grands (elle l’avait encore prouvé en allant voir Léna). J’étais sceptique, mais Danny m’avait convaincue de me taire en plaidant que si je le racontais à quelqu’un, je devrais révéler toute l’histoire (sous-entendu : y compris les petits secrets d’Antoine). Je ne pouvais m’y résoudre, alors j’avais ravalé de mon mieux mon angoisse. Nous étions livrés à nous même, et nous de pouvions pas décemment laisser Antoine entre les mains incertaines de Léna. Si ça n’avait pas l’air d’inquiéter Callie outre-mesure, moi, ça me rongeait, et je cherchais par tous les moyens à localiser Antoine et Léna. Danny et moi les avions appelés cent fois, mais nous tombions sur messagerie. Alors j’eus cette idée un peu folle de passer par les oiseaux d’Alex. C’était eux qui m’avaient trouvé, dans ma ville du Nord, et qui avaient été prévenir Alex et Léna qu’une enfant de Gaia commençait à être en danger. Si Alex arrivait si bien à les contrôler qu’il le disait, alors il arriverait peut-être à les envoyer localiser Antoine et Léna. Callie m’avait regardé comme si j’étais une folle, mais Danny approuva. Alex avait été bien surpris de nous voir arriver dans sa chambre, affolés, et encore plus abasourdi par notre requête.

-Je peux le faire, avait-il confirmé avec indécision. Mais il me faudrait un objet d’un des deux, ce sera plus facile.

Callie et Danny avait soupiré en concert avec désespoir, mais j’avais triomphalement sortis la dague qu’Antoine m’avait prêtée pour que je puisse me défendre. Alex l’avait pris et avait appelé ses oiseaux d’un sifflement (un peu genre … Blanche-Neige qui appelle ses amis animaux pour faire le ménage, et ils accourent tous avec empressement. Vous voyez le genre ?). Nous avions attendu plus d’une heure dans sa chambre, à faire les cent pas, et à discuter à voix basse de ce qui avait pu se passer. J’étais tellement nerveuse que j’avais fini par dire à Danny, pendant que Callie et Alex étaient sortis, que c’était la chambre que papa avait occupée. Et je n’avais pas dit « mon père ». J’avais bien dit « papa ». Danny m’avait lancé un regard étrange, et je m’étais empressée de sortir prendre l’air. Quelques minutes après cet échange, des oiseaux avaient fini par revenir par nuées, et Alex s'était retourné vers nous au pas de course.

-Trouvés ! avait-t-il annoncé avec satisfaction. Un immeuble à Orléans, à priori. Au bord de la Loire.

Il n’avait pas fallu plus d’indications à Danny pour qu’il pâlisse. Sans attendre la fin des précisions d’Alex, ni même le remercier, il avait fait demi-tour et était sorti de la chambre. J’avoue avoir été tout aussi impolie en me précipitant à sa suite, et j’avais entendu Callie le remercier et s’excuser pour nous. Une fois dans le Hall, Danny s’était tourné vers nous avec une question : « on y va, ou pas ? ». son regard flambait de résolution : la réponse pour lui était évidente. Callie et moi nous étions regardées avec appréhension, mais avions hoché la tête de concert. Danny m’avait demandé de téléporter la clef du portail d’entrée de Sappho, qui était chez Raymond, et ses clefs de voiture dans son bureau. Je lui avait docilement obéi, et en quelques minutes, il avait eu les clefs en mains. Quelques minutes après, il nous avait fait monter dans sa petite Clio, moi à l’avant, et Callie à l’arrière.

-Maintenant, avait-t-il décrété en mettant le moteur. Tu balances les secrets de Meynier. Tout.

Et je les avais balancés. De toute façon, au point où on en était … ça faisait une demi-heure que nous étions partis de Sappho quand j’achevai mon récit. Je vis les yeux de Callie dans le rétroviseur. Ils brillaient de larmes.

-Oh, Lucas, souffla-t-elle.

C’était aussi la partie qui avait le plus bouleversé Danny. J’avais été plus maligne qu’Antoine en leur expliquant d’abord le chantage (donc, l’utilisation vile et malsaine de Lucas), et après l’objet du chantage (à savoir, les brèches, et Baal et par conséquent la culpabilité d’Antoine). Présenté dans cet ordre-ci, ils n’avaient aucun moyen de s’en prendre à Antoine.

-Vous croyez que sa chute…, entonna doucement Callie.
-Non, l’interrompis-je, voyant où elle venait en venir. J’étais là, à ce moment, et c’était un accident. Simplement, il est bien tombé.

Callie et Danny échangèrent un drôle de regard via le rétroviseur. Ma colocataire avait pâli au fur et à mesure de mon récit, et plusieurs fois, j’avais eu l’impression qu’elle voulait me sauter au cou. Mais la tension émanait plus de Danny. Ses doigts étaient tellement crispés sur le volant que ses jointures avaient blanchies. Et comme Callie, je l’avais plusieurs fois senti prêt à faire un geste de tendresse à mon égard. Mais je n’étais pas sûre de l’accepter. Après quelques minutes de silence, Danny posa la question fatidique :

-Et tu crois que le corbeau peut être Léna ?

Précisément la question que je me posais.

-Aucune idée, avouai-je sombrement. Antoine l’avait rayée de sa liste, parce que même quand elle était absente, il recevait des mails venant du compte administrateur de Sappho. Et je ne vois pas pourquoi elle ferait ça. Mais … enlever Antoine ?
-On ne sait pas encore si elle l’a enlevé, fit remarquer Callie.
-Pourquoi elle aurait blessé Grispoil, sinon ? rétorquai-je avec lassitude.

Le silence se fit dans la voiture. Danny n’avait pas desserré les mains du volant, et il appuyait un brin trop sur l’accélérateur à mon goût. Son regard était rivé sur la route, et quand les premiers panneaux « Orléans » apparurent, son visage se ferma.

-Danny, demandai-je timidement. Où est ce qu’on va, en fait ?

Il ne répondit pas, et poussa un profond soupir pour se détendre. Je me retournais pour demander silencieusement l’avis de Callie, mais elle haussa les épaules. Elle était blanche comme un linge.

-Et Luna ? s’enquit-t-elle doucement pour changer de sujet. Comment ça se fait qu’on en est jamais entendu parler ?

Je fis les plus gros efforts du monde pour ne pas regarder Danny, mais je sentais bien sa crispation. La question n’était pas faite pour le détendre.
D’un certain point de vue, c’était Luna qui lui avait pris son père (notre père ?).
Je répétai à Callie ce que m’avaient dit Antoine et la directrice : le fait que les enfants de Gaia ordinaires se méfiaient des marqués de Luna car il étaient trop puissants, et donc incontrôlable, que cette méfiance se répercutaient sur la descendance, et que quand il n’y avait pas méfiance, on tentait d’utiliser ces individus. D’une manière générale, je pensais que les grands du monde de Gaia avaient peur de Luna.

-Donc, conclut Callie en plissant des yeux, tu as des ancêtres à Sappho.
-Mon père, pour commencer, confirmai-je prudemment en évitant de jeter un coup d’œil à Danny. Mais la dépositaire de la lignée est Antoinette Perrault.
-Eisenhover, rectifia Danny, presque machinalement.

Callie fronça les sourcils en nous regardant tous les deux.

-La meuf qui a le droit à sa petite plaque commémorative ?
-Tout juste, fit Danny.

Je réprimai un sourire. Quand j’avais appris qu’Antoinette Perrault avait été la reine de Sappho, j’avais trouvé ça incongru. Mais Danny avait appris qu’il descendait d’elle alors que depuis toujours, il voyait son nom inscrit en lettres d’or, et les profs le prononcer avec un soin presque religieux. Pour lui, c’était comme si on lui disait qu’il descendait de Dieu ou de Louis XIV. Callie poussa un petit sifflement.

-Hé bien, la Rousse au bois dormant, tu as du sang bleu dans les veines, fit-t-elle remarquer.
-Oui, bien … Garde le pour toi, tu veux ? (Je me mis sur les genoux pour me retourner et la regarder dans les yeux). Et je ne plaisante pas, Callie. A Sappho, ils sont cinq au courant de l’histoire entière : Devyldère, Antoine, moi, Danny et toi. Et je veux qu’on reste cinq au courant, d’accord ? L’unique transgression que j’accepterais, c’est Lucas, mais c’est tout. Personne d’autre. Alors, tu promets de tenir ta langue ?

Callie me fixa nerveusement, mais hocha la tête sans un mot. Elle avait très bien vu que je lui faisais un reproche muet. « Tu as déconné en en parlant à Léna. ça t’apprendra à l’ouvrir ». Je ne voulais pas être particulièrement accusatrice, d’autant plus que je comprenais pourquoi elle avait fait ça. Il n’empêchait que ça me restait en travers de la gorge, et que je savais que si cette histoire finirait mal, je ne pourrais m’empêcher de lui en vouloir – et de m’en vouloir à moi aussi. Danny finit par quitter la voie rapide, et nous entrâmes gaiement à Orléans. Au fur et à mesure qu’on s’enfonçait dans la ville, le silence s’était fait dans la voiture, et mon cœur s’était douloureusement serré. C’était d’autant plus glaçant que Danny semblait exactement savoir où aller, et qu’il refusait de nous le dire. Ce fut quand nous commençâmes à longer la Loire que je me mis réellement à angoisser. Je regardais chaque immeuble, pétrifiée, m’attendant à chaque fois à voir Léna ou Antoine apparaître par la fenêtre. Quand Danny stoppa enfin sa voiture, je ne sentais plus mes entrailles tellement elles s’étaient contractées.

-Danny, fit doucement la voix de Callie, rompant le silence religieux qui s’était instauré. Où est-ce qu’on est ?
Il ne répondit pas, et attendit quelques instants pour couper le contacte, et sortir aussi sec de la voiture. Interloquée, Callie et moi échangeâmes un regard avant de le suivre hors de l’abitacle. Danny ferma la voiture, et nous désigna la Loire du menton.
-On n’y est pas encore, c’est de l’autre côté. Je pensais que ce serait mieux si Léna ne nous voyat pas arrivé.
-Danny, m’agaçai-je finalement en contrôlant les accents hystériques qui tentaient de percer ma voix. Où est-ce que tu nous emmènes ?

Il me lança un drôle de regard, et je vis la commissure de ses lèvres se relever, comme s’il retenait un sourire. Mais un sourire un peu amer. Il s’engagea sur un pont qui enjambait le fleuve, et Callie et moi le suivîmes précipitemment.

-On va chez Geoffrey, avoua-t-il finalement du bout des lèvres.

Je faillis me stopper net, mais Danny dut prévoir ma réaction car il glissa immédiatement une main dans mon dos pour me forcer à m’avancer.

-Léna et lui avaient loué un appart à Orléans, où ils devaient s’installer après le bac, expliqua-t-il en continuant à me faire avancer. J’avais été le visiter avec eux, et je me souviens parfaitement bien du petit immeuble devant la Loire … C’était ce qui avait attiré Léna.
-Et Léna l’a gardé tout ce temps ? s’étonna Callie.

Moi, c’était un autre détail qui me surprenait.

-Je pensais que Geoffrey allait à Strasbourg après le bac.

Le visage de Danny se ferma. Il avait fini comme moi par comprendre pourquoi Geoffrey avait choisi Strasbourg plutôt qu’une autre IEP mieux classée. Simplement, il s’était souvenu dans ces souvenirs d’enfants que c’était là-bas que son père habitait. Je ne voyais pas d’autre raison. Quand on était admissible à Lille et Lyon, les meilleurs IEP, et qu’on s’exilait à Strasbourg, c’était qu’il y avait une raison personnelle derrière. En l’occurrence, mon père (notre père. Un jour, peut-être, ça viendra).

-Oui, mais Geoffrey comptait revenir les week-ends, précisa Danny. Peut-être pas tous, mais comme Léna faisait ses études à Orléans, et que ma mère et moi restions à Sappho, il voulait faire quelque aller-retours. Alors ils avaient investi dans un appart.

Nous avions passé le pont et Danny nous fit tourner à gauche. Effectivement, un petit immeuble modeste faisait face à la Loire. Je scrutai nerveusement ses fenêtres, mais aucun signe d’Antoine et de Léna. Nous nous arrêtâmes devant la porte de l’immeuble. Il était sécurisé par un code d’accès.

-On y va vraiment ? s’assura timidement Callie.

J’ignore ce qui lui faisait peur : devoir affronter ou raisonner Léna (voir peut-être Antoine, nous n’étions sûrs de rien), ou découvrir une horrible vérité potentielle qui lui ferait mal. J’avouai que la seconde option m’effrayait bien plus que la première : j’avais assez eu de vérité douloureuse pour le restant de mes jours.

-Pour l’instant, on ne va nulle part, constatai-je en masquant mon anxiété. On a …

Au moment même où je disais ça, Danny s’avançait vivement à l’interphone et tapa rapidement quatre chiffres. Une seconde plus tard, la porte d’ouvrait avec un bip sonore. Danny lui-même paraissait surpris.

-Je ne pensais pas qu’ils allaient garder sept ans les mêmes codes, s’étonna-t-il en maintenant la porte ouverte. Vous venez ?

Je hochai la tête et passai la première la porte, suivie d’une Callie indécise. Ses cheveux étaient restés d’une incertaine couleur verte, comme si elle avait la flemme de leur faire prendre une couleur plus décente. Danny le lui fit remarquer dans le Hall, et lui demanda de prendre une couleur plus naturelle au cas où nous tombions sur quelqu’un. Elle lui lança un regard acéré, mais ses cheveux se colorèrent rapidement en châtain. A priori, c’était la couleur qu’elle prenait quand elle sortait (pour ne pas éveiller les soupçons de toute sa famille. Elle ne pouvait pas se permettre en vacances de faire un jour blonde, un jour rouge). Danny nous fit monter rapidement les escaliers jusqu’au deuxième étage, et nous amena devant une porte portant le numéro 5. Son visage était livide. Il s’immobilisa, mais moi j’avançai, collant presque mon oreille à la porte. En me concentrant, et en faisant abstraction de Danny et Callie, je parvenais à entendre de faibles bruissements, mais rien de concret.

-C’est ici, chuchota Danny. Je le sens.
-On frappe ? proposa Callie.

Danny secoua la tête, et colla comme moi son oreille à la porte. Après quelques secondes, il mit timidement la main sur la poignée, et la tourna. La porte était ouverte.

-Et bien, elle devait être ou sûre d’elle, ou pressée, constatai-je en regardant dans l’entrebâillement.

Pas d’Antoine en vue. Ni de Léna. Mon cœur se remit à battre nerveusement la chamade, surtout quand Danny posa un doigt sur ses lèvres pour me faire taire. Il poussa la porte, et me fit signe d’entrer. Je levai un sourcil, étonnée de l’honneur, mais je compris rapidement que c’était simplement parce qu’il n’avait pas envie de voir un lieu qui lui rappelait Geoffrey. Pas maintenant, où nous semblions si proches du dénouement, si proches de connaître la vérité sur sa mort. Sauf que je faillis rester paralysée sur le seuil.
Je n’étais pas sûre de vouloir découvrir un endroit qui évoquait Geoffrey. L’avenir qu’il aurait pu avoir s’il avait vécu.
Aurais-je fait partie de cet avenir ? Moi, la petite sœur qu’il avait désiré, mais jamais connu ?
Danny porta sur moi un regard presque suppliant. Malgré la boule qui m’était montée à la gorge, j’hochai faiblement la tête. Si c’était horrible pour moi, ça devait être pire pour lui. Je pouvais bien faire ça, je n’étais pas sans cœur. Alors je poussai la porte du bout des doigts, comme si elle allait me brûler. J’étais dans un petit salon éclairé, qui donnait à droite sur une petite cuisine style américaine, avec un bar et des plaques cuissons vieillotte (quoi, il n’y avait pas encore d’induction il y a sept ans ?). La pièce était éclairée, mais il n’y avait personne. Je tendis l’oreille, et entendis toujours ces faibles bruissements, sans que je ne puisse les identifier, Danny et Callie sur les talons.

-Et bien, constata-t-elle en regardant la petite cuisine. Bel appart pour des jeunes.
-Léna avait de l’argent de côté, et ses parents l’aidaient bien, expliqua Danny à voix basse. Et ma mère ne voulait pas laisser son grand dans une pièce sordide. Alors … (il écarta les bras en embrassant la pièce du regard) Voilà.

Je me promenai dans le salon, à l’affut du moindre bruit, de la moindre piste, mais la pièce était désespérément déserte. Le salon n’était pas si impeccable que cela : la table jonchait de boîtes de pizza vides, un canapé lit était déplié et défait, et des vêtements trainaient dans un coin. De plus, une odeur épaisse et malsaine régnait dans la pièce, une odeur écœurante qui m’obligeait à froncer du nez.

-Je vois mal Léna habiter là-dedans, commenta Callie avec une grimace en observant un verre vide, coloré de rouge. Gaia, cette odeur !
-Elle n’y vit pas, répliqua Danny, qui fouillait la petite cuisine.
-Et bien quelqu’un squatte, avançai-je en prenant un jean du bout des doigts. Un homme.

Le jean était bien trop large pour être celui de Léna. On en mettrait deux comme elle. Et la coupe était presque typiquement masculine. Un malaise me tordit le ventre. Ces vêtements ne pouvaient quand même pas être … ceux d’Antoine ? A vue de nez, je les trouvais aussi trop large pour Antoine, mais l’éventualité me labourait littéralement les entrailles.

-Elle a peut-être un copain, proposa Callie en faisant tourner le verre entre ses mains. En tout cas, si un mec vit ici, ça explique l’odeur.

Je lâchai le jean, et consultai Danny du regard. Du moins, je l’aurai voulu. Mais celui-ci avait les yeux rivés sur le frigo qu’il venait d’ouvrir, la bouche ouverte. Ses yeux étaient écarquillés.

-Danny ?

Il secoua la tête et son regard se posa brièvement sur moi avant de se focaliser à nouveau sur le frigo. Je le rejoignis, perplexe, et regardai moi aussi à l’intérieur. Avant de voir le contenu, ce fut l’odeur qui me heurta de plein fouet, emplissant désagréablement mes narines. C’était infect, lourd et âpre. Puis mes yeux se posèrent sur le contenu, et s’agrandirent sous le choc.
On venait de découvrir l’origine de l’odeur.

-Ce n’est comme même pas…, m’étranglai-je en m’accroupissant à hauteur des étagères.

Elles étaient remplies de divers poches, bols et verres remplis d’un liquide rouge foncé. Danny prit un verre à moitié plein entre ses doigts, prudemment, et l’approcha de son nez. Il se fronça immédiatement.

-Oh que si, grimaça-t-il en remettant le verre à sa place.
-Du sang, soufflai-je avec horreur. Danny, pourquoi ce frigo ressemble à une banque de sang ? Léna s’est convertie dans l’humanitaire ? (Je pointai un verre du doigt) Je ne suis pas sûre que ces échantillons respectent les lois sanitaires !

Callie nous avait rejoint, toujours le verre vide et taché à la main. Au mot « sang », elle avait tellement pâli que j’avais cru qu’elle allait s’évanouir. Elle jeta un bref coup d’œil au frigo, et parut réprimer un haut-le-cœur. Danny finit par le fermer d’un geste sec avant de s’appuyer là dessus.

-Je ne vois qu’un seul genre de personne qui peuvent avoir besoin d’autant de sang, déclara-t-il de façon presque pragmatique. Et non, Léo, ce n’est pas pour de l’humanitaire.

Un bruit d’éclat de verre me fit sursauter. Callie venait de lâcher le verre qu’elle tenait à la main, et fixait maintenant les débris d’un air horrifié. Ils avaient une couleur rouge assez malsaine. La couleur du sang séché.
Un verre, c’était fait pour boire… Non ?
Je sentis la bile me remonter dans la gorge en comprenant ce que ça signifiait.

-Tu déconnes ? lâcha Callie d’une petite voix.
-Un vampire, explicita-je en luttant contre la nausée. Ici.
-Il faut qu’on trouve Antoine, nous ébroua Danny en enlevant les débris de verre. Et vite.

Il s’avança énergiquement vers une porte dans le salon et ouvrit la porte d’un geste sec. Cette fois, la pièce était dans le noir, et j’eus la présence d’esprit d’ouvrir l’application « lampe torche » de mon téléphone. Je faillis lâcher un cri en voyant un visage en face de moi, et je laissai tomber mon portable de panique

-Léo !

Danny chercha ma main à tâtons, et je m’y agrippai avec force. D’accord, mon comportement était loin d’être cohérent. Mais j’avais mon cœur qui battait à une vitesse folle. Les yeux qui m’avaient fixée ne m’étaient pas étrangers.
Non. Les vampires d’accord. Les fantômes, pas question.
Je mis mon autre main sur mon cœur pour calmer mon rythme cardiaque.

-Ça va, haletai-je.
-Tu es sûre ? s’enquit Callie en allumant son propre portable. Oh …
-Quoi ? fit Danny en se tournant vers elle.

Je sentis sa main se figer dans la mienne. Je ramassai mon portable sans lâcher Danny, et rallumai fébrilement la lampe pour voir ce qui effrayait mes compagnons. J’eus l’impression que quelqu’un avait injecté un liquide froid dans mes veines, et qu’il me glaçait lentement les vaisseaux sanguins, engourdissant mes membres. Le mur devant lequel nous nous tenions était empli de photo. Il ne restait pas le moindre centimètre carré de peinture. Que des photos. D’une unique personne. Dont je n’oublierait jamais les yeux bleus et rieurs.
Geoffrey.

-Oh mon dieu, laissa-je échapper.

Callie hocha sinistrement la tête.

-C’est la chose la plus flippante que je n’ai jamais vu …

Danny ne dit rien. Il s’était intégralement figé, comme si la vue de son frère l’avait changé en pierre. Je le laissai à son hébétude et fit tourner la lampe autour de la pièce. Tous les murs étaient tapissés de photos de Geoffrey. Dans certaines, d’autres personnes apparaissaient. Danny. Isabelle. Léna. Un pan entier de mur paraissait être dédié à des photos de couple, des photomatons, des photos d’eux s’embrassant … En revanche, toujours aucune trace d’Antoine. Je remarquai aussi une commode, où beaucoup d’objets semblaient être entreposés. Je voulus m’approcher, mais Danny eut un regain d’énergie et serra ma main si fort qu’elle me fit mal. Je ne voyais pas ses yeux dans la pénombre, mais je compris facilement le message. « Ne me laisse pas seul. Pas seul avec son fantôme. s'il te plaît ». J’aurais été cruelle de lui faire ça. Et j’étais cruelle de ne pas le rassurer.
Mais le fait était que j’étais presque dans le même état que lui.
Voir mille photos du frère que j’aurais voulu connaître, comme un rappel de ce que j’avais manqué toutes ses années … ça me tordait le ventre de manière douloureuse.
Et puis même sans cela, l’ambiance de cette pièce était malsaine. C’était un véritable temple au souvenir de Geoffrey.
Et le sang d’à côté, c’était son sacrifice aux morts ?
Je ravalai ma nausée de mon mieux, et pressait la main de Danny.

-Viens, lui fis-je d’une voix douce. Faut qu’on trouve Meynier.

Danny ne bougea pas. Seuls ses yeux bougeaient, d’une photo à l’autre, comme hypnotisés.

-Danny, repris-je d’une voix plus ferme. Ça ne sert à rien de rester là. On s’en va.

Je serrai sa main, mais même au maximum de ma force, je ne lui rendais pas la pression qu’il exerçait sur la mienne.

-Danny, le suppliai-je finalement. Tu commences à me faire mal, là.

Je ne l’aurais jamais avoué, habituellement. Je préférais le faire comprendre de manière plus subtile. Mais là, je n’avais qu’un souhait : quitter cette pièce au plus vite. Danny baissa finalement la tête, avant de me regarder. La pression de sa main se relâcha et je laissai échapper un infime soupir. Alors je sentis ses doigts rencontrer ma joue. Surprise, je ne tentai pas de me dérober. Son souffle me caressait la joue, et pour la première fois, je constatai que je ne craignais plus le spectre romantique qui nous avait toujours hanté quand nous étions proches.
Comment pouvait-t-il encore exister ?

-Léo, souffla Danny d’une voix si faible que je me demandai comment je pouvais l’entendre. Je … Je n’ai jamais voulu te faire de mal. Ce … ce n’était pas moi. Mais ça n’arrivera plus jamais. Jamais, tu m’entends ?

J’avais surtout l’impression qu’il cherchait à se convaincre lui-même. Et je comprenais aisément qu’il ne parlait pas de ma main. Je baissai les yeux en me mordant la lèvre. Il avait passé une main dans mon cou, effleurant doucement ma joue du pouce. Son doigt cueillit une larme. Je ne m’étais pas rendue compte que je l’avais laissé échapper. Son autre main me prit par la nuque, et son front rencontra le mien. Je les vis alors à mon tour : les petites perles translucides qui s’accrochaient désespérément à ces cils pour ne pas tomber.

-Jamais, Léo, répéta-t-il doucement, toujours très bas. Parce que … parce que tu es ma petite sœur.

Parce que tu es ma petite sœur. Les mots me parurent presque irréels. Les larmes me montèrent au yeux, et je clignais des paupières pour les contenir. Je n’avais jamais admis ces mots. Je ne me sentais pas capable de les lui retourner. L’avais-je un jour considéré comme un grand frère ? J’aurais pu, avec l’instinct de protection qu’il était censé avoir à mon égard. La transition aurait pu être facile. Mais le Spectre romantique nous avait toujours accompagné, s’accrochant à nos pas, et j’avais été incapable de voir Danny autrement qu’un garçon comme les autres. Puis la vérité avec éclaté, chassant le spectre, mais avait aussi ébranlé les résolutions de Danny. Il avait failli me blesser : son instinct protecteur de grand-frère avait disparu. Alors, non. A aucun moment je n’avais été capable de le voir comme un grand frère.
Tu es ma petite sœur.
Je pouvais vraiment l’être malgré tout ce qui s’était passé ?
Pourrais-je le lui rendre ?
Je ne savais pas quoi répondre. Et quelque soit la réponse, elle entrainerait nécessairement des larmes. Ce n’était pas quelque chose que je souhaitais, alors je restai silencieuse, et hochai doucement la tête contre la sienne. Danny poussa un petit soupir, et s’écarta un tout petit peu. Ses doigts glissèrent sur mes épaules et parurent hésiter. Je compris rapidement pourquoi ils étaient indécis, et les aidai en l’enlaçant de mon plein gré.
Je lui en voulais. Je n’étais pas sûre de pourvoir être sa sœur, tout de suite.
Mais je pouvais apprendre.
J’avais besoin de lui. Malgré tout.
Les bras se refermèrent sur moi, naturellement, instinctivement. Notre étreinte me rappela la première fois qu’il m’avait prise dans ses bras, au stand de tir. Je me souvins de cette sensation de bien-être, comme si tout allait de soi. Je ne l’avais pas comprise alors. Mais au fond, elle était évidente… J’avais été entière. Parce que j’avais retrouvé un pan de famille. Un petit morceau de mon père qui m’avait été inconnu. Mon cœur se serra pendant que je constatai que Danny avait bien plus en commun avec papa qu’il ne pouvait le penser : les yeux, son allergie, cette manie de corner les pages des livres dont j’avais aussi hérité, son obstination, son espièglerie … j’arrivais même à trouver leur odeur identique. Mais ça, je pensais aussi que c’était due à l’émotion, à la psychose plus qu’à un fait.

-Hé !

Je sursautai et Danny se détacha de moi. J’en avais oublié Callie – et Antoine, pour ma plus grande honte. Je me sentis rougir en pensait que peut-être elle avait tout entendu, mais elle était de l’autre côté de la pièce, le visage pâle, et ne s’était retournée que pour nous voir enlacés. Mais pour l’heure, elle se fichait bien des rumeurs, elle aussi : ses yeux n’étaient même pas accusateurs. Juste écarquillés.

-Désolée de déranger, mais on a un boulot, nous rappela-t-elle avec son manque habituel d’empathie. C’est quoi, la prochaine pièce, Dan ? Parce que je pense qu’on est resté assez longtemps dans ce temple. J’ai l’impression d’être chez les aztèques. C’était pas eux les cannibales ? Oh, laissez tomber ! Avec tout ce sang qu’il y avait dans le frigo, ça me fout les jetons ! Vous ne pensez pas que Léna ait pu donné du sang à la mémoire de Geoffrey ?
-Callie ! m’indignai-je.

Mon estomac se retourna, et je sentis à nouveau la bile me monter à la gorge. Mais elle haussa les épaules.

-Je préfère ça à la présence potentielle d’un vampire, avança-t-elle.
-Ou à l’alliance potentielle entre Léna et un vampire, grommela Danny.

Les yeux de Callie s’écarquillèrent un peu plus.

-Non mais tu es fou ? Tu n’y penses pas sérieusement ?

Mais Danny avait largement repris constance après son épisode émotif, et ses yeux étincelaient dans la pénombre. Oui, il y pensait sérieusement. Mes entrailles se glacèrent. Il fallait qu’on trouve Antoine.

-Prochaine pièce ? demanda-je en regardant autour de moi.
-Il doit y avoir une porte, ici, expliqua Danny en montrant un mur. A la base, cette pièce devait être une chambre, pas un tombeau. Et elle mène droit à la salle de bain.

Il fouilla entre les photos et Callie et moi l’éclairâmes de nos téléphones. Finalement, il trouva la poignée derrière et la tira. La porte ne broncha pas.

-Verrouillée, constata-t-il en se penchant pour voir dans la serrure. La clef n’est pas là, et je vois rien d’ici.
-Tu sais crocheter une serrure ? demanda Callie avec inquiétude.

Danny secoua la tête en se mordant la lèvre. Je les regardais tous les deux, les yeux écarquillés. Quoi, aucun des deux ne savait crocheter une serrure ? (Pas que j’étais la spécialiste en la matière, mais je pensais que Callie aurait su le faire, vu les quatre-cent coups qu’elle avait fait dans son adolescence). Et puis, ils étaient des enfants de Gaia, non ? Quand la finesse n’était pas de mise, il restait la force, et c’était quelque chose qu’Aguiard, le professeur d’escrime, nous avait répété pendant des semaines. Oh, et puis j’étais là, aussi ! Je fourrai mon téléphone dans les mains de Danny, et fermai théâtralement les main. Une seconde plus tard, je les ouvris. La clef était dedans.

-Abracadabra ! chantonnai-je en fourrant à la hâte la clef dans la serrure.
-C’est dans ces moments là que je te préfère, la rousse aux bois dormants ! me félicita Callie.

La porte s’ouvrit avec un déclic, et Danny fut le premier à s’engouffrer dedans. Callie et moi le suivîmes. La pièce était noire aussi, mais cette fois, mes doigts trouvèrent à tâtonnement un interrupteur. La lumière inonda la petite salle de bain. Elle était vieillotte, mais surtout d’apparence déserte. Du moins, c’était ce que je pensais … avant de voir un pied dépasser des portes fermées de la douche.

-Merde, jura Danny en ouvrant l’étroite douche.

Antoine y était replié, l’air évanoui. Quelqu’un lui avait sommairement bâillonné la bouche (en d’autres circonstances, ça aurait été quelque chose que j’aurais approuvé), et ligoté les poignets derrière le dos. Des mèches blondes trempaient dans le sang qui s’échappait d’une blessure sur son front. Danny le prit par les aiselles et le sortit de la douche pour l’adosser contre un mur.

-Antoine, l’appela-t-il en lui retirant son baillon.

Il le secoua, mais Antoine demeura inerte. J’eus la présence d’esprit de trouver une serviette et de la mouiller pour nettoyer la plaie à sa son front. Mon cœur battait la chamade, mais s’était ôté d’un poids non négligeable. On l’avait retrouvé. Il était vivant. Danny vérifia son pouls et regarda sommairement s’il n’avait pas d’autre blessure.

-Ils ont dû bien l’assommer, constata-t-il en ouvrant le gilet d’Antoine pour voir s’il n’avait pas de blessure sur le torse. Fermez les yeux, les filles. Même évanoui, il a le droit à la pudeur.

Je lui obéis, réprimant un sourire. Je ne pouvais pas décemment admettre que je l’avais déjà vu torse nu.

-Ils ? s’inquiéta Callie en fermant elle aussi les yeux .
-Léna et son complice vampire ? devinai-je.

L’idée me tordait le ventre. Je n’arrivais pas à imaginer Léna faire ça. Le sourire qui avait failli me venir aux lèvres s’envola aussi tôt, remplacé par une grimace d’angoisse. Danny nous indiqua qu’il avait fini d’examiner Antoine, et Callie entrepris de lui couper ses liens.

-C’est impossible, soufflai-je doucement. Ça ne peut pas … ça voudrait dire …

Le reste s’étouffa dans ma gorge, mais je n’eus pas besoin d’aller plus loin : Danny hocha sèchement la tête. L’idée devait lui être plus difficile à imaginer qu’à moi.

-C’était Léna son corbeau ? fit Callie d’une petite voix, disant tout haut ce que nous pensions tout bas.
-Il semblerait, confirma sombrement Danny.
-Non, répondis-je avec une fermeté qui me surpris. Pragmatiquement, c’est impossible, et Antoine lui-même l’a admis. Pendant qu’elle était censée être en Bretagne, Antoine recevait des mails du compte administrateur de Sappho. Si c’est elle, c’est …

Je me tus, en me rappelant douloureusement de ce à quoi j’avais songé ce matin. Non pas un, mais deux corbeaux. Au moins. Danny me lança un bref regard, et il parut lire dans mes pensées.

-Un complice, peut-être, proposa-t-il.
-Mais pourquoi elle aurait fait ça ? s’enquit Callie en regardant nerveusement par la porte ouverte.
-Aucune idée, avoua Danny en réprimant son émotion de son mieux. Mais on n’a pas le temps de s’occuper de ça.

Je hochai distraitement la tête.

-On doit rentrer à Sappho, enchéris-je doucement.
-Et aller voir Devyldère, continua Danny en tentant d’hisser Antoine.

Callie lui fit de grands yeux, mais moi je souris. C’était l’esprit de mon père qui l’avait lui aussi convaincu de l’innocence de Devyldère. Elle ne pouvait pas avoir fait ça. Pas en étant la marraine de Geoffrey et la meilleure amie de papa. Danny le savait autant que moi – peut-être même plus. J’avançai pour l’aider à soutenir Antoine, mais c’était un véritable poids mort. Danny était plus grand que lui, mais un poids mort était toujours difficile à transporter. Je m’apprêtai à l’aider, quand j’entendis quelques bruissements de l’autre côté de la paroi. Je m’immobilisai net, et jetai un coup d’œil à Danny. Il était bien trop occupé à maintenir Antoine pour remarquer quoique soit. Callie était venue l’aider.

-Si tu pouvais te réveiller maintenant, Meynier, grommela-t-elle, croulant presque sous son poids. Histoire que tu vois ton pire cauchemar…
-Pour ça, il faudrait d’abord que vous sortiez d’ici, fit une voix horriblement familière à mes oreilles.

Je me retournai vivement. Mes oreilles ne m’avaient donc pas trahie, et mes yeux s’écarquillèrent sous le choc. Ce n’était pas Léna qui se tenait dans l’encadrement de porte. Mais c’était bien une connaissance.
C’était le métalleux qui m’avait agressé dans le train pour Orléans.
Il me lança un sourire torve en posant sur moi ses iris incroyablement clairs.

-Alors mon petit oiseau, comment on se retrouve ? susurra-t-il d’un ton doucereux.

Alors qu’il parlait, je remarquai un détail que je n’avais pas vu lors de notre première rencontre. Ses dents. Plus précisément, ses canines. Incroyablement blanches. Incroyablement pointues.
Nous devions avoir devant nous le propriétaire du sang dans le frigo.
Me estomac se retourna, et j’agrippai machinalement la dague d’Antoine qui pendait à ma ceinture. Du coin de l’œil, je vis Danny confier (tant bien que mal) Antoine à Callie pour préparer son arc. Mais cette fois, il ne me visait pas. Le métalleux eut un sourire amusé.

