Le voici, le voilà! Un cher petit chapitre qui nous arrive Et enfin, je vous le donne dans les temps! Je veux vraiment essayer de ne plus dépasser un mois entre chaque chapitre! Et cette fois-ci, j'ai réussi Avec seulement trois jours d'avance, mais bon. Rien ne peut être parfait. La logique voudrait que je sois capable de les écrire en deux semaines (donc deux fins de semaine), mais la procrastination me colle à la peau (ou d'autres projets). Bref... Je ne me souviens plus si j'ai prévenu pour le bonus, mais dans tous les cas, il est juste en haut pour ceux qui ne l'auraient pas lu et qui sont intéressés! Donc, donc, donc... Est-ce que j'ai autre chose à ajouter? Je ne crois pas... Oh, si! Je vais avoir une demande à vous faire, mais ce ne sera qu'à la fin de ce chapitre-ci, alors on se revoit rendu là! Bonne lecture!
Chapitre 13
- Pourquoi vous faites cette tête-là? s’exclama James en nous dévisageant tour à tour les filles et moi.
- La guerre n’apporte pas que la mort et des tortures, Jiminy, souffla Ruby.
- Et Allison a dit que son cousin était lié à ce Berkeley machin et à sa tante. Il ne te vient en tête en attendant ça?
- Non… enfin… peut-être, mais c’est impossible!
- Ton innocence est touchante, marmonna sa petite-amie en levant les yeux au ciel. Mais elle n’a pas sa place. C’est écrit dans plusieurs livres d’histoire. La guerre apporte beaucoup, beaucoup de lots dévastateurs.
- Et beaucoup de femmes en subissent des conséquences directes qui ne s’arrêtent pas toujours après que la guerre soit finie, ajouta sa cousine.
- Mais… quoi? souffla Albus d’une toute petite voix.
Je me tournai vers les filles qui semblaient tout aussi exaspérées que moi par le manque de compréhension des trois… non. Seulement des deux Potter. Quelque chose dans le regard de Scorpius me disait qu’il comprenait précisément de quoi on parlait, maintenant. Je le voyais dans la tension de ses épaules, dans son regard légèrement lointain.
- Ton cousin… Ton cousin est le fils de ta tante et de Berkeley, c’est ça? lâcha-t-il. Il a… Il lui…
- Attendez une minute… QUOI? s’écria Albus, interrompant son ami au passage. Ta tante a eu une relation avec Berkeley?
- Une relation? Merlin, Al! Est-ce qu’il t’arrive de réfléchir ou…
- Est-ce que je t’ai demandé ton avis! NON! rétorqua l’intéressé à son frère avec un regard meurtrier.
- Berkeley a détenu ma tante prisonnière pendant trois mois. Il l’a torturé… et il l’a violé. Une, ou plusieurs fois? Je ne le sais pas et je ne veux pas le savoir, répondis-je.
Parce que j’avais déjà envie de lui tordre le cou, de lui arracher la tête et de le voir partir en fumée. Sauf que ce n’était pas le moment pour me jeter à corps perdu dans une vengeance aveugle. De ce que j’en savais, c’était précisément ce qu’il attendait de moi. Il voulait que je me jette entre ses bras sans discernement, que la colère m’aveugle au point que je commette une faute. Je m’étais fait prendre une fois…
Il n’y en aurait pas de deuxième.
Mais alors pourquoi avais-je les poings serrés par la rage et le corps tourné vers la porte? J’inspirai longuement, tâchant de me contrôler. Ce ne fut qu’en sentant une main s’enserrer autour de mon poignet que je compris que je venais de faire un pas vers la porte, et de l’ouvrir.
- Ce n’est pas du tout le temps de sortir, Alli, grommela Ruby. Pas quand tu as l’air de vouloir tuer quelqu’un.
- Je vais le tuer.