-Tiens tiens, se moqua-t-il en s’appuyant avec nonchalance sur l’encadrement de porte. Tu me dis quelque chose, je t’ai déjà vu quelque part … où ça… (il fronça les sourcils en faisait mine de réfléchir, puis eut soudain une révélation : ) Oui, je sais ! J’ai connu ton frère, un jour … il y a longtemps.

Je vis les doigts de Danny trembler sur sa flèche et il arma immédiatement son arc. Un éclair de fureur avait traversé ses yeux. Ne craque pas, le suppliai-je. Pas maintenant. Je gratifiai le métalleux d’un regard féroce, et sortis ma dague au clair.

-On est trois, tu es seul, observai-je dans un souci de le détourner de Danny. Alors tu nous laisses passer.
-Non, je ne pense pas, minauda doucement le vampire en s’avançant vers moi.

La flèche partit, et alla se ficher dans le pied du méttalleux. Il poussa un grognement de frustration en se penchant pour l’arracher, et je profitai de son mouvement pour lui asséner mon pied dans les parties intimes, et un autre coup dans le ventre. Avec d’autres grognements, il s’affala à terre, et cette fois, je vis distinctement ses canines luire.
Vampire.
Danny me lança son arc et aida Callie à soutenir Antoine. Je les éclairai dans le temple, cherchant la porte à tâtons.

-Prend ton temps, Léo, grommela Danny derrière moi.
-La ferme, le taclai-je en mettant enfin la main sur la poignée.

J’ouvrit la porte à la volée et la tint ouverte pour qu’ils puissent passer avec Antoine. La porte d’entrée était toujours ouverte, et Callie et Danny s’y précipitèrent, mais à peine avaient-ils fait un pas, que quelqu’un surgit de la cuisine pour mettre un coup de pied dedans. Elle se referma avec un grand fracas, et la personne eut un grand sourire satisfait en s’y adossant. Elle nous jaugea de ses yeux bleus, habituellement rieurs. Mais malgré son sourire, ils étaient cette fois glacials.

-Alors les enfants, vous pouvez me dire où vous comptiez aller ? s’enquit Léna avec un air presque réprobateur.

La suite arrive ... presque de ce pas !! (j'ai des trucs à faire, je la posterais dans la journée ! Pareille pour les préventions, désolée ! :)
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Je lirai plus tard parce que là je vais aller manger une croûte au fromage après avoir fait du ski de randonnée (ça c'est juste pour te prouver à quel point ta vie va être merveilleuse à partir de maintenant) MAIS JE SUIS TROP HEUREUSE ça fait trois jours que je passe voir tous les jours si tu as posté :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Argh

J'arrive pas à le croire

Bon, déjà, critique purement pratique : ils ont loué ou acheté leur appart ? Parce qu'on dirait plutôt qu'ils l'ont acheté, mais en fait on s'en balance :lol:

Je vois ce que tu veux dire par bizarre, mais pour moi c'est dû au fait qu'on quitte Sappho et ... que y a du sang dans le frigo :lol: On se croirait dans ton fameux Esprits Criminels. En fait y a un petit côté surréaliste, mais c'est aussi comme ça que le vivent les persos non ? Alors oui, il est bizarre, mais ça me paraît normal :lol: (paradoxe quand tu nous tiens)

Antoiiiiiine bouhouhou
Bon, le temple à la mémoire de Geoffrey là, ça c'est vraiment horrible et si bizarre, et clairement Léna est devenue folle parce que c'est très très très étrange et pourquoi DIABLE s'est-elle associée avec un des vampires qui a tué Geoffrey ?! (oui parce que moi c'est ce que j'ai compris et je m'en fous si c'est pas le cas)
Ca va mal finir tout ça, très très mal. En plus Antoine est vraiment pas en état de se battre et GRETEL N ETAIT PAS DANS LE COMPLOT me voilà fort triste :lol: Nan, plus sérieusement ça sent sérieusement le roussi là et le pauvre Danny, Léna c'était un peu sa grande soeur et BIM fini
Et wait, pourquoi est-ce qu'elle s'en prendrait à Antoine alors qu'elle héberge chez elle un vampire ? (que ce soit celui qui ai tué Geoffrey ou non ça reste la même race) Et puis elle a été attaqué par un vampire au début de l'année non ? Est-ce qu'elle est devenue un vampire et personne s'en est rendu compte ? AAAH tellement de questions sans répooooonse

Sinon, Danny est vraiment trop chou quand il lui dit que c'est sa petite soeur et j'ai hâte de le voir en action comme grand frère dans le tome 2 :lol: Et puis la réaction de Léo est parfaite je trouve, le fait qu'elle lui en veut mais qu'elle l'accepte quand même comme sa famille.

Et...bah voilà
J'espère que je t'ai pas trop servi à rien :lol:
La suite pitié T.T Je veux savoir si Léna est un vampire caché !
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 18 (3/3). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Et donc voilà la suite ! Bonne lecture :)


Chapitre 18 (3/3) : Le Break, 2.0.

Nous restâmes un instant figé. J’avais beau m’y attendre, la vision de Léna me paralysa monentanément les jambes.

-Non mais qu'est-ce que tu fais ? s’indigna (naïvement) Callie, qui croulait presque sous le poids d’Antoine.
-Je penses que la véritable question est qu'est-ce que tu as fait, rectifia Danny, crachant presque ces mots.

Il avait déjà la réponse. Son intuition le lui avait fait comprendre dès l’instant où il avait vu du sang dans le frigo. Mais la conclusion logique refusait toujours de s’imposer à mon esprit. Léna eut un petit sourire peiné. Elle ferma le verrou de la porte, et s’avança joyeusement dans le salon en nous faisant signe de la suivre. Nous échangeâmes des regards perplexes, mais Léna interrompit notre débat pour prendre la parole :

-Tu te souviens de cet appartement, Danny ? souffla-t-elle en caressant un canapé.

La mâchoire de Danny se contracta.

-Oui, rétorqua-t-il sèchement. Et je me souvenais d’une chambre, dans l’autre pièce. Pas un temple.

Il commençait à trembler, mais j’ignorais si c’était sur le coup de l’émotion, ou si le poids d’Antoine commençait à être trop lourd à supporter. Le sourire de Léna se figea, et ses yeux se durcirent.

-Il faut bien que quelqu’un se rappelle de lui.

La remarque me piqua au vif, et je ravalai de mon mieux le commentaire brûlant qui me venait à la bouche. Ce n’était pas censé me toucher plus que ça. En théorie, je n’avais pas de rapport avec Geoffrey. Mais Danny ne se gêna pas :

-Tu crois que moi, je m’en souviens pas ?!
-Et il a fallu que attende sept ans pour t’intéresser à ce qu’il l’a tué ! s’écria Léna en se tournant brusquement vers lui, accusatrice.
-J’étais un gosse, Léna ! lui rappela-t-il, maîtrisant tant bien que mal les accents de rancoeur. Un gosse. Comment voulais-tu que je trouve quoique soit ? Comment voulais-tu que je crois que c’était un meurtre ?

Les yeux de Léna roulèrent dans leurs orbites.

-Oh, arrête. A douze ans, tu étais largement capable de voir les signes, cingla-t-elle avec froideur.

Danny la fixa avec de grands yeux. Je sentais sa tension d’ici, et je le sentais sur le point d’exploser. Alors je me fis violence, et articulai prudemment :

-Tu es sûre que tu n’inverses pas les rôles ?

Le regard de Léna glissa lentement vers moi, et elle pencha la tête sur le côté, l’air de réfléchir à la question.

-Ce que je veux dire, précisai-je, c’est qu’aux dernières nouvelles, ce n’est pas Danny qui héberge un vampire.
-Oh ! comprit soudainement Léna en levant les yeux au ciel. Tobias ? Un … vieil ami.

Danny se raidit, en même temps que moi. Je n’avais pas oublier ce que « Tobias » avait dit à Danny. Il avait connu Geoffrey. Il y a longtemps. Léna parut s’amuser de la réflexion qui brillait dans nos yeux. J’eus une soudaine envie de lui sauter à la gorge. Mais à quoi jouait-elle ?

-Oh, ne vous en faites pas, il n’a jamais touché Geoffrey, se moqua-t-elle en s’installant sur le canapé. En revanche, il n’a pas pu s’empêcher de me blesser, mais m’a laissé la vie sauve – oh, oui, c’était voulu. Ils avaient encore besoin de moi. Mais il a une dette envers moi. Les autres …
-Besoin de toi ? répétai-je sans comprendre.
-Et il a aussi tué Elodie ? répliqua durement Danny.
-Non, bien sûr. Les vampires qui ont tué Elodie ont été tués. Tu le sais, tu y a participé.

La mâchoire de Danny se contracta à nouveau. Callie n’y tint plus, psychologiquement et physiquement. Elle abandonna Antoine à Danny (qui, lui aussi à bout, le posa doucement à terre), et se précipita vers Léna couteau en main. Elle lui mit la lame sous la gorge, les yeux brillants, les cheveux parcourus de veines rouges et noirs.

-Et c’est toi qui les a introduit ? demanda-t-elle d’une voix étouffée.

Léna ne jeta pas le moindre coup d’œil au couteau, et dit de façon très posée :

-Oui.

Je portai une main à ma bouche, instinctivement. Je m’attendais en entrant à entendre ses mots. Il avaient été une possibilité, douloureuse, un spectre qui flottait au-dessus de nous, et qui n’avait jamais cessé de flotter. Le spectre venait de prendre substance. Pourtant, je voyais toujours à travers. Je n’arrivais simplement pas à le croire. Pas à le comprendre. Nous nous étions confiés à Léna. Elle était la personne au-dessus de tout soupçon. Elle avait souffert autant que nous.
Comment pouvait-elle être le corbeau ?
Callie recula un petit peu, sous le choc. Des larmes brillaient dans ses yeux.

-Pourquoi ? croassa-t-elle en retenant ses pleurs.

Je rejoignis Callie en quelques pas pour la soutenir psychologiquement. Je savais que Léna avait été une grande sœur pour elle. La maman de tout le monde, un pilier sur lequel tout le monde s’était appuyé depuis la mort de Geoffrey. La famille venait d’être à nouveau amputée. Léna fixa tranquillement Callie, et contourna son couteau pour cueillir une larme qui venait de couler.

-Oh ma petite Callie, soupira-t-elle. Toute notre vie, nous avons tué les créatures de notre maître. Est-ce que tu trouves cela logique ?

J’eus l’impression qu’elle me donnait un coup de poing dans l’estomac. Le « notre maître » était une référence presque explicite à Baal (dont la traduction était seigneur, maitre). Mais ce qui me choquait le plus était le fond de ce qu’elle venait de dire.
Qui n’avait pas cessé de me répéter que c’était ou les créatures d’Hélios, ou moi ? Qui m’avait toujours répété que la seule chose que je devais faire, c’était les tuer pour survivre ? Et maintenant, elle nous demandait si on trouvait ça normal ?
J’avouais qu’il y avait quelque chose qui m’échappait.

-C’est ou elles, ou non, lui rappela Danny, de la perplexité dans la voix.

Il me jeta un coup d’œil, et je vis que nous venions de faire le même cheminement. Même nos cerveaux étaient identiques. C’était pour cela que nous étions généralement en phase.

-C’est possible d’avoir un « elle et nous », fit durement Léna.
-Ce n’est pas ce que tu as dit, me souvins-je.
-Et ce n’est pas ce vers quoi elles tendent, enchérit durement Danny. Sinon, Geoffrey et Elodie seraient encore en vie.

Léna nous regarda doucement, et ricana.

-Oh, ces créatures-là ? Oui, tuez les Sirènes, tuez les Corbeaux … Mais pas celles que notre seigneur a spécialement bénies.
-Baal ne bénit personne en particulier, il ne se rend pas compte de ce qu’il fait, déclarai-je en mettant un maximum de conviction dans ma voix.
-Peut-être, admit Léna. en revanche, tu es bien placée pour remarquer que mon ami Tobias n’a pas l’air complètement dérangé.

Je supposai que ça relevait du point de vue. Personnellement, il me faisait flipper, et il avait tout d’un psychopathe. Mais le visage de Danny m’indiquait qu’il appuyait Léna sur ce point. Celle-ci sourit, satisfaite.

-Alors tuer des Créatures intelligibles, ça relève du meurtre, conclut-t-elle.
-A quoi ça rime, Léna ? s’agaça Callie en se relevant. Pourquoi tu dis tout cela ?

Elle nous regarda tous les trois, l’air compatissant, comme si une vérité aveuglante nous échappaient.

-Vous ne comprendriez pas, souffla-t-elle en s’adossant au fauteuil avec son aisance habituelle.
-Non, au contraire, cingla Danny. Parce que t’associer avec les assassins de Geoffrey, ça se comprend tout à fait.

Les yeux de Léna se durcirent dangereusement, et un éclair indéfinissable passa dans ses iris. Ignorant le couteau que Callie tenait toujours (passivement), elle se leva pour se planter devant Danny. Il ne recula pas, et se contenta de la scruter intensément. J’eus une boule au ventre. La teneur de ce moment était pesante : Danny tentait de garder la tête haute, mais ses yeux trahissaient les émotions douloureuses qui le traversait : trahison, déception, et espoir.

-Danny, s’il y a quelque chose dont tu peux être certain, c’est que j’aimais Geoffrey, affirma Léna avec lenteur. Je l’aime toujours. Et c’est pour lui que je fais tout ça.

Je vis la paume d’Adam de Danny descendre et remonter nerveusement. Mes entrailles se glacèrent. J’avais l’impression que le monde que je m’étais construit en venant à Sappho s’effondrait pierre par pierre.
Pour lui que tu faisais quoi, Léna ?

-Non, j’avoue ne pas comprendre.

Pendant une fraction de seconde, les yeux de Léna se tournèrent vers moi, mais elle reposa rapidement son attention sur Danny.

-Tu te souviens de ce que Geoffrey disait sur Dieu ?

La question me parut déplacée. Danny écarquilla les yeux, désappointé, avant de hocher doucement la tête.

-Il y a un ordre dans la nature, et c’est à nous de suivre cet ordre, se rappela-t-il.

J’eus l’impression de recevoir un coup de poing au creux du ventre, et mis une main sur ma bouche pour masquer mon trouble. Ma gorge se comprima. Cette maxime m’était horriblement familière. J’avais entendu ces mots toute mon enfance. « Elle te protège, ma petite étoile. Rien de ce qu’elle fait n’est fait par hasard, même si elle n’en a pas conscience. Nous ne sommes pas un hasard. Il y a de l’ordre, dans ce monde qu’elle anime. Et sans nous en rendre compte, nous suivons cet ordre. Nous l’animons, lui donnant vie et substance. C’est aussi ça la vie, ma petite étoile. C’est nous ».
Je me souvenais de ces mots comme si je les avais entendus hier. Papa me les avait dit pendant des années. Ce que j’ignorais, c’était que Geoffrey les avait également entendus. Le poids de leur perte se fit alors cruellement sentir, et je me détournais pour que ni Danny ni Léna ne voit mon trouble.

-Quel est l’ordre, Danny ? s’enquit doucement Léna, à la manière pragmatique d’un professeur.

Je ne vis pas la réaction de Danny, mais je devinai la lueur de curiosité qui s’était activée dans son regard. Elle me fut d’autant plus insupportable, même virtuelle, puisqu’il faisait référence, sans le savoir, aux paroles de mon père – qu’il avait, rappelons-le, détesté. Je me rapprochai d’Antoine, et sortis la serviette que j’avais rangé dans ma poche pour tapoter sa blessure. Sa bouche tressaillit, et je poussai un soupir de soulagement. C’était le premier signe de vie qu’il donnait depuis qu’on l’avait retrouvé.

-Tiens bon petit prince, on va te sortir de là, murmurai-je en essuyant le sang sur son front.
-Si tu parles de l’ordre du cosmos …, fit Danny d’un air superbement dubitatif.
-Ne me fais pas ces yeux-là. Enfin, Danny, sois logique ! (Le son des pas de Léna m’indiquait qu’elle commençait à faire les cent pas). On est d’accord, Gaia est la vassale de Baal. Alors pourquoi devrions nous nous acharner à détruire les créatures que le seigneur a créé, si nous ne sommes que des créations de sa Vassale ? Quel droit avons-nous sur elles, Danny ?
-Et elles, quelles droits ont-elles sur nous ? répliqua-t-il âprement. Quel droit ont-elles de prendre nos vies ?

Léna marqua une pause, et je lui jetai un coup d’œil. Une lueur étrange, presque fanatique, brillait dans son regard. Son visage s’était transformé à mes yeux. Léna avait fait tomber le masque.

-Tous les droits que donnent le pouvoir. Et le pouvoir, elles l’ont. Il a simplement été dénigré. On les a réduit à des « créatures », des animaux à abattre. Alors qu’elles sont bien plus puissantes. Hélios, tu parles ! Ce n’était qu’une façon pour les grecs de minimiser la force de l’entité créatrice pour les enfants de Gaia qu’ils formaient ! Une manière de les rassurer. « Ne vous en faites pas. Ce n’est que le Soleil, n’ayez pas peur. Vous avez vu le pouvoir que vous procure la terre ? Vous êtes bien plus forts ! ». Quelle réduction ! Quelle arrogance !

Le ton de Léna dégoulinait de rancœur, mais aussi de ferveur. Son discours venait de loin, aussi bien dans son être que dans son histoire. C’était un discours assimilé depuis longtemps qu’elle présentait avec les tripes.

-Réduire Baal à « Hélios », au « Soleil »… C’est quelque chose de presque blasphématoire. Une volonté des grecs, du berceau de la civilisation occidentale de prendre la main sur le pouvoir. Car au fond, les écoles, nous, notre rôle, ce n’est que ça : une lutte de pouvoir. Les anciens voulaient reprendre le pouvoir à Baal. D’où le mythe de ces Créatures sans cervelles, le cerveau complètement grillé par le méchant « Hélios » qu’on vous met dans la tête à longueur de journées. On a diabolisé ses créatures pour qu’elles perdent le pouvoir. On t’a toujours dit que Médée était une créature d’Hélios, tu te souviens ? Tu as lu la Médée de Sénèque? Qui est le cruel, dans la pièce, Médée ou Jason ?

Je fermai les yeux alors qu’un silence s’installait du côté de Danny. Je connaissais la réponse pour avoir étudié Médée en long, en large et en travers, faisant des comparatifs avec tous les auteurs ayant travaillé dessus, dont Sénèque. Et c’était sans doute la version qui m’avait le plus marquée. Parce que Médée n’apparaissait pas si méchante que cela. Dans cette version, pour être honnête, j’avais surtout considéré que l’antagoniste était plus Jason que Médée. Mon cœur se serra. C’était exactement la conclusion qu’attendait Léna.

-Tu sais bien que j’ai raison, poursuivit-t-elle, une note de satisfaction dans la voix. Sénèque, bien que latin, a été un des derniers penseurs à dépeindre une Créature d’Hélios pensante, et ayant de l’empathie. Médée avait été marquée par Baal, il est vrai. Mais ce n’était pas une déjantée. Elle méritait sa place parmi les grands de son monde – si un enfant de Gaia ne la lui avait pas usurpée. On a qu’une vision de l’histoire, chez nous. La nôtre, une vision manichéenne qui frise le ridicule : eux les méchants qui tentent de nous tuer, et nous les gentils qui tentons de nous défendre.

Callie ricana doucement.

-Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, c’est partiellement ce qui se passe.

Léna partit à son tour d’un petit rire.

-Je te l’accorde, il y a deux sortes de Créatures de Baal. Les soldats, ceux qui obéissent à leurs plus bas instincts, et l’élite, ceux qui sont comme Médée et Tobias. Souvent des humains, du reste, devenus vampires. Danny, souviens-toi, il y a un ordre des choses. Donner à des gens l’intelligence et la puissance ne peut être fait par hasard. L’ordre du cosmos n’a pas à être différent de celui sur terre.

Je réprimai un haut-le-cœur. Elle me donnait la nausée à utiliser la mémoire de Geoffrey – les arguments de mon père – pour tenter de convaincre Danny du bien fondé de sa pensée. Cette conversation ne menait à rien, sinon à faire gagner du temps à Léna et à embrouiller l’esprit de Danny. Les grandes théories et philosophies, c’étaient très peu pour moi.

-Et concrètement, ta belle idéologie, c’est quoi ces conséquences ? enchéris-je en réprimant les émotions qui se bousculaient dans ma voix. La destruction des écoles qui empêchent des copains de Baal de prendre le pouvoir ?

Je sentis plus que je ne vis le regard de Léna glisser sur moi. Un petit sourire retroussa ses lèvres.

-On ne perd pas de vue ses priorités ? s’amusa-t-elle. Mais comme j’ai trouvé en toi une adversaire particulièrement coriace, je vais te répondre : oui, quelque chose dans ce goût-là.

J’avais beau m’attendre aussi à cette réponse, elle me coupa le souffle. Je ne pus m’empêcher de dévisager Léna d’un air incrédule. Callie avait aussi porté la main à la bouche, mais ses yeux brillaient, non de larmes, mais de fureur.

-C’était toi le corbeau ?

Léna posa son regard sur Callie, et eut un petit sourire méprisant.

-Lui ? fit-t-elle en donnant un coup de menton en direction d’Antoine. Oui, je supposai qu’il allait finir par demander l’aide de quelqu’un, notamment après la mort d’Elodie. Simplement, je n’avais pas deviné vers qui il allait se tourner (elle me scruta, de son regard bien particulier, comme si elle me testait). Et j’avoue ne toujours pas comprendre, Léonie. Je pensais qu’il irait voir quelqu’un de mieux placé. Pas une novice – a fortiori une novice qui vient se confier à moi.

Mon sang ne fit qu’un tour dans mes veines. Je la gratifiai d’un regard furibond, mais j’étais intérieurement perplexe. Quelque chose sonnait étrange dans ce qu’elle venait de dire.
Comment savait-elle qu’Antoine était venu me voir en premier ? Ça ne pouvait être Callie : elle n’avait été au courant des secrets d’Antoine qu’aujourd’hui.
Callie plissa des yeux, et un éclair d’horreur les traversa. Un reflet rouge sombre passa dans ses cheveux.

-Tu as vraiment … menacé Lucas ? s’assura-t-elle d’une petite voix.

Le sourire satisfait et les yeux durs de Léna m’indiquaient que non seulement elle l’avait menacé, mais qu’elle aurait mis la menace à exécution si elle avait dû. L’effroi me retourna l’estomac de manière douloureuse.
Avait-elle perdu la raison à ce point ?
Danny avait dû arriver à la même conclusion que moi. Il avait serré les poings tellement ses mains tremblaient.

-Comment peux-tu faire ça ? souffla-t-il, effaré. Comment tu peux ne serait-ce que penser tuer Lucas de sang froid ?
-Dans une guerre, il y a toujours de bons soldats qui meurent, martela-t-elle avec une parodie de sourire triste. J’avais besoin d’Antoine, il était le seul qui puisse faire tomber efficacement les défenses de l’école. Le plan aurait été parfait … (elle me lança un regard acéré) si un petit oiseau trop curieux n’avait pas été fouiller dans les arbres. Et puis, tu imagines à quel point c’est rare de trouver un enfant de la Lune qui ait un point sensible si tangible ? A côté, Achille et son talon peuvent aller se rhabiller ! Il a bien tenté de résister, mais les Sirènes lui ont fait définitivement comprendre que j’avais les arguments de mon côté.
-Les Sirènes, répétai-je en fronçant les sourcils. Tu parles de celles que tu nous exhortes à tuer sans compassion ?

Léna eut un petit sourire, mais ses yeux s’assombrirent considérablement. Ce fut Danny qui répondit d’une voix contenue à grand-peine :

-C’est différent ça, Léo. C’est de la pure vengeance.

Léna haussa un sourcil, l’air surprise que Danny l’ait si vite cernée.

-En effet, confirma-t-elle, des accents dangereux dans la voix. Il y a très longtemps que j’ai conscience de tout ça, Danny.
-Tu l’étais il y a sept ans, continua-t-il, le plus posément que possible.
-Tu es à l’origine de la première brèche, compris-je soudain, une brève conversation me revenant en mémoire comme un éclaire. Tu étais au courant pour les Gardiens depuis très longtemps, depuis que tu étais étudiante – et tu n’as pas jugé bon d’en informer Devyldère.

Un immense poids s’ôta de mon cœur. En une phrase, je venais de déculpabiliser non seulement Devyldère, mais aussi papa. Léna me lança un nouveau regard surpris, mêlé au test silencieux qu’elle me faisait sans cesse passer.

-Bien vu, et bien entendu, avoua-t-elle avec une certaine réserve. J’avais été fouiller dans les archives, les très vieilles auxquelles personne n’a jamais eu accès. Quand à la façon dont la brèche s’est faite …

Mais Danny en avait entendu assez. Il avait été frappé d’horreur quand j’avais évoqué l’implication de Léna sur la première brèche, mais maintenant qu’elle confirmait, l’horreur faisait place à la fureur. Je devais avouer que j’avais bien du mal à ne pas y céder également. Je me rendis compte que j’avais sous-estimé le désir de vengeance qui bouillonnait en moi depuis que j’avais découvert que Geoffrey était mon demi-frère.

-Alors tu l’as tué, conclut Danny d’une voix blanche de colère.

Léna se tourna vers elle, les yeux flamboyants, piquée au vif par l’accusation.

-Non ! vociféra-t-elle. C’était un accident ! Jamais, jamais ça n’aurait dû arriver, je ne l’aurais jamais permis ! La brèche avait été crée, certes, et j’y ai contribué. Mais ce n’est pas moi qui ait fait entrer ces vampires ! Pas moi ! C’était simplement un groupe stupide ! (Elle pointa le doigt vers la porte). Pourquoi crois-tu que Tobias m’obéisse au doigt et à l’œil ? Il a une dette envers moi, une dette de sang que je lui fait payer chaque jour que Dieu fait !
-Et que tu fais payer à toutes les « créatures stupides », terminai-je en réprimant ma rage de mon mieux. En nous exhortant à exécuter ta vengeance.

Je songeai à toutes les créatures que les enfants de Gaia avaient tué sous l’impulsion de Léna. Toutes les Créatures qui étaient passées sous le fil de l’épée du candide Lucas, déchirant chaque fois plus son âme, simplement parce que Léna l’avait convaincu que c’était l’unique façon pour lui de s’en sortir. J’en eus la nausée. Léna incarnait un paradoxe difficilement concevable : d’un côté la logique d’une domination des élus de Baal qui devaient prendre le pouvoir parce que c’était leur droit par l’organisation du cosmos, et d’un autre la folie vengeresse qui réclamait le sang de ce qui lui avait coûter tout ce qu’elle aimait il y a sept ans. Ce que je n’avais pas compris, c’était qu’en plus de perdre Geoffrey, elle avait perdu sa raison. Elle me lança un regard empli de résignation. Elle n’éprouvait aucun remord. Elle n’avait fait que son devoir : envers son idéologie (Cf Lucas et Elodie) et envers Geoffrey (cf les Sirènes … et encore Lucas). Puis elle se tourna vers Danny, et eut l’air presque suppliant.

-J’aimais vraiment Geoffrey, assura-t-elle une nouvelle fois. Et je l’aime toujours et à jamais.
-Ça, on l’avait vu, fit remarque Callie avec son manque habituel d’empathie.

Je ne pus m’empêcher de lui adresser un sourire crispé. Je pensais que la pièce en honneur à Geoffrey nous avait tous marqués. Léna pensait peut-être convaincre Danny – et Danny seul, son petit frère, le dernier vestige vivant qu’elle avait de Geoffrey – du bien-fondé de ses actions. Pour ma part, elle n’y arriverait pas. Rien ne justifiait ce qui était arrivé à Elodie. Et rien ne justifiait ce qu’elle avait fait à Antoine et Lucas. Danny la contempla un long moment, et un instant, j’eus deux peur contradictoires : qu’il lui pardonne et la suive dans sa folie, ou qu’il lui plante une flèche dans le cœur sans demander son reste. Finalement, ses yeux croisèrent les miens, et je secouai discrètement la tête. Il reporta son attention sur Léna pour faire le même geste, et se détourna pour venir vers moi et Antoine.

-Non, refusa-t-il. Ce n’est pas de l’amour, ce que tu as fait. c’est … je ne sais même pas le définir (il secoua encore la tête). Désolé, Léna.

Le « désolé » me paraissait de trop, mais j’étais soulagée de sa réaction mesurée. Je m’accroupis vers Antoine en lançant à Danny un regard approbateur. Je tâtai encore la plaie d’Antoine, et cette fois, sa gorge laissa entendre un léger grognement. Sa respiration était beaucoup plus régulière et ses paupières tressaillaient. Il commençait à reprendre conscience.

-On y va, soufflai-je à Danny.

Il hocha la tête, et voulut me relever, mais un pied s’abattit violemment dans mon ventre alors que je voulais me relever avec Antoine.

-Léo ! crièrent Danny et Callie.

Je tombai lourdement à terre, en me prenant le ventre entre les mains. Mes entrailles étaient remontées, et je retenus la nausée qui me venait de mon mieux. Mon regard était embué, mais je vis le sourire sadique du métalleux – Tobias – à travers.

-Non, petit oiseau, susurra-t-il en s’approchant de moi, ses dents luisant. Ce n’est pas l’heure de partir.

Un éclair de panique me traversa et je voulus me relever, mais il me jeta à terre sans ménagement. Je vis du coin de l’œil Danny armer son arc, mais Léna se jeta sur son bras avec un poignard sorti de nulle part. Danny étouffa un cri en s’affalant, et Callie hurla. Alarmée, j’ouvris les yeux au moment où Léna retirait son arme de l’épaule droite de Danny, qui s’était affalé à terre, Callie à son chevet, et l’essuyait froidement sur son jean.

-Désolée Danny, mais il a encore de longues années à faire à mon service, gronda-t-elle, presque sans aucune once d’émotion. De plus, je regrette, mais je ne peux pas vous laisser emmener Antoine. Il commençait à être gênant à Sappho, mais nous avons besoin de gens comme lui, les filii lunae. Ils le veulent vivant. Tobias, laisse Léonie tranquille, s'il te plaît. Tu as plein de sang dans le frigo.

Je vis le vampire avoir une moue de déception. Je m’écartai discrètement en tentant de prendre ma dague sans attirer l’attention.

-Tu veux rire ? grogna-t-il en approchant sa main de ma gorge. Elle est casse-couille au pas-possible, et en plus, tu m'avais promis que je pourrais l’avoir.
-Tu pouvais l’avoir si tu l’interceptais à son arrivée à Orléans, rappela durement Léna. Là, c’est différent. Oh, et puis vas-y ! ça cassera Antoine pour de bon !

Mes yeux s’écarquillèrent d’horreur, et je pris ma dague entre mes mains pour me rassurer. Le geste fut trop brusque, et le vampire me prit soudainement à la gorge d’une main, retenant celle qui tenait ma dague de l’autre. Sa poigne était extraordinaire. Je vis fugacement Danny tenter de se relever, mais Léna mit son pied sur son épaule blessée pour le remettre à terre.

-Non ! hurla la voix de Callie.

Je ne la vis pas au premier abord. Puis, j’entendis Léna hurler de douleur, et porter sa main sur son épaule avec des yeux écarquillés. La pointe d’un couteau y dépassait, et une tâche de sang s’étendait sur le pull de Léna. Callie apparut soudainement derrière elle, abandonnant son camouflage, des larmes sillonnant ses joues. Avec un cri, Léna se jeta sur elle. Tobias leva la tête pour humer l’odeur de sang frais qui émanait des blessures de Léna et Danny, et j’en profitai pour récupérer ma main et donner un coup vif dans sa cuisse avec ma dague. Tobias étouffa un grognement, et attrapa ma jambe. Je me débattis, mais sa poigne me coupait presque la circulation. La panique s’éprit de moi quand je me vis retrousser ses lèvres sur ses canines, et son regard affamé se poser sur ma clavicule. Mon cœur se mit à battre vite et fort. Réfléchis, m’ordonnai-je, tentant de lutter contre l’affolement qui paralysait mon esprit et mes membres. Débats-toi, téléporte-toi ! Mais je savais que je n’arriverais pas à actionner ma téléportation. Tobias me fixait, prêt à fondre sur mon artère, quand il poussa soudainement un cri de douleur en regardant ses doigts avec horreur. Ses mains étaient ornés d’anneaux de fer, et des cloques commençaient y apparaître, comme des brûlures. Il me délaissa pour retirer les anneaux avec frénésie, quand il poussa un nouveau hurlement en portant sa main au piercing qu’il avait sur la lèvre. Il se leva avec un grognement étouffé, et je me redressai en resserrant ma prise sur la dague, le cœur battant.

-Baal tout puissant, c’est quoi cette sorcellerie ?
-Usuellement parlant, on appelle plutôt ça de l’alchimie, corrigea une voix faible, mais familière.

Je faillis défaillir de soulagement en l’entendant. Antoine. Quand Tobias fut complètement relevé, paniqué, j’échappai à sa prise et me précipitai vers lui. Il était encore assis contre le mur, mais s’était un peu redressé, et ses yeux étaient ouverts.

-Ça va princesse ? murmura-t-il avec un faible sourire.
-C’est à toi qu’il faut demander ça, imbécile, grondai-je.

Mais le soulagement ne s’entendait que trop dans ma voix, et le faible sourire d’Antoine s’accentua. Il tenta de se relever, mais il blêmit immédiatement, et j’appuyais mes mains sur ses épaules pour l’obliger à rester assis. Le tour de magie qui m’avait sauvé la mise face à Tobias avait épuisé les rares forces qu’il avait. Je jetai un regard à la ronde. Callie était toujours à la lutte avec Léna dans le salon et arrivait globalement à la tenir à distance. Danny tentait toujours de se relever, mais chaque fois qu’il y arrivait, Léna se détournait de Callie pour le mettre à terre. Une boule de colère remonta dans ma gorge.

-Birdy, fit Antoine d’une voix pressante. L’alchimie … je ne vais pas tenir longtemps.

Je ravalai mon courroux, et hochai la tête. Je comprenais le message : bientôt, le métalleux se jetterait à nouveau sur moi. Je pris la dague que je venais de laisser tomber à côté d’Antoine, posai la garde contre mon cœur. Il battait à tout rompre. Antoine me lança un regard pénétrant.

-Ecoute, j’ai partiellement entendu … ce qu’a dit Léna, articula-t-il avec lenteur. Et ce n’est pas que des conneries. Mais là, dans ces circonstances, je pense qu’on peut s’en tenir à la vision darwinienne de la vie. N’hésite pas.

Mes entrailles se glacèrent. Le sous-entendu était explicite : dès qu’il cesserait de se débattre, c’était ou lui, ou moi. Pas de demi-mesure.
J’allais être obligée de le tuer pour avoir la paix.
Antoine serra ma main.

-Ne réfléchis pas, princesse, me souffla-t-il avec difficulté. Fais-le.

Avant que je n’ai pu répondre, des pas lourds se firent entendre dans notre direction. Antoine hocha la tête, et je me détournai pour voir Tobias se précipiter sur moi. Des cloques couvraient ses doigts et sa lèvre, mais une lueur dangereuse, affamée, assoiffée de sang brillait dans ses yeux. Cette lueur faillit me clouer sur place, mais je réussis à arracher mes jambes à cette torpeur pour lui mettre mon pied dans mes parties intimes. J’entendis Antoine ricaner derrière moi, mais je ne pris pas le temps de m’attarder, d’autant plus que Tobias, qui s’était tout d’abord replié sur lui, avait sorti quelque chose de ses amples vêtements de métalleux. Je ne vis pas ce que c’était, mais il le lança et ça allait se ficher à une vitesse folle derrière moi. Affolée, je me retournai. C’était une étoile à cinq branches, qui s’était fichée à quelque centimètre de la tête d’Antoine. Tobias grogna, et je compris qu’Antoine avait réussis à l’éviter en penchant sa tête. Il en prépara une nouvelle, et je vis dans ses yeux et dans ceux du jumeau de Lucas qu’il finirait par atteindre sa cible.
Il fallait que j’éloigne Tobias d’Antoine.
Je levai la main pour téléporter l’étoile qu’avait le vampire, et elle apparut docilement dans ma main. Tobias lança un regard surpris à sa propre main, avait de me gratifier d’un regard furieux. Bon, j’avais attiré son attention. Le reste du plan, Léo, qu'est-ce que c’était ?

-Léna m’avait promis ton sang, grogna-t-il, sauvagement (et Léna le trouvait civilisé ?). Je te jure que je l’aurais, même si c’est celui d’un petit oiseau.

Mon surnom dans sa bouche m’horripilait, et je déglutis. Oui, je le croyais sur parole. Mais en l’occurrence, je n’avais pas d’autre choix que de lui faire miroiter cette possibilité si je voulais éviter qu’il ne tue définitivement Antoine. Je reculai à tâtons vers la porte qui menait à la pièce-temple derrière, et ouvris la porte avec défi. Allez, le suppliai-je en feignant de me retourner pour m’échapper. Viens me chercher. Tobias était prévisible. Il se rua sur moi, et je dûs me mettre à courir pour de bon. La porte de la salle de bain était ouverte et je m’engouffrai dedans en la fermant pour ralentir Tobias. La salle de bain était pourvue d’une étroite baie-vitrée et je l’ouvris. Elle menait à un minuscule balcon qui donnait sur la Loire tourbillonnante. La rambarde était une précaution ridicule, parce si elle était assez large pour que je puisse monter dessus dans perdre l’équilibre, elle m’arrivait à hauteur de genoux.

-Super, lâchai-je sombrement en contemplant les flots vifs de la Loire en contrebas. Et je fais quoi, maintenant ?

Dans ma volonté de laisser du temps à Antoine et aux autre, je n’avais pas réalisé que j’allais dans une impasse. Mon cœur se mit à battre la chamade et je refermai ma prise sur la dague avec angoisse. La porte s’ouvrit alors à la volée et Tobias se précipita vers moi. Je lui donnai un nouveau coup de pied mais il intercepta ma jambe. Je perdis l’équilibre, et réussis à poser mes fesses sur la ridicule rambarde de pierre pour éviter de tomber. Mes doigts s’y agrippèrent avec panique. Je me débattis, mais Tobias appuya sur ma jambe pour m’attirer à lui. Je voulus lui asséner ma dague dans le cou, mais il me prit de vitesse en tordant mon poignet. Sa force était incroyable, et mon poignet craqua en un bruit atroce. Je ne pus retenir un petit cri, et ma dague tomba avec un son fracassant. Un sourire sadique retroussa les lèvres de Tobias. Ses yeux se posèrent sur ma gorge, et ses doigts se refermèrent sur mes avant-bras, pour me maintenir tranquille. Je me battis avec la force du désespoir, reculant sur la rambarde au point que je pensais que si Tobias ne m’avait pas tenu, je serais sans doute tombée. Il eut un sourire amusé.

-Oh mon petit oiseau, tu veux voler ? susurra-t-il en s’écartant de moi. Je peux te donner satisfaction …

Mon cœur tomba dans ma poitrine.

-Je préfère éviter, articulai-je difficilement.

Je repliai ma jambe sous moi, et tentai de lui donner un coup de genou, mais il appuya sur mon poignet blessé. Je sentis mes os craquer sous la pression, et les larmes me vinrent au yeux. La douleur m’aveugla, et mes genoux faillirent plier sous moi. Il me prit sans ménagement par la taille et me força à monter sur la rambarde. Il ne me suivit pas, serrant toujours mon poignet blessé pour me maintenir sous contrôle.

-Alors petit oiseau, tu sens des ailes prêtes à se déployer ?

Non, elles ne l’étaient pas du tout. Je voulus reculer, le cœur au bord des lèvres, mais je sentis une douleur indescriptible me traverser le bras. Je ne pus retenir un hurlement, et m’affaissai sur moi-même. Tobias posa brutalement sa main sur ma bouche pour me faire taire, et colla des lèvres gluante contre ma gorge. Elles collaient, et une odeur âpre et lourde flottait dans l’air. En un éclair de lucidité, surgissant à travers la brume de douleur qui paralysait mon cerveau, je compris ce qui s’était passé.
Tobias venait de me mordre l’avant-bras bras droit.
Il l’avait lâché pour pouvoir me faire taire, et je le repliai sur ma poitrine. Je vis le carnage à travers mes larmes. Une plaie sanglante en forme de croissant de Lune se dessinait sur la peau pâle. Mon poignet était violeté par la brisure. Mon bras était inutilisable. La nausée s’éprit de moi, et je tentai de me dégager. Mais dès que je bougeais, Tobias me faisait pencher en avant, droit vers la Loire. Ses lèvres se pressèrent un peu plus sur la gorge.

-Alors petit oiseau, l’eau ou le sang ?

Ses lèvres poisseuses étalèrent un liquide visqueux à l’odeur malsaine sur ma gorge. Du sang – mon sang. Ni l’un ni l’autre, gémis-je intérieurement en m’efforçant de ne pas regarder la Loire en bas. Mon bras brûlait tellement que j’avais l’impression qu’il allait se détacher de mon corps, et je n’osais pas bouger de peur que Tobias ne me pousse dans le vide.
J’étais coincée.
Des sanglots nouèrent ma gorge, mais je me refusai à les laisser éclater. Ça aurait donné trop de satisfaction au pseudo vampire. Mon immobilité dû donner sa réponse à Tobias, et je sentis ses lèvres sourire et ses mains remonter le long de mes hanches. Mon sang se figea dans mes veines et l’indignation desserra l’étau qui me comprimait la gorge.

-Ne me touche pas, sifflai-je, mauvaise.

Tobias s’écarta, décollant (pour mon plus grand soulagement) ses lèvres de ma gorge pour éclater de rire. Son rire s’étouffa soudainement, en même temps qu’un son sourd retentit, couvrant momentanément les flots de la Loire. Tobias me lâcha d’une main, et je fus brièvement déséquilibrée.

-Saloperie ! jura-t-il en se massant la tête. tu crois vraiment que c’est une lampe de chevet qui va m’arrêter, mon gars ?

Je tournai la tête prudemment, et mon cœur fit un bond. Antoine se tenait dans l’encadrement, pâle comme la mort, et, effectivement, une lampe de chevet dans les mains. Il eut un petit sourire effronté.

-Je suis d’accord sur le fond, admit-t-il. Mais c’était tout ce que j’avais sous la main.

Son regard passa rapidement sur moi – sur mon bras violacé et ensanglanté, ma dague à terre, et la main de Tobias toujours refermée sur mon bras sain. Le vampire ricana, et d’une main, sortit une ses étoiles.

-En théorie, on devait te garder en vie pour continuer l’œuvre …
-Mais quelle perspective réjouissante, persiffla Antoine avec un sourire torve.
-… Mais tu m’as assez fait chier pour le restant de mes jours.

Il lança étoile, comme ça, sans élan, droit sur lui. Je réprimai un cri, mais Antoine se bougea juste à temps pour qu’elle se fiche à un cheveu de son oreille. Et avant qu’il n’eut le temps de dire « ouf », une autre se planta à un centimètre de sa main.

-Et je vais t’apprendre, grommela Tobias en s’armant d’une troisième étoile, qu’on ne me brûle pas les pattes comme ça.

Antoine pâlissait à vue d’œil. Il avait eu assez de force pour venir jusqu’ici et frapper Tobias, mais peut-être il était trop faible pour changer ne serait-ce qu’un atome. Le vampire allait forcément le toucher, à un moment ou à un autre. Mon cœur se serra si fort que j’en oubliais la brûlure qui me rongeait le bras. Et Callie et Danny qui étaient encore dans l’autre pièce avec Léna …
Il fallait que cela cesse.
Tobias lança sa troisième étoile. Celle-ci fit mouche et se planta dans la cuisse d’Antoine. Il grogna, mais réussit à se tenir debout. Mais il était exempt de tout possibilité de mouvement. Tobias ricana, savourant son triomphe d’avance, mais Antoine en avait encore sous le pied : je vis ses yeux se plisser, et le béton sous Tobias s’affaissa, aspirant ses pieds comme un sable mouvant. Le vampire battit du bras avec surprise, déséquilibré. Antoine s’affaissa sur le mur, mais réussit à tenir debout par je ne sais quel miracle. Ce tour l’avait vidé de ces dernières forces. Il eut le temps d’accrocher mon regard, avant de le glisser à terre. Je suivis son regard, et compris rapidement. Je hochai la tête avec difficulté, et dépliai mon bras avec prudence. A chaque seconde, un éclair de douleur me traversait le bras, mais je n’avais pas le choix, d’autant plus que Tobias se redressait. Si la douleur et l’urgence ne m’embuaient pas le cerveau, je me serais délectée de son air terrorisé.

-Arrête ça ! glapit-t-il en resserrant la prise sur mon bras sain. Sinon je la fais tomber !

Non, il ne me ferait pas tomber. J’en avais assez d’être à sa merci. Je dépliai les doigts de ma main blessée, et me concentrai autant que me le permettait la douleur qui m’élançait toujours. Quand le métal froid entra en contact avec ma peau, je refermai mes doigts dessus. N’hésite pas, plus que jamais, c’est ou lui, ou toi. Je fermai les yeux, rassemblant mes forces, mon courage et ma lucidité, et me fis violence. Je ne pris même pas conscience du mouvement que fit mon bras. Ni de la douleur que ça occasionna. En revanche, j’eus douloureusement conscience de la dague tremblant dans ma main quand elle perça la peau, de la résistance qu'opposa la chair, la trachée et l’œsophage, du gargouillement écœurant de Tobias produisit quand la lame fut plongée jusqu'à la garde. Et pire que tout, du sang, abondant, nauséabond, malsain qui se repandait à flots sur ma main, giclant jusqu'à mon visage. Horrifiée, je lâchai la garde pour voir le vampire d’affaisser à genoux. Tobias tituba et me lança un regard où se mêlait l’horreur et la douleur.

-Je choisis le sang, soufflai-je quand ses yeux accrochèrent les miens.

Il me lâcha pour tenter de retirer la dague qui lui traversait la gorge de part en part, mais le mal était fait, et il s’affaissa rapidement face contre terre, toussant, crachant, gargouillant de façon écoeurante. Quand il me lâcha, je me sentis tanguer, et perdis momentanément l’équilibre, mais je réussis à me maintenir sur la rambarde en battant des bras. Ce fut là que j’aperçus ma main blessée – celle qui avait tenu la garde. Ecarlate. Couverte d’un sang visqueux qui coulait sur ma paume en douces gouttes pour se noyer dans la Loire. Je ne quittai pas ce sang des yeux, cette main qui s’était octroyée le droit de prendre une vie … soit disant pour sauver la sienne. L’odeur me donna la nausée, et je réprimai la bile qui me montait à la gorge.

-Birdy.

Cette voix me ramena à la réalité, et je consentis à baisser difficilement les yeux. Antoine s’était redressé, et s’avançait vers moi, une main tendue.

-Descends s'il te plaît, me demanda-t-il doucement. C’est fini.

Fini. Ce mot définitif me donna encore plus la nausée, et mon regard se porta à Tobias qui se vidait encore de son sang, à moitié sur le petit balcon, à moitié dans la salle de bain. Mais il ne bougeait déjà plus.
C’est fini.

-Je … Je l’ai …, bafouillai-je, les yeux rivés sur le vampire.
-Birdy, gronda Antoine en s’avançant encore. Regarde-moi, s'il te plaît.

Après quelques secondes, j’arrachai mon regard à Tobias pour fixer Antoine. Ses yeux étaient enfoncés dans leurs orbites, mais ils trouvèrent la force de se planter dans mes miens, me ramenant dans le monde réel. Sa main s’avança encore.

-Viens princesse, souffla-t-il. S'il te plaît.

Je hochai la tête, et pris la main qu’il me tendait avec ma main valide. Je descendis prudemment de la rambarde avec l’aide d’Antoine, tremblante. Nous nous fîmes face quelques secondes, haletants, puis je tins plus : repliant un bras contre ma poitrine, je me blottis contre lui, posant mon front contre son épaule. Antoine eut une seconde d’inaction, puis son bras m’enlaça alors que sa main me caressait les cheveux. Il soupira dans mon cou. Je tremblais de tous mes membres, et il me fallut un moment avant de comprendre que je pleurais aussi.

-C’est tout Birdy, tenta de me consoler Antoine en continuant de me caresser les cheveux. C’est fini, tu n’avais pas le choix …
-Dis moi qu’on s’y habitue, bégayai-je contre son épaule. Que ça passe un jour …

J’avais cette horrible impression de vide. Sur la rambarde, cette impression que j’étais prête à me laisser aller, répondre à l’appel de la Loire bouillonnante à mes pieds, inconsciemment, pour avoir défié ainsi la nature. Gaia avait un jour donné la vie à Tobias.
De quel droit la lui avais-je repris?

-Non, Birdy, souffla Antoine. Je ne peux pas te dire ça.

Je m’attendais à cette réponse, mais elle me gela tout de même les entrailles. Je m’en doutais bien. Je le voyais à la tête de Lucas, à chaque fois qu’il devait tuer quelqu’un. Il ne s’était jamais habitué.

-Merci.

Antoine s’écarta un petit peu pour me contempler, surpris. Je levai ma main valide pour sècher mes larmes.

-D’être venu me chercher, précisai-je d’une petite voix.

Antoine eut un petit sourire, et leva la main pour essuyer une larme sur ma joue. Je n’en revenais pas de me autant laisser aller devant Antoine Meynier, mais pour l’heure, je m’en fichais.

-Tu n’as pas l’impression que tu inverses les rôles, princesse ? se moqua-t-il doucement. Techniquement parlant, c’est moi qui devrais te remercier. Sans toi, je serais sans doute dans un train pour l’enfer.

Un petit sourire crispé s’étira sur mes lèvres.

-Je crois que j’ai abandonné l’idée que tu me remercies un jour.

Antoine eut un sourire espiègle, mais ne dit rien. Nous restâmes un moment sur le balcon, avec les hurlements de la Loire comme seuls meubles de ce silence. Puis je sursautai soudainement, et m’écartai d’Antoine avec horreur.

-Léna !

Je voulus me dépêcher de rentrer pour aider Callie et Danny, mais Antoine raffermit sa prise sur moi. Son sourire avait disparu, et je lui fis de grand yeux.

-Callie a été encore plus indécise que toi, grommela-t-il. Mais sa chance, c’est que Léna paraissait l’être aussi. Elle a réussi à avoir le dessus sur Cal, mais au lieu de lui faire du mal, elle a pris ses clefs de voiture et s’est enfuie. Callie a voulu la poursuivre, mais Danny continuait de pisser le sang, alors elle est restée, et moi je suis venu te chercher.

Je sentis un poids se retirer de mon cœur et je laissai aller mon front sur l’épaule d’Antoine. Callie allait bien. Je redressai à nouveau la tête.

-Alors on va voir Danny.

Antoine hocha doucement la tête, et je le sentis sur le point de faire un commentaire du genre « tu t’inquiètes pour ton amoureux ? ». Heureusement, il s’abstient, et exanima rapidement mon bras blessé avant de sortir du balcon.

-Heureusement que Hollywood a tort, commenta-t-il en passant un doigt au dessus de la morsure de Tobias. Nos vampires à nous n’ont pas de venin.
-Quelle chance, bougonnai-je avec une grimace. Et ta jambe ?

Il avait retiré l’étoile qui s’était plantée dans sa cuisse, et son pantalon était tâché de sang, de même que son Tee-shirt – mais pour ça, je plaidais coupable.

-Je vais survivre, affirma-t-il en me poussant vers la porte. Lève les yeux au ciel, Birdy.

N’ayant pas le moins du monde envie de voir le cadavre de Tobias, je m’exécutai et Antoine me guida jusqu’au temple. Puis il me lâcha quelques secondes pour retourner dans la salle de bain, et revint avec la dague ensanglantée. J’eus une moue, et il me poussa à nouveau vers le salon. Quand j’arrivai, Callie me sauta au cou.

-Oh ciel de Dieu tout puissant !

Elle s’écarta, et je constatai qu’une brève étreinte avait suffi à la tâcher de sang. Je ne voulais même pas voir à quoi je ressemblais. Antoine s’affala dans un fauteuil sans demander son reste et ferma immédiatement les yeux. Callie m’entraîna dans un autre fauteuil, en face de Danny. Il était allongé sur le canapé, et Callie avait sommairement bandé sa blessure à l’épaule. Il écarquilla les yeux quand il me vit, et j’eus en son regard horrifié la confirmation que mon état ne devait pas être joli à voir. J’avais douloureusement conscience du sang qu’il y avait sur mon visage, mon cou et mes vêtements. J’en étais recouverte, que ce soit du mien, ou de celui de Tobias. Je repliai mes jambes sur ma poitrine et mis prudemment mon bras blessé sur mes genoux.

-J’ai eu tellement peur, babilla Callie en arrivant vers moi avec un bol d’eau et une serviette. Comment ça s’est fini avec Tobias ?
-Elle l’a invité à danser, cingla durement Antoine sans ouvrir les yeux. D’autres questions, Callie ?

Pour la première fois depuis que je le connaissais, je fus reconnaissante au sarcasme d’Antoine. je n’avais pas envie de m’épancher sur le sujet, mais Callie était assez intelligente pour lire entre les lignes. Danny se redressa sur le canapé.

-Mouais, je suppose que ça s’imposait, commenta-t-il faiblement en grimaçant.

Antoine ouvrit les yeux pour regarder Danny avec étonnement.

-C’est de l’humour, Hautroi ?
-La ferme, Meynier. Quand on rentre à Sappho, tu vas me faire le plaisir d’effacer tes putains de signes, d’accord ?
-Encore faudra-t-il qu’on rentre à Sappho, remarquai-je sombrement. Aïe !

Callie venait de commencer à désinfecter mon bras, mais chaque fois qu’elle posait la serviette dessus, la plaie m’élançait.

-Désolée, s’excusa-t-elle précipitamment. N’empêche que je fais avec les moyens du bord, sers les dents ma belle.

Je serrai les dents, et la laissai faire. Bientôt, mon bras fut sommairement bandé, et elle me fit une écharpe avec un foulard de Léna qui trainait.

-N’empêche que t’as raison admit-t-elle en s’asseyant à terre. Danny ne peut pas conduire dans cet état.
-Aucun de nous ne pourrait conduire dans l’état où nous sommes, sauf toi qui es trop jeune, précisa Antoine, qui s’était replongé dans sa torpeur. Que quelqu’un appelle Gret’, Raymond … Je sais pas, vous avez bien prévenu quelqu’un ?

Nous échangeâmes des regards gênés. Effectivement, maintenant, notre précipitation nous paraissait relativement stupide. Inquiété par notre silence, Antoine ouvrit les yeux, et nos mines penaudes le firent gémir.

-Tu parles d’une équipe de sauvetage, grommela-t-il entre ses dents.

La remarque me piqua au vif. Voilà que son sarcasme recommençait à m’agacer !

-Petit Prince, la seule chose que tu as à dire, c’est « merci ».

J’avais volontairement zappé l’autre partie. Je ne voulais pas que Callie et Danny s’imaginent quoique soit. Antoine me lança un regard complice, avant de fermer les yeux. Danny réclama son portable et appela Raymond sans donner de détail. Après ce coup de fil, il se leva pour donner un coup de pied taquin dans la jambe d’Antoine.

-T’inquiète pas mon gars. La cavalerie arrive.



VOILA ! A la semaine prochaine pour la première partie du dernier chapitre, "The End?" :cry:
N'hésitez SURTOUT PAS pour les commentaires sur cette partie : je veux ABSOLUMENT TOUT ce que vous avez à dire :D
Bisou les enfants, à la semaine pro !
PS : je vous préviens plus tard.
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Désolé je n'ai pas pu mettre des commentaires à certains chapitres, j'étais à Londres ! C'était trop cool !!! 8-) Enfin bref... Me revoilà !! ;)


Mais quels chapitres !! La partie que tu trouvais bizarre est effectivement bizarre mais je ne sais pas... Ça ma l'air normal !! Du sang dans un frigo est loin d'être normal mais bon...

Par contre, je n'ai pas compris pourquoi Léna fait ça... Peut-être que c'est moi qui n'a pas compris alors que c'est écris ou peut-être que tu vas l'expliquer plus loin.

Au moment où Tobias attaque Léo, je me suis dit que sur le coup de la peur, du stresse... elle se téléporterais mais non... Antoine est intervenu !! Je le croyait absolument hors service moi !

Antoine était absolument génial à la fin :) c'était trop mignon... Finalement, je n'aurais rien contre leur couple ;)
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Well, well, well (ceci est une citation de Galavant mais personne ne connaît Galavant, PERRI va regarder Galavant !! (t'as acheté Magnus Chase aussi ??? pas moi T.T))

AAARGH j'arrive pas à croire que c'est Léna qui est responsable de la mort de Geoffrey ! (oui quoiqu'elle en dise, elle est responsable)
Bon, du coup vu que c'est elle le corbeau ça explique pourquoi elle a kidnappé Antoine : il faudrait pas qu'il échappe à son emprise, c'est ça ?
Ah et tant pis pour Tobias, il a pas tué Geoffrey ^^
Enfin bref
Comme l'a dit Antoine, elle n'a pas dit que des conneries. Mais en même temps si les créatures intelligentes de Baal sont toutes aussi méchantes que Tobias, je vois pas trop l'intérêt (d'ailleurs à un moment tu as mis "intelligibles", intelligentes est pas forcément mieux mais j'arrive pas à retrouver le terme adéquat). Mais j'aime beaucoup le côté "Léna endoctrinée depuis des années". Enfin comme le dit Léo, elle a juste aucune cohérence. Conséquence de la folie, sans doute (parce qu'elle est clairement folle) (mais heureusement que Callie l'a pas tuée, ça aurait été vraiment bizarre)

Ensuite, DU SANG DU SANG DU SANG
Pauvre Danny chéri
Mais mon moment préféré (toute personne qui lit des bouquins où les persos souffrent - càd tous les bouquins - est décidément une psychopathe en puissance) c'est sur le balcon, là. J'avoue que j'ai cru que Léo allait finir dans la Loire (oh allez, elle aurait survécu) Mais Antoine qui débarque, c'est bien mieux ! D'ailleurs il est absolument génial, le gars réussit à être sarcastique alors qu'il se fait laminer ! Fantastique. Vraiment, il a réussi à me faire presque rire alors que Léo avait les dents du vampire dans le bras ou peu s'en faut (t'as bien fait de préciser qu'ils avaient pas de venin dans les dents d'ailleurs - mais comment tu transformes quelqu'un en vampire du coup ? C'est seulement la marque d'Hélios ?)
Bref, c'était vraiment une super scène -qui fout mal pour Léo par ailleurs. Mais heureusement qu'Antoine était là dis donc. ET IL LUI FAIT UN CALIN ! Oh d'ailleurs, j'ai relevé un truc que dit Léna : "Oh, et puis vas-y ! ça cassera Antoine pour de bon ! " 8-) 8-) 8-) Antoine aurait-il des choses à cacher à propos de Birdy ? Ils sont trop choux à s'appeler "Petit Prince" et "princesse" là, ils ont beau dire ils ont fini par devenir amis. (olala j'ai encore failli fermer la page, ça m'aurait vraiment saoulé)

Beuuuuuurg
Je veux pas que ça se termine

En résumé, nothing to say about the so-called awkardness of this chapter (désolée je regarde trop de séries en anglais en ce moment parce que tu sais quoi ? JE SUIS EN VACANCES ET TOI AUSSI) parce que c'était pas bizarre (cf mon précédent commentaire) mais ... eh ben une belle conclusion à toute cette merdasse. Ah juste, parfois j'ai un peu eu du mal à suivre Léna, mais on s'y retrouve tout de même :D Ce qui est cool c'est que comme elle essaie de les convaincre on a pas l'impression d'avoir affaire à un crétin de méchant qui dévoile tous ses plans avant de tuer tout le monde mais BIM quelqu'un a enregistré sa confession et l'a transmise au shérif ! Bref tu vois ce que je veux dire. C'était PARFAIT Perri et moi je veux pas que ça se termine T.T

(merci qui pour le fatos commentaire ? :mrgreen: :lol: )
delph212000

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par delph212000 »

Je sais pas quelle partie est sensé être bizarre mais j'ai rien vu de spécial. Parcontre j'ai pas compris pourquoi Léna a fait tout ça. Soit je me suis perdue dans les explications soit c'est pas clair.
Sinon super cette bataille finale et Léna qui devient folle et qui se sauve donc tout n'est pas fini. T'a prévu combien de tomes?
Sinon j'aime le moment frère/sœur de Léo/Danny et la fin avec Antoine qui vient la sauver et qui lui fait un câlin j'adore. Il aurait pu en profiter pour l'embrasser parce qu'avec un seul chapitre qui reste on va se retrouver le bec dans l'eau niveau histoire d'amour.
Dernière modification par delph212000 le mer. 27 avr., 2016 10:34 pm, modifié 1 fois.
chatchat14

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par chatchat14 »

Hey !!

C'est sur ? Une semaine pour avoir la suite ? Sur de chez sur ? on peut pas faire plus court ? Vraiment ? ( oui je suis lourde :lol: ) Bon bah, dans deux semaines c'est la fin…
2 partie pour voir Antoine et Léo ensemble ( oui je sais je sais, l'espoir fait vivre… )

Bref, à bientôt !
Marie-A

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Marie-A »

Tu es sûre que tu veux tout ?
D'accord dans ce cas :

OH ! LA VACHE !! MAIS C'EST QUOI CE DÉLIRE ?????? Léna est complètement marteau, c'est pas possible autrement. Comment elle a pu et peut encore menacé des personnes qu'elle connait depuis de nombreuses années ? Tout ça pour une idée totalement contradictoire avec la mémoire de Geoffrey. C'est juste HORRIBLE, RÉPUGNANT et MALSAIN !!
Et moi qui l'aimait bien et ben j'en suis pour mes frais, tiens ! :evil:

Bon, essayons d'être un peu plus calme. Très bon chapitre ! Le dénouement de ce premier tome risque d'être très intéressant. J'ai hate de lire le dernier chapitre même si je sais que je vais devoir trouver une histoire aussi bien à lire après sur le forum... :(
Tu n'as pas déjà commencé le tome 2 par hasard ?? :roll:
Je suis bien contente que Danny n'ai pas suivi l'idée de Léna sinon, je l'aurai haï ! J'adore Antoine de plus en plus par contre et j'aime encore à penser qu'il y a quelque chose de possible entre lui et Léonie. J'ai l'âme trop romantique, je sais. :lol:
Quant à Callie, elle a un sacré courage ! On la pense fragile parce qu'elle a encore des réactions de gamine parfois mais elle a tout de même beaucoup de cran dès qu'il s'agit de protéger ses amis. Je suis pressée de savoir comment son personnage évolue par la suite.

Sur ces mots, je te souhaite une bonne soirée et profites bien de la vie maintenant que tu as terminé les concours ! ;)
throrund

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par throrund »

Premièrement, j'adore ton livre, c'est génial!!!
Secondement, j'espère que tu passeras le second tome à tes amis avant de le poster ici :p

Sincèrement, ton Grand Pretre
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Je t'aime très beaucoup :mrgreen: :mrgreen:
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 19 (1/2). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Salut tout le monde ! :D

Oui, je sais, ça fait moins d'une semaine que j'ai posté la dernière partie, mais bon ... Je vais quand même la mettre maintenant, et vous aurez la dernière partie, et donc la fin ... (je vais pleurer, vous aussi?) dimanche pro, ça vous va? :)

Bon voilà, première partie de l'ultime chapitre ... Je me sens pas bien ...Mais bon ... Bonne lecture :)




Chapitre 19 (1/2) : The end ? ( Note de l’écrivain : J’ai l’impression d’être Robert Downey Junior à la fin de Sherlock Holmes 2)

Etrangement, ce ne fut pas Raymond, mais Esther Devyldère en personne qui vint nous chercher. Antoine s’était endormi depuis longtemps, et Danny et moi étions dans un piteux état, si bien que Callie fut obligée de lui raconter toute l’histoire dans la voiture. Mais c’en était trop pour la petite Callie, qui avait craqué en plein milieu du trajet. Elle ne dit rien contre Antoine, et je compris qu’étant donné les circonstances, elle lui pardonnait ses frasques. Quand nous fûmes arrivés à Orléans, Devyldère nous avait avoué qu’elle avait soupçonné Léna depuis le début, mais qu’elle n’avait jamais eu de preuve concrète – d’où la dispute que j’avais surprise lors de ma troisième téléportation. Nous avions passé la nuit dans l’infirmerie. Devyldère avait briefé Gretel, qui avait tellement pâli durant les explications de la directrice que j’avais compté les secondes avant qu’elle ne s’évanouisse. Mais elle avait tenu le choc, et nous avait tous soigné dans un état second. C’était à peine si elle avait laissé éclater son soulagement à la vue d’Antoine. Celui-ci était trop faible pour s’en offusquer, mais la détresse de Gretel m’avait touché. Sa famille était de nouveau ébranlée par une nouvelle crise – une crise qu’elle était loin d’avoir vu venir. Au final, nous nous en sortions bien : Danny et moi avions un bras en écharpe, et Antoine un pansement à la cuisse et le besoin d’une boîte entière de somnifères. Callie était indemne, si ce n’était quelques égratignures.

Cette commère de Salomé Rosier s’était faite un plaisir de faire état de la disparition d’Antoine et de la blessure de Grispoil, si bien que Devyldère dût faire une conférence (à laquelle nous n’avions pas assisté, cloués dans nos lits à l’infirmerie, mais Callie y avait été) sur ce qui s’était passé dans le petit appartement Orléanais dès le lendemain matin. Elle n’avait jamais été au courant des Gardiens, c’était un secret contenu dans les archives, mais difficilement accessible, même pour les directeurs. Elle avait été les fouiller par curiosité, et avait remarqué que la dernière personne à les avoir consultées était Léna Duriez, alors qu’elle était encore étudiante. Tout le monde avait été choqué de l’implication de la très aimée Léna, et les protestations avaient commencé à fuser. Bien sûr, c’était sur Antoine que pesait toutes les accusations, mais Callie avait été là pour le défendre, ce qui nous avait énormément surpris. Quand Antoine fut assez rétabli, Devyldère l’emmena avec elle dans son bureau, et l’amnistia de tout ce qui s’était passé, à condition qu’il détruise tous les sigles qu’il avait gravés. Nous n’étions pas sûrs qu’effacer les sigles supprimerait les brèches, mais c’était à tenter. Il avait hésité à le faire, de peur que Léna ou son complice ne continue de menacer sa famille, mais deux jours après Orléans, sa boîte mail et son téléphone s’étaient tus. Il s’était donc autorisé à tester la théorie de Devyldère, et je l’avais accompagné, ainsi que Devyldère, à chaque arbre infecté. Il détruisit l’écorce, usant de sa dague et de ses pouvoirs, si bien qu’il était impossible de voir la moindre trace du sigle. Danny et moi avions fait le tour des arbres pendant les jours qui suivirent, et le jeudi d’après, l’arbre près de l’arène commençait à reprendre une certaine vitalité, et les vibrations du Sceau se faisaient à nouveau sentir au creux du Gardien. J’en avais été tellement heureuse que je lui avais sauté dans les bras.

De manière générale, après ce sombre incident, toutes les relations s’étaient apaisées. Callie et Antoine avaient enterré la hache de guerre, et le froid que j’entretenais avec Danny avait cessé. Au contraire, je le retrouvais à nouveau tous les soirs à l’infirmerie. J’y étais restée une semaine, parce que même si les vampires n’avaient pas de venin, leurs morsures mettaient un certain temps à cicatriser, et Gretel préférait m’avoir à l’œil. Du fait de la présence de l’infirmière, nous n’avions pas pu parlé librement de ce qui s’était passé – notamment dans la salle du temple, comme nous l’appelions toujours. Mais il m’avait ramené le café tous les matins, pour me rembourser toutes les boissons qu’il me devait, et à mon dernier matin à l’infirmerie, il avait même ramené des croissants. Ce jour-là, j’étais monté faire ma valise. Les vacances arrivaient à grands pas, et je voulais partir le plus tôt possible. Avec tout ce qui s’était passé, ce que je voulais plus que tout, c’était retrouver ma mère, Greg, ma petite ville Nordiste, mes séries américaines… Je voulais qu’il commence à neiger et prendre le train pour aller voir Hadrien. Faire un bonhomme de neige comme on faisait dans la demeure ancestrale d’Alsace. Faire des ombres chinoises sous la couette avec ma mère. Des courses dans le parc de ma ville. Recopier en toute hâte un des cours de Sylvain que je n’avais pas pris. Faire mon échauffement au côtés de Joris. Lire les livres que j’avais laissés chez moi. Faire une belote avec ma tante, Hadrien, et grand-mère Moineau avant de déballer les cadeaux pour Noël. Mais je savais que je ne pourrais pas faire la moitié de ce que je venais de lister. Je ne pourrais pas aller voir Sylvain sans lui mettre mon poing dans la figure. Je ne pouvais pas aller dans le parc de la mairie sans avoir l’angoisse de revoir le gars aux yeux flippants. Je ne pouvais plus faire d’ombre chinoise avec ma mère, parce que ce que je cachais me pèserait trop pour que j’apprécie ce moment. Je ne pouvais pas aller voir Nathalie et grand-mère Moineau sans penser à tout ce qu’elles m’avaient caché durant toutes ses années. Il fallait que je m’y fasse : mon arrivée à Sappho avait été un tournant décisif dans ma vie. J’avais découvert un véritable monde, quelque chose d’aussi lointain que des entités abstraites, que des choses aussi triviales qu’une famille, de cœur, et de sang. Malgré tout, je gardais l’espoir de maintenir l’illusion d’une vie normale, ne serait-ce que l’espace des deux semaines de vacances de Noël. Alors ma valise était prête et je rentrais le lendemain. Danny m’amenait à la gare, seul. Il y avait une raison. J’avais quelque chose à faire. Quand j’avais demandé ça à Danny, il avait sourit, comme s’il s’y attendait. Je n’avais pas relevé ce sourire, mais il avait tout de suite accepté.

-En vérité, il ne manque plus que Lulu se réveille, et tout serait parfait, commenta Callie en piquant dans le paquet de chips.

C’était la veille de mon départ, et Antoine, Danny, Callie et moi étions attroupés autour du lit de Lucas. Gretel travaillait derrière, silencieusement. Mais je pensais que le fait qu’elle n’était pas avec nous relevait moins de son sérieux que de sa volonté d’isolement. Elle avait été la plus touchée par ce qui s’était passé avec Léna, et Antoine était très souvent resté avec elle dans sa chambre, à parler à voix basse, à la prendre dans ses bras pour calmer les tremblements qui la prenaient subitement. Elle en était arrivée à un point où c’était aussi Antoine qui devait faire les piqures d’insuline (avec un impressionnant professionnalisme) à la petite Charlotte, et il avait même changé lui-même les pansements de Danny parce que les mains de Gretel tremblaient trop. Tant de dévouement de la part d’Antoine me touchait, mais j’étais encore plus affectée par l’état de Gretel.

-Mouais, pas faux, admit Danny.
-Si, justement, grommela Antoine en fusillant les photos du regard. Il ne me manque plus que le réveil de mon frère, et la tête du complice de Léna.

Je suivis son regard, et vit la photo de famille sur laquelle Geoffrey tenait Lucas dans un bras, et enlaçait Léna de l’autre. Voir le visage souriant de Léna me donnait toujours un coup douloureux au cœur, d’autant plus qu’Antoine avait raison. Nous cherchions toujours le complice de Léna, et Devyldère et Danny continuaient d’être persuadés que c’était quelqu’un de Sappho. Ils ne l’avaient pas dit à tous les élèves pour éviter de mettre la psychose, mais la perceptive me hantait toujours.