Devrais-je avoir peur de la facilité avec laquelle j’avais prononcé ces mots? Peut-être. Était-ce le cas? Non. Il n’y avait qu’un moyen d’en finir avec ce cauchemar de manière à ce qu’il ne se reproduise plus jamais. Du moins dans cette réalité. Mais je n’irais certainement pas dans chacune d’entre elles pour tuer Berkeley des dizaines de fois. Ça donnait envie, mais je ne pouvais pas. Déjà, parce que j’avais mieux à faire de ma vie que de la passer à poursuivre un homme et à le tuer, encore et encore. Comment savoir le nombre de réalités qui existaient? Aucun, sauf en explorant. Et j’avais mieux à faire de mon temps.
Il fallait seulement s’en convaincre.
- Tu plaisantes, pas vrai? murmura Rose.
- Je crains que ce ne soit pas le cas, soupira la Serpentard.
- Est-ce que t’es dingue! s’énerva Albus. Tu peux finir à Azkaban pour ça!
- Une seconde… c’est vraiment la première chose à laquelle tu penses? s’étonna Scorpius.
S’ensuivirent des répliques de plus en plus rapides et inintelligibles de toutes les personnes présentes dans la pièce. Après deux minutes où je n’arrivais pas à placer un seul mot et où j’entendis à quelques reprises un « va falloir la surveiller », « peut-être qu’on devrait l’attacher à l’un d’entre nous? » et « on peut prévenir les professeurs », je m’écriai :
- Non, mais ça suffit, oui! Personne ne va me surveiller ni m’attacher et vous allez encore moins prévenir les professeurs! Je suis beaucoup plus au courant de comment on doit gérer cette situation et toute personne qu’on implique qui est d’une façon ou d’une autre négligeable… finira par mourir. Et je refuse que ça n’arrive à nouveau. De par mon expérience… je sais qu’il n’y a qu’un moyen. Qu’un seul pour arrêter Berkeley.
- Et sa mort est la solution! s’énerva la seule rouquine de la pièce.
- Oui, dis-je simplement. La prison n’a pas très bien fonctionné, pas vrai?
Le silence qui s’installa après ma dernière remarque me rendit mal à l’aise. Je me détournai d’eux pour ajouter, un tremblement dans la voix :
- La dernière fois… Ce n’est pas moi qui l’ai tuée. Et… je ne laisserai aucun de mes amis le faire cette fois. C’est mon fardeau, le mien. À moi seule. Personne ne devrait le supporter à ma place.
James me manquait… Celui que je connaissais depuis ma première année. Celui qui avait donné le coup fatal à Berkeley pour nous sauver Al et moi. Je ne lui avais jamais demandé comment il se sentait après ça. Jamais. Et je me disais son amie? Certes, on détestait tous Berkeley. Mais tuer quelqu’un… Ça laissait des marques. J’étais prête à le faire. À ce moment-là. Enfin, je le pensais. Mais on ne pouvait jamais en être sûr… Parce qu’il y a toujours une marge entre affirmer quelque chose et poser l’action dont on se disait capable de commettre.
Et c’était vrai en n’importe quelle circonstance, pas seulement lorsqu’il était question de meurtre.
- Tu es en train de dire que la dernière fois… c’est l’un de tes amis qui l’a tué? Comment? Qui? s’enquit Ruby.
- Je ne répondrai pas à cette question, affirmai-je. Déjà, parce qu’elle va en apporter d’autres auxquelles je ne veux pas répondre et ensuite… personne n’a vraiment envie de le savoir, d’accord?
- Mais pourquoi tu ne voudrais pas répondre à ces autres questions? s’étonna James.
- Parce que c’est… compliqué. Et que c’est ma botte secrète que j’aimerais garder secrète pour une fois.
- Je n’y comprends absolument rien, grommela Albus.
- Ce n’est pas important de toute façon! grondai-je. Ce qui l’est, c’est que je dois parler avec mon cousin.
- Et pourquoi? m’interrogea Rose.