-On finira par trouver, affirma Callie en prenant encore des chips. Devyldère a du flair pour ce genre de truc.

J'haussai un sourcil.

-Maintenant tu la kiffes, la directrice ?

Callie haussa les épaules avec flegme. Il était vrai que l’ensemble de notre groupe était mu d’un sentiment nouveau envers Esther Devyldère, y compris Antoine, qui avait publiquement avoué qu’il s’était trompé sur son compte.
Comme quoi, la règle numéro deux valait toujours : Léo a toujours raison.

-Un autre truc qui me chiffonne, fit Callie. C’est qu’on ne sait toujours pas pourquoi Léna s’est faite agressé.
-Le même accident qu’il y a sept ans, avança Danny en piochant dans les chips. Elle a voulu faire entrer un vampire, et elle n’a pas su le contrôler. Quand il nous a entendu arrivé avec Léo, il s’est barré.
-D’accord, admit Callie en essuyant les mains sur son jean. Alors autre question : il y a sept ans, ils n’avaient pas Antoine. Alors qui a gravé le sigle ?

Son regard glissa fugacement vers moi, mais il ne fut pas le seul : Antoine et Danny aussi. Je sentis une boule d’amertume se former dans ma gorge, et ignorais envers lequel des trois j’avais le plus de rage.

-Ne me dites quand même pas que vous accusez explicitement mon père ?

Mon regard était particulièrement dardé sur Danny et Antoine. Si Danny détourna rapidement les yeux, Antoine le soutint, impassible.

-Non, Léo, personne ne dit ça, me rassura Danny, toujours sans me regarder.
-Non mais tu rigoles ? s’insurgea Callie en faisant de gros yeux. Qui d’autre tu vois faire ça, c’est le seul de la tranche d’âge qui …
-Callie !

Mais Danny l’avait coupé bien trop tard. Je me levai brusquement de ma chaise. J’entendis Callie m’appeler, mais je passai outre et sortis de l’infirmerie. J’avais besoin d’air frais pour ne pas dire ou faire des choses que je pourrais regretter. Mon père était un sujet extrêmement sensible, surtout en ce moment. Et plus j’avançais, moins j’avais envie qu’on y touche. Certainement pas des personnes qui ne savaient rien, comme Callie. Je descendis la volée de marches avant de m’y asseoir. L’air de décembre était froid, et le ciel perle menaçait de larguer sur nous ses flocons. Le mot « décembre » résonna mille fois en moi, et je ne pus m’empêcher de sourire avec mélancolie. Ça me faisait toujours penser au film Anastasia.

-Des images me reviennent, comme un souvenir tendre… Une ancienne ritournelle, autrefois en décembre…, chantonnai-je doucement pour me détendre.
-Je pensais qu’on avait établi que les dessins animés c’était mauvais pour ton équilibre, princesse.

Je sursautai, et vit Antoine fermer la porte de l’infirmerie pour s’assoir à côté de moi. Je croisai les bras sur mes genoux, et fixai résolument le sol.

-Oh ne me fais pas la tête, Birdy, au cas où tu ne l’aurais pas marqué, j’ai rien dit sur ton père, et ton amoureux est en train d’incendier Callie.
-Mais tu n’en pensais pas moins, grommelai-je, la bouche contre mon plâtre.

Ma morsure me faisait encore un mal de chien, et mon plâtre me gênait. Antoine ricana.

-Je ne suis pas encore assez stupide pour répondre à cette question.

Je lui flanquais un coup sur l’épaule de ma main saine, et il se laissa faire avec un sourire. Nous restâmes un petit moment silencieux, assis dans le froid, à attendre que tombent les premiers flocons.

-Ça va mieux ? s’enquit-t-il au bout de quelques instants, du bout des lèvres.

Il regardait mon plâtre, mais je n’étais pas dupe. Ce n’était pas l’extérieur qui l’intéressait, mais l’intérieur. Je supposais qu’avoir grandi avec Lucas devait aider à voir les signes.

-Je m’en sors, éludai-je en haussant les épaules.

Ce n’était pas tout à fait exact, mais j’avais peur de me mettre à pleurer si j’en parlais. Il était arrivé la nuit que je rêve de Tobias, de ses iris incroyablement clairs et vides, rivés sur les miens, de ma dague s’enfonçant impitoyablement dans son cou. Dès que je regardais mon plâtre, ce souvenir me prenait à la gorge. Ma main se mit à trembler, et avant que je ne pus cacher ce tremblement, Antoine me la prit. Je pestai intérieurement contre ma transparence, mais comme je le disais, Antoine avait grandi avec Lucas. Les crises de remords, ça devait le connaître.

-C’est normal, souffla-t-il doucement. Il faut juste apprendre à vivre avec.
-C’est facile de dire ça, pour toi, répliquai-je en réprimant les larmes qui me venaient aux yeux.

Antoine eut un petit ricanement et secoua la tête. Depuis l’incident d’Orléans, Devyldère l’avait autorisé à prendre des somnifères, et il s’était levé tous les jours à midi. Résultat, c’était la première fois depuis que je le connaissais que je le voyais si reposé, si en forme. Toute trace de cernes avait disparu, et il était d’une pâleur infiniment moins maladive. Ses yeux s’étaient éclaircis, passant du saphir froid et dur à un azur beaucoup plus doux.

-Tu me blesses, Birdy. Je ne suis pas aussi sans-cœur qu’il n’y paraît. Tuer quelqu’un, ça fait mal à tout le monde de normalement constitué. Personne ne s’y habitue. Notre capacité à nous en remettre dépend de la façon dont on apprend à vivre avec ça.

Je me sentis vaguement honteuse d’avoir sous-entendu qu’il n’avait pas de cœur, parce que je savais que c’était faux. Il en avait un, et il le dévouait presque entièrement à sa famille, son frère, sa petite sœur. A Gretel, aussi. Je pensais sérieusement qu’Antoine était ce genre de personnes prêtes à donner sa vie pour ceux qu’elles aiment. Je repliai mes jambes sur ma poitrine.

-Je n’arriverais jamais à vivre avec ça. Dès que je ferme les yeux, la seule chose que je sens, c’est du sang.

Et pourtant, ce n’était pas faute d’avoir nettoyé une dizaine de fois ma dague avec mille produits différents, d’avoir jeté mes vêtements tâchés, de m’être lavée deux fois par jour, et de mettre du parfum pour masquer l’odeur, même fictive. Le coup du parfum avait d’ailleurs surpris Danny, et je n’avais pas eu le cœur à lui révéler la véritable raison de cet excès de féminité. Antoine serra mes doigts.

-C’est normal au début, princesse. Et je ne dis pas que ça doit le devenir, tuer quelqu’un, même un vampire, c’est loin d’être un acte à banaliser. Mais il y a des choses que tu ne peux pas changer. Il allait te tuer, Léo. Nous tuer. Si tu ne l’avais pas fait, l’un de nous aurait peut-être survécu, mais c’est la mort de l’autre qu’il aurait eu sur la conscience. Et je pense que ça aurait été cent fois plus lourd à supporter.

Mon cœur se serra. Si j’avais hésité, si Tobias s’était échappé du tour d’Antoine … Qu'est-ce qui se serait passé ? M’aurait-il poussée d’abord dans la Loire, du haut de cinq étages, avant de s’en prendre à Antoine ? Ou l’aurait-t-il d’abord tué pour l’avoir à deux fois humilié ? Que se serait-t-il passé si Antoine était mort parce que j’avais hésité à tuer Tobias ? Je sentis mon visage se décomposer, et il dut lire l’horreur dans mes traits.

-Mouais, je suppose que ça n’aurait vraiment pas été facile, ricana-t-il.

Je ne pus m’empêcher de sourire, et de le regarder en levant un sourcil.

-Je suppose que c’est le moment où tu es censé me dire « merci », et « je t’adore » ? tentai-je de plaisanter en réprimant mes larmes pour de bon.

Antoine sourit aussi, d’une manière un peu timide qui me surprit beaucoup. Les seuls sourires que j’avais vus sur les lèvres d’Antoine avaient été sarcastiques, arrogants, assurés, et quelques fois penauds. Timide était quelque chose de nouveau, et de surprenant.

-Oui, je pense que le « merci » est plus que de mise après ce qui s’est passé, avoua-t-il. Alors – attention, Birdy, savoure bien – Merci.

Je levai le visage au ciel en me mordant la lèvre inférieure, de façon taquine, l’air de déguster ce mot ô combien rare dans la bouche d’Antoine Meynier. Pourtant, il ne s’arrêta pas là. J’avais été maintes fois surprise depuis que j’étais arrivée à Sappho. Et je puis vous assurer que celle-ci fut la plus surprenante, pour ne pas dire choquante. Antoine se pencha sur moi, et posa un petit baiser sur ma joue.

-Et je t’adore, ajouta-t-il, d’un souffle.

Je clignai des yeux, éperdue, et posai une main sur ma joue. Le temps que je m’en remette, Antoine s’était levé, et était rentré dans l’infirmerie sans demander son reste. Je restai un moment assise sur les marches, contemplant la porte de l’infirmerie, mes doigts scotchés sur ma joue. Je savais que je devais avoir l’air d’une parfaite idiote, et je m’en rendis parfaitement compte. Je m’ébrouai, et me levai pour faire quelques pas devant l’infirmerie, le cerveau en ébullition. L’unique chose qui me ramena à la réalité fut la voix de Callie, qui ouvrit la porte à la volée au bout de quelques minutes.

-Léo ! Viens tout de suite !

L’extase et son sourire se sentaient dans sa voix, et elle n’attendit pas que je réponde pour retourner à l’intérieur de l’infirmerie. Ma curiosité piquée, je montai rapidement les marches de l’infirmerie, et la suivis jusqu’au lit de Lucas. Elle me prit le bras avec vigueur. Ses yeux brillaient.

-Lucas vient d’ouvrir les yeux !

Et elle me tira plus fort vers le fond de l’infirmerie. Mon cœur fit un saut périlleux, et je courus avec Callie jusque derrière le paravent. Antoine et Danny s’activaient, redressant Lucas, positionnant ses oreillers derrière son dos. Je me stoppai net devant le lit, et scrutai le visage pâle de Lucas. Il était crispé, ses paupières papillonnaient, et il avait l’air assez perdu. Mais ses yeux étaient ouverts.
Petit génie.
Je sentis une grosse boule d’émotion se former dans ma gorge, et elle faillit éclater quand Lucas posa les yeux sur moi, et me sourit. Puis son regard passa à son frère, qui l’aidait toujours à se redresser.

-Tu n’as pas fait trop de bêtises pendant que je dormais ? plaisanta-t-il d’une voix faiblarde.

On aurait dit qu’il parlait avec du coton dans la bouche. Je le vis déglutir, et il fut secoué de toussotements. Ça faisait des semaines qu’il n’avait pas prononcé un mot.

-Imbécile, pesta Antoine, un grand sourire démentant son ton. Tu m’as foutu la frousse de ma vie !

Il souriait tellement que c'en était contagieux, avec la simplicité du bonheur. Je ne pouvais m’empêcher de l’imiter. Danny revint vers nous avec un verre d’eau qu’il donna à Lucas, qui le but d’une traite.

-Comment tu vas mon Lulu ? s’enquit Callie en s’asseyant sur le lit, chose que nous nous étions interdite pendant le coma de Lucas.

Un faible sourire s’étendit sur les lèvres de Lucas, tandis qu’il prenait conscience d’un certain nombre de choses : le fait qu’il avait toujours une attelle à la jambe et au bras, qu’il était à l’infirmerie, que Danny et moi étions blessés, et que son frère se trouvait dans la même pièce que Callie. Ses sourcils se froncèrent vite, et un éclair fugace traversa ses yeux. Il se tourna vers Antoine, qui le contemplait toujours avec ravissement.

-Où est Gretel ? demanda-t-il d’une voix faible.
-Derrière, elle bosse, lui apprit son frère. Tu veux que j’aille la …

La main saine de Lucas s’abattit presque brutalement sur le bras d’Antoine, qui venait de se lever pour aller chercher l’infirmière. Antoine fixa son frère, surpris, un sourire figé sur les lèvres.

-Non, haleta Lucas en laissant retomber sa main. Je ne préfère pas …

Nous échangeâmes tous des regards surpris, et ceux d’Antoine et Callie se fixèrent sur Lucas. Le mien se riva sur Danny. Son visage s’était fermé dès l’instant où Lucas avait empêché Antoine d’aller chercher Gretel. Ses yeux rencontrèrent les miens, et j’y fis passer une question muette. Il articula silencieusement « deux minutes », et retourna s’assoir à côté de la tête de Lucas.

-Pourquoi ? s’étonna Callie. Lulu, tu es tout pâle, tu es sûr que …
-Lucas, la coupa Danny, avec douceur cependant. Ce n’est pas la première fois que tu te réveilles ?

Les yeux d’Antoine s’écarquillèrent, et je fronçai les sourcils en regardant la réaction du petit génie. Il sourit péniblement à Danny, l’air de dire « je savais que je pouvais compter sur toi, mec », et hocha difficilement la tête.

-Et Gretel le savait … Du moins, la plupart du temps, ajouta-t-il.
-La plupart du temps ? répétai-je sans vraiment comprendre.
-Gretel le savait ?

La voix d’Antoine claqua comme un fouet à mes oreilles. Lucas hocha la tête en lançant un drôle de regard à son frère. Je reconnaissais ce regard, pour l’avoir mille fois lancé, à son frère comme au mien.
Oh, ciel. Venais-je vraiment d’admettre que Danny était mon frère ?
Il fallait bien croire.
Bref. Toujours était-t-il que c’était le regard typique de l’avertissement « ne t’énerve pas. s'il te plaît ». Evidemment, s’était aussi typiquement le regard dont Antoine passait outre.

-Oui, elle m’a vu les yeux ouverts, avoua-t-il d’une petite voix. Mais elle en a été horrifiée, tu aurais vu sa tête …
-Lucky, gronda Antoine d’une voix que je trouvais inutilement menaçante. Qu'est-ce que tu veux dire, au juste ?

Lucas ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit, et il lança un regard suppliant à Danny, comme pour lui demander de prendre le relais. Je remarquai alors que Danny avait blêmi, les mains crispées sur ses genoux.

-Elle te maintenait endormi ? s’assura-t-il alors, répondant au souhait muet de son ami.

Callie leva les yeux au ciel.

-C’était à cause de l’hématome qu’il avait au cerveau, évidemment qu’elle te maintenait endormi, s’agaça-t-elle.
Franchement, vous devenez paranoïaques ! On parles de Gretel, les mecs !

Je devais avouer être d’accord avec Callie, mais la pâleur de Danny, et l’inquiétude dans les yeux de Lucas me faisait douter. Quand à Antoine, il était toujours debout, les bras croisés sur sa poitrine, les yeux rivés sur Lucas.

-Ce n’est pas vraiment ce que j’ai entendu, avoua celui-ci, toujours faiblement. J’ai …

Il leva les yeux, et ils se figèrent sur un point derrière moi. Je fronçai les sourcils, et me retournai pour voir Gretel à l’entrée du paravent. Elle fixait Lucas avec des yeux brillants, le visage vierge de toute expression.

-Comment tu vas petit génie ? demanda-t-elle d’une voix cassée.

Elle me faisait réellement de la peine. J’avais du mal à reconnaître la pétillante infirmière qui nous avait fait faire des séances de spiritisme, et qui dansait avec dextérité le rock avec Antoine.

-Gretel, intervint Danny avant que Lucas n’ait pu répondre. Ça fait combien de temps que son hématome s’est résorbé ?

Les incroyables yeux de Gretel se posèrent sur Danny. Je remarquai alors que son regard brillait parce que ses yeux étaient remplis de larmes.

-Deux semaines.

J’ignore ce qui me surprit le plus : la réponse en elle-même, ou la franchise de Gretel. Une larme coula sur sa joue. Qu'est-ce qui émouvait à ce point l’infirmière ? Tout le monde accusa le coup de la réponse. Ça faisait des semaines que Gretel évoquait son hématome pour me rassurer quand je le voyais endormi…

-Alors … Pourquoi …, commençai-je avec indécision.
-Ne me dis pas que tu as fait ça.

J’eus du mal à reconnaître cette voix étranglée, avant de comprendre qu’elle appartenait à Antoine. Gretel vrilla ses yeux perlés sur lui, et porta la main à sa bouche, comme pour réprimer un sanglot.
J’avouai être définitivement larguée.

-Tonio, s’étrangla Gretel, une main crispée sur le paravent. Je suis vraiment désolée … Je n’avais pas le choix … Je …

Les larmes se mirent à couler en abondance sur le visage de Gretel, et elle ne tenta même pas de les essuyer. Je regardai Danny, demandant silencieusement confirmation de ce que je pensais. Il me retourna un regard écarquillé d’horreur. Même lui ne l’avait pas vu venir. Et pourtant, c’était la stricte vérité. Je mis ma main sur la bouche pour contenir mon effroi.
Gretel était la complice de Léna.

-Non.

Antoine s’écarta de son frère, et me dépassa rapidement pour rejoindre Gretel. Il lui prit l’épaule d’une main, le visage de l’autre, la forçant à le regarder.

-Gret’, fit-t-il d’une voix presque suppliante. Les photos … Ne me dis pas que c’est toi qui …

Le sanglot qui s’échappa de la gorge de Gretel était un terrible aveu à lui seul. Je me couvris le visage des deux mains. Je refusai d’entendre ce sanglot. Non, Gretel. Pas toi. Le visage d’Antoine se décomposa littéralement. Il lâcha brutalement Grete, et recula, sonné.

-Tonio, sanglota l’infirmière. s'il te plaît, je … Elle me l’a demandé, je … Je ne pouvais pas …
-Tu m’avais juré que c’était terminé, souffla Antoine, à voix très basse.

Les pleurs de Gretel reprirent de plus belle, et elle tenta de prendre la main de son ami, mais il se déroba, se détournant d’elle pour faire les cent pas, une main sur le front. Toute la fatigue qu’il avait éliminé ses derniers jours parut revenir d’un seul coup.

-Gretel, entonna Danny d’une voix douce, indécise. Je … J’avoue que pour le coup, j’ai besoin de l’entendre pour le croire …

Je lançai un coup d’œil à Danny. Son visage était presque aussi décomposé que celui d’Antoine. Et je ne parlait pas de Callie. Gretel fixa dans Danny, ses yeux brillants de larmes, et elle rassembla tout son courage pour s’expliquer :

-Je vous jure … que c’était la dernière chose que je voulais, haleta-t-elle en s’adossant au paravent, comme si elle ne pouvait plus soutenir son propre poids. Vous faire du mal, à tous … (son regard se porta sur Antoine). ça me fendait le cœur … Elle a compris, elle ne m’a pas demandé grand chose … de mettre des somnifères dans les médicaments de Lucas … prendre deux ou trois photos pour son compte …

A chaque mot que Gretel prononçait, je voyais Antoine tressaillir. Il se retourna pour contempler Gretel comme s’il la voyait pour la première fois, et elle fondit à nouveau en larmes. J’étais déchirée entre un sentiment atroce de trahison, inégalé par mon père et Léna, et un fort sentiment de pitié. Quoi qu’elle ait fait, Gretel le regrettait amèrement.

-Dites-moi que c’est une blague, laissa échapper Antoine, une main toujours sur le front.
-Non, souffla Lucas à voix basse. Ç’en n’est pas une.

Les yeux d’Antoine se portèrent brièvement sur son frère. Le déchirement que je voyais dans ses yeux me transperça le cœur.

-Elle ne t’a pas fait ça …
-Tonio …, fit Gretel en tentant une fois de plus de lui prendre le bras.

-Lâche-moi ! cria-t-il en se dégageant. Toute ma vie, depuis toujours je t’ai fait confiance ! Tu étais la seule qui savait tout – tu en savais même plus sur moi que Lucky ! Dès le début de cette affaire … Tu as toujours tout su !

La voix d’Antoine se brisa à cet instant, et ce qu’il m’avait dit dans l’écurie me revint en un éclair en mémoire. Si Gretel n’avait pas été là pour le soutenir, il se serait tiré une balle. Or, Gretel était en partie responsable de son abominable trimestre. Des événements qui auraient pu pousser Antoine au suicide … Si elle n’avait pas été là. J’entendis un autre sanglot, mais cette fois, il venait de Callie.

-Je ne comprend pas, pleura-t-elle en séchant ses larmes. Tu as été notre meilleur soutien … pourquoi …
-Je sais pourquoi, répliqua durement Antoine.

Gretel laissa échapper un hoquet, et fixa son ami avec de grands yeux. Le regard qu’il lui lançait était implacable, accusateur … déchiré, et déchirant.

-Non, Tony, protesta faiblement Gretel. Ce n’est pas …
-Alors pourquoi ?! ragea-t-il en levant les bras aux ciel. Pourquoi, si c’est pas ça, Gret’ ? Pourquoi tu m’aurais fait ça si ce n’est pas à cause de ça ?!

Gretel ne répondit pas, se couvrant la bouche des deux mains, et son mutisme parut être la réponse d’Antoine. Les yeux d’Antoine étincelaient. Je ne l’avais jamais vu dans un tel état, ni après la chute de Lucas, ni au moment où il avait craqué dans l’écurie, ni dans l’appartement Orléanais. Je retrouvais devant moi le Antoine dont j’avais eu peur pendant des semaines, celui qui était capable plus du pire que du meilleur. Lucas parut aussi s’inquiéter de l’humeur de son frère, car il se redressa et fit un geste pour retirer ses couvertures. Je l’en empêchai en mettant une main sur son bras.

-Ne t’en fais pas, lui soufflai-je. Ça fait des semaines que je gère ça.

Lucas me lança un regard surpris, mais aussi torturé – et fatigué. Mais il hocha la tête, et se laissa retomber sur ses oreillers. Pour ma part, je me levai pour continuer mon rôle de « tampon » (un jour, peut-être, je me ferais payer pour ça). Gretel me vit arriver, et elle me prit immédiatement la main saine.

-Je ne voulais pas petit oiseau, m’assura-t-elle. Jamais je ne me le serais pardonné s’il vous était arrivé quelque chose …

Je me figeai quand elle m’appela « petit oiseau ». La première personne à m’avoir appelée comme ça été Tobias. Mes entrailles se glacèrent un instant, mais je pris mon courage à deux mains pour articuler :

-Pourtant, il est bien arrivé des choses à des gens…

Gretel fronça les sourcils, m’obligeant à m’expliciter.

-Elodie.

Le visage de l’infirmière se décomposa, et de nouvelles larmes perlèrent à ses yeux. Je ne pouvais supporter sa détresse, alors je détournai le regard pour continuer :

-Gretel, dis-moi que tu avais une raison valable de faire ça… Tu te rends quand même compte que … Si tu n’avais pas soutenu Léna … Elodie …

Ma voix se brisa, et je me refusai à continuer. Je ne voulais pas aller plus loin, car je ne voulais pas dire ce que j’avais vraiment sur le cœur. Le destin tragique d’Elodie, évidemment.
Mais surtout, si elle n’avait pas aidé Léna, peut-être que je n’aurais pas eu à tuer Tobias.
J’entendis Antoine renifler avec mépris.

-Ça dépens ce que tu appelles une raison valable, tacla-t-il durement.
-Et bien éclaire nous, au lieu de garder tes secrets ! explosa Callie.
-D’accord ! (Il pointa Gretel du doigt, et je fus presque sûre de voir des larmes lui monter aux yeux). Ça fait des années qu’elle est amoureuse de Léna !

Gretel me lâcha pour enfouir son visage dans ses mains. Mais ce n’était pas pour retenir ses pleurs, cette fois. C’était pour retenir, ne serait-ce qu’artificiellement son secret. Un silence abasourdi s’installa dans la pièce, et nous dévisageâmes Gretel avec un étonnement qui frisait le choc. Les larmes s’étaient figées sur les joues de Callie.

-Quoi ? croassa-t-elle, éperdue. Gretel … Tu … Tu es …

Gretel mit son index et sn pouce sur ses yeux, avant de regarder Callie en soupirant. Elle eut un faible sourire.

-Lesbienne ? Oui, je crois que c’est le terme.

Je la fixai moi aussi, sous le choc. Je ne m’attendais absolument pas à ce genre de révélation. Je m’étais souvent demandé si Gretel pouvait avoir un copain – elle était si jolie, si gaie … Je n’avais jamais imaginer que le copain puisse être une copine.
Et encore moins Léna.

-Alors tu veux dire que tu as fait tout ça – prendre des photos de Lucas, maintenir la pression sur Antoine, le forcer à graver les sigles – juste … pour Léna ? récapitulai-je, incrédule. Simplement parce que tu en étais … amoureuse ?

Gretel eut un sourire condescendant à travers ses larmes.

-Oh, petit oiseau, si tu savais … On peut faire beaucoup de choses, des choses stupides, par amour.

Elle coula un regard en direction d’Antoine, mais passa vite dessus. Je compris la teneur de ce regard. Elle le prenait pour exemple. « Antoine a fait tout ça par amour pour Lucas ».
Sauf qu’Antoine avait eu le couteau sous la gorge. Pas elle.
Il paraissait penser exactement la même chose que moi, et un éclair de fureur traversa ses yeux bleus. Ils étaient soudainement redevenus durs et froids comme le saphir.

-Rien à voir ! cracha-t-il. Je n’avais pas le choix, pas le choix ! Est-ce qu’on menaçait Léna ? Non ! Est-ce que tu as reçu des photos d’elle décapitée ? Non ! L'uunique personne de ton entourage qui souffrait, qui était réellement menacée, c’était Lucas – c’était moi, bordel, pas Léna !

Une grimace tordit les lèvres parfaites de Gretel, mais ses larmes avaient séché sur ses joues.

-Elle aussi elle souffrait, tu sais, souffla-t-elle à voix basse. Et elle avait perdu réellement quelqu’un.

Le « Contrairement à toi », était clairement sous-entendu. Antoine la fixa avec de grands yeux, la stupeur chassant fugacement la colère. Elle avait l’air de dire que la souffrance à Léna était réelle alors que celle d’Antoine n’était que fictive. Son argument me retourna le ventre.

-Tu es sérieuse ? lâcha Antoine d’une voix dure. C’est ça ton excuse, Léna souffrait alors du coup tu as voulu la soulager en me faisant miroiter la même douleur ?

Gretel planta ses dents dans sa lèvre inférieure, mais ne dit rien, retenant ses larmes du mieux qu’elle pouvait. Mais son mutisme ne fit que déculper la colère d’Antoine.

-Mais tu es atroce ! Tu sais tout ce que j’ai vécu ces dernières semaines – ce qu’il aurait pu arriver à Lucas ! ( Il pointa le lit de son frère du doigt). Tu m’as rassuré pendant des semaines, alors que c’était toi qui était à l’origine de ça ? Gretel, putain, je te pensais pas si hypocrite !
-J’ai fait ce qui était le mieux pour que cette histoire finisse bien, tenta de se défendre Gretel. Je t’ai poussé à le faire, à la fois pour éviter qu’on fasse du mal à Lucas, et que tu te fasses du mal à toi même.

La mâchoire d’Antoine se contracta quand elle prononça la dernière phrase, et je sentis le regard de la pièce glisser sur lui, tentant de la décrypter. Callie se couvrit le visage des mains.

-Tu m’as poussé surtout parce qu’elle te l’avait demandé, pas vrai ? répliqua-t-il finalement.

Gretel ne releva pas.

-Alors le seul calcul que tu as eu à faire, ça a été de voir qui tu aimais le plus entre Léna et moi ! s’exclama Antoine. Je pensais que c’était fini, Gretel, tu me l’avais promis !
-Ça n’a rien à voir !
-Rien à voir ?! Tu l’aurais fait si tu n’étais pas obsédée par elle ?
-Je ne suis pas …
-Si ! Si, c’est exactement ça ! (Les poings d’Antoine étaient serrés, et ses yeux brillaient). Tu t’es toujours imaginée que tu pourrais faire quelque chose, être quelqu’un pour elle, plus qu’une petite sœur ! Tu m’avais dis que c’était passé, tu m’as menti, d’un bout à l’autre ! Mais bon sang, comment tu as pu me faire ça ?!

Ce n’était pas tant vis-à-vis de Léna ou de Lucas qu’il s’énervait. Si les yeux d’Antoine brillaient, c’était bien qu’il y avait des larmes qui menaçaient de couler. Gretel l’avait trahi lui, son meilleur ami – peut-être plus que ça. Je m’étais souvent demandé si Antoine n’avait pas un jour été amoureux de Gretel – et sa réaction m’inviter à croire cette voix.
C’était personnel. C’était entre lui et Gretel.
Il allait finir par exploser.

-Arrête, soufflai-je à voix très, très basse.

Ce murmure avait un but : n’être entendu que par une seule personne. La seule personne ayant d’assez bonnes oreilles. Antoine me regarda un bref instant, agacé. Ses poings étaient serrés, et je le sentais bien à deux doigts d’utiliser ses pouvoirs contre Gretel.
Je ne pouvais pas le laisser faire ça. Il allait le regretter.

-J’aurais voulu que sa finisse, affirma Gretel dans un filet de voix, ne m’ayant pas entendue. Je te jure, mais ce n’est pas … Elle souffrait tellement.

A cet instant précis, mon plus grand souhait aurait été de gifler Gretel. Le regard d’Antoine se reporta immédiatement contre elle, et ses mains se desserrèrent. Je sentis l’ambiance de la pièce se tendre d’un coup.

-Arrête ! fis-je, cette fois d’une voix parfaitement audible.

J’avançai de quelques pas pour me mettre entre lui et Gretel, les mains levées en signe de pacifisme. J’aurais préféré que ce soit Danny qui s’énerve. Il s’en voulait tellement d’avoir failli me blesser que le fait même de me voir surgir l’aurait tout de suite apaisé. Mais en l’occurrence, c'était un volcan en puissance – et au meilleur de sa forme – que je devais éteindre. Je lançai un regard appuyé à Antoine. Il me jaugea avec courroux, mais ses poings se resserrèrent.

-Birdy, gronda Antoine à voix basse entre ses dents. S'il te plaît, vire.

Il parlait bas pour que moi seule puisse l’entendre. Je sentis un frisson me parcourir la colonne vertébrale. Il était dangereux quand il était ainsi, et tous mes sens me hurlaient « DANGER », mais j’avais un stupide sens du devoir qui me poussait à rester plantée là, devant lui, inflexible.

-Non, toi, tu vires, le rabrouai-je d’une voix aussi posée que je pu. Tu as tes réponses, c’est l’essentiel. Le reste, c’est du surplus. Inutile que tu t’affliges ça. Tu as pas déjà assez souffert comme ça ?

La mâchoire d’Antoine se contracta, et il lança un regard à la fois venimeux et torturé à Gretel, par-dessus mon épaule. Je ressentis monter la tension d’un cran, et ne pus m’empêcher de fermer les yeux.

-Antoine s'il te plaît. Pense à Lucas.

Argument relativement vache, mais qui eut son effet. Antoine se passa une main sur le visage, jeta un bref coup d’œil à son frère, toujours pâle et silencieux dans son lit, et foudroya Gretel du regard.

-Je t’aimais beaucoup, Gretel. Et même pour mon frère, jamais je ne t’aurais fait ça.

Les dernières paroles lancées, il secoua la tête avec frustration, et me dépassa d’un pas lourd. Je vis Gretel faire un mouvement pour le rattraper, mais je lui aggripai le bras pour qu’elle le laisse partir. Ce ne fut que quand j’entendis la porte de l’infirmerie claquer violemment que je la relâchai. Elle ricana amèrement, et se laissa tomber sur la chaise vide.

-Pourtant il a fait pire, pour son frère…
-Rien à voir !

Je me mordis la langue. Je n’avais pas évacué Antoine pour prendre la relève. Mais j’avouai que j’avais l’impression d’avoir de la braise à la place du sang, une braise qui chauffait lentement mais sûrement dans mes veines.

-Ce que tu ressens pour Léna … Je suis désolée, Gretel, mais pour moi ça ne pourra pas justifier ce que tu as fait à Sappho, entonnai-je d’une voix résolument plus calme. Et à Antoine, ajoutai-je après une seconde de réflexion.
-Ça petit oiseau, tu verras quand tu seras amoureuse, renifla Gretel avec dépit. J’ai fait ce que j’avais à faire …

Je voulus répliquer quelque chose de mordant, mais ravalai mon commentaire en songeant que, quoique je réponde, elle se cacherait derrière son amour pour justifier mon incompréhension.

-Et puis, si je n’avais pas été là, Antoine ou Lucas seraient peut-être mort à l’heure qu’il est, enchérit-t-elle.

Le pire dans ce qu’elle disait, c’était qu’elle avait peut-être raison. Pousser Antoine à graver ces sigles avait eu deux buts : maintenir Lucas en vie, et éviter qu’Antoine ne choisisse une solution plus radicale pour mettre à la fois Sappho et son frère hors de danger. Mais ce fut l’argument traître de trop pour Callie : sans un mot, sinon un cri d’indignation étouffée, elle se leva, et courut presque jusqu'à la porte. Contrairement à Léna, elle n’avait pas le courage de l’affronter.

-Mais si tu n’avais pas aidé Léna, protesta Danny quand Callie fut partie, Antoine n’aurait pas eu à graver ses sigles. Ce qui l’a convaincu définitivement de le faire, c’est quand Lucas a été blessé – et je suis presque sûr que c’est indirectement de ton fait. Juste après cela, Elodie est morte. Je suis d’accord, tu as au moins sauvé Antoine. Mais pas Elodie. Tu as mis Antoine au pied du mur … et Elodie est morte.

Gretel fixa Danny avec de grands yeux écarquillés, et enfouit son visage dans ses mains. Le ton de Danny m’avait particulièrement glacé. C’était un ton délibératif, froid, sans aucune contestation possible. Pour la première fois, je n’eus aucun mal à le voir dans un tribunal – robe ridicule, ou non. Il se leva lentement de sa chaise, et s’assit sur le lit de Lucas, en face de Gretel. Son visage était fermé, résolu, impassible.

-Voilà ce qu’on va faire, annonça-t-il, toujours avec ce ton froid et définitif. Dans une demi-heure, je vais aller voir la directrice pour lui dire ce que tu as fait. Il est hors de question que je protège ça.

Les yeux de Gretel s’emplirent d’horreur, mais de résignation. Après ce qui s’était passé à Orléans, elle devait s’attendre à être dénoncée. Mais un détail sonna désagréablement à mes oreilles.

-Une demi-heure ? répétai-je, incrédule.
-Oui, confirma Danny, sans quitter les yeux de Gretel du regard. Qu’on soit d’accord, Gretel : ce n’est pas un cadeau. C’est impardonnable, ce que tu as fait. Mais Léna a réussi à s’en sortir alors qu’elle est plus responsable que toi. Alors je te laisse à toi aussi une chance de t’en sortir : tu as une demi-heure pour faire ta valise, et quitter Sappho. Simple question d’équité.

Oui, pensai-je malgré ma stupeur. Sa place est dans un tribunal. Gretel dévisagea Danny quelques secondes, puis voulut lui prendre la main, mais il se leva pour se dérober, et retourna à sa place en répétant « une demi-heure ». L’infirmière nous scuta tous les trois. Je détournai le visage, incapable de soutenir son regard, et l’entendis se lever pour aller dans sa pièce. Je regardai Danny. Quand Gretel avait quitté son champ de vision, il avait mis ses coudes sur ses genoux, et avait enfoui son visage dans ses mains. Lucas se fit violence pour se redresser et lui donner une tape sur l’épaule.

-Tu as ton ticket pour l’école de magistrature, tenta-t-il de plaisanter.

Danny eut un pâle sourire distrait, mais ses yeux restèrent sombres.

-Tu vas vraiment la laisser partir ? m’assurai-je avec incrédulité.

J’avais pitié de Gretel. Evidemment qu’elle m’avait fait de la peine.
Mais rien ne justifiait ce qu’elle avait fait ! Rien, pas même son soi-disant amour pour Léna !
Mais Danny hocha sombrement la tête. Je sentis une rancœur me tordre l’estomac.

-Elle a failli tuer Lucas ! protestai-je en me levant. Et Elodie ! On a laissé échapper Léna, c’est déjà quelque chose qui reste en travers de la gorge, et tu ne veux pas qu’elle paie pour ce qu’elle a fait ?

Des larmes me montèrent aux yeux. Une petite Léonie sentimentale me réprimait durement d’être aussi sévère avec Gretel, mais c’était plus fort que moi. J’adorais Gretel. Mais j’avais failli mourir une ou deux fois à cause d’elle.
Et Elodie…
Je regardai Lucas, en quête de soutien, mais il secoua la tête. Il était d’accord avec Danny. Je ne pus m’empêcher de lui faire les gros yeux. Après ce qu’il lui avait fait pendant des semaines, il l’amnistiait ?

-Si elle reste ici, si elle passe en jugement, articula Lucas. Tony deviendrait fou.
-C’est ça ton argument ?
-Pas que ça, Léo. Elle a été aussi manipulée qu’Antoine, plaida-t-il avec une grimace. Je … Je ne savais pas que Gretel était … (Il hésita, et je ne sus si c’était pour chercher ses mots, ou s’il avait encore des difficultés à parler). Mais je pense … Non, je ne la condamne pas.

Je sentis mes yeux sortir de mes orbites. J’ignorais ce que Lucas savait, au juste. Mais ça m’étonnerait qu’il comprenne réellement la teneur de ce qu’avait fait Danny. Je levai des yeux résolus vers celui-ci.

-Je ne peux pas te laisser faire ça.
-Et bien tu n’as pas le choix, répliqua-t-il.
-Ce n’est pas à toi de prendre cette décision !
-Léonie, soupira Danny avec plus de douceur. Je comprends que tu ne veuilles pas que Gretel s’en aille sans avoir assumé les conséquences de ses actes, mais … Elle sera loin de Sappho. Et loin de Sappho, elle sera inoffensive. Ce qui la rendait dangereuse, c’était qu’elle était interne.

Je fis de mon mieux pour réprimer ma rage.

-Mais elle sait pas mal de choses, arguai-je. Et ça, c’est loin d’être inoffensif.

Antoine avait dit tout ce qu’il savait à Gretel. Jusqu’où il était allé dans ses confessions, je l’ignorais (avait-il été jusqu’à me balancer ?). Mais il n’empêchait qu’elle en savait énormément.

-Elle en sait autant que Léna, contrattaqua Danny en haussant les épaules.

Peut-être, songeai-je en rongeant mon frein. Mais Léna ne sait pas que je suis une descendante de la Lune. Gretel, peut être que si. Ciel, si c’était le cas, j’étranglerais Antoine ! Danny dut lire mon inquiétude dans mes yeux, et son visage se crispa. Il se leva, et me prit la main. Je lui lançai le regard le plus féroce que je pus.

-Il ne serait pas si idiot, chuchota-t-il très bas, de façon à ce que Lucas ne puisse pas entendre. Il n’aurait rien dit à Gretel là-dessus. Elle ne savait même pas pour lui … Il n’aurait rien pu dire sur toi.
-Et qu'est-ce que tu en sais ? répliquai-je sèchement entre mes dents.

Il eut un petit sourire en coin, entendu, et je ne pus retenir un grognement. Il pressa encore ma main, et me força à le regarder.

-Léonie, s'il te plaît, fais-moi confiance, me supplia-t-il en plantant son regard grave dans le mien. Je sais que c’est la bonne solution… Du moins la moins pire. S'il te plaît, laisse-moi faire.

Je ne voulais pas paraître indécise, pourtant je me mordis la lèvre. Jusque là, l’intuition de Danny n’avait eu que très peu de failles, mais je me répugnai à laisser partir Gretel. Je jetai un petit coup d’œil à la photo du paravent.
Après tout, peut-être que le pire châtiment pour Gretel, c’était l’exil.
Je pinçai les lèvres, et hochai difficilement la tête. Je pensais que je regretterais de l’avoir laissé faire. Mais la règle numéro un, c’était bien « toujours écouter Danny ».

-Mais Devyldère va te tuer, ajoutai-je nerveusement.
-Je sais, Léo.

Je ne dis rien d’autre, et retournai m’assoir. Devyldère avait déjà été assez énervée que nous allions à Orléans sans en parler à un membre de l’administration – et avait presque été outrée quand nous lui avions expliqué que c’était principalement parce qu’elle était la numéro un de nos suspect. Le fait était qu’elle avait des comptes à rendre aux familles des victimes (aux parents d’Elodie, à Isabelle Hautroi, et aux proches de ceux qui étaient morts dans l’arène). Elle aurait aimé attraper la coupable, mais elle s’était enfuie. Danny laissait maintenant une échappatoire à la complice. Dix minutes plus tard, Gretel passa devant nous avec une partie de ses affaires. Elle s’arrêta devant le lit de Lucas brièvement, et murmura un dernier « désolée » avant de reprendre la route jusqu'à sa voiture. Je fus tentée de la rattraper avant qu’elle ne passe la porte, mais ça n’aurait servi à rien. Vingt minutes plus tard, Danny se leva silencieusement pour aller voir Devyldère, me laissant seule avec Lucas. Nous étions restés silencieux quelque minutes, digérant le flot d’informations qui venait de nous parvenir, ravalant ma rage, et lui assemblant vainement les pièces que l’on venait de lui présenter.

-J’avoue ne pas avoir tout compris, fit faiblement Lucas avec une grimace. Je savais que Léna était impliquée dedans, et que ça concernait vaguement Tony …

Je sourit presque malgré moi. J’avais eu un pincement au cœur en entendant à nouveau les presques familiers « Lucky » et « Tony ». Les jumeaux étaient enfin réunis.

-Mais j’ai dû louper pas mal d’épisode.

Oh, ciel, s’il savait … Qu’avait-t-il réellement entendu durant ses brefs moments de conscience ? Avait-il compris ce que son frère avait fait ? Et Elodie … Je déglutis difficilement. On avait tellement de choses à lui raconter… Un éclair d’angoisse avait traversé les yeux de Lucas. Il avait peur d’être pris en pleine tempête. Je posai une main rassurante sur son bras.

-Ne t’en fais pas, petit génie, le rassurai-je. Je vais tout t’expliquer, mais de toute manière, c’est terminé.

Lucas eut un petit sourire, légèrement amer.

-Non, Léo. Je pense sincèrement que c’est le commencement.

***


Cazo' Cazo' Cazo' Cazo ? T'AVAIS RAISON !! Et tu vas te faire une joie de le hurler sur tout les toits :lol: Et oui, Gretel était une méchante :lol: Promis, c'est la dernière grosse surprise de ce tome :x

Donc voila ... La semaine prochaine ... Et bien ... Je poste la fin. Je suis pas bien, les amis ...
Bon, en clair. Commencez à faire le bilan de tout ça : ce que vous avez pensé des Enfants de Gaia, vos moments préférés, vos personnages préférés, pourquoi, ce que je pourrais changer, ce qui n'est pas clair, ce qui est bien, le mal, le bien, si vous avez aimé, et au contraire pas aimé, si c'était un liste BN, dans quelle liste pour le mettrais ... VOILA, tout ce qui vous passe par la tête et qui pourrait m'être utile ! :lol:

Parce que j'avoue que EdG, c'est un peu mon bébé, mon bijou ... Et que comme toute personne qui écrit, mon rêve est d'un jour publier un truc, même si c'est un rêve inaccessible :lol: Alors voilà, je demande humblement vos avis !

Un Tome 2 est prévu. Mais avec la prépa, et ma fanfic' j'ai pas trop avancé dessus cette année ... Et elle reste bloquée à 50 pages :lol: Donc se ne sera pas pour tout de suite ! :/

Bisous bisous ! A la semaine prochaine pour le dernier poste des enfants de Gaia !
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

J'ai pas fini de lire le chapitre mais il faut juste que je m'exprime : JE LE SAVAIS JE LE SAVAIS JE LE SAVAIS !!!! C'est limite si je danse pas de joie alors qu'en fait c'est horrible mais JE LE SAVAIS !!!!!!! :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
Perripuce

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Cazolie a écrit :J'ai pas fini de lire le chapitre mais il faut juste que je m'exprime : JE LE SAVAIS JE LE SAVAIS JE LE SAVAIS !!!! C'est limite si je danse pas de joie alors qu'en fait c'est horrible mais JE LE SAVAIS !!!!!!! :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
Cazo', t'as réagis exactement comme je pensais que t'allais réagir :p
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Nan mais attends ça fait trois mois que tout le monde me dit "mais nan mais elle est trop sympa blablabla" POUYA BOUAHAHHAH dans vos dents ! Mais même moi au début de ce chapitre je me suis re-dit "Bon bah c'est mort pour Gretel, tant pis". MAIS NON :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:

Alors

Bon du coup tout s'explique pour Lucas parce que j'avoue que je me demandais un peu pourquoi il avait dû rester dans le coma pendant la moitié du tome.
Par contre, c'est vraiment dégueulasse pour Antoine, ça me fait trop de peine. C'était horrible quand tu as rappelé qu'il avait failli se suicider, c'est vraiment horrible ce qui lui est arrivé, mon pauvre bébé-chat T.T

Mais d'ailleurs, le moment devant l'infirmerie entre Antoine et Léo, c'était vraiment trop chou grihihi et j'aime vraiment beaucoup beaucoup beaucoup Antoine (l'autre jour quelqu'un a parlé d'un Antoine et j'ai failli me mettre à brailler de façon hystérique parce que rien qu'entendant ce prénom j'ai eu une bouffé d'affection pour notre Antoine)

Franchement, Danny est cool. Je comprends que ça soûle Léo. Je sais pas trop ce qu'Antoine va en penser, mais bon. Tiens d'ailleurs avant de partir, il balance à Gretel "Je t'aimais beaucoup" : je me doute que tu as mis le "beaucoup" pour par créer d'ambiguité (ou pas j'extrapole peut-être) mais du coup ça fait une impression bizarre, comme s'ils venaient de se rencontrer et qu'ils auraient pu devenir hyper potes.... Ou alors je suis juste folle :lol: Parce qu'en même temps je vois pas ce qu'il pourrait dire d'autre sans que ça laisse des doutes sur ses sentiments justement. A part "Tu étais ma meilleure amie" ou je sais pas quoi, mais là ça fait un peu "bestah" nan ? Bref, je crois que je vais juste me taire en espérant que tu aies compris ce que j'essaie désespérément de dire :lol:

Callie me fait trop de peine, parce que ça qui se rajoute au reste ça risque de lui foutre un sacré coup aah

Oh et j'ai ADORE l'ambiance quand ils se retrouvent tous les 4 (+ Lucas of course) dans l'infirmerie, avec Callie et Antoine réconciliés : ils forment ENFIN un vrai groupe et je sens qu'ils ont pas fini de chercher les problèmes et de se crêper le chignon :mrgreen: :mrgreen: Mais au moins ils sont tous du même côté maintenant !

(je reviens à Antoine mais sérieusement ce personnage c'est vraiment du pur génie, quand on repense à ce qu'on savait de lui et comment il était au début, et tout ce qu'on a appris depuis et aaaaah parfait, absolument parfait, je t'aime Perri)

Delvydère va maaaal le prendre, et j'attends toujours de savoir qui a fait la brèche y a 7 ans argh (d'ailleurs, bonne nouvelle que ça se reconstitue) et ... bah j'ai oublié ce que je voulais dire (je suis trop occupée à regarder P!nk dans So What pour m'en rappeler)

Bref, c'était de la balle ce chapitre (comme tous les autres btw) et bon courage pour la reprise mon pauvre kiki (expression d'une amie, je ne suis pas responsable du côté bizarre que ça peut avoir)
roxyfox

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par roxyfox »

JE LE SAVAIS!!!!! GRETEL N'EST PAS GENTILLE!!!!! bon j'avais pas penser aux répercussions par contre.... À quel point elle était proche d'Antoine et un peu la mère de la petite famille...

J'adore le sens de la justice de Danny c'est vrai qu'il ferrait un super bon avocat!

LÉO ET ANTOINE!!!! C'est juste trop cute comme moment :

"Et je t'adore" bec sur la joue!!!!!!!! Yahou!!!!! *danse de la victoire *

Je veux pas que ça termine :(
Approximativement tu dirais que les chances minimales que tu reviennes d'ici peu sont élevées à un niveau de combien ( okii j'avoue avoir tenter d'écrire une phrase compliquée pour que tu te mélanges et écrive demain :twisted: )

J'ai quand même hâte de voir la dernière partie de ce tome :)

Rox
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Coucou !! :D

Je n'ai pas pu commenter plus tôt, désolé, mais j'était vraiment très occupée (Le collège dans toute sa splendeur !! ). Je profite de cette petite accalmie pour écrire ça :

Waou !!!!!!!! Je ne m'attendais pas du tout à ça de la part de Gretel !!! C'est vraiment inattendu pour moi ( apparemment un peu moins pour d'autre mais bon toutes les histoires c'est comme ça ;) )
Le moment Léo Antoine c'était trop mimi :) :)

Je crois que c'est tout...

Ah non, pour répondre à ta question du début, oui moi aussi je vais pleurer :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry:... Je ne veux pas que ça se termine !!! :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: enfin bref je crois que t'a compris :lol:

A dimanche prochain pour la fin ( :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: ) de la meilleur histoire que j'ai lue sur Booknode. :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry:

Ah et juste encore une question : Tu mettras le tome 2 sur booknode ? Stp stp stp :)
Scandium

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Scandium »

Et voilà, comme d'habitude j'arrive trop tard ...

J'ai tellement de choses à dire mais je ne sais pas vraiment par où commencer ...

Bon déjà, faut que tu saches que j'ai vraiment adoré (sans blagues !), bref l'histoire est originale, il y a beaucoup de suspense, des personnages trop cool, bref, tout ce qui fait qu'une histoire est trop cool quoi !!!
Ah et aussi, tout comme dans Lucy Weasley, j'ai adoré ton style d'écriture qui est très beau, très fluide !!!
J'ai adoré tout des personnages, Léonie était vraiment géniale, j'ai adoré Lukas (il est vraiment trop mignon comme garçon), Danny était super aussi et puis Antoine, bon, je suis complètement sous son charme !!!



Que dire de plus, j'ai adoré le concept des enfants de Gaïa et d'Hélios, tout les rebondissements, etc ...

Mes moments préférés sont :

- quand Léonie rencontre Lukas, Danny, et Callie dans la voiture
:arrow: Là je me suis dit : Oh purée ça sent les personnages ultra géniaux bourrés de charmes et le monde magique hyper cool !!! :D :D :D :D

- les premiers chapitres sur la découverte de l'école
:arrow: Ouais, en apprendre un peu plus sur l'école et puis tout les petits détails comme les moments au stand de tirs, l'attaque des Sirènes

- les révélations d'Antoine
:arrow: Là je m'y attendais pas du tout !!! En fait il était tellement soupçonné au début que j'ai été très vite persuadée que ce n'était pas lui le coupable (le raisonnement pourri ...). En plus Antoine est un de mes perso préféré alors quand il a dit "c'est moi qui ai gravé les sigles" je m'y attendais pas du tout, j'étais tellement dégoûtée (en mode : QUOI ?! Mais c'est pas possible !!!! Pas lui !!! Pas mon chéri !!! Perri je ne te le pardonnerai jamais !!!!!! NNOOOOOOONNN !!) Voilà, voilà, heureusement que ça s'est arrangé après quand on apprend le chantage avec Lukas !!
Pour ce qui est de la découverte de Sélène, bon quand on a parlé de 3ème entité j'ai logiquement tout de suite pensé à la Lune mais je m'imaginais pas du tout, tout le reste, c'était trop cool, j'ai trouvé que c'était une super bonne idée !!!

- les révélations de Danny
:arrow: Là non plus je m'y attendais pas, pourtant quand on y pense bien c'était évident : le père de Danny qui s'est barré, Jeoffrey qui descendait d'un enfant de la Lune (par rapport à Grispoils), et l'allergie aux fruits jours Put*** c'était évident et c'est le genre de détail qui d'habitude retiennent mon attention mais là je sais pas ce qui s'est passé, j'ai été trop choqué !! Après j'étais pas une fanatique du couple Danny/Léonie (pas à cause de Danny, il est vraiment super et je suis trop contente qu'il soit son frère, c'est juste que je rêve, j'adorerais avoir le couple Antoine/Léonie !!! Et comme ça Danny peut être avec Callie et tout le monde est content !!!!)

-le dénouement
:arrow: J'ai pas soupçonné Delvyldère très longtemps (trop évident), tu coup pour être au courant du système de protection, utiliser l'ordi de l'école, je ne voyais que Léna. En plus je trouvais ça évident dans l'idée que c'est un des premiers peronnages qu'on découvre (dès le premier chapitre je crois) mais j'espérais vraiment que c'était pas elle quand même parce qu'elle me faisait de la peine par rapport à Geoffrey ... (maintenant c'est fini, elle est complètement tarée !!!)
Quand on apprend que Lukas a été pris en photo dans son lit d'infirmerie, j'ai soupçonné Gretel parce qu'elle en avait la possibilité mais en priant très fort pour que ça ne soit pas elle !!! (et bien sur ça a pas marché ... J'étais trop triste pour Antoine surtout ... Comme si il avait pas déjà assez souffert ...)

Maintenant j'ai hâte de lire l'épilogue !!!
A mon avis on va découvrir d'autres trucs non ?? Du style ce qui s'est passé il y a 7 ans (j'hésita à savoir qui a gravé les lettres, parce que si c'est Tristan ça explique pourquoi il n'a pas voulu que sa fille vienne et pourquoi il s'est enfui mais je trouve que Geoffrey sous l'influence de Léna est très plausible !!)Et aussi l'agression de Léna dont on n'a pas parlé ...

Il y a plein de moments qui m'on fait sourir, voir même mourir de rire, plein de petites références qui me faisait penser à plein trucs (genre la période comédie musicale de Léonie avec le roi Soleil ;) ;), la sœur Meynier qui s'appelle Chloé comme moi, le Libérée Délivrée :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: , Mariveaux :( :( (j'ai du le lire en 3ème et c'était une torture !!! En tout cas merci beaucoup, ça m'a donné mon ouverture de commentaire que j'avais à faire ce weekend ... Et que j'ai baclé parce que je lisais ton histoire !!! ) :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: bref il y a tellement de trucs ...

Sinon il parait que tu travailles sur le tome 2 non ? C'est trop génial, je suis super contente j'ai vraiment hâte !!! ET JE VEUX QUE LEONIE ET ANTOINE FINISSENT ENSEMBLE !!!! :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:

Allez, j'ai un seul petit bémol (t'inquiète pas, tu vas voir il est ridicule ...). Je suis moi aussi en train d'écrire une histoire ou tout les personnages possèdent des pouvoirs (mais quelle originalité !!!!!) bref, comment je fais maintenant moi, quand je lis des pouvoirs trop stylés (par exemple Antoine) que je pensais avoir inventé ou des pouvoirs comme Gretel, Léna, Danny que j'ai envie de rajouter dans mon histoire (mais ce serait de la triche ...) ?? Comment je suis censée réagir ???
:( :( :( C'est injuste et rageant :( :( :(

Bref voila, je m'arrête là je sais plus ce que je voulais dire !!! ;) ;) ;)
delph212000

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par delph212000 »

Gretel celle la je l'avais pas soupçonnée :o Et en plus tout ça pour une raison idiote mettre tout le monde en danger pour Léna qui ne l'aimera jamais c'est trop nul. Surtout trahir Antoine comme ça lui qui l'aimais tant et qui avais tant confiance en elle.
La scène devant l'infirmerie entre Antoine et Léo est trop mignonne dommage qu'elle le corrige pas en lui disant que Danny n'est pas don amoureux afin qu'il ai un peut d'espoir.
Du coup en un chapitre tu va pas les mettre ensemble je vais devoir m'asseoir sur mon histoire d'amour :x et pas de tome 2 à suivre rapidement je fais rester sur ma faim c'est trop horrible :cry:
annabethfan

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par annabethfan »

;) Et j'ai terminé! Il m'aura fallu deux jours et j'avoue que mon seul regret c'est justement que ça n'a pas duré plus longtemps :lol: Dire qu'il ne reste qu'un seul chapitre, je suis en déprime totale!

Donc comme pour Lucy, je me demande pourquoi je ne suis pas venue lire plus tôt (maintenant ma règle numéro un à moi ça sera: toujours écouter Cazo' parce qu'elle a raison sur les bonnes histoires :lol: )

Ma chère, tu es une reine sur tous les plans: intrigue, personnages, écriture! Développons ces trois points (ouais la prépa te donne de la méthodes comme on le voit parfaitement :lol: )

:arrow: Intrigue
Je pense que c'est là où tu excelles, contrairement à moi, tu mets en place des intrigues riches, complètes, mais à la fois aussi compréhensible et cohérente! Bon déjà je suis toujours une quiche pour deviner la vérité dans ce genre de cas mais alors là je crois qu'on atteint des sommets. Je n'ai rien venu venir pour Léna, Gretel et le lien parental entre Léo et Danny! C'est peut-être parce que j'ai lu tous les chapitres d'un coup, sans devoir attendre ni faire des théories entre eux, mais il n'empêche que ça reste incroyable!

Le pire pour c'est quand même Danny et Léonie frère et sœur quoi! Je me suis pris une claque en pleine figure (je les voyais ensemble moi, c'était bon :lol: C'était LE couple que je voyais trop. Autant dire que je suis tombée de haut). Même après la surprise passée, j'avais du mal à l'accepter (encore une fois je pense que je manquais aussi du recul peut-être) et puis tu as réussi à rendre ça... pas normal, parce que ça fait encore un peu bizarre (en fait je ressens tellement la même chose que Léonie c'est impressionnant) mais je commence à me faire à l'idée. Quand Danny lui dit "tu es ma petite sœur", ah tant d'émotion en moi! Et là j'ai réalisé "oui, une relation fraternelle entre eux, j'aimerais voir comment ça serait!".

Ensuite pour toute l'histoire autour de Léna et Gretel, je n'avais rien vu venir non plus. Tu as parfaitement réussi à nous faire comprendre le "pourquoi" et le "comment", ça donne de l'épaisseur de l'histoire d'avoir les justifications et en plus tu expliques clairement donc c'est génial!

:arrow: Personnage
En fait, ton point fort c'est les intrigues ET les personnages :lol:
Ils sont tous géniaux (mêmes les méchants), ils ont leur personnalité, on se les imagine parfaitement!

Tout d'abord, Léonie. C'est quand même important une héroïne principale, on en conviendra tous. Elle est parfaite dans le sens où elle ne l'est pas. Ce n'est pas une Mary-Sue, elle a ses défauts et ses qualités, mais ce que j'ai littéralement adoré chez elle c'est son intelligence! Elle sait réfléchir! Mais elle est aussi profondément humaine dans le sens où elle peut vaciller parfois quand tout s'écroule autour d'elle, que les mystères s'accumulent et que les secrets sont révèles. J'aime son humour, son empathie, sa façon d'interagir avec les autres. Bref, ne change rien!

Ensuite, mon coup de cœur absolu: Danny! Dès le début avec son aura dans l'école, son histoire tragique, son don intriguant et ses secrets...Ah j'ai craqué! J'ai adoré sa relation avec Léonie de A à Z, sa façon de s'inquiéter pour elle, et même quand mes ambitions romantiques se sont cassées la figure ça n'a pas changé. Il sera parfait en grand frère! Sa relation avec Lucas est aussi touchante, une très belle amitié! J'aime son intelligence, son humour, son côté protecteur!

Passons à Antoine, le personnage avec qui j'aurais joué au yo-yo pendant toute l'histoire. Au début, je pouvais pas le voir! Il me paraissait froid et tête à claque (et puis j'étais team Danny j'avoue :lol: ). Mais bon, il m'arrivait de lui trouver des bons points, notamment son humour cynique et son amour pour son frère qui est juste incroyable. Finalement, un peu comme Léonie avec qui je suis décidément totalement en phase, j'ai revu mon jugement au fur et à mesure. Et ce n'est seulement qu'après l'attaque à l'appartement que je vois le potentiel d'un couple Antoine-Léonie qui pourrait être intéressant (surtout en considérant que maintenant Danny est le grand frère protecteur si leur relation évolue :lol: ). Toute façon, on le fait, quand un gars appelle une fille "princesse" y'a un truc (cf Bellamy dans the 100 ou Sirius avec Alexia (oui je me cite moi-même en exemple :lol: ))

Dans un effort de logique, on va passer à Lucas. Bon le pauvre est resté hors-jeu un bon bout de l'histoire en vérité mais qu'importe, il n'a besoin que d'un chapitre pour être attachant notre ange blond! Tant de gentillesse en une seule personne, c'est exceptionnel! Il est adorable!

Enfin, dernière de la bande, Callie. Elle m'agaçait parfois, comme Léonie, mais on ne peut pas s'empêcher de l'aimer au fond parce qu'elle est cool, attachante et courageuse quand le veux ;)

Quant aux personnages secondaires, ils apportent tous une touche de réalisme et de vivacité au récit donc absolument génial!
Chez les adultes, la directrice, Raymond (qui m'a fait penser à Hagrid pendant toute ma lecture :lol: ) et les professeurs sont très bien décrit. D'ailleurs, même les personnages qui sont pas là, morts en fait, comme Tristan ou Geoffrey, planent sur l'histoire et je trouve que c'est un point qu'il faut souligner parce que c'est hyper intéressant!

Enfin, Léna et Gretel, nos deux "méchantes". Je ne l'avais pas vu venir encore une fois mais les scènes d'explications et de dénouement de leur implication étaient extrêmement intense, surtout celle de Gretel. Si Léna paraissait froide, c'était tout le contraire pour elle et sa confrontation avec Antoine m'a brisé le cœur!

:arrow: L'écriture
Tu le sais, je suis fan de ton style! Cette histoire ne fait exception :D

Les sentiments sont parfaitement décrit, je me croirais dans la tête de Léonie et au final c'était un peu ça puisque j'avais les mêmes ressenties qu'elle vis à vis des autres.

Il y a un très bon équilibre entre les dialogues et les descriptions, tous les deux parfaitement écrit. Tu arrives à mettre une intensité incroyable par moment, et c'est une des rares histoires pour lesquelles j'ai eu les larmes aux yeux!

Seul bémol, et je pense que c'est l'hôpital qui se moque de la charité venant de ma part parce que j'en fais des tonnes, les fautes d'orthographe. Y'en a vraiment pas, en fait les seules sont souvent une confusion entre -é/er et -ait mais je sais très bien que c'est parce que tu écris vite et que tu fais pas attention, en plus t'écris sûrement tard le soir ou après avoir les cours/devoirs/révisions donc tu es toute pardonnée! Bref, en fait je m'en fiche total tellement à côté de la perfection de cette histoire c'est à peine un détail :mrgreen:

:arrow: En bref, si cette histoire était sur Booknode, elle serait dans ma liste de Diamant :D

Je veux tellement pas que ça termine, Perri! Pitié, promets-moi que tu posteras la suite bientôt! T'as terminé les concours, tu vas avoir le temps d'écrire pitié! :lol:
Allez à dimanche!

PS: Je pense que BigP peut être fière de moi sur les parenthèses dans ce com' :lol:
PPS: Cazo' a toujours raison
PPPS: Perri est incroyable!
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Je relisais mes commentaires en me disant que j'allais te faire un best-of pour répondre à tes questions de fin de tome et je suis tombée sur ça : " mais qui complote aaaah (celle que personne ne soupçonnait : GRETEL ! Et Antoine va épouser Léonie :D Quoi, je formule des hypothèses, même si c'est absurde)" = ça m'a fait rire :lol:

Et du coup je viens de réaliser un truc : On a toujours pas eu la lettre ! C'est vraiment pas sympa ça !! Bon enfin du coup j'imagine que c'est le contenu du dernier bout de chapitre (beuuuurg que je suis triste)
aleclave66

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

Perripuce a écrit :Salut tout le monde ! :D Salut !!!

Oui, je sais, ça fait moins d'une semaine que j'ai posté la dernière partie, mais bon ... Je vais quand même la mettre maintenant, et vous aurez la dernière partie, et donc la fin ... (je vais pleurer, vous aussi ? OUI… :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: ) dimanche pro, ça vous va? Que tu postes dimanche pro, oui ça me va par contre que ça soit la fin, alors là non !!! Ca me va pas du tout !!!!!! :)

Bon voilà, première partie de l'ultime chapitre ... Je me sens pas bien ... Moi non plus !!!! :cry: Mais bon ... Bonne lecture :)




Chapitre 19 (1/2) : The end ? Je vais me suicider !!! Tu vas avoir la mort d'un petit labrador mignon sur la conscience !!! ( Note de l’écrivain : J’ai l’impression d’être Robert Downey Junior à la fin de Sherlock Holmes 2 Pourquoi ? (oui, j'avoue, je n'ai pas regardé Sherlock Holmes... Mais je suis fan de l'acteur et de Iron Man alors me frappe pas s'il te plaît !!!!))

Etrangement, ce ne fut pas Raymond, mais Esther Devyldère en personne qui vint nous chercher. Wow !! La classe !!! La directrice qui vient chercher ses élèves par elle-même !!! Antoine s’était endormi depuis longtemps, étonnant, n'est-ce pas ? et Danny et moi étions dans un piteux état, je ne m'en serais jamais douté !! si bien que Callie fut obligée de lui raconter toute l’histoire dans la voiture. Mais c’en était trop pour la petite Callie, qui avait craqué en plein milieu du trajet. Pauvre petite puce !!! Demande à Danny de te faire un câlin !!! Elle ne dit rien contre Antoine, :shock: :shock: :shock: et je compris qu’étant donné les circonstances, elle lui pardonnait ses frasques. Enfin un peu de sagesse de sa part !! Il lui en a fallu du temps !!! Quand nous fûmes arrivés à Orléans, Devyldère nous avait avoué qu’elle avait soupçonné Léna depuis le début, raison pour laquelle elle l'a laissée à un point important de l'administration, pour qu'elle puisse bien profiter des privilèges des professeurs !!! mais qu’elle n’avait jamais eu de preuve concrète – d’où la dispute que j’avais surprise lors de ma troisième téléportation. Nous avions passé la nuit dans l’infirmerie. Devyldère avait briefé Gretel, mauvaise idée !!! Gretel est diabolique !!! qui avait tellement pâli durant les explications de la directrice que j’avais compté les secondes avant qu’elle ne s’évanouisse. Si elle s'évanouit, tant mieux !!! J'irai cracher sur sa tombe (petite allusion à Boris Vian pour ceux qui auraient pas reconnu) Mais elle avait tenu le choc, et nous avait tous soigné dans un état second. Vérifie qu'elle ait pas mis du poison dans les médicaments !!! C’était à peine si elle avait laissé éclater son soulagement à la vue d’Antoine. Celui-ci était trop faible pour s’en offusquer, mais la détresse de Gretel m’avait touché. Sa famille était de nouveau ébranlée par une nouvelle crise – une crise qu’elle était loin d’avoir vu venir. Si, elle l'a vu venir, elle était même aux premières loges pour la contempler !! Au final, nous nous en sortions bien : Danny et moi avions un bras en écharpe, et Antoine un pansement à la cuisse et le besoin d’une boîte entière de somnifères. Callie était indemne, si ce n’était quelques égratignures.

Cette commère de Salomé Rosier s’était faite un plaisir de faire état de la disparition d’Antoine et de la blessure de Grispoil, bien sûr elle ne pouvait pas se taire !! C'était trop lui demander !!!! si bien que Devyldère dût faire une conférence (à laquelle nous n’avions pas assisté, cloués dans nos lits à l’infirmerie, comme c'est surprenant !!! mais Callie y avait été) sur ce qui s’était passé dans le petit appartement Orléanais dès le lendemain matin. Elle n’avait jamais été au courant des Gardiens, c’était un secret contenu dans les archives, mais difficilement accessible, même pour les directeurs. Elle avait été les fouiller par curiosité, et avait remarqué que la dernière personne à les avoir consultées était Léna Duriez, alors qu’elle était encore étudiante. Tout le monde avait été choqué de l’implication de la très aimée Léna, et les protestations avaient commencé à fuser. Bien sûr, c’était sur Antoine que pesait toutes les accusations, comme si c'était de sa faute si Léna l'avait fait chanter !!! mais Callie avait été là pour le défendre, :shock: :shock: :shock: ce qui nous avait énormément surpris. Moi aussi, je dois avouer que je suis choquée là !!!! Quand Antoine fut assez rétabli, Devyldère l’emmena avec elle dans son bureau, et l’amnistia de tout ce qui s’était passé, à condition qu’il détruise tous les sigles qu’il avait gravés. De toute façon, il les aurait enlevés quand même non ? Nous n’étions pas sûrs qu’effacer les sigles supprimerait les brèches, mais c’était à tenter. Qui ne tente rien n'a rien !!! Il avait hésité à le faire, de peur que Léna ou son complice la diabolique Gretel !! ne continue de menacer sa famille, mais deux jours après Orléans, sa boîte mail et son téléphone s’étaient tus. Il s’était donc autorisé à tester la théorie de Devyldère, et je l’avais accompagné, ainsi que Devyldère, à chaque arbre infecté. Il détruisit l’écorce, usant de sa dague et de ses pouvoirs, il se déchaine le petit Antoine !! si bien qu’il était impossible de voir la moindre trace du sigle. Danny et moi avions fait le tour des arbres pendant les jours qui suivirent, et le jeudi d’après, l’arbre près de l’arène commençait à reprendre une certaine vitalité, et les vibrations du Sceau se faisaient à nouveau sentir au creux du Gardien. J’en avais été tellement heureuse que je lui avais sauté dans les bras. C'est trop mignon !!!

De manière générale, après ce sombre incident, toutes les relations s’étaient apaisées. Callie et Antoine avaient enterré la hache de guerre, ENFIN !!! et le froid que j’entretenais avec Danny avait cessé. ENFIN !!!! Au contraire, je le retrouvais à nouveau tous les soirs à l’infirmerie. J’y étais restée une semaine, parce que même si les vampires n’avaient pas de venin, leurs morsures mettaient un certain temps à cicatriser, et Gretel préférait m’avoir à l’œil. Du fait de la présence de l’infirmière, nous n’avions pas pu parlé librement de ce qui s’était passé – notamment dans la salle du temple, comme nous l’appelions toujours. Mais il m’avait ramené le café tous les matins, pour me rembourser toutes les boissons qu’il me devait, environ une centaine... et à mon dernier matin à l’infirmerie, il avait même ramené des croissants. Vive Danny ! Et vive les croissants !!! Ce jour-là, j’étais monté faire ma valise. Les vacances arrivaient à grands pas, et je voulais partir le plus tôt possible. Comme tout le monde quand il s'agit de quitter le lycée !! Avec tout ce qui s’était passé, ce que je voulais plus que tout, c’était retrouver ma mère, Greg, ma petite ville Nordiste, mes séries américaines… Comme NCIS, Bones et Esprit Criminel (aucun rapport mais j'ai toujours préféré Spencer à Derek (même si je l'aime beaucoup aussi), pas toi ?) ? Je suis absolutivement fan de son programme !!!! Je voulais qu’il commence à neiger et prendre le train pour aller voir Hadrien. Faire un bonhomme de neige comme on faisait dans la demeure ancestrale d’Alsace. Faire des ombres chinoises sous la couette avec ma mère. Des courses dans le parc de ma ville. Recopier en toute hâte un des cours de Sylvain et lui mettre ton poing dans la figure !!! que je n’avais pas pris. Faire mon échauffement au côtés de Joris. Lire les livres que j’avais laissés chez moi. Faire une belote avec ma tante, Hadrien, et grand-mère Moineau avant de déballer les cadeaux pour Noël. Mais je savais que je ne pourrais pas faire la moitié de ce que je venais de lister. Je ne pourrais pas aller voir Sylvain sans lui mettre mon poing dans la figure. Raison de plus pour y aller alors !!!! Je ne pouvais pas aller dans le parc de la mairie sans avoir l’angoisse de revoir le gars aux yeux flippants. Je ne pouvais plus faire d’ombre chinoise avec ma mère, parce que ce que je cachais me pèserait trop pour que j’apprécie ce moment. Je ne pouvais pas aller voir Nathalie et grand-mère Moineau sans penser à tout ce qu’elles m’avaient caché durant toutes ses années. Donc si je te suis bien, tu ne supportes pas que ta grand-mère et ta tante t'aient caché des trucs, mais tu ne veux pas dire la vérité à ta mère, c'est ça ? Il fallait que je m’y fasse : mon arrivée à Sappho avait été un tournant décisif dans ma vie. Tu y as même rencontré l'amour de ta vie sous le nom d'Antoine Meynier, même si tu ne le sais pas encore !!!! J’avais découvert un véritable monde, quelque chose d’aussi lointain que des entités abstraites, que des choses aussi triviales qu’une famille, de cœur, et de sang. Malgré tout, je gardais l’espoir de maintenir l’illusion d’une vie normale, ne serait-ce que l’espace des deux semaines de vacances de Noël. C'est bien d'être optimiste... Alors ma valise était prête et je rentrais le lendemain. Danny m’amenait à la gare, seul. Il y avait une raison. Quelle raison ? J’avais quelque chose à faire. Quand j’avais demandé ça demandé quoi ?! à Danny, il avait sourit, comme s’il s’y attendait. A quoi ?!!Je n’avais pas relevé ce sourire, mais il avait tout de suite accepté. Accepté quoi nom de Zeus !!!!!!