- Parce que je sais mieux que quiconque que lorsqu’on ne sait rien… c’est pire. Il finira par remarquer quelque chose. Et… enfin. Je dois lui dire de faire attention.
- Tu vas vraiment… Tu vas vraiment lui dire que son père est… commença Scorpius, mais je le coupai.
- Non. J’inventerai quelque chose. Quitte à dire que c’est parce qu’il est le fils d’Abigail et que Berkeley lui tient rancune de sa capture. À elle et mon père. Ça serait crédible.
- Sauf si tu ne parles pas à sa sœur, fit remarquer la seule Serpentard du groupe.
À part moi, songeai-je amèrement. J’avais encore du mal à m’habituer au fait que je n’étais plus dans la même Maison. C’était dingue, quand même! Sauf que ça démontrait bien que, souvent, une personne avait des affinités avec plus d’une Maison et que l’on change toujours tout au long de notre vie. Cela dit, j’aurais quand même préféré rester dans ma Maison des cinq dernières années. Déjà parce que… j’y étais habituée. J’en connaissais tous les coins et les recoins. Et aussi, je n’avais pas autant l’impression d’être une intruse.
Toutefois… je ne regrettais pas d’y être dans la réalité présente.
Car il fallait bien regarder les choses en face, le Joshua Flint d’ici avait bien besoin qu’on le remette à sa place! Juste pour ça, j’étais reconnaissante d’être là. Et si je devais être parfaitement honnête envers moi-même… je dirais que j’aimais aussi l’idée que cette fois, j’aurais la chance de me venger de Berkeley, de mes propres moyens.
- Je suppose que je devrai lui parler aussi alors! répondis-je. De toute manière, il faudra bien que je lui parle…
- Tu sais que… commença Ruby.
- Je sais que… quoi? m’impatientai-je.
- Tu n’es pas vraiment… comment dire… très proche de ton cousin.
- Hein?
- Si je me souviens bien, chaque année, c’est une guerre ouverte entre vous pendant les vacances de Noël.
- QUOI?
D’accord. D’accord, je devais bien l’avouer, mais ça, je ne m’y attendais pas. Et pourtant, je n’ai aucune idée du pourquoi ça m’étonnait, car j’étais la première à me dire que c’était incroyable que des gens me supportent et m’acceptent tels que j’étais.
- À quel point je suis différente de ta meilleure amie?
- Tu veux une réponse honnête?
- Oui.
- Pas tellement. Ce n’est pas pour rien que tu as réussi à me tromper aussi… facilement.
- Pas longtemps!
- C’est parce que je connais ma meilleure amie par cœur, Allison! Depuis que nous sommes bébés, on se voit régulièrement!
- Pas faux. Mais sur quoi on ne se ressemble pas? Il faut que je fasse en sorte de ne pas paraître suspecte!
- Déjà, elle n’irait pas lui parler.
Magnifique!
- Donc elle est plus bornée que moi?
- Si on veut. Je dirais plus qu’elle s’acharne moins sur les gens qu’elle n’apprécie pas, mais…
- De quoi « m’acharner »?
Toutes les personnes présentes dans le placard à balai se jetèrent un coup d’œil et je sus sans l’ombre d’un doute que j’étais la seule à trouver que je ne m’acharnais pas sur les gens. Enfin, oui, j’aimais taquiner à outrance ceux que je n’appréciais pas quand ils me prenaient de haut, mais… de là à m’acharner? Décidément, ils ne m’avaient jamais vu m’acharner sur quelqu’un pour penser que je l’avais fait ici!
Dit comme ça, ce n’était pas très flatteur.
Autant pour eux que pour moi.
Avec chance je n’avais rien dit à voix haute! Un peu sous-entendu, oui, mais rien de verbal! J’inspirai doucement en essayant de réfléchir au moyen de me sortir de cette histoire-là. Et sans paraître dingue devant les seuls amis que j’avais ici… enfin, presque tous des amis. Pour Rose? J’hésitais encore. Je finis par lâcher :
- De toute manière, ça ne sert à rien d’y penser tout de suite. On ignore si Berkeley en a après lui, jusqu’ici ce n’est que moi qu’il cherche et appelle.