-En vérité, il ne manque plus que Lulu se réveille, et tout serait parfait, commenta Callie en piquant dans le paquet de chips. Oui !!! Mon petit Lulu !!!!

C’était la veille de mon départ, et Antoine, Danny, Callie et moi étions attroupés autour du lit de Lucas. Gretel travaillait derrière, silencieusement. Mais je pensais que le fait qu’elle n’était pas avec nous relevait moins de son sérieux que de sa volonté d’isolement. Elle avait été la plus touchée par ce qui s’était passé avec Léna, et Antoine était très souvent resté avec elle dans sa chambre, à parler à voix basse, à la prendre dans ses bras pour calmer les tremblements qui la prenaient subitement. Elle en était arrivée à un point où c’était aussi Antoine qui devait faire les piqures d’insuline (avec un impressionnant professionnalisme) à la petite Charlotte, et il avait même changé lui-même les pansements de Danny parce que les mains de Gretel tremblaient trop. Tant de dévouement de la part d’Antoine me touchait, mais j’étais encore plus affectée par l’état de Gretel. Contrairement à moi !!!!

-Mouais, pas faux, admit Danny. Absolument vrai tu veux dire !!! Arrête de jouer les désintéressés Danny !!!!
-Si, justement, grommela Antoine en fusillant les photos du regard. Il ne me manque plus que le réveil de mon frère, et la tête du complice de Léna. Va voir derrière et tu la trouveras !!!!

Je suivis son regard, et vit la photo de famille sur laquelle Geoffrey tenait Lucas dans un bras, et enlaçait Léna de l’autre. Voir le visage souriant de Léna me donnait toujours un coup douloureux au cœur, d’autant plus qu’Antoine avait raison. Nous cherchions toujours le complice de Léna, Gretel, et Devyldère et Danny continuaient d’être persuadés que c’était quelqu’un de Sappho. Gretel !!! (j'ai la légère impression de me répéter là...)Ils ne l’avaient pas dit à tous les élèves pour éviter de mettre la psychose, mais la perceptive me hantait toujours.

-On finira par trouver, il (enfin elle) est présente dans la même pièce que vous !! affirma Callie en prenant encore des chips. Espèce de goinfre !!! Moi si je fais ça je prends 3 kilos, c'est pas justeuh !!!!!!Devyldère a du flair pour ce genre de truc. A croire que non vu qu'elle a toujours pas arrêté Gretel !!

J'haussai un sourcil.

-Maintenant tu la kiffes, la directrice ?

Callie haussa les épaules avec flegme. Il était vrai que l’ensemble de notre groupe était mu d’un sentiment nouveau envers Esther Devyldère, y compris Antoine, qui avait publiquement avoué qu’il s’était trompé sur son compte. Wow !!! Antoine Meynier qui avoue qu'il a eu tort !!! Je vais faire une crise cardiaque !!!!!
Comme quoi, la règle numéro deux valait toujours : Léo a toujours raison. Non ! la règle numéro deux c'est "Clarisse a toujours raison !!"

-Un autre truc qui me chiffonne, fit Callie. C’est qu’on ne sait toujours pas pourquoi Léna s’est faite agressé. Parce que quand on joue avec le feu, on finit par se brûler !!!!
-Le même accident qu’il y a sept ans, avança Danny en piochant dans les chips. Elle a voulu faire entrer un vampire, et elle n’a pas su le contrôler. Quand il nous a entendu arrivé avec Léo, il s’est barré.
-D’accord, admit Callie en essuyant les mains sur son jean. Alors autre question : il y a sept ans, ils n’avaient pas Antoine. Alors qui a gravé le sigle ?

Son regard glissa fugacement vers moi, mais il ne fut pas le seul : Antoine et Danny aussi. Et ça se dit ami !!! Ils sont ignobles !!! Je sentis une boule d’amertume se former dans ma gorge, et ignorais envers lequel des trois j’avais le plus de rage. TOUS !!!!

-Ne me dites quand même pas que vous accusez explicitement mon père ? Mais bien sûr que si !!!

Mon regard était particulièrement dardé sur Danny qui est aussi son fils, n'oublions pas !!et Antoine. Si Danny détourna rapidement les yeux, c'est la meilleure chose que tu avais à faire !!! Antoine le soutint, impassible. Je ne sais pas si je l'aime ou si je le déteste pour ça...

-Non, Léo, personne ne dit ça, non, vous ne faites que le sous-entendre, c'est encore plus horrible, et hypocrite !!! me rassura Danny, toujours sans me regarder.
-Non mais tu rigoles ? s’insurgea Callie en faisant de gros yeux. Qui d’autre tu vois faire ça, c’est le seul de la tranche d’âge qui … La ferme idiote !!!
-Callie !

Mais Danny l’avait coupé bien trop tard. Je me levai brusquement de ma chaise. J’entendis Callie m’appeler, Callie, ou l'art de mettre les pieds dans le plat, mais aussi tout le reste !! Vous voulez faire dégénérer une situation sans savoir comment vous y prendre, nous avons une solution : appelez Callie au 82222, Callie au 82222 !! mais je passai outre et sortis de l’infirmerie. J’avais besoin d’air frais pour ne pas dire ou faire des choses que je pourrais regretter. Mon père était un sujet extrêmement sensible, surtout en ce moment. Et plus j’avançais, moins j’avais envie qu’on y touche. Certainement pas des personnes qui ne savaient rien, comme Callie. Je descendis la volée de marches avant de m’y asseoir. L’air de décembre était froid, et le ciel perle menaçait de larguer sur nous ses flocons. Le mot « décembre » résonna mille fois en moi, et je ne pus m’empêcher de sourire avec mélancolie. Ça me faisait toujours penser au film Anastasia. Me frappez pas mais j'ai jamais vu Anastasia

-Des images me reviennent, comme un souvenir tendre… Une ancienne ritournelle, autrefois en décembre…, chantonnai-je doucement pour me détendre.
-Je pensais qu’on avait établi que les dessins animés c’était mauvais pour ton équilibre, princesse. Les dessins-animés ne seront JAMAIS mauvais pour l'équilibre de qui que ce soit !!!!

Je sursautai, et vit Antoine fermer la porte de l’infirmerie pour s’assoir à côté de moi. Ce garçon est vraiment FAN-TAS-TIQUE !!!!! Je croisai les bras sur mes genoux, et fixai résolument le sol.

-Oh ne me fais pas la tête, Birdy, au cas où tu ne l’aurais pas marqué, j’ai rien dit sur ton père, et ton amoureux maintenant que je connais la vérité, voir ça d'écrit ça me fait vraiment mais alors vraiment bizarre, pas vous ? est en train d’incendier Callie. Qui le mérite absolument !!!
-Mais tu n’en pensais pas moins, grommelai-je, la bouche contre mon plâtre.

Ma morsure me faisait encore un mal de chien, et mon plâtre me gênait. Antoine ricana.

-Je ne suis pas encore assez stupide pour répondre à cette question. Antoine Meynier, ou l'art de savoir parler aux filles !!! Je reformule ce que j'ai dit plus haut : ce garçon est fantastique, mais vraiment exaspérant parfois !!!

Je lui flanquais un coup sur l’épaule de ma main saine, et il se laissa faire avec un sourire. Nous restâmes un petit moment silencieux, assis dans le froid, à attendre que tombent les premiers flocons.

-Ça va mieux ? Mais bien sûr !!! Elle pète la forme, ça ne se voit pas ? s’enquit-t-il au bout de quelques instants, du bout des lèvres.

Il regardait mon plâtre, mais je n’étais pas dupe. Ce n’était pas l’extérieur qui l’intéressait, mais l’intérieur. Je supposais qu’avoir grandi avec Lucas devait aider à voir les signes. Je croyais que c'était Lucas qui avait le pouvoir de déchiffrer les émotions des gens, pas Antoine.

-Je m’en sors, éludai-je en haussant les épaules.

Ce n’était pas tout à fait exact, mais j’avais peur de me mettre à pleurer si j’en parlais. Pauvre petite puce :( !!! Demande-lui de te faire un câlin pour te consoler !! Il était arrivé la nuit que je rêve de Tobias, de ses iris incroyablement clairs et vides, rivés sur les miens, de ma dague s’enfonçant impitoyablement dans son cou. Dès que je regardais mon plâtre, ce souvenir me prenait à la gorge. Ma main se mit à trembler, et avant que je ne pus cacher ce tremblement, Antoine me la prit. Fantastique, exaspérant et trop mignon !!! Je pestai intérieurement contre ma transparence, mais comme je le disais, Antoine avait grandi avec Lucas. Les crises de remords, ça devait le connaître.

-C’est normal, souffla-t-il doucement. Il faut juste apprendre à vivre avec.
-C’est facile de dire ça, pour toi, répliquai-je en réprimant les larmes qui me venaient aux yeux.

Antoine eut un petit ricanement et secoua la tête. Depuis l’incident d’Orléans, Devyldère l’avait autorisé à prendre des somnifères, et il s’était levé tous les jours à midi. Résultat, c’était la première fois depuis que je le connaissais que je le voyais si reposé, si en forme. Toute trace de cernes avait disparu, et il était d’une pâleur infiniment moins maladive. Ses yeux s’étaient éclaircis, passant du saphir froid et dur à un azur beaucoup plus doux.

-Tu me blesses, Birdy. Je ne suis pas aussi sans-cœur qu’il n’y paraît. Tuer quelqu’un, ça fait mal à tout le monde de normalement constitué. Qu'est-ce que tu racontes ? Moi je fais ça tous les jours avant le petit-déjeuner !!! C'est aussi simple que de couper une tranche de rôti !!! Personne ne s’y habitue. Notre capacité à nous en remettre dépend de la façon dont on apprend à vivre avec ça.

Je me sentis vaguement honteuse d’avoir sous-entendu qu’il n’avait pas de cœur, parce que je savais que c’était faux. Il en avait un, et il le dévouait presque entièrement à sa famille, son frère, sa petite sœur. A Gretel, aussi. Et à toi, bientôt... Je pensais sérieusement qu’Antoine était ce genre de personnes prêtes à donner sa vie pour ceux qu’elles aiment. Ce qui est logique vu ce qu'il a fait pour Lucas. Je repliai mes jambes sur ma poitrine.

-Je n’arriverais jamais à vivre avec ça. Dès que je ferme les yeux, la seule chose que je sens, c’est du sang.

Et pourtant, ce n’était pas faute d’avoir nettoyé une dizaine de fois ma dague avec mille produits différents, d’avoir jeté mes vêtements tâchés, de m’être lavée deux fois par jour, et de mettre du parfum pour masquer l’odeur, même fictive. Le coup du parfum avait d’ailleurs surpris Danny, et je n’avais pas eu le cœur à lui révéler la véritable raison de cet excès de féminité. Antoine serra mes doigts.

-C’est normal au début, princesse. Et je ne dis pas que ça doit le devenir, tuer quelqu’un, même un vampire, c’est loin d’être un acte à banaliser. Ah bon ? Moi je pensais que c'était normal !!! Mais il y a des choses que tu ne peux pas changer. Il allait te tuer, Léo. Nous tuer. Antoine, ou l'art de souligner l'évidence même !!! Si tu ne l’avais pas fait, l’un de nous aurait peut-être survécu, mais c’est la mort de l’autre qu’il aurait eu sur la conscience. Et je pense que ça aurait été cent fois plus lourd à supporter. C'est vrai que la mort de la personne qu'on aime (même sans le savoir) c'est insupportable !!

Mon cœur se serra. Si j’avais hésité, si Tobias s’était échappé du tour d’Antoine … Si ma tante en avait on l'appellerait tonton Jean Claude !!! Arrête avec tes "si", ça ne s'est pas passé alors arrête !!! Qu'est-ce qui se serait passé ? M’aurait-il poussée d’abord dans la Loire, du haut de cinq étages, avant de s’en prendre à Antoine ? Ou l’aurait-t-il d’abord tué pour l’avoir à deux fois humilié ? Que se serait-t-il passé si Antoine était mort parce que j’avais hésité à tuer Tobias ? Je sentis mon visage se décomposer, et il dut lire l’horreur dans mes traits.

-Mouais, je suppose que ça n’aurait vraiment pas été facile, ricana-t-il. Non, tu crois ?

Je ne pus m’empêcher de sourire, et de le regarder en levant un sourcil.

-Je suppose que c’est le moment où tu es censé me dire « merci », et « je t’adore » ? tentai-je de plaisanter en réprimant mes larmes pour de bon.

Antoine sourit aussi, d’une manière un peu timide qui me surprit beaucoup. Les seuls sourires que j’avais vus sur les lèvres d’Antoine avaient été sarcastiques, arrogants, assurés, et quelques fois penauds. Timide était quelque chose de nouveau, et de surprenant. Il va lui faire une grande déclaration d'amour ?

-Oui, je pense que le « merci » est plus que de mise après ce qui s’est passé, avoua-t-il. Alors – attention, Birdy, savoure bien – Merci. :shock: :shock: :shock:

Je levai le visage au ciel en me mordant la lèvre inférieure, de façon taquine, l’air de déguster ce mot ô combien rare dans la bouche d’Antoine Meynier. Pourtant, il ne s’arrêta pas là. J’avais été maintes fois surprise depuis que j’étais arrivée à Sappho. Et je puis vous assurer que celle-ci fut la plus surprenante, pour ne pas dire choquante. Antoine se pencha sur moi, et posa un petit baiser sur ma joue. Oh mon Dieu !!! Perri, je t'aime vraiment beaucoup à cet instant précis !!!!

-Et je t’adore, ajouta-t-il, d’un souffle. Moi aussi mon petit Antoine, moi aussi... Quoi ? C'est pas à moi qu'il parle ? Vous êtes sûrs ? Bon, tant pis... :lol:

Je clignai des yeux, éperdue, et posai une main sur ma joue. Le temps que je m’en remette, Antoine s’était levé, et était rentré dans l’infirmerie sans demander son reste. Vous les hommes vous êtes tous pareils !!! A chaque fois que vous faites quelque chose, vous vous enfuyez pour ne pas assumer vos actes !!! Je restai un moment assise sur les marches, contemplant la porte de l’infirmerie, mes doigts scotchés sur ma joue. Play ! Non, ça marche pas ? J'aurai essayé ! Je savais que je devais avoir l’air d’une parfaite idiote, et je m’en rendais parfaitement compte. Je m’ébrouai, et me levai pour faire quelques pas devant l’infirmerie, le cerveau en ébullition. L’unique chose qui me ramena à la réalité fut la voix de Callie, qui ouvrit la porte à la volée au bout de quelques minutes.

-Léo ! Viens tout de suite ! Quoi ? Les extraterrestres débarquent ? Louis Weasley fait un strip-tea... oups, je crois que je me suis trompée d'histoire :lol: (où est le problème ? Il n'y a pas d'âge pour devenir sénile...)

L’extase et son sourire se sentaient dans sa voix, et elle n’attendit pas que je réponde pour retourner à l’intérieur de l’infirmerie. Ma curiosité piquée, je montai rapidement les marches de l’infirmerie, et la suivis jusqu’au lit de Lucas. Elle me prit le bras avec vigueur. Ses yeux brillaient.

-Lucas vient d’ouvrir les yeux !

Et elle me tira plus fort vers le fond de l’infirmerie. Mon cœur fit un saut périlleux, et je courus avec Callie jusque derrière le paravent. Antoine et Danny s’activaient, redressant Lucas, positionnant ses oreillers derrière son dos. Je me stoppai net devant le lit, et scrutai le visage pâle de Lucas. Il était crispé, ses paupières papillonnaient, et il avait l’air assez perdu. Mais ses yeux étaient ouverts.
Petit génie.
Je sentis une grosse boule d’émotion se former dans ma gorge, et elle faillit éclater quand Lucas posa les yeux sur moi, et me sourit. Puis son regard passa à son frère, qui l’aidait toujours à se redresser.

-Tu n’as pas fait trop de bêtises pendant que je dormais ? plaisanta-t-il d’une voix faiblarde. Pas du tout !! Je ne vois absolument pas ce qu'elle a fait de répréhensible pendant ce temps-là mais alors pas du tout :roll: :roll: !!!

On aurait dit qu’il parlait avec du coton dans la bouche. Je le vis déglutir, et il fut secoué de toussotements. Ça faisait des semaines qu’il n’avait pas prononcé un mot. Tout ça à cause de Gretel !!!

-Imbécile, pesta Antoine, un grand sourire démentant son ton. Tu m’as foutu la frousse de ma vie !

Il souriait tellement que c'en était contagieux, avec la simplicité du bonheur. Je ne pouvais m’empêcher de l’imiter. Danny revint vers nous avec un verre d’eau qu’il donna à Lucas, qui le but d’une traite.

-Comment tu vas mon Lulu ? Merveilleusement bien !! Il est prêt à courir un marathon là, ça ne se voit pas ? s’enquit Callie en s’asseyant sur le lit, chose que nous nous étions interdite pendant le coma de Lucas.

Un faible sourire s’étendit sur les lèvres de Lucas, tandis qu’il prenait conscience d’un certain nombre de choses : le fait qu’il avait toujours une attelle à la jambe et au bras, qu’il était à l’infirmerie, que Danny et moi étions blessés, et que son frère se trouvait dans la même pièce que Callie. Ses sourcils se froncèrent vite, et un éclair fugace traversa ses yeux. Quand ils lui auront tout raconté, le pauvre va faire une crise cardiaque !! Il se tourna vers Antoine, qui le contemplait toujours avec ravissement. Play ! Toujours pas ? Tant pis...

-Où est Gretel ? demanda-t-il d’une voix faible.
-Derrière, elle bosse, lui apprit son frère. Tu veux que j’aille la …

La main saine de Lucas s’abattit presque brutalement sur le bras d’Antoine, qui venait de se lever pour aller chercher l’infirmière. Antoine fixa son frère, surpris, un sourire figé sur les lèvres.

-Non, haleta Lucas en laissant retomber sa main. Je ne préfère pas … Enfin quelqu'un qui reconnaît son côté diabolique !!

Nous échangeâmes tous des regards surpris, et ceux d’Antoine et Callie se fixèrent sur Lucas. Le mien se riva sur Danny. Son visage s’était fermé dès l’instant où Lucas avait empêché Antoine d’aller chercher Gretel. Ses yeux rencontrèrent les miens, et j’y fis passer une question muette. Il articula silencieusement « deux minutes », et retourna s’assoir à côté de la tête de Lucas.

-Pourquoi ? s’étonna Callie. Lulu, tu es tout pâle, tu es sûr que …
-Lucas, la coupa Danny, avec douceur cependant. Ce n’est pas la première fois que tu te réveilles ?

Les yeux d’Antoine s’écarquillèrent, et je fronçai les sourcils en regardant la réaction du petit génie. Il sourit péniblement à Danny, l’air de dire « je savais que je pouvais compter sur toi, mec », et hocha difficilement la tête. Règle numéro 1 : Toujours compter sur Danny !!

-Et Gretel le savait … Du moins, la plupart du temps, ajouta-t-il.
-La plupart du temps ? répétai-je sans vraiment comprendre.
-Gretel le savait ?

La voix d’Antoine claqua comme un fouet à mes oreilles. Lucas hocha la tête en lançant un drôle de regard à son frère. Je reconnaissais ce regard, pour l’avoir mille fois lancé, à son frère comme au mien. Elle... elle vient de l'admettre ou j'ai rêvé ?
Oh, ciel. Venais-je vraiment d’admettre que Danny était mon frère ? Ah non, j'ai pas rêvé... C'est génial !!!
Il fallait bien croire.
Bref. Toujours était-t-il que c’était le regard typique de l’avertissement « ne t’énerve pas. s'il te plaît ». Évidemment, s’était aussi typiquement le regard dont Antoine passait outre. Surprenant, non ?

-Oui, elle m’a vu les yeux ouverts, avoua-t-il d’une petite voix. Mais elle en a été horrifiée, tu aurais vu sa tête …
-Lucky, gronda Antoine d’une voix que je trouvais inutilement menaçante. Qu'est-ce que tu veux dire, au juste ? Que Gretel est une traîtresse !

Lucas ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit, et il lança un regard suppliant à Danny, comme pour lui demander de prendre le relais. Je remarquai alors que Danny avait blêmi, les mains crispées sur ses genoux.

-Elle te maintenait endormi ? Bonne réponse !! s’assura-t-il alors, répondant au souhait muet de son ami.

Callie leva les yeux au ciel.

-C’était à cause de l’hématome qu’il avait au cerveau, évidemment qu’elle te maintenait endormi, mauvaise réponse !! s’agaça-t-elle.
Franchement, vous devenez paranoïaques ! On parles de Gretel, les mecs ! Justement !!

Je devais avouer être d’accord avec Callie, mauvaise idée !! mais la pâleur de Danny, et l’inquiétude dans les yeux de Lucas me faisait douter. Quand à Antoine, il était toujours debout, les bras croisés sur sa poitrine, les yeux rivés sur Lucas.

-Ce n’est pas vraiment ce que j’ai entendu, avoua celui-ci, toujours faiblement. J’ai …

Il leva les yeux, et ils se figèrent sur un point derrière moi. Je fronçai les sourcils, et me retournai pour voir Gretel à l’entrée du paravent. Elle fixait Lucas avec des yeux brillants, le visage vierge de toute expression.

-Comment tu vas petit génie ? J'ai l'impression de me répéter mais je vais le redire : il pète la forme, il est prêt à courir un marathon tout de suite s'il veut !! demanda-t-elle d’une voix cassée.

Elle me faisait réellement de la peine. J’avais du mal à reconnaître la pétillante infirmière qui nous avait fait faire des séances de spiritisme, et qui dansait avec dextérité le rock avec Antoine.

-Gretel, intervint Danny avant que Lucas n’ait pu répondre. Ça fait combien de temps que son hématome s’est résorbé ?

Les incroyables yeux de Gretel se posèrent sur Danny. Je remarquai alors que son regard brillait parce que ses yeux étaient remplis de larmes.

-Deux semaines.

J’ignore ce qui me surprit le plus : la réponse en elle-même, ou la franchise de Gretel. Une larme coula sur sa joue. Qu'est-ce qui émouvait à ce point l’infirmière ? Tout le monde accusa le coup de la réponse. Ça faisait des semaines que Gretel évoquait son hématome pour me rassurer quand je le voyais endormi…

-Alors … Pourquoi …, commençai-je avec indécision.
-Ne me dis pas que tu as fait ça. Si ! Exactement !

J’eus du mal à reconnaître cette voix étranglée, avant de comprendre qu’elle appartenait à Antoine. Gretel vrilla ses yeux perlés sur lui, et porta la main à sa bouche, comme pour réprimer un sanglot.
J’avouai être définitivement larguée.

-Tonio, s’étrangla Gretel, une main crispée sur le paravent. Je suis vraiment désolée … Les regrets ça ne suffit pas toujours... Je n’avais pas le choix … On a toujours le choix !! Je …

Les larmes se mirent à couler en abondance sur le visage de Gretel, et elle ne tenta même pas de les essuyer. Je regardai Danny, demandant silencieusement confirmation de ce que je pensais. Il me retourna un regard écarquillé d’horreur. Même lui ne l’avait pas vu venir. Et pourtant, c’était la stricte vérité. Je mis ma main sur la bouche pour contenir mon effroi.
Gretel était la complice de Léna. JE LE SAVAIS !! JE LE SAVAIS !! JE LE SAVAIS !!! JE LE... bon ok j'arrête, mais je le savais !!!

-Non. Si !!

Antoine s’écarta de son frère, et me dépassa rapidement pour rejoindre Gretel. Il lui prit l’épaule d’une main, le visage de l’autre, la forçant à le regarder.

-Gret’, fit-t-il d’une voix presque suppliante. Les photos … Ne me dis pas que c’est toi qui … Si !!

Le sanglot qui s’échappa de la gorge de Gretel était un terrible aveu à lui seul. Je me couvris le visage des deux mains. Je refusai d’entendre ce sanglot. Non, Gretel. Pas toi. Si !! Le visage d’Antoine se décomposa littéralement. Il lâcha brutalement Grete, et recula, sonné.

-Tonio, sanglota l’infirmière. s'il te plaît, je … Elle me l’a demandé, et alors ? je … Je ne pouvais pas … Si, tu pouvais !!
-Tu m’avais juré que c’était terminé, terminé quoi ? souffla Antoine, à voix très basse.

Les pleurs de Gretel reprirent de plus belle, et elle tenta de prendre la main de son ami, mais il se déroba, se détournant d’elle pour faire les cent pas, une main sur le front. Toute la fatigue qu’il avait éliminé ses derniers jours parut revenir d’un seul coup.

-Gretel, entonna Danny d’une voix douce, indécise. Je … J’avoue que pour le coup, j’ai besoin de l’entendre pour le croire …
La suite tout de suite
Dernière modification par aleclave66 le jeu. 05 mai, 2016 7:27 pm, modifié 1 fois.
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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

Et voila la suite !!
Perripuce a écrit :Je lançai un coup d’œil à Danny. Son visage était presque aussi décomposé que celui d’Antoine. Et je ne parlait pas de Callie. Gretel fixa dans Danny, ses yeux brillants de larmes, et elle rassembla tout son courage pour s’expliquer :

-Je vous jure … que c’était la dernière chose que je voulais, c'est flagrant !! haleta-t-elle en s’adossant au paravent, comme si elle ne pouvait plus soutenir son propre poids. Vous faire du mal, à tous … (son regard se porta sur Antoine). ça me fendait le cœur … Elle a compris, elle ne m’a pas demandé grand chose … de mettre des somnifères dans les médicaments de Lucas … prendre deux ou trois photos pour son compte … Espèce de...

A chaque mot que Gretel prononçait, je voyais Antoine tressaillir. Il se retourna pour contempler Gretel comme s’il la voyait pour la première fois, et elle fondit à nouveau en larmes. J’étais déchirée entre un sentiment atroce de trahison, inégalé par mon père et Léna, et un fort sentiment de pitié. Quoi qu’elle ait fait, Gretel le regrettait amèrement. Et alors ? C'est pas une excuse !!

-Dites-moi que c’est une blague, si tu veux je peux le dire, mais c'est pas pour ça que ce sera vrai !! laissa échapper Antoine, une main toujours sur le front.
-Non, souffla Lucas à voix basse. C’en n’est pas une.

Les yeux d’Antoine se portèrent brièvement sur son frère. Le déchirement que je voyais dans ses yeux me transperça le cœur.

-Elle ne t’a pas fait ça … Fait quoi ?
-Tonio …, fit Gretel en tentant une fois de plus de lui prendre le bras.

-Lâche-moi ! cria-t-il en se dégageant. Toute ma vie, depuis toujours je t’ai fait confiance ! Tu étais la seule qui savait tout – tu en savais même plus sur moi que Lucky ! Dès le début de cette affaire … Tu as toujours tout su ! Donc Léna aussi...

La voix d’Antoine se brisa à cet instant, et ce qu’il m’avait dit dans l’écurie me revint en un éclair en mémoire. Si Gretel n’avait pas été là pour le soutenir, il se serait tiré une balle. Or, Gretel était en partie responsable de son abominable trimestre. Des événements qui auraient pu pousser Antoine au suicide … Si elle n’avait pas été là. J’entendis un autre sanglot, mais cette fois, il venait de Callie.

-Je ne comprend pas, pleura-t-elle en séchant ses larmes. Tu as été notre meilleur soutien … pourquoi …
-Je sais pourquoi, dis-le alors, nom de Zeus !! répliqua durement Antoine.

Gretel laissa échapper un hoquet, et fixa son ami avec de grands yeux. Le regard qu’il lui lançait était implacable, accusateur … déchiré, et déchirant.

-Non, Tony, protesta faiblement Gretel. Ce n’est pas … Quoi ?
-Alors pourquoi ?! ragea-t-il en levant les bras aux ciel. Pourquoi, si c’est pas ça, Gret’ ? Pourquoi tu m’aurais fait ça si ce n’est pas à cause de ça ?!

Gretel ne répondit pas, se couvrant la bouche des deux mains, et son mutisme parut être la réponse d’Antoine. Les yeux d’Antoine étincelaient. Pauvre chou !! Je ne l’avais jamais vu dans un tel état, ni après la chute de Lucas, ni au moment où il avait craqué dans l’écurie, ni dans l’appartement Orléanais. Je retrouvais devant moi le Antoine dont j’avais eu peur pendant des semaines, celui qui était capable plus du pire que du meilleur. Lucas parut aussi s’inquiéter de l’humeur de son frère, car il se redressa et fit un geste pour retirer ses couvertures. Je l’en empêchai en mettant une main sur son bras.

-Ne t’en fais pas, lui soufflai-je. Ça fait des semaines que je gère ça. Brillamment d'ailleurs !!

Lucas me lança un regard surpris, mais aussi torturé – et fatigué. Mais il hocha la tête, et se laissa retomber sur ses oreillers. Pour ma part, je me levai pour continuer mon rôle de « tampon » (un jour, peut-être, je me ferais payer pour ça bonne idée !! Tu gagneras beaucoup !!!). Gretel me vit arriver, et elle me prit immédiatement la main saine.

-Je ne voulais pas petit oiseau, à chaque fois que je vois ce surnom ça me fait bizarre parce que c'est aussi le mien (ceci était un petit moment racontage de vie sans aucun intérêt... :lol: ) m’assura-t-elle. Jamais je ne me le serais pardonné s’il vous était arrivé quelque chose … Alors pourquoi tu l'as fait ?

Je me figeai quand elle m’appela « petit oiseau ». La première personne à m’avoir appelée comme ça été Tobias. Mes entrailles se glacèrent un instant, mais je pris mon courage à deux mains pour articuler :

-Pourtant, il est bien arrivé des choses à des gens…

Gretel fronça les sourcils, m’obligeant à m’expliciter.

-Elodie.

Le visage de l’infirmière se décomposa, et de nouvelles larmes perlèrent à ses yeux. Je ne pouvais supporter sa détresse, alors je détournai le regard pour continuer :

-Gretel, dis-moi que tu avais une raison valable de faire ça… C'est quoi pour toi une raison valable ? Tu te rends quand même compte que … Si tu n’avais pas soutenu Léna … Elodie … serait encore en vie !

Ma voix se brisa, et je me refusai à continuer. Je ne voulais pas aller plus loin, car je ne voulais pas dire ce que j’avais vraiment sur le cœur. Le destin tragique d’Elodie, évidemment.
Mais surtout, si elle n’avait pas aidé Léna, peut-être que je n’aurais pas eu à tuer Tobias.
J’entendis Antoine renifler avec mépris.

-Ça dépend ce que tu appelles une raison valable, tacla-t-il durement.
-Et bien éclaire nous, au lieu de garder tes secrets ! explosa Callie.
-D’accord ! (Il pointa Gretel du doigt, et je fus presque sûre de voir des larmes lui monter aux yeux). Ça fait des années qu’elle est amoureuse de Léna ! :shock: :shock: :shock: Alors là, je m'y attendais pas du tout !!!! :o :o :o

Gretel me lâcha pour enfouir son visage dans ses mains. Mais ce n’était pas pour retenir ses pleurs, cette fois. C’était pour retenir, ne serait-ce qu’artificiellement son secret. Un silence abasourdi s’installa dans la pièce, et nous dévisageâmes Gretel avec un étonnement qui frisait le choc. Les larmes s’étaient figées sur les joues de Callie.

-Quoi ? croassa-t-elle, éperdue. Gretel … Tu … Tu es …

Gretel mit son index et sn pouce sur ses yeux, avant de regarder Callie en soupirant. Elle eut un faible sourire.

-Lesbienne ? Oui, je crois que c’est le terme. Personnellement ce n'est pas ça qui me dérange, mais plutôt sa trahison !!

Je la fixai moi aussi, sous le choc. Je ne m’attendais absolument pas à ce genre de révélation. Je m’étais souvent demandé si Gretel pouvait avoir un copain – elle était si jolie, si gaie … Je n’avais jamais imaginer que le copain puisse être une copine.
Et encore moins Léna. Juste au cas où vous ayez oublié, le plus important là maintenant tout de suite c'est surtout de l'arrêter, pas de se préoccuper de ses histoires de coeur, et puis qu'elle soit lesbienne on s'en fout !!!!

-Alors tu veux dire que tu as fait tout ça – prendre des photos de Lucas, maintenir la pression sur Antoine, le forcer à graver les sigles – juste … pour Léna ? récapitulai-je, incrédule. Simplement parce que tu en étais … amoureuse ? L'amour rend crétin (Tara Duncan a vraiment raison de dire ça) !!!!

Gretel eut un sourire condescendant à travers ses larmes.

-Oh, petit oiseau, arrête de l'appeler comme ça !!! si tu savais … On peut faire beaucoup de choses, des choses stupides, par amour. Trahir son meilleur ami, tuer indirectement quelqu'un, mettre toute l'école en danger, faire du chantage, comploter, faire semblant, mentir... Clairement, on peut tout lui pardonner, après tout si elle a fait ça par amour, je ne vois AB-SO-LU-MENT PAS pourquoi on lui en voudrait !!!!

Elle coula un regard en direction d’Antoine, mais passa vite dessus. Je compris la teneur de ce regard. Elle le prenait pour exemple. « Antoine a fait tout ça par amour pour Lucas ». Alors ça c'est vraiment un coup bas !!! J'avais encore un tout petit peu pitié d'elle jusqu'à maintenant mais après ça non !!! Je n'ai plus du tout pitié !!!!
Sauf qu’Antoine avait eu le couteau sous la gorge. Pas elle.
Il paraissait penser exactement la même chose que moi, et un éclair de fureur traversa ses yeux bleus. Ils étaient soudainement redevenus durs et froids comme le saphir.

-Rien à voir ! cracha-t-il. Je n’avais pas le choix, pas le choix ! Est-ce qu’on menaçait Léna ? Non ! Est-ce que tu as reçu des photos d’elle décapitée ? Non ! L'unique personne de ton entourage qui souffrait, qui était réellement menacée, c’était Lucas – c’était moi, bordel, pas Léna ! Bien dit petit prince !!!!

Une grimace tordit les lèvres parfaites de Gretel, mais ses larmes avaient séché sur ses joues.