- Et donc? m’enjoignit James.
- Et donc, ça veut dire que je n’ai pas à lui parler tout de suite. On trouvera un plan infaillible plus tard. Pour tout de suite, je dois discuter avec le professeur Blacksen. Et lui emprunter une boule de cristal, car c’est la seule chose qu’il me reste pour voir le futur, le présent et le passé.
- D’accord. Alors c’est quoi le plan pour le professeur Blacksen? s’enquit Scorpius.
- Le plan?
- Bah, oui, confirma Albus.
- J’avais seulement l’intention d’aller la voir pendant sa période libre et d’improviser…
Soupir collectif. Pouvais-je savoir ce qu’il y avait de mal avec cette manière de faire? Le professeur Blacksen m’avait explicitement dit qu’elle accepterait de me voir si j’avais des questions à lui poser ou seulement besoin d’aide! Ne leur avais-je pas dit, d’ailleurs? J’étais presque certaine que oui!
- Qu’est-ce qu’il y a? marmonnai-je en croisant les bras.
- Ton plan c’est seulement d’y aller et de lui poser tes questions, comme ça! lâcha Rose.
- Oui.
Je fronçai les sourcils et grommelai :
- Qu’est-ce qu’il y a de mal là-dedans? Ce n’est pas comme si j’avais plusieurs choix! Elle sait pour moi. Je n’ai rien à cacher, sauf peut-être mes intentions. Mais elle est l’une des premières à m’avoir prévenu que rester ici signifierait ma perte!
- Et, justement, tu crois qu’elle va prendre comment tes idées de meurtre à l’égard d’une certaine personne? s’emporta Albus.
- Je ne lui dirai rien à ce sujet! Au cas où vous l’auriez oublié, ce n’est pas la première fois que je suis impliquée dans ce genre de chose! Et si vous ne me faites pas confiance pour me débrouiller, et bien tant pis pour vous!
Je n’attendis pas qu’ils disent quoi que ce soit d’autre et je sortis en coup de vent du placard à balai, en refermant la porte bien violemment dans mon dos. Ce ne fut qu’à cet instant que je me rappelai que j’avais oublié de demander à James à quoi ressemblait mon cousin. Eh bien, tant pis! Je me débrouillerai sans eux! Que ce soit pour le professeur Blacksen ou Lukas! J’y arriverais bien, de toute façon!
La porte s’ouvrait tout juste à nouveau lorsque je me remis en marche et sans prêter attention à ceux qui, derrière moi, m’interpellaient avec une certaine dose de colère. Mes amis de chez moi auraient eu confiance en mon jugement. Et je comprenais maintenant ce qui clochait avec ce plan, à leurs yeux. Ce n’était pas que je n’avais pas de plan en soi, mais plutôt le fait que j’avais l’intention d’improviser. Jusqu’ici, ils me considéraient tous comme une impulsive qui ne se maîtrisait pas. Et à bien des égards, ils avaient raison. Mais pas sur ce point-là. J’avais retenu la leçon et quand bien même… je n’étais plus aussi impulsive que l’année dernière, sans même parler des années qui l’avaient précédée.
Était-ce plus facile d’accepter quelqu’un avec ses qualités et défauts lorsqu’on avait onze ans?
Si oui, ça expliquerait sans doute pourquoi mes amis de chez moi ne me jugeaient pas, complètement du moins, là-dessus. Ça leur arrivait, bien entendu, mais… quand même. Seulement quand je faisais quelque chose de complètement inconsidéré. Pas comme… pas comme là. Une boule se forma dans ma gorge et je me tordis les mains.
N’y pense pas, me morigénai-je.
Sauf que rien n’y fit et pendant tout mon trajet précipité vers la salle de cours d’Histoire de la Magie, je ressentis ce poids qui m’oppressait. N’ayant aucune envie de m’asseoir avec un seul d’entre eux, je m’empressai de m’écraser à côté de la première personne venue. Un seul coup d’œil me suffit à comprendre que c’était un très mauvais choix, mais déjà les autres entraient dans la salle.
Plus moyen de reculer, semblait-il.
- Est-ce que je peux savoir qu’est-ce que tu fous à ma table, Beauxbâtons? grinça Joshua en me jetant un coup d’œil dédaigneux.
- Tu n’attraperas pas de puces avec moi, Flint. Alors, arrête de me regarder comme si j’en avais! Et si tu veux vraiment savoir, je n’avais pas envie de m’asseoir avec quelqu’un que j’apprécie.
- Et bien, moi, oui. Alors, dégage.
- Non.
- Beauxbâtons…
- Je vais rester ici, insistai-je en affichant mon air le plus déterminé.
Il poussa un soupir.
- Tes talents au Quidditch ne suffiront jamais à me faire apprécier ta présence, tu le sais, ça?
- Je m’en doute, dis-je en souriant malicieusement.
- Très bien. Alors maintenant, fais ce que tu veux, pars ou reste, mais par Merlin, garde ton clapet fermé! J’ai bien l’intention de profiter d’une petite heure de sommeil supplémentaire…
Je le regardai en haussant un sourcil, mais préférai garder le silence. Toutefois, s’il croyait que j’allais le laisser dormir pendant un cours…! Certes, ça ne l’aiderait pas à m’apprécier, mais tant pis! Il devait y avoir une raison pour laquelle le Joshua d’ici était différent de celui que je connaissais. Il me suffisait de le découvrir et puis voilà! Je réussirais peut-être à remettre les choses en ordre, du moins… un peu. Peut-être. Je l’espérais.
Une impulsion me poussa à glisser une main dans la poche de ma robe et mes doigts se refermèrent sur ma Carte par habitude. Un soupir silencieux m’échappa, mais je la sortis tout de même. J’avais appris à faire confiance à mon instinct, même si souvent je le trouvais bien débile.
À demi-mot je murmurai les paroles pour ouvrir ma Carte et tentai d’ignorer les larmes que je sentais monter en voyant tout prendre forme devant mes yeux. Nos pseudos, la trace indélébile de notre amitié… Je dépliai rapidement la Carte pour laisser entrevoir l’intérieur et je manquai presque la relâcher en sursautant. Je pouvais parfaitement voir que mon message avait disparu, remplacé par des traces noires qui ne formaient aucun mot… mais qui démontraient leur existence.
Quelqu’un avait essayé de m’écrire!
Qui?
Albus? Scorpius? Rose? Lequel d’entre eux l’avait fait? Peut-être était-ce chacun d’entre eux? Et pourquoi je n’arrivais pas à lire ce qu’il y avait d’écrit! Était-ce ce qui était arrivé dans leur cas à eux aussi? Mes mains se mirent à trembler, la Carte à plier légèrement et le bruit du parchemin qu’on malmène se répercuta. Du moins, c’était l’impression que ça me donnait. Mais personne ne se tourna dans ma direction, en tout cas… pas parmi les élèves des autres tables.
- Merlin, Beauxbâtons! Un peu de silen…
J’aperçus le moment exact où son regard saisit ce qu’il voyait dans mes mains. Ce n’était pas un simple parchemin ni même une simple carte. Non, c’était beaucoup plus! Bon sang! Et maintenant il l’avait vu! Plusieurs jurons me vinrent en tête, la majorité provenant de la province de naissance à ma mère. Étonnamment c’était ceux-là qui me venaient plus facilement en tête quand j’étais en colère!
- Pourquoi tu trembles?
Ça, ce n’était pas la question à laquelle je m’attendais.
- Je ne crois pas que ce soit à cause de moi, poursuivit Joshua en plongeant son regard dans le mien.