-Elle aussi elle souffrait, tu sais, souffla-t-elle à voix basse. Et elle avait perdu réellement quelqu’un. Et alors, c'est une raison pour faire chanter quelqu'un et essayer de tuer tous les enfants de Sappho ?

Le « Contrairement à toi », était clairement sous-entendu. Dans mon échelle de pitié, elle vient de passer de -100 à -200 000 là :evil: :evil: !!!! Antoine la fixa avec de grands yeux, la stupeur chassant fugacement la colère. Elle avait l’air de dire que la souffrance à Léna était réelle alors que celle d’Antoine n’était que fictive. Son argument me retourna le ventre.

-Tu es sérieuse ? Apparemment oui !!! lâcha Antoine d’une voix dure. C’est ça ton excuse, Léna souffrait alors du coup tu as voulu la soulager en me faisant miroiter la même douleur ? Exactement !!

Gretel planta ses dents dans sa lèvre inférieure, mais ne dit rien, retenant ses larmes du mieux qu’elle pouvait. Mais son mutisme ne fit que déculper la colère d’Antoine.

-Mais tu es atroce ! Entièrement d'accord !! Tu sais tout ce que j’ai vécu ces dernières semaines – ce qu’il aurait pu arriver à Lucas ! ( Il pointa le lit de son frère du doigt). Tu m’as rassuré pendant des semaines, alors que c’était toi qui était à l’origine de ça ? Gretel, putain, je te pensais pas si hypocrite ! Moi si !!!
-J’ai fait ce qui était le mieux pour que cette histoire finisse bien, tu as une drôle de manière de faire en sorte que ça se finisse bien à mon avis !!! tenta de se défendre Gretel. Je t’ai poussé à le faire, à la fois pour éviter qu’on fasse du mal à Lucas, et que tu te fasses du mal à toi même. Quelle bonté d'âme !! Quel dévouement !!!! C'est sûr que sans toi rien n'aurait été possible !!!!!

La mâchoire d’Antoine se contracta quand elle prononça la dernière phrase, et je sentis le regard de la pièce glisser sur lui, tentant de la décrypter. Callie se couvrit le visage des mains.

-Tu m’as poussé surtout parce qu’elle te l’avait demandé, pas vrai ? Exactement !!! Elle n'a absolument aucune excuse !!! répliqua-t-il finalement.

Gretel ne releva pas.

-Alors le seul calcul que tu as eu à faire, ça a été de voir qui tu aimais le plus entre Léna et moi ! De toute évidence c'est Léna, désolée petit prince !!! s’exclama Antoine. Je pensais que c’était fini, Gretel, tu me l’avais promis ! Pourquoi elle lui avait promis ? C'était pas ses affaires !!! Je ne vois pas en quoi le fait que Gretel soit amoureuse de Léna le concerne (enfin maintenant si mais au moment où elle a promis non) !!!
-Ça n’a rien à voir !
-Rien à voir ?! Tu l’aurais fait si tu n’étais pas obsédée par elle ? Bien sûr que non !!!
-Je ne suis pas …
-Si ! Si, c’est exactement ça ! (Les poings d’Antoine étaient serrés, et ses yeux brillaient). Tu t’es toujours imaginée que tu pourrais faire quelque chose, être quelqu’un pour elle, plus qu’une petite sœur ! Tu m’avais dis que c’était passé, on dirait qu'il parle d'une maladie, c'est assez homophobe comme terme non ? tu m’as menti, d’un bout à l’autre ! Mais bon sang, comment tu as pu me faire ça ?! Très bonne question !!!

Ce n’était pas tant vis-à-vis de Léna ou de Lucas qu’il s’énervait. Si les yeux d’Antoine brillaient, c’était bien qu’il y avait des larmes qui menaçaient de couler. Gretel l’avait trahi lui, son meilleur ami – peut-être plus que ça. Je m’étais souvent demandé si Antoine n’avait pas un jour été amoureux de Gretel – et sa réaction m’inviter à croire cette voix. Mais non !!! Si il aime Gretel ça veut dire qu'il aime pas Léo et ça c'est hors de question !!!
C’était personnel. C’était entre lui et Gretel.
Il allait finir par exploser. Tant que c'est contre Gretel, moi ça ne me dérange absolument pas !!!

-Arrête, soufflai-je à voix très, très basse.

Ce murmure avait un but : n’être entendu que par une seule personne. La seule personne ayant d’assez bonnes oreilles. Antoine me regarda un bref instant, agacé. Ses poings étaient serrés, et je le sentais bien à deux doigts d’utiliser ses pouvoirs contre Gretel. Fais-le !!! (j'ai l'impression d'être sans-coeur mais j'arrive vraiment pas à avoir pitié de Gretel, vous trouvez que je suis une psycopathe ou vous non plus vous n'y arrivez pas ?)
Je ne pouvais pas le laisser faire ça. Mais si !!! Il allait le regretter. Ah oui, j'avais pas pensé à ça donc non, c'est mieux qu'il le fasse pas.

-J’aurais voulu que sa finisse, affirma Gretel dans un filet de voix, ne m’ayant pas entendue. Je te jure, mais ce n’est pas … Elle souffrait tellement. Parce qu'Antoine non peut-être ?

A cet instant précis, mon plus grand souhait aurait été de gifler Gretel. Moi aussi !!! Le regard d’Antoine se reporta immédiatement contre elle, et ses mains se desserrèrent. Je sentis l’ambiance de la pièce se tendre d’un coup.

-Arrête ! fis-je, cette fois d’une voix parfaitement audible.

J’avançai de quelques pas pour me mettre entre lui et Gretel, les mains levées en signe de pacifisme. J’aurais préféré que ce soit Danny qui s’énerve. Il s’en voulait tellement d’avoir failli me blesser que le fait même de me voir surgir l’aurait tout de suite apaisé. Mais en l’occurrence, c'était un volcan en puissance – et au meilleur de sa forme – que je devais éteindre. Je lançai un regard appuyé à Antoine. Il me jaugea avec courroux, mais ses poings se resserrèrent.

-Birdy, gronda Antoine à voix basse entre ses dents. S'il te plaît, vire. Mais oui, bien sûr, on croirait que tu ne la connais pas !!!

Il parlait bas pour que moi seule puisse l’entendre. Je sentis un frisson me parcourir la colonne vertébrale. Il était dangereux quand il était ainsi, et tous mes sens me hurlaient « DANGER », aucun instinct de survie !!!! mais j’avais un stupide sens du devoir qui me poussait à rester plantée là, devant lui, inflexible. Elle-même elle l'admet !!!

-Non, toi, tu vires, le rabrouai-je d’une voix aussi posée que je pu. Tu as tes réponses, c’est l’essentiel. Le reste, c’est du surplus. Inutile que tu t’affliges ça. Tu as pas déjà assez souffert comme ça ?

La mâchoire d’Antoine se contracta, et il lança un regard à la fois venimeux et torturé à Gretel, par-dessus mon épaule. Je ressentis monter la tension d’un cran, en Volt ? Désolée j'étais obligée de la faire, vous avez le droit de me jeter des tomates pourries ou des œufs si vous avez envie !!! et ne pus m’empêcher de fermer les yeux. "Ne clignez pas des yeux ! N'y pensez même pas ! Clignez et vous êtes morte ! Ils sont rapides, bien plus rapides que vous ne le croyez ! Ne tournez pas le dos ! Ne regardez pas ailleurs ! Et surtout ne clignez pas ! .... Bonne chance !" Désolée mais je viens de reregarder la saison 3 de Doctor Who sur youtube et ce moment m'a particulièrement marquée (oui, je l'avoue, cet épisode m'a fait flipper mais je suis sûre que vous aussi alors ne vous moquez pas !!!!) !!!!

-Antoine s'il te plaît. Pense à Lucas. Ça, c'est déloyal !!!

Argument relativement vache, qu'est-ce que je disais ? mais qui eut son effet. Antoine se passa une main sur le visage, jeta un bref coup d’œil à son frère, toujours pâle et silencieux dans son lit, et foudroya Gretel du regard.

-Je t’aimais beaucoup, Gretel. Et même pour mon frère, jamais je ne t’aurais fait ça.

Les dernières paroles lancées, il secoua la tête avec frustration, et me dépassa d’un pas lourd. Je vis Gretel faire un mouvement pour le rattraper, mais je lui agrippai le bras pour qu’elle le laisse partir. Ce ne fut que quand j’entendis la porte de l’infirmerie claquer violemment que je la relâchai. Elle ricana amèrement, et se laissa tomber sur la chaise vide.

-Pourtant il a fait pire, pour son frère… NON !!! Là je ne suis pas d'accord !!!! Son frère était menacé !!! S'il n'avait rien fait Lucas serait mort !!! La petite Chloé Meynier aussi !!! Léna n'avait aucun couteau sous la gorge, elle !!! Gretel a fait ça de son plein gré !!! Sans aucune forme de contrainte !!!!
-Rien à voir ! Exactement !!!

Je me mordis la langue. Je n’avais pas évacué Antoine pour prendre la relève. Mais j’avouai que j’avais l’impression d’avoir de la braise à la place du sang, une braise qui chauffait lentement mais sûrement dans mes veines.

-Ce que tu ressens pour Léna … Je suis désolée, Gretel, mais pour moi ça ne pourra pas justifier ce que tu as fait à Sappho, entonnai-je d’une voix résolument plus calme. Et à Antoine, ajoutai-je après une seconde de réflexion. ENTIEREMENT D'ACCORD !!!!
-Ça petit oiseau, ARRÊTE AVEC CE SURNOM !!!! tu verras quand tu seras amoureuse, renifla Gretel avec dépit. J’ai fait ce que j’avais à faire … *air plus que sceptique*

Je voulus répliquer quelque chose de mordant, mais ravalai mon commentaire en songeant que, quoique je réponde, elle se cacherait derrière son amour pour justifier mon incompréhension. Gretel est d'une lâcheté inégalée !!!

-Et puis, si je n’avais pas été là, Antoine ou Lucas seraient peut-être mort à l’heure qu’il est, *air de plus en plus sceptique* enchérit-t-elle.

Le pire dans ce qu’elle disait, c’était qu’elle avait peut-être raison. Pousser Antoine à graver ces sigles avait eu deux buts : maintenir Lucas en vie, et éviter qu’Antoine ne choisisse une solution plus radicale pour mettre à la fois Sappho et son frère hors de danger. Non, même là c'est un peu trop pour moi là !! Si on la suit bientôt on apprendra qu'elle lui a sauvé la vie et que sans elle il n'aurait pas été juste enlevé mais tué !!! Mais ce fut l’argument traître de trop pour Callie : sans un mot, sinon un cri d’indignation étouffée, elle se leva, et courut presque jusqu'à la porte. Ma pauvre petite puce !!! Contrairement à Léna, elle n’avait pas le courage de l’affronter.

-Mais si tu n’avais pas aidé Léna, protesta Danny quand Callie fut partie, Antoine n’aurait pas eu à graver ses sigles. Ce qui l’a convaincu définitivement de le faire, c’est quand Lucas a été blessé – et je suis presque sûr que c’est indirectement de ton fait. Juste après cela, Elodie est morte. Je suis d’accord, tu as au moins sauvé Antoine. Mais pas Elodie. Tu as mis Antoine au pied du mur … et Elodie est morte.

Gretel fixa Danny avec de grands yeux écarquillés, et enfouit son visage dans ses mains. Elle ne s'attendait pas à un contre argument aussi construit à mon avis !!! Le ton de Danny m’avait particulièrement glacé. C’était un ton délibératif, froid, sans aucune contestation possible. Pour la première fois, je n’eus aucun mal à le voir dans un tribunal – robe ridicule, ou non. Il se leva lentement de sa chaise, et s’assit sur le lit de Lucas, en face de Gretel. Son visage était fermé, résolu, impassible.

-Voilà ce qu’on va faire, annonça-t-il, toujours avec ce ton froid et définitif. Dans une demi-heure, je vais aller voir la directrice pour lui dire ce que tu as fait. Il est hors de question que je protège ça.

Les yeux de Gretel s’emplirent d’horreur, mais de résignation. Après ce qui s’était passé à Orléans, elle devait s’attendre à être dénoncée. Mais un détail sonna désagréablement à mes oreilles.

-Une demi-heure ? répétai-je, incrédule.
-Oui, confirma Danny, sans quitter les yeux de Gretel du regard. Qu’on soit d’accord, Gretel : ce n’est pas un cadeau. C’est impardonnable, ce que tu as fait. Mais Léna a réussi à s’en sortir alors qu’elle est plus responsable que toi. Alors je te laisse à toi aussi une chance de t’en sortir : tu as une demi-heure pour faire ta valise, et quitter Sappho. Simple question d’équité. Et le pire c'est que je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il a raison, c'est plus juste !!

Oui, pensai-je malgré ma stupeur. Sa place est dans un tribunal. Je dois avouer que je suis bien d'accord avec ça !! Gretel dévisagea Danny quelques secondes, puis voulut lui prendre la main, mais il se leva pour se dérober, et retourna à sa place en répétant « une demi-heure ». L’infirmière nous scuta tous les trois. Je détournai le visage, incapable de soutenir son regard, et l’entendis se lever pour aller dans sa pièce. Si j'étais à sa place, j'attendrais la demi-heure sans rien faire, je ne chercherais pas à m'enfuir et j'accepterais ma sanction parce que je la mériterais !!! Mais pour ça, il faut avoir un minimum de courage !! Je regardai Danny. Quand Gretel avait quitté son champ de vision, il avait mis ses coudes sur ses genoux, et avait enfoui son visage dans ses mains. Lucas se fit violence pour se redresser et lui donner une tape sur l’épaule.

-Tu as ton ticket pour l’école de magistrature, tenta-t-il de plaisanter.

Danny eut un pâle sourire distrait, mais ses yeux restèrent sombres.

-Tu vas vraiment la laisser partir ? Apparemment ! m’assurai-je avec incrédulité.

J’avais pitié de Gretel. Evidemment qu’elle m’avait fait de la peine. Moi non !!
Mais rien ne justifiait ce qu’elle avait fait ! Rien, pas même son soi-disant amour pour Léna !
Mais Danny hocha sombrement la tête. Je sentis une rancœur me tordre l’estomac.

-Elle a failli tuer Lucas ! protestai-je en me levant. Et Elodie ! On a laissé échapper Léna, c’est déjà quelque chose qui reste en travers de la gorge, et tu ne veux pas qu’elle paie pour ce qu’elle a fait ?

Des larmes me montèrent aux yeux. Une petite Léonie sentimentale me réprimait durement d’être aussi sévère avec Gretel, mais c’était plus fort que moi. J’adorais Gretel. Mais j’avais failli mourir une ou deux fois à cause d’elle.
Et Elodie…
Je regardai Lucas, en quête de soutien, mais il secoua la tête. Il était d’accord avec Danny. Je ne pus m’empêcher de lui faire les gros yeux. Après ce qu’il lui avait fait pendant des semaines, il l’amnistiait ?

-Si elle reste ici, si elle passe en jugement, articula Lucas. Tony deviendrait fou.
-C’est ça ton argument ? C'est un très bon argument si on réfléchit bien !!
-Pas que ça, Léo. Elle a été aussi manipulée qu’Antoine, peut-être pas jusque là quand même ! plaida-t-il avec une grimace. Je … Je ne savais pas que Gretel était … (Il hésita, et je ne sus si c’était pour chercher ses mots, ou s’il avait encore des difficultés à parler). Mais je pense … Non, je ne la condamne pas.

Je sentis mes yeux sortir de mes orbites. J’ignorais ce que Lucas savait, au juste. Mais ça m’étonnerait qu’il comprenne réellement la teneur de ce qu’avait fait Danny. Je levai des yeux résolus vers celui-ci.

-Je ne peux pas te laisser faire ça.
-Et bien tu n’as pas le choix, répliqua-t-il.
-Ce n’est pas à toi de prendre cette décision ! C'est à qui alors ?
-Léonie, soupira Danny avec plus de douceur. Je comprends que tu ne veuilles pas que Gretel s’en aille sans avoir assumé les conséquences de ses actes, mais … Elle sera loin de Sappho. Et loin de Sappho, elle sera inoffensive. Ce qui la rendait dangereuse, c’était qu’elle était interne. Encore une fois, c'est un bon argument...

Je fis de mon mieux pour réprimer ma rage.

-Mais elle sait pas mal de choses, arguai-je. Et ça, c’est loin d’être inoffensif.

Antoine avait dit tout ce qu’il savait à Gretel. Jusqu’où il était allé dans ses confessions, je l’ignorais (avait-il été jusqu’à me balancer ?). Mais il n’empêchait qu’elle en savait énormément.

-Elle en sait autant que Léna, contrattaqua Danny en haussant les épaules.

Peut-être, songeai-je en rongeant mon frein. Mais Léna ne sait pas que je suis une descendante de la Lune. Gretel, peut être que si. C'est débile ! Tout ce qu'Antoine a dit à Gretel, elle a dû le répéter à Léna donc si Gretel est au courant, Léna aussi !! Ciel, si c’était le cas, j’étranglerais Antoine ! Danny dut lire mon inquiétude dans mes yeux, et son visage se crispa. Il se leva, et me prit la main. Je lui lançai le regard le plus féroce que je pus.

-Il ne serait pas si idiot, chuchota-t-il très bas, de façon à ce que Lucas ne puisse pas entendre. Il n’aurait rien dit à Gretel là-dessus. Elle ne savait même pas pour lui … Il n’aurait rien pu dire sur toi. On pourra dire ce qu'on veut mais c'est quelqu'un de juste et loyal, il n'aurait jamais rien dit sans l'accord de Léo !!
-Et qu'est-ce que tu en sais ? répliquai-je sèchement entre mes dents.

Il eut un petit sourire en coin, entendu, et je ne pus retenir un grognement. Il pressa encore ma main, et me força à le regarder.

-Léonie, s'il te plaît, fais-moi confiance, me supplia-t-il en plantant son regard grave dans le mien. Je sais que c’est la bonne solution… Du moins la moins pire. S'il te plaît, laisse-moi faire. Règle numéro 1 : toujours faire confiance à Danny !!

Je ne voulais pas paraître indécise, pourtant je me mordis la lèvre. Jusque là, l’intuition de Danny n’avait eu que très peu de failles, mais je me répugnai à laisser partir Gretel. Je jetai un petit coup d’œil à la photo du paravent.
Après tout, peut-être que le pire châtiment pour Gretel, c’était l’exil. Enfin !! J'ai cru qu'elle n'allait jamais se mettre à réfléchir !!
Je pinçai les lèvres, et hochai difficilement la tête. Je pensais que je regretterais de l’avoir laissé faire. Mais la règle numéro un, c’était bien « toujours écouter Danny ».

-Mais Devyldère va te tuer, ajoutai-je nerveusement.
-Je sais, Léo. Et apparemment il assume !!

Je ne dis rien d’autre, et retournai m’assoir. Devyldère avait déjà été assez énervée que nous allions à Orléans sans en parler à un membre de l’administration – et avait presque été outrée quand nous lui avions expliqué que c’était principalement parce qu’elle était la numéro un de nos suspect. Moi qui pensait qu'elle allait les accueillir à bras ouverts et leur faire un câlin après qu'ils ont avoués qu'ils la croyaient coupable !!! Le fait était qu’elle avait des comptes à rendre aux familles des victimes (aux parents d’Elodie, à Isabelle Hautroi, et aux proches de ceux qui étaient morts dans l’arène). Elle aurait aimé attraper la coupable, mais elle s’était enfuie. Danny laissait maintenant une échappatoire à la complice. Après, personne n'est obligé de savoir qu'ils lui ont laissé le temps de s'échapper, si ? Dix minutes plus tard, Gretel passa devant nous avec une partie de ses affaires. Encore une fois, mon sens de l'honneur est peut-être un peu trop développé mais moi, je ne serais pas partie !!! Elle s’arrêta devant le lit de Lucas brièvement, et murmura un dernier « désolée » avant de reprendre la route jusqu'à sa voiture. Je fus tentée de la rattraper avant qu’elle ne passe la porte, mais ça n’aurait servi à rien. Vingt minutes plus tard, Danny se leva silencieusement pour aller voir Devyldère, me laissant seule avec Lucas. Nous étions restés silencieux quelque minutes, digérant le flot d’informations qui venait de nous parvenir, ravalant ma rage, et lui assemblant vainement les pièces que l’on venait de lui présenter. Ca ne doit pas être facile !!

-J’avoue ne pas avoir tout compris, surprenant, non ? fit faiblement Lucas avec une grimace. Je savais que Léna était impliquée dedans, et que ça concernait vaguement Tony …

Je sourit presque malgré moi. J’avais eu un pincement au cœur en entendant à nouveau les presques familiers « Lucky » et « Tony ». Les jumeaux étaient enfin réunis. OUAIIIIS !!!!

-Mais j’ai dû louper pas mal d’épisode. Juste un tout petit peu...

Oh, ciel, s’il savait … Qu’avait-t-il réellement entendu durant ses brefs moments de conscience ? Avait-il compris ce que son frère avait fait ? Et Elodie … Je déglutis difficilement. On avait tellement de choses à lui raconter… Un éclair d’angoisse avait traversé les yeux de Lucas. Il avait peur d’être pris en pleine tempête. Je posai une main rassurante sur son bras.

-Ne t’en fais pas, petit génie, le rassurai-je. Je vais tout t’expliquer, mais de toute manière, c’est terminé.

Lucas eut un petit sourire, légèrement amer.

-Non, Léo. Je pense sincèrement que c’est le commencement. NOOOONNN !!!! C'est bientôt la fiiiinnnnnnnnnn :cry: :cry: :cry: :cry: :( :( :( :( :( :( !!!!!!

***


Cazo' Cazo' Cazo' Cazo ? T'AVAIS RAISON !! Cazo t'es la meilleure !!!! Et tu vas te faire une joie de le hurler sur tout les toits :lol: Et oui, Gretel était une méchante JE LE SAVAIS !!!! JE LE SAVAIS !!!! JE LE SAVAIS !!!! JE LE SAVAIS !!!!! JE LE SAVAIS !!!!! JE LE SAVAIS !!!!! JE LE SAVAIS !!!!! JE LE SAVAIS !!!!! JE LE SA... Quoi ? Je l'ai déjà dit ?! Ah oui, exact !! Bon j'arrête alors :lol: :lol: Promis, c'est la dernière grosse surprise de ce tome :x OUF !! Mon petit coeur n'en aurait pas supporté plus !!!

Donc voila ... La semaine prochaine ... Et bien ... Je poste la fin. :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: Je suis pas bien, les amis ... Nous non plus, nous non plus... :( :( :( :(
Bon, en clair. Commencez à faire le bilan de tout ça : ce que vous avez pensé des Enfants de Gaia, c'était génial !! vos moments préférés, la révélation d'Antoine et celle de Danny !! vos personnages préférés, Antoine et Callie pourquoi, parce qu'ils me font rire !! ce que je pourrais changer, rien !!! ce qui n'est pas clair, les raisons de la trahison de Léna sont un peu floues pour moi !! ce qui est bien, tout !! le mal, le bien, si vous avez aimé, OUI !!!et au contraire pas aimé, si c'était un liste BN, dans quelle liste pour le mettrais ... Tu veux dire or diamant et tout ça ? Si c'est ça alors diamant direct !! VOILA, tout ce qui vous passe par la tête et qui pourrait m'être utile ! J'adore les gâteaux au chocolat, Esprits Criminels et Doctor Who (que j'ai commencé pendant les vacances (me tapez pas)) !! Tu trouves que c'est une pensée utile ? :lol:

Parce que j'avoue que EdG, c'est un peu mon bébé, mon bijou ... Et que comme toute personne qui écrit, mon rêve est d'un jour publier un truc, même si c'est un rêve inaccessible :lol: Alors voilà, je demande humblement vos avis ! A mon avis, ce rêve n'est pas inaccessible et tu peux tenter de publier, c'est clair !! Si un jour tu essayes et que tu y arrives, je me ferai un plaisir d'aller acheter ton livre !!!

Un Tome 2 est prévu. OUAAIIIIIIIIIISSSS !!!!!!! Mais avec la prépa, et ma fanfic' j'ai pas trop avancé dessus cette année ... Et elle reste bloquée à 50 pages :lol: Donc se ne sera pas pour tout de suite ! :/ SNIF !!! :cry: :cry: :cry:

Bisous bisous ! A la semaine prochaine pour le dernier poste des enfants de Gaia ! Bisous !!! Je sens que je vais déprimer là !!

Et voila !! Mon premier com'citation sur ton histoire, je me suis dit que c'était un bon cadeau de fin de fic donc la semaine prochaine, tu en auras un autre sur la deuxième partie !! En plus ça fait quelques temps que j'oublie de commenter tes chapitres donc j'espère que ça te fera rire et que tu me pardonneras d'avoir oublié (c'est la faute de Doctor Who) !!!
annabethfan

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par annabethfan »

aleclave66 a écrit : En plus ça fait quelques temps que j'oublie de commenter tes chapitres donc j'espère que ça te fera rire et que tu me pardonneras d'avoir oublié (c'est la faute de Doctor Who) !!!
Alors on dit c'est grâce à Doctor Who d'abord, parce que Doctor Who ne peut être que positif, c'est la meilleure série de tout les temps! (Oui ceci est de la propagande mais je m'en fiche parce qu'au fond c'est vrai) :lol: :lol:
Perripuce

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Les enfants de Gaia - The End. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Attention. Ne pas pleurer, ne pas paniquer, rester parfaitement calme.

Je vous offre ainsi la dernière partie du dernier chapitre des Enfants de Gaia ... Ouf. Je suis pas bien.
SO. Je vous remercie énormément d'avoir tout suivi, d'avoir commenter, d'avoir critiquer, d'avoir aimé ... Tout ce que vous m'avez dit va beaucoup m'aidé pour améliorer les Enfants de Gaia, et je ne vous en remercierais jamais assez !
Mon dieu, je suis d'humeur sentimentale :lol:

Allez, je vous laisse lire, par contre, essayez de lire le message qui suivras le chapitre s'il vous plait ;) Allez, bonne lecture, chers amis !


Chapitre 18 (2/2) : The end ? ( Note de l’écrivain : J’ai l’impression d’être Robert Downey Junior à la fin de Sherlock Holmes 2)


J’espérai sincèrement que Lucas avait tort.

Effectivement, Esther Devyldère avait incendié Danny pour sa réaction face à Gretel. Mais, après un quart d’heure de débat, elle s’était résignée, et n’avait rien fait contre lui. A l’heure du diner, elle apprit à toute l’école la trahison de Gretel, qui fut pour tous les élèves le choc de trop. Je vis même certaines filles éclater en sanglot. Gretel était très aimée, peut-être même plus que Léna, en raison de sa proximité d’âge avec les élèves. Mais celui qui pouvait prétendre souffrir le plus de cette situation, c’était évidemment Antoine. Je ne l’avais pas revu depuis qu’il avait quitté l’infirmerie, mais Callie si, et elle m’avait prévenu qu’il valait mieux qu’il reste seul quelque temps. Plus que jamais, la question de ses sentiments réels envers Gretel restait en suspens dans mon esprit.

J’avais passé toute la soirée à expliquer à Lucas ce qui s’était passé depuis son coma, et avec mes informations, plus les siennes, nous étions parvenus à avoir une idée précise de ce qui s’était passé. Durant sa première période de semi-conscience (naturelle, celle-ci), Lucas avait entendu beaucoup de choses autour de lui, sans arriver à ouvrir les yeux. Il avait ainsi surpris nombre de conversations compromettantes entre Léna et Gretel. Quand Gretel l’avait compris, elle l’avait artificiellement endormi pour qu’il ne la trahisse pas. Sans le vouloir, elle avait fourni un nouveau poids de pression sur Antoine à Léna. Nous avions aussi compris ce que Danny avait voulu dire quand il avait dit que la blessure de Lucas était indirectement de son fait. Elle n’avait rien fait lors de la chute en elle-même, certes, c’était un accident. En revanche, la maladie qui avait précédé cette chute, la soudaine faiblesse de Lucas, était effectivement de son fait. Les médicaments qu’elle lui avait donné soi-disant pour le soigner l’affaiblissait en réalité. Elle avait ainsi exalté un peu plus la fibre protectrice d’Antoine afin qu’il accepte plus facilement de faire ce que le corbeau (Léna, rappelons-le) lui demandait. La chute n’avait été qu’une conséquence bienvenue.

Pressée par toute ses révélations, le lendemain avait été un grand jour de départ, mais aussi de soulagement. Laura nous avait appris qu’Arwen, qui était partie après la mort d’Elodie, revenait après les vacances de Noël. Nous avions des nouvelles de Tanguy, le petit ami de la défunte, qui devrait survivre à ses blessures. Léna et Gretel avaient complètement disparues de la circulation, et Devyldère devait leur chercher des remplaçants pendant les vacances. L’œuvre de rectification d’Antoine sur les Gardiens avait fonctionné, parce qu’à ma dernière ronde avec Danny, le matin de mon départ, tous les arbres avaient retrouvé cette vibration qui caractérisait l’énergie du Sceau.
Il n’y aurait plus de fuites.

Et du reste, en effet, ma valise était bouclée. A la fin de la matinée, vers onze heures, j’étais descendue saluer une dernière fois Esther Devyldère, la meilleure amie de mon père, qui avait souri en me souhaitant bon voyage. Maintenant que tout cela été terminé, je la voyais tellement humaine que je me demandais comment j’avais un jour pu la craindre. J’avais été aussi voir Raymond et Fantine pour les remercier, et ils avaient pris dans leur bras la fille de leur presque-fils. Ma dernière étape était l’infirmerie, où Lucas se remettait toujours. Dès qu’il serait assez remis de son long état comateux, lui et Antoine repartiraient pour Paris. Callie, quand à elle, partait demain pour Laon, et Danny passait Noël avec Raymond, Fantine, mais aussi Devyldère. Quand il avait annoncé ça, Callie et Lucas l’avaient regardé avec des yeux ronds, et j’avais fait de mon mieux pour réprimer le sourire qui me venait spontanément aux lèvres. J’avais passé une heure en leur compagnie, la valise attendant devant la porte. Ça faisait du bien de retrouver Lucas. Il avait repris des couleurs, et parlait maintenant sans aucune difficulté. Callie se permettait même de le charrier. Il pouvait quitter son lit, et réemménager dans sa chambre le soir même. Eglantine, qui faisait la garde à l’infirmerie, avait voulu qu’on défasse le paravent, mais nous nous y étions tous opposés, et il trônait dans un coin de la pièce, un pâle reflet de la mémoire de la famille. Lucas avait tout de même enlevé une ou deux photos de Léna et Gretel, mais avait laissé la photo principale, celle avec Geoffrey. La purge faite, Callie et lui avaient entrepris de prendre plusieurs photos de nous quatre, prétextant que le mur était trop vide sans moi. Il était temps d’écrire une nouvelle histoire dans le long roman de notre famille – et je devenais un personnage récurrent de cette histoire. Je n’aimais pas les photos habituellement, mais cette fois je pris plaisir à les faire (y compris celle avec les grimaces). Callie promit de les développer – ainsi que celle que nous avions faites en début d’année, lors de nos cours de trigo qui avaient fini en bataille de surligneur. Puis Danny m’annonça que c’était l’heure, et j’étreignis Callie.

-Tu vas me manquer, la rousse au bois dormant !
-Toi aussi, Cal. Bonne vacances.

Elle sourit, et me relâcha pour que j’aille voir Lucas. Il se leva difficilement pour m’étreindre à son tour. En le prenant dans mes bras, j’eus douloureusement conscience de sa maigreur, et ce qu’il avait dit la veille me traversa l’esprit « Je pense sincèrement que c’est le commencement ».
Pitié. Faites qu’il ait tort.

-Encore merci pour ce que tu as fait pour Tony. Tu es sûre que tu ne veux pas qu’on t’accompagne ? s’assura-t-il en me prenant à bout de bras pour me fixer.

J’eu un petit sourire penaud.

-Tu dois te reposer, le taclai-je gentiment. Et j’ai un truc à faire, avant d’aller à la gare.

Je m’efforçai de ne pas donner un coup d’œil nerveux à Danny. Lucas me lança un regard interrogateur, mais avant qu’il n’ait pu poser une question, je lui posai un rapide baiser sur la joue.

-Bonnes vacances, petit génie.

Je leur souris à tous les deux, et Danny prit ma valise pour partir. Je l’autorisai à prendre ma valise simplement parce que mon poignet n’était pas assez remis, alors que son épaule l’était presque. De ce fait, également, il pouvait reprendre la conduite pour m’emmener à la gare – mais non sans avoir fait un petit détour avant. Callie et Lucas nous saluèrent et nous sortîmes de l’infirmerie. Nous fîmes quelques pas en silence, les yeux rivés sur le sol, quand Danny me donna un coup de coude. Je lui lançai un regard surpris, et il désigna le chemin du menton. Je suivis son regard et mon cœur fit un bond quand je vis Antoine arriver en sens inverse. Ses yeux croisèrent les miens, et il eut un pâle sourire.

-Je t’attends à la voiture, annonça Danny en prenant mon sac de voyage.

Je lui lançai un regard éperdu.

-Quoi ?

Danny eut un petit sourire entendu, et partit sec. Je le regardai s’éloigner à grands pas, et fut encore plus surprise de le voir ralentir devant Antoine pour lui mettre une tape dans l’épaule. Antoine parut être aussi étonné que moi par cette marque d’amitié. Il ne réagit pas, et Danny partit joyeusement vers la voiture.

-Lunatique, ton amoureux, commenta Antoine en le regardant s’éloigner.
-Bien, vous êtes deux, répliquai-je en levant les yeux au ciel. Comment ça va ?

Ses épaules s’affaissèrent, et le léger sourire qui flottait sur ses lèvres se fana. Il avait remis son bonnet gris sur ses oreilles, et comme les miennes étaient gelées, je me surpris à avoir envie de le lui piquer.

-Je fais aller. On verra, éluda-t-il avec un haussement d’épaules. Tu as parlé à Lucas ?

Je savais très bien ce qu’il voulait dire par là, même sans entendre la crispation dans sa voix.

-Oui, mais je t’ai laissé Luna. Je pense que c’est à son frère de lui apprendre ce genre de choses. Mais il sait le reste, y compris ce que tu as fait. Il ne t’en veut pas.

Antoine ne répondit rien, le regard perdu au loin. Il était vrai que j’avais volontairement tronqué la version que j’avais donnée à Lucas. Il l’avait deviné, et quand il avait posé des questions, j’avais été évasive, sans évoquer Antoine. C’était à lui de lui parler de ça. Son mutisme fit naitre un sourire sur mes lèvres.

-Meynier, c’est le moment où tu me dis « merci », et « je t’adore ».

Antoine reporta ses yeux sur moi, et un nouveau sourire naquit lentement sur ses lèvres. Son regard passa fugacement sur ma joue, avant de rapidement revenir à mes yeux.

-Je pense que tu en as eu assez hier, Birdy, me rappela-t-il avec une lueur fade d’espièglerie.

Je ne compris pas pourquoi, mais en entendant le maintenant familier « Birdy », je me sentis relativement soulagée. J’avais sans doute eu peur qu’après ce qui s’était passé avec Gretel, il s’éloigne de tout le monde - y compris de moi – et que je n’entendrais plus jamais ce surnom que j’avais fini apprécier. Puis je compris ce à quoi il faisait référence, et je rougis. Evidement, c’était son but, parce que son sourire s’agrandit et il se détourna pour aller vers l’infirmerie.

-Bonnes vacances, princesse !

Malgré ma rougeur et mon agacement contre lui, je sentis un sourire flotter sur les lèvres, et je secouai la tête.

-Bonnes vacances, petit prince, murmurai-je en me détournant.
-J’ai entendu, Birdy !

Je levai les yeux au ciel et lui fit un vague geste en direction de l’infirmerie sans me retourner.

-Va voir ton frère !