Il y avait quelque chose de profondément intrusif avec sa manière de me détailler, comme s’il arrivait à lire ce qui se trouvait au plus profond de mon âme. On resta comme ça, plusieurs secondes, à se dévisager l’un l’autre dans le blanc des yeux et sans que mes mains n’arrêtent une seule seconde de trembler. Et ça me prit beaucoup trop de temps pour rétorquer :
- Qu’est-ce que ça pourrait bien te faire, hein, Flint?
- Eh bien, si tu as une maladie ou un truc du genre, qui te fait trembler des mains, va falloir que je trouve un nouveau Batteur. Autant que je le sache tout de suite!
Malgré la sincérité et la moquerie qu’il y avait dans sa voix, je voyais parfaitement que ce n’était pas la raison. Mais alors quoi?
- Je crois que tu peux trouver mieux, Flint.
- Peut-être. Peut-être que j’ai déjà vu quelqu’un avec les mains aussi tremblantes. Quelqu’un dans ton genre. Et dans son cas, ça ne voulait rien dire de bon.
Mais de qui est-ce qu’il parlait, par Merlin? Quelque chose dans son regard semblait légèrement plus doux. Pas de beaucoup, mais suffisamment pour qu’en étant à trente centimètres de lui je puisse le remarquer! D’ailleurs… nous nous regardions de beaucoup trop proche! Je détournai rapidement le visage et me décalai de plusieurs centimètres pour que l’on soit un peu plus éloigné. Ceci dit, ça ne servait presque à rien, car notre bureau commun ne me permettait pas de beaucoup m’éloigner.
Je surpris un sourire moqueur étirer ses lèvres, et comme il me regardait toujours, j’en déduisis qu’il avait suivi tous mes mouvements. Je fronçai les sourcils et passai à deux doigts de lui adresser un rictus mauvais ou un grondement de prévention, mais j’en fus interrompue par le professeur Binns qui commençait son cours.
- Est-ce que je t’aurais mise mal à l’aise, par hasard? souffla Joshua en se penchant légèrement vers moi.
La brûlure que je ressentis aux joues avait plus d’une cause. Eh oui, la gêne en faisait partie, mais aussi la colère. J’avais maintenant sous les yeux une autre preuve que le Joshua d’ici était définitivement différent de celui par chez moi! Celui qui était mon ami ne ferait jamais ça, enfin! Il ne laisserait jamais sous-entendre que je… ou qu’il… Il ne laisserait jamais planer des sous-entendus ridicules. D’accord, d’accord, ils n’étaient pas si ridicules que ça.
Car maintenant que je le regardais de plus près… Joshua
était mignon.
Et celui devant moi le savait
parfaitement.
Mais ça ne changeait rien à un fait indéniable : il n’y avait qu’une seule personne pour moi. Et c’était Al. Mon Al. Pas une version de lui. Aucune des versions de lui. Sauf la mienne. Celle qui partageait des milliers de souvenirs avec moi. Celle que j’avais embrassée… beaucoup, beaucoup de fois. Celle avec qui j’avais partagé un lit tout l’été. Alors peu importe à quel pouvait être mignon la personne devant moi, ça n’importait pas. Ça pouvait me gêner, voire m’intimider légèrement… sauf que je n’étais pas celle que j’étais sans raison.
Et s’il voulait jouer à ce jeu-là… il n’y jouerait certainement pas seul!
Et s’il devait y avoir un gagnant… ça serait moi!
Je penchai légèrement la tête sur le côté en m’approchant un peu de lui avant de susurrer :
- Je ne sais pas quel genre d’idée tu te fais à mon propos, Flint. Mais tu as tort. Et j’ai déjà un copain.
- C’est Potter?
- Hein?
- Il te dévore des yeux chaque fois que tu as le dos tourné, tu n’es pas au courant? me glissa-t-il avec un sourire amusé.
- James? m’indignai-je.
- Mais non, par Merlin! Beauxbâtons, je te croyais plus intelligente que ça!
- Oh. Albus?
- Ouais. Alors, c’est lui ton copain?
- Non, affirmai-je. Et en quoi ça t’intéresse?
- En rien, je t’assure. Seulement, c’en est gênant, parfois. Du moins, ça le serait sans doute si tu t’en rendais compte.
Je déglutis légèrement en m’éloignant à nouveau. D’accord… j’avais soupçonné que c’était une possibilité, mais j’espérais tellement avoir tort! Rien de bon ne pourrait sortir de cette histoire en plus! Ça ne ferait que compliquer des choses déjà bien ardues! Si seulement rien de tout cela n’était arrivé… Si seulement j’étais à la maison. À ma vraie maison. À mon Poudlard à moi!
Mais le destin en avait décidé autrement.
Ou au moins mon don l’avait fait…
- On dirait que tu as arrêté de trembler, remarqua Joshua.
Ce ne fut qu’une seconde plus tard que je me rendis compte qu’il venait de me prendre la main. Et me tordre le poignet. Pas de manière brutale, mais seulement pour avoir une vue dégagée de ma paume. Je tentai de ramener mon bras vers moi, mais il me tint fermement avant de lancer :
- Est-ce que tu as des ennuis? Est-ce que quelqu’un est après toi?
- Tu veux dire à part toi? grommelai-je.
- Si je voulais te faire du mal, je l’aurais fait depuis longtemps, Beauxbâtons.
- Non. Non, il n’y a personne après moi. Et pourquoi ça t’importerait, au juste?
- Parce qu’il n’y a que moi qui ai le droit de donner des leçons aux autres, évidemment!
Sur ces mots, il me relâcha et se détourna pour ensuite s’étaler le visage sur sa partie de bureau. Je le soupçonnai d’avoir fermé les yeux aussi, mais je ne pouvais pas en être certaine. En regardant vers l’avant de classe où le professeur Binns babillait à propos d’une énième guerre de gobelins, je surpris le regard d’Albus poser sur moi. Une humeur indescriptible dansait dans ses yeux et malgré qu’elle soit bien enfouie au milieu de plusieurs autres, je pouvais reconnaître l’émotion principale : la jalousie. Au moment exact où il remarqua que je le regardais, il se détourna prestement.
Sauf qu’il était trop tard.
Apparemment, Joshua avait raison à propos du Albus d’ici. Et semblait-il que je venais de vexer l’intéressé, car il avait sans doute mal compris ce qui se passait ici. Je me tournai avec un regard furieux vers celui dont je partageais la table et sans avertissement je lui donnai un coup de coude brutal :
- Beauxbâtons! s’écria-t-il immédiatement.
Tout en faisant attention que personne d’autre dans la classe ne puisse l’entendre.
- Tu ne dormiras pas pendant le cours. Hors de question! sifflai-je.
- Qu’est-ce qui te rend aussi agressive soudainement? Est-ce que ce serait à cause de Potter, par hasard?
Ma mâchoire se crispa et je lâchai sur un ton particulièrement mielleux et innocent :
- Et pourquoi ça semble autant te réjouir qu’il soit dans cet état? Est-ce que tu aurais oublié de me dire quelque chose,
par hasard?
- Comme quoi? ricana-t-il.
- Je crois que tu ne me détestes pas. Pas autant que tu veux me le faire croire, en tout cas. Ni autant que les autres le croient. À vrai dire… je crois que tu m’aimes
bien, soufflai-je en m’approchant légèrement de lui.
- Je pense que tu dérailles!
-
Vraiment? Très bien, alors si tu ne veux pas être honnête à ce propos, peut-être que tu pourrais me dire qui avait tendance à trembler des mains comme moi…
Son regard se fit beaucoup plus dur et son expression devint immédiatement dédaigneuse lorsqu’il répondit :
- Tout le monde n’a pas la chance d’avoir une bonne et gentille petite famille, Beauxbâtons. Maintenant, laisse-moi tranquille.