Il ne répondit pas, et je refusai de me retourner pour de bon, de crainte que ça ne le satisfasse que trop. Alors je repris la route, les mains dans les poches, et me glissai dans la voiture de Danny. Ce ne fut que lorsque je m’assis que je me rendis compte que je souriais sans raison. Je tordis ma bouche pour effacer ce sourire stupide et entendit Danny ricaner à côté de moi. Je lui lançai le regard le plus innocent que je pus.

-Quoi ?

Il eut un sourire en coin entendu en mettant le contact. Je fis de mon mieux pour ne pas rougir, mais je sentis tout de même mes oreilles s’enflammer.

-Rien, répondit-t-il en souriant toujours.
-Oh, arrête, je sais très bien ce que tu penses ! m’agaçai-je en mettant le chauffage pour justifier ma rougeur.
-Alors pourquoi tu demandes ?
-Tu sais quoi, Hautroi ?

Danny éclata de rire. Il y avait longtemps que je ne l’avais pas vu ou entendu rire. Son rire ressemblait à celui de papa.

-Oui, je sais, tu me détestes. Et tu sais quoi, Léo ?

Mes yeux roulèrent dans leurs orbites.

-« Menteuse », chantonnâmes-nous en chœur.

Un autre sourire s’étira sur mes lèvres, mais celui-ci avait une cause bien définie. J’étais heureuse d’avoir retrouvé Danny, celui que j’avais laissé avant qu’Antoine ne craque, avant qu'il ne remarque la ressemblance entre les deux photos, avant qu’il n’aille voir Devyldère. Celui qui me faisait des sourires en coin, qui me traitait de menteuse dès que je lui disais que je le détestais, qui m’ébouriffait les cheveux dès que je disais quelque chose d’idiot, qui lisait dans mes pensées. Celui que j’aurais peut-être pu considérer comme mon frère, si les circonstances avaient été favorables. Danny sortit de Sappho en sifflotant, et me demanda de mettre un CD. Je choisis évidemment un CD de Tryo, mon préféré, Grain de Sable, et nous écoutâmes la musique pendant toute la route, tantôt silencieusement, tantôt chantant, ou faisant des commentaires sur les paroles (Allez prononcer plusieurs fois sans regarder l’orthographe : ma techno-délire psychédélique, apocalyticodramatic.) Arrivé à Orléans, Danny m’autorisa à descendre chez le fleuriste et j’achetai un bouquet de fleurs blanc et or avant de remonter rapidement dans la voiture. Cinq minutes plus tard, Danny s’arrêta à nouveau, non loin d’une immense grille blanche.

-Tu es sûre que tu veux y aller ? s’assura-t-il une dernière fois en pianotant le volant.

Je regardai les fleurs, puis la grille, et hochai résolument la tête. Oui. J’en avais besoin. Danny opina du chef, et défit sa ceinture pour sortir. Je lui tendis les fleurs pour faire de même, et il me conduisit jusqu'à la porte. Elle avait des mesures qui auraient pu figurer à Versailles, et m’intimida un peu, mais Danny l’ouvrit sans problème et nous nous glissâmes à l’intérieur. Je restai bouche bée devant le spectacle qui s’offrait à moi.

-Mouais, commenta Danny en me poussant dans l’allée principale. Dès que je viens, j’ai toujours l’impression d’être dans une ville dédiée aux morts.

Je ne répondis pas, mais c’était aussi mon impression. Le grand Cimetière d’Orléans était immense, et des tombes de toutes sortes – petites, modestes ou grandes et luxueuses, anciennes comme neuves – s’étendaient à perte de vue à l’horizon. Nous errâmes un instant entre les tombes. Si Danny gardait le regard fixé sur notre objectif, je ne pus m’empêcher de lire les noms sur les pierres tombales. « Marcel Waterlot ». Son prénom et ses dates me faisaient penser à Marceau, mon arrière-grand-père. Jennifer … 1997-2000. Morte à trois ans … Un long frisson me parcourut la colonne vertébrale, et je cessai mon jeu morbide. Danny me guida au fond du cimetière, puis me fit tourner dans une rangée de tombes relativement jeunes. Soudainement il s’arrêta et posa sa main sur mon épaule.

-C’est ici.

Je fermai les yeux, et pris une profonde inspiration pour regarder la pierre tombale. Elle était d’un marbre gris sombre, sombre, et étrangement vide. Deux plaques commémoratives se battaient en duel (« à mon frère », et « à mon fils adoré »). Un bouquet de fleurs fraîches s’épanouissait dans un vase, mais il y en avait deux autres de vides. Sur la pierre, s’étalaient des lettres d’or que je craignais de lire. Pourtant, mes yeux s’y accrochèrent immédiatement :

GEOFFREY HAUTROI
12 avril 1989 — 30 juin 2007


Je fis un rapide calcul. Geoffrey était mort à dix-huit ans. Il avait à peine eut le temps d’explorer sa majorité, voter pour les présidentielles et les législatives de 2007, passer son bac, avoir les résultats de ses concours, penser à l’avenir avec sa petite amie… Au moment où le monde s’offrait réellement à lui, la mort l’avait fauché. Les larmes me vinrent aux yeux sans que je ne l’aie décidé, et je soupirai profondément pour les faire passer.

-Après sa mort, je venais ici tous les week-end, m’apprit Danny à voix basse. Je m’asseyais devant et je faisais mes devoirs, pour être, ne serais-ce que virtuellement, avec lui.

Oui, j’imaginais tout à fait Danny faire ce genre de choses. Notamment parce que c’était ce que j’avais fait à chaque fois que j’allais en vacances à Strasbourg : m’asseoir devant la tombe de papa, et ne pas bouger durant plusieurs heures. Peut-être était-ce pour cela qu’il avait, comme moi, du mal à travailler assis à une table. J’avais toujours les fleurs dans les mains, mais je n’osai pas approcher de la tombe. Mes yeux étaient rivés sur le nom de Geoffrey.
Mon frère.
J’avais éprouvé le besoin de faire ce voyage dès la minute où j’avais compris le lien de sang qui nous unissait. Dès que j’avais compris que j’avais perdu quelqu’un sans jamais l’avoir connu. Et la confrontation avec Léna avait décuplé ce besoin irrépressif. Je savais que Geoffrey était mort – que mon frère que je n’avais jamais connu n’était plus. Mais j’avais besoin de voir sa tombe, noir sur blanc, pour l’ancrer définitivement dans mon esprit. Et puis, plus simplement, j’avais voulu voir mon frère, ne serait-ce que dans la mort. Une rencontre par-delà la terre et les enfers.

-On peut séparer le bouquet entre les deux vases qui restent, ça fera de la décoration, proposa Danny en prenant une partie du bouquet. Tu peux le faire, tu sais.

J’hochai la tête, et m’approchai timidement de la pierre tombale pour mettre les fleurs dans le vase, en veillant à ne pas trop effleurer le marbre. Danny fit la même chose de son côté, avec la même précaution religieuse, avant de se redresser.

-Des chrysanthèmes, reconnut-t-il en revenant devant la tombe. La « fleur d’or », en grec. Je n’ai jamais aimé ces fleurs.
-En France, c’est la fleur du cimetière, mais en réalité, c’est une fleur très gaie, lui appris-je en le rejoignant. J’en mets tous les ans sur la tombe de papa.

Je me mordis la lèvre, mais Danny ne releva pas. « Papa ». Pas « mon père ». Papa. Notre père. A tous les deux.
A tous les trois.
Danny s’assit devant la tombe, sans doute comme il le faisait dans les semaines qui suivaient la mort de Geoffrey.

-Le dernier ennemi qui sera vaincu, c’est la mort, souffla-t-il doucement.
-Pardon ?
-C’est dans Harry Potter. J’ai lu le sept juste après la mort de Geoffrey. Je ne me suis jamais senti aussi proche d’Harry qu’à ce moment-là.

J’opinai du chef avec compréhension. Personnellement, je l’avais lu bien après la mort de mon père – deux ou trois ans. Il était vrai que dans le tome sept, la présence de la mort était presque omniprésente – volonté de Voldemort de vaincre la mort, mort d’une multitude de personnages (Dobby !! Fred Weasley !!!), intrigue sur les reliques de la mort et la pierre de résurrection. A l’époque où je l’avais lu, il m’avait autant fasciné que mise mal à l’aise.

-J’aurai aimé le connaître, avouai-je d’une petite voix, sans réfléchir.

Les larmes me retinrent aux yeux, et je les chassai d’un battement de cils. Danny me lança un drôle de regard, et me tendit une main que je pris. Il sourit doucement.

-Et moi je commence à dire que j’aurais aimé connaître papa.
« Papa ». Pas « mon père ». Ni « ton père ».
Papa.
Tu es ma petite sœur.

Je le dévisageai, surprise, et il eut un pauvre sourire. Ses yeux brillaient, mais je ne vis aucune larme s’échapper. Je m’accroupis pour être à sa hauteur.

-C’est vrai ?

Il haussa les épaules. Je m’assis en tailleur à côté de lui en fronçant les sourcils. J’avais l’impression que Danny venait de dénouer mes entrailles.

-Il paraît que je me suis trompé, précisa-t-il sans me regarder. J’aurais aimé connaître l’homme qui a tout sacrifié pour moi.

J’hochai la tête, et posai prudemment ma joue sur son épaule. Il passa un bras dans mon dos et me caressa doucement le bras, sans un mot. Plus de spectre romantique. Plus d’ambiguïté. Nous en avions vaguement parlé pendant que je faisais mes bagages, hier soir, après ce qu’il s’était passé avec Gretel. Nous avions conclu au moins une chose : ne pas en parler aux autres. J’avais encore du mal à le voir comme un frère, et il fallait qu’il apprenne à résorber tous les ressentiments qu’il avait toujours nourris contre papa. Ça prendrait du temps, l’un et l’autre, et nous ne voulions pas nous imposer d’autres difficultés avant d’avoir appris à gérer nos liens.
Avant d’avoir appris à être frère et sœur.
Techniquement, c’était le genre de choses que l’on apprenait dès le plus jeune âge, en côtoyant l’autre toute sa vie, depuis le berceau. Danny et moi avions du retard dans le domaine – mais nous ne pouvions pas être bons en tout.

-Je pense qu’il est venu, déclara Danny à voix basse, les yeux rivé sur le nom de Geoffrey. A son enterrement.

Je fronçai les sourcils, et je perçus une tristesse contenue dans sa voix.

-Ça m’aurait plus étonné qu’il n’y ait pas été, fis-je lentement remarquer.

Danny pinça des lèvres. Ses doigts pianotèrent le sol à côté de lui.

-Je veux dire … Léo, je l’ai vu à l’enterrement. Avec une autre femme et Devyldère. Je m’en suis souvenu quand j’en ai parlé avec elle …

Sa voix se cassa un peu, et il s’éclaircit la gorge. Un éclair de frustration brilla dans ses yeux, un éclair que je compris. Il avait vu son père. Sans savoir que c’était lui. Il aurait pu le connaître, lui parler, ne serais-ce qu’un bref instant. Danny baissa encore la tête.

-Je me souviens que maman avait été lui parler. Quand elle est revenue, elle pleurait. Mais je pensais que c’était à cause de Geoffrey. Je … Je n’arrêtais pas de penser à Geoffrey, ce jour-là, je …

Son regard se perdit au loin, à l’opposé de la tombe. Le regret passa comme une ombre sur son visage, et je sus que c’était là que papa s’était tenu pour l’enterrement de son fils. Je pris vivement la main de Danny, et serrai ses doigts. La mâchoire de Danny se contracta et il secoua la tête.

-C’est passé, soufflai-je doucement.
-Oui, ricana-t-il en levant les yeux au ciel. C’est bien cela le problème.

Je ne répondis rien, me contentant de serrer encore une fois sa main. Je comprenais bien ce qu’il s’était passé dans sa tête quand il avait compris qui était l’homme qui s’était tenu à la droite de Devyldère. Regrets. Frustration. Douleur. Vide. C’était exactement ce que je ressentais à l’égard de Geoffrey.
Ce pourquoi j’étais ici.
Nous ne dîmes rien pendant quelques instants. Je lus les inscriptions sur la pierre tombale jusqu’à la connaître par cœur, et un sourire amusé fleurit sur mes lèvres quand je pris conscience de sa date de naissance.

-Je ne savais pas que Geoffrey était né en avril.
-Si. Pourquoi ?

Je souris timidement. C’était quelque chose sur laquelle j’avais cogité, quand j’essayais de me demander si je n’avais pas vu des signes. En me souvenant de la date de naissance de Danny, et en voyant maintenant celle de Geoffrey, je me rendis compte qu’en réalité, il y avait une multitude de signes.

-Papa avait un délire, c’était toujours de mettre une bougie sur un lapin de Pâques et de me la faire souffler, lui expliquai-je. Comme un gâteau d’anniversaire.

Danny regarda fixement la date de naissance de son frère, avant de sourire d’un air amusé. Pâques tombait souvent dans les alentours de l’anniversaire de Geoffrey.

-Un moyen de fêter son anniversaire. Ta mère ne trouvait pas ça bizarre ?

J’eus un sourire malicieux.

-Papa faisait plein de trucs bizarres. Déjà, il était écologiste. Ensuite, il n’arrêtait pas de me répéter que la terre me protégeait. Il m’apprenait à grimper aux arbres, et à jouer à la belote alors que je n’avais que sept ans. Ah, et il mettait aussi des bougies sur la galette des rois.

Je le regardai d’un air entendu. Danny écarquilla les yeux, avant de les baisser au sol, et de se frotter l’arête du nez. L’anniversaire de Danny tombait le jour de la fête des rois. Je ne m’en étais jamais rendue compte, mais chaque année, mon père avait veillé à ce que je souhaite inconsciemment un « joyeux anniversaire » à chacun de mes deux frères.

-Désolé, mais on a jamais pu penser à te rendre la pareil, marmonna-t-il en relevant la tête.
-En fait, si. Quand je te dis dix-huit juin, à quoi tu penses ?
-Appel du général De Gaulle, récita-t-il immédiatement, avant d’avoir un petit sourire en coin. Tu es du dix-huit juin ?

J’hochai fièrement la tête. J’avais toujours été très fière que ma date d’anniversaire corresponde à un évènement historique capital – et j’avouai être jalouse de tous les gens nés le quatorze juillet : ils avaient le droit à un feu d’artifice !

-Donc chaque fois que tu t’extasiais en voyant un drapeau français, tu rendais hommage à ta petite sœur chérie ! le taquinai-je joyeusement.
-« Chérie », tu es sûre que tu n’exagères pas un peu, petit oiseau ? se moqua-t-il en ébouriffant mes cheveux.

Je levai les yeux au ciel, les joues légèrement rouges. Je ne m’étais pas rendue compte de ce que j’avais dit avant que ça sorte de ma bouche, mais j’avouai être incapable d’effacer mon sourire de mon visage.

-Hey ! Je vous ferez signalez, monsieur, que d’un point de vue purement pragmatique, vous êtes autant un petit oiseau que moi ! lui fis-je remarquer.

Danny me lança un regard perplexe, et parut débattre sur la question si oui, ou non, on pouvait le qualifier de « petit oiseau ». Mais c’était un fait : en qualité de fils cadet de Tristan Moineau, il était autant un « petit oiseau » que je ne l’étais moi, la benjamine. Du moment que je garde « Birdy », me surpris-je à songer. Je secouai la tête pour faire passer cette pensée.

-Mince, finit par lâcher Danny. Il va falloir que je te trouve un autre surnom.

Je sentis mon cœur se gonfler d’une joie immense. Assumer qu’il était un « petit oiseau » était assumer qu’il était comme moi un Moineau. Qu’il assumait être le fils de Tristan. Je lui serrai la main, et il me la pressa en retour avec un sourire en coin.

-Je pense que j’ai assez de surnoms pour le restant de mes jours, avançai-je.
-Pas faux, admit Danny avec un sourire taquin. Petit oiseau, Birdy, le zoziaux, la rousse au bois dormant … Et j’ai rêvé, ou Antoine t’a appelé « princesse » ?

Je sentis mes joues s’embraser, et m’en voulus immédiatement. Quand est-ce qu’il avait bien pu entendre ça ?

-Parce que je descends de la Reine de Sappho, protestai-je passivement.

Danny me fit un regard dubitatif, et j’avouai l’être relativement aussi. Si le « Birdy » était clairement une façon pour lui de se démarquer (une seconde nature, chez lui), je ne comprenais pas pourquoi il avait ajouté « princesse » aux noms qu’il me donnait. Mais ce n’était ni le moment, ni l’endroit d’en débattre. Je passai la main dans ma poche, et sortis l’enveloppe que j’avais prise avec moi. Les petites lettres me serraient toujours le cœur. L’enveloppe était encore scellée, mais plus pour très longtemps.
Je pensai que cette fois j’étais prête.
Danny lorgna la lettre, et il tressaillit quand je passai mon pouce dans l’ouverture pour arracher doucement le papier. J’en sortis deux feuilles blanches, parcourues d’une écriture noire familière. Mes doigts hésitèrent sur la lettre, et je n’osai pas trop fixer les lettres. J’avais peur de ce que j’allais lire.

-Vas-y, m’encouragea Danny en serrant mes doigts. Il faut que bien que tu la lises un jour.

J’étais assez d’accord. Et je pensais qu’avec tout ce qui s’était passé, j’avais besoin d’entendre la voix de mon père. J’ignorai de quoi il était question – j’ignorai même s’il évoquait Danny, ou sa vie à Sappho. Mais j’avais besoin d’entendre ce qu’il avait à me dire. alors je dépliai lentement la feuille, et, rassemblai toute ma volonté pour poser les yeux sur les lettres.

Ma petite étoile,

Si tu lis cette lettre, c’est que j’aurais échoué. Echouer à te protéger de mon monde, échouer à t’écarter de Sappho, de Gaia, et de Luna … Oh, Luna. Léonie, avant de continuer cette lecture, il y a quelque chose que tu dois savoir sur moi. Je ne suis pas fier de ce que j’ai fait …J’en ai encore assez honte pour ne pas souhaiter l’évoquer dans cette lettre. Alors écoute-moi : si tu n’a pas envie de m’étrangler en lisant les mots « Gaia », « Luna », « Isabelle », « Geoffrey », et « Danny », alors cours chercher ma mère, ou Esther Devyldère (je sais que quand tu liras cette lettre, tu la connaîtra) et demande-leur de te l’expliquer. Ce n’est pas que je ne veux pas, Léonie. Je n’en n’ai pas le temps – et je n’en ai pas le courage. Mais tu dois le savoir avant de lire le reste de cette lettre. Sit tu savais comme je suis désolé, ma petite fille …

Tu reprends ta lecture. Cette fois tu sais tout – ou du moins je l’espère. Tu sais qui je suis – tu sais qui nous sommes. Tu sais que j’ai fait l’un des pires crimes qu’un père puisse faire : j’ai abandonné mes fils, et une femme que j’aimais. J’étais certain que c’était la meilleure solution - Dan méritait mieux que de grandir dans l’angoisse perpétuelle. Il ne s’est pas passé un jour sans que je ne regrette cette décision. J’aurais aimé les voir grandir, rester avec eux et Isabelle à Orléans, voir ce qu’il devenait. Isabelle était une femme extraordinaire, et je l’ai aimée de tout mon être. J’ai compris ses décisions, elles étaient légitimes : je l’avais fait souffrir, trop et trop vite. Le jour où j’ai su que Geoffrey avait été admis à Science Po, j’en ai crié de joie, et pleuré d’amertume. J’étais si fier de mon fils, tout en ayant honte de ne pas pouvoir participer à son triomphe comme un père se doit de le faire. J’ai toujours regretté de ne pas avoir pris ma voiture, ce jour-là. J’aurais dû aller le féliciter de vive voix, et te prendre avec moi – une sorte de cadeau pour tous les deux. J’ai failli, tu sais. Tu aurais pu le connaître, avant … Oh, Léonie, pardonne-moi d’avoir hésité, ce jour là. A cause de cette indécision, tu n’as jamais pu connaître Jojo. Jamais pu connaître ton frère. J’aurais tellement aimé … Il t’aurait adoré, tu sais. Vous vous ressemblez tellement … Tu m’as rappelé lui, quand tu as commencé à regarder les dessins animés Pokémon. Ou quand tu tenais tête à ta mère, du haut de tes sept ans ! Vous n’avez aucun sens de la convention, aucun de vous deux – et j’espère que vous m’en avez pardonné.

J’espère que vous m’aurez aussi pardonné de toutes les cachotteries que j’ai faites. Luna, Sappho … J’aurais peut-être dû tout te dire. C’était ce que je prévoyais, d’ailleurs. Tout te raconter. Mais tu étais trop jeune, ma petite fille. A douze ans, avais-tu les épaules pour supporter le poids de ces révélations ? Aurais-tu compris ce que ça impliquait, ce que j’ai réellement fait ? Non. Je voulais attendre que tu ais une quinzaine d’années. Que Geoffrey soit assez indépendant pour revenir me voir (et mon espérance secrète, qu’il prenne Danny avec lui). ça aurait sans doute était plus facile pour tout le monde. Mais la vie a un sens étrange, et avant que je n’ai pu retrouver mon fils, on me l’a violemment arraché. Cette expérience m’a au moins permis de voir, ne serait-ce que brièvement, Danny. J’aurais aimé le revoir encore une fois, ne serait-ce qu’une fois pour tout lui expliquer … Mais la vie a un drôle de sens, et la mort me fauchera, bien avant que ne puisse me réconcilier avec mon fils.

Oui, ma petite étoile. Je sais pertinemment que lorsque tu liras cette lettre, je serais dans une tombe, sans doute dans le cimetière familial à Strasbourg. Mon aptitude a été un lourd fardeau : tu ne peux pas imaginer ce que c’est de savoir précisément ce qui va se passer, de manière indéniable, et sans pouvoir ne rien y refaire. Le seul sentiment que mon aptitude m’a laissé est un horrible sentiment d’impuissance. Je me suis vu à Sappho avant même que ta grand-mère n’ait envisagé de m’y envoyer. Je me suis vu quitter ma famille avant même qu’Isabelle n’accouche de Danny. Je me suis vu quitter l’Alsace, ma terre de cœur, avant même que ta mère ne m’annonce qu’elle était enceinte. Et je pense que la pire expérience a été de me voir dans mon cerceuil, ma fille et ma femme pleurant devant. Je ne sais pas quand ça va arriver. Et je ne sais pas comment. Je sais seulement que ça approche, et qu’il faut que je mette mes affaires en ordre. Je te dois des explications, tu en eu partiellement. Esther a dû te dire que je ne m’étais jamais vraiment plu à Sappho – Branchard, cette vieille charogne balbutiante – en a toujours attendu plus de moi que des autres, parce que je descendais de Luna. Le 3A était pour moi obligatoire, les séances d’entraînements duraient plus longtemps, je devais avoir également de meilleures notes, et on négligeait mes soins médiacaux, puisque j’avais de « meilleures capacités de guérison ». Dès que j’avais le moindre signe de défaillance, j’étais quitte pour aller au bureau, et plusieurs heures de colles (il aimait particulièrement me mettre aux archvies). Pour en rajouter, mon aptitude était pour lui un véritable mystère, et il s’attendait à ce que je lui fasse des prédictions ici et maintenant (ce que je ne pouvais pas faire, ce n’était pas sur commande.) Cette exigence s’expliquait simplement parce qu’il me craignait, et qu’il craignait mon sang. C’est pour cela que j’ai gardé ma relation avec Isabelle et la naissance de Geoffrey relativement secrète. Et c’est pour ça que j’ai agi de cette manière avec Danny. Quand j’ai quitté Sappho, l’année de mon bac, un représentant du Conseil est venu me dire que si j’avais un jour une progéniture, il faudrait le signaler. Quatre générations qui se perpétuaient, c’était déjà énorme. Cinq méritaient des recherches approfondies. J’aurais dû signaler Danny. Te signaler. Mais voir mes enfants réduits à des rats de laboratoire me soulevait littéralement le cœur. Je ne pouvais pas. Pardonne-moi, Léonie. Mais je ne pouvais pas vous abandonner à ses gens. Alors j’ai fait ce qu’il fallait pour vous évitez les désagréments : je suis parti.

Mais j’ai échoué, Léonie. Tu es à Sappho, à l’instant même où tu lis cette lettre. Tu es avec Danny. As-tu conscience qu’il est ton frère, je n’en avais aucune idée quand j’ai eu cette vision. Mais vous voir l’un à côté de l’autre – comme vous avez grandi … Vous ressemblez tellement à vos mères, les deux femmes les plus extraordinaires que j'ai jamais vues, que ça m’en a fait mal. Toujours est-il que j’ai échoué à te maintenir loin de Sappho. Tu arriveras là-bas avec une étiquette, la même que j’avais. Si j’ai confiance en Esther pour ne pas reproduire avec toi les erreurs que Bronchard a fait avec moi, je n’ai aucune confiance en le Conseil des Trois écoles. Dieu merci, tu as l’air assez âgée pour faire prévaloir tes droits et tes opinions. S’ils t’embêtent, bas-toi bec et ongles, ma petite étoile. Mais si personne ne vient, fait profil bas. Passe ton bac. Ais un copain. Jouis de la jeunesse que ton grand frère n’a pas pu avoir. Fais moi plaisir, et fais en sorte que l’Homme ne bousille pas notre belle planète. Vis. Gaia ne t’en empêche absolument pas, ma petite étoile. Nous sommes certes sur cette terre pour une raison précise : être un père, une fille, parties d’un groupe, une protectrice … Mais notre vie nous appartient. Ce que Gaia donne, jamais elle ne te le reprendra. C’est un don sans condition. Uses-en comme tu le souhaites, ma petite fille. Quitte Sappho, et retourne à Lille, oublie tout ce que tu as appris ces derniers temps si tu le veux. Tu peux vivre sans Gaia. J’ai réussi à le faire, pendant des années. Tu m’en a donné la force. Nous sommes sur cette terre pour une raison bien précise, Léonie. Vivre n’est pas une raison suffisante à notre présence sur terre ? Alors je veux que tu vives ta vie de la façon que tu l’entends, et seulement celle-là. Ne laisse personne te détruire. Ne laisse personne te briser. Le jour où j’ai dû quitter tes frères, ils ont failli me briser, Léonie. Ne les laisse pas te faire la même chose – quand bien même ta progéniture serait comme toi : mais bon, nous n’en sommes pas là.

Voilà. Je t’ai expliqué pourquoi je t’ai maintenu loin de ce monde, et pourquoi je me suis maintenu loin de Danny. Si j’avoue que mon résultat est mitigé envers toi (encore pardon, ma petite étoile), j’ai au moins la satisfaction d’espérer que Danny restera en paix, et que notre souffrance réciproque n’a pas été vaine. J’espère que tu y veilleras, petit oiseau. Tu es peut-être la petite jeune, mais quelque chose me dit que ce sera à toi de veiller sur ton grand frère. Moi je veillerais toujours sur vous, par-delà la mort. (J’ai mes espions : Raymond, Fantine et Esther ne vous quitteront pas des yeux tels que je les connais !). Si tu es encore avec Danny quand tu lis ces mots, dis-lui d’aller voir Esther le plus rapidement que possible. Une lettre identique l’attend, mais j’attendais que tu puisses préalablement lui fournir des explications, afin qu’il lise cette lettre l’esprit éclairé. J’ai peur que mon propre fils ne me déteste, et je ne lui en voudrais pas. Cette haine est légitime. Je veux seulement l’apaiser. Je vous laisse donc là, mes enfants. J’espère sincèrement que tu ne m’en voudras pas trop, Léonie. Fies-toi à ton instinct, vis comme tu le souhaites, deviens grande et forte (et sauve la forêt amazonienne !). D’ici peu, je ne serais plus là, et je te prie de me pardonner pour le mal que ça t’occasionnera. Je partirai trop tôt, je le sais. Mais je retrouverai Jojo, et j’espère que par-delà la mort, vous trouverez tous les trois le moyen de me pardonner.

Je t’aime ma petite étoile. Ne l’oublie jamais, car c’est quelque chose d’immuable : je t’aime. Prends soin de toi et de ta mère. Sois indulgente envers ton frère. Arrête de grimper aux arbres. Embrasse Raymond et Fantine pour moi. Prends chaque valet tournant à la belote (ça évite le capot). Apporte du côte-d’or à Esther. Fais attention à ce qui t’entoure. Vis. Vis comme Jojo et moi n’avons pas pu vivre.
Bref. Je t’aime.

Ton père.


Une tâche humide vint décolorer le papier, et déformer les derniers mots. Je me rendis tardivement compte que c’était une larme qui avait coulé le long de mon nez pour s’écraser sur la lettre. Je l’essuyais d’un revers de main, mais je remarquais que mon visage était inondé, et que je retenais mes sanglots et mon souffle depuis plusieurs minutes. Je relevai la tête pour soupirer et chasser le poids qui m’oppressait la poitrine. Chaque mot avait résonné dans ma tête avec la voix de mon père, comme si son fantôme avait toujours été présent dans mon esprit pour un jour prononcer ces mots. Un jour, j’avais eu peur de ne plus me souvenir du son de sa voix. Mais en fait, elle avait toujours été logée dans un coin de mon cerveau, en embuscade. J’avais beau savoir l’essentiel de ce qu’il avait écrit, j’avais eu l’impression qu’un étau me compressait la poitrine un petit peu plus fort à chaque mot. Je relevai les yeux vers Danny. Il tenait toujours ma main, mais n’était pas intervenu quand j’avais craqué, me laissant de l’intimité. Il remarqua que j’avais fini ma lecture, et sourit doucement. Il leva une main pour caresser ma joue, et essuyer mes larmes.

-Alors, tu te sens mieux ?

J’étais incapable de me dire comment je me sentais. La lettre avait accru mon désarroi quant à Geoffrey, et m’avait à nouveau fait prendre conscience du vide qui existait en moi depuis la mort de papa. Mais d’un autre côté, après avoir eu les versions de Mamy Moineau, Raymond et Devyldère, j’avais enfin eu la version de mon père. Et ça valait tout l’or du monde.
-Je te dirais ça … plus tard.
Danny sourit encore, comprenant sans doute que j’avais besoin de temps, et détourna le regard pour fixer de nouveau la tombe de Geoffrey. Je fixai la lettre d’un œil vide, retourna passivement les pages quand je remarquai une phrase que je n’avais pas lu, au dos de la seconde feuille.

Post-Scriptum : Demande à Danny le nom complet de Geoffrey. Je pense que ça te fera rire.


-C’est quoi les noms de Geoffrey ?

Danny se retourna sur moi, désappointé par la question. Il réfléchit quelques secondes avant de déclarer :

-Geoffrey Léon Hautroi. Enfin, je pense que pragmatiquement parlant, on peut rajouter Moineau à la fin, mais c’est vraiment si important ?

Je méditai sur le nom de Geoffrey quelques secondes, et un sourire naquit à travers mes larmes. Effectivement, pour le coup, Moineau n’était pas important. Il s’appelait Léon. Léon était le parrain de mon père, le frère de mon arrière-grand-père Marceau, mais il était bien plus jeune que son aîné. Papa avait toujours eut du respect pour lui, et je ne m’étonnai pas qu’il ait donné son nom à son fils aîné.
Ni à sa benjamine. Je m’appelais Léonie à cause de lui.
Je serrai inconsciemment la lettre contre mon cœur, les yeux humides. Papa avait voulu que j’ai un lien avec mon frère, ne serait-ce qu’un lien aussi trivial que mon nom. Léon nous unissait, Geoffrey et moi. Même par delà la mort. Danny dût lui aussi prendre conscience du jeu des prénoms que mon père avait opéré, car sa main serra la mienne.

-Et toi, c’est quoi ton deuxième nom ? s’enquit-t-il. Tu sais le mien, mais pas moi !
-Oh … Léonie Danielle. C’est …

Je sentis mes yeux s’écarquiller, et regardai Danny avec incrédulité. Il eut un sourire en coin, entendu, sans me regarder, les yeux rivés au ciel. J’allais dire que Danielle était mon arrière-grand-mère maternelle que même ma mère n’avait pas connu, mais après le Post-scriptum, je n’étais pas certaine que ce fût aussi simple que ça. Danielle était aussi la version féminine du prénom de Danny.
J’étais un hommage vivant à mes deux frères.
Papa avait perdu tout espoir d’un jour nous réunir. Alors il avait en sorte que j’ai un lien avec mes frères, ces fils qu’il avait laissé à Orléans. Il m’avait donné leur nom.
Geoffrey Léon. Léonie Danielle. Daniel Raymond.
La surprise passée, je sentis un rire monter dans ma poitrine, puis s’échapper par mes lèvres. Papa avait eu raison : la coïncidence me faisait bien rire.

-Il avait un curieux sens de l’humour, commenta Danny avec un petit sourire.

Je lui flanquai une claque sur la cuisse.

-Ose dire que Geoffrey n’avait pas le même !

Danny ne releva pas, et je sus que j’avais raison – mais cela se voyait à l’identique sourire espiègle qu’ils avaient souvent tous les deux, sur les photos. Je me rapprochai de Danny, et posai ma joue sur son épaule.

-Tu dois aller voir Devyldère, lui soufflai-je. Il t’a laissé quelque chose, à toi aussi.

Danny hocha doucement la tête, comme s’il s’y attendait. Ça devait être le cas. Un autre point commun entre papa et Danny était leurs aptitudes, étrangement similaires : visions et intuitions. Nous restâmes un petit moment silencieux, à contempler la tombe de Geoffrey. Je ne pouvais m’empêcher que nous venions d’accomplir un des rêves de papa : nous étions tous les trois réunis, même virtuellement, autour de sa mémoire. A bien des égards, c’était lui qui avait orchestré cette réunion, depuis sa tombe strasbourgeoise. Depuis le ciel, où il nous contemplait sans doute avec Geoffrey, un identique sourire attendri aux lèvres. Je sentis les larmes me venir à nouveau aux yeux, et appuyai mon front sur l’épaule de Danny en fermant les paupières. Danny passa un bras sur mes épaules pour me calmer, et eut un sourire amusé.

-Tu vas salir mon manteau, si tu continues de pleurer sur moi, plaisanta-t-il en me donnant un mouchoir.

Je grimaçai en l’utilisant pour sécher définitivement mes larmes. Pleurer et lire cette lettre avait ôté un poids non négligeable de mon cœur, et l’étau qui m’emprisonnait la poitrine se desserrait de minute en minute. J’eus un sourire espiègle en le regardant.

-Oui, et bien, c’est le lot des petites sœurs d’embêter les grands frères, chantonnai-je doucement.

J’avais exprimé notre parenté à voix haute, et je me rendis compte que, contrairement à nos débuts, ça n’avait absolument aucun mal à sortir. C’était devenu quelque chose de simple, et de naturel. J’avais envisagé souvent de considérer Danny comme mon frère, mais la lettre m’avait définitivement convaincue de rendre cette possibilité effective. Un soulagement mêlé d’une étrange sensation de bien-être m’envahit, et je me sentis me détendre. Les dernières tensions dues à la lecture de la lettre s’envolèrent. Je souris à Danny, et il me retourna mon sourire en m’attirant à lui. Nos deux familles avaient été gravement mutilées. Estropiées. Elles n’avaient tenu toutes ses années qu’à un fil. Celle que nous tentions de reconstruire à Sappho était jeune, vacillait sur des jambes fébriles, et n’avait pas la solidité qu’apportait le sang. Nous, nous l’avions. Nous pouvions essayer de reconstruire une famille, avec les débris de nos anciennes familles respectives, la cimenter avec la mémoire de notre père, ainsi que celle de Geoffrey, et essayer (sans doute vainement) d’y faire participer nos mères, Isabelle et Florence, les deux amours de Tristan. J’avais perdu mon père. Je venais d’apprendre que j’avais aussi perdu mon frère. Il était hors de question que je laisse filer l’autre. Après tout, papa avait quand même réussi ce qu’il avait cru impossible : réunir ses enfants.

C’était maintenant à nous de rendre hommage à son sacrifice et perpétuer sa mémoire.



The End?
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