J’aurais pu rétorquer que c’était lui qui avait commencé, mais je n’en fis rien. Ma bouche restait obstinément clause alors que ses paroles se répétaient dans ma tête. De quoi parlait-il? Qu’insinuait-il? Je le regardai, les yeux écarquillés alors qu’il plaçait enfin son matériel scolaire sur le bureau, puis une fois qu’il eut une plume à la main, il tourna la tête vers le professeur et afficha un air d’intense concentration.
Sauf que pour ma part, je n’arrivais pas à me concentrer sur ce que disait le professeur Binns.
Qu’entendait-il par ce qu’il avait dit? Vivait-il des trucs pas nets chez lui? Ou peut-être quelqu’un de sa famille? Si ce n’était pas les deux… Mais que se passait-il exactement? Était-ce pour cela qu’il était si différent de celui que je connaissais? Ou peut-être… Peut-être… Non! Le Joshua que je connaissais ne pouvait pas vraiment vivre des choses comme celles sous-entendues ici, pas vrai? C’était impossible!
Mais comment le saurais-je?
Ce n’était pas comme si nous étions amis depuis des lustres! Ni même qu’il me faisait confiance pour me confier des choses comme celles-là… Ruby le savait peut-être. Scorpius aussi. Ceux de chez moi, pas d’ici. Mais je n’avais aucun moyen de demander. Pas en ce moment.
Sauf que le moment viendrait, et là… peut-être que je pourrai y faire quelque chose!
Mais pour que ça arrive, il fallait d’abord en finir avec plusieurs choses. D’abord, la conversation avec mon cousin. Ensuite, celle avec le professeur Blacksen. Ou inversement. Je n’avais aucun moyen de savoir si Lukas Ash avait un cours libre en avant-midi. En même temps que le mien, évidemment. Toutefois… je savais pour le professeur Blacksen. Et je pouvais vérifier sur la carte pour mon cousin.
Pourquoi n’y avais-je pas pensé plus tôt?
Je ressortis rapidement ma Carte, que j’avais apparemment rangée mécaniquement un peu plus tôt lorsque Joshua m’avait surpris. Je jetai un coup d’œil dans sa direction et comme il semblait toujours aussi concentré sur le professeur, je mis mon plan en action. Dès que les noms commencèrent à apparaître, je me mis à chercher celui de mon cousin. D’abord par toutes les salles de classe. Ne le voyant nulle part dans celles-ci, il y avait deux possibilités : il séchait son cours ou il n’en avait pas.
Je tentai la Salle Commune des Poufsouffles, sans résultat. J’essayai quelques couloirs au hasard au passage, puis me rendit à la bibliothèque. Apparemment, c’était l’endroit où il se trouvait. S’il faisait ses devoirs ou flânait, je ne pouvais pas le savoir. Sans l’avoir jamais rencontré, je ne pouvais pas affirmer s’il était, oui ou non, studieux. Mais je l’apprendrais bien assez vite, sans doute. Dommage qu’il n’y avait aucun moyen de quitter la classe discrètement… ça aurait été pratique! Comme ça, j’aurais pu avoir ma conversation à l’insu de ceux qui voulaient se prétendre mes amis!
Je savais que j’étais injuste envers eux.
Je le savais très bien, puisque je savais
pourquoi ils agissaient ainsi. Mais tant qu’ils n’apprendraient pas à faire confiance à mon jugement, comment pourraient-ils être mes amis? S’attendre à que je reste bien sage à les écouter me dire qu’ils étaient mes amis, alors même qu’ils ne me faisaient pas confiance pour bien agir… c’était injuste de leur part. Pour moi. Comment pouvais-je accepter leur amitié s’ils me montraient à quel point… ils me pensaient trop dérangée pour agir convenablement?
J’avais déjà souffert d’une situation comme celle-ci.
Et je m’étais promis que ça n’arriverait plus.
Alors s’ils n’arrivaient pas à comprendre? Tant pis pour eux.
Et tant pis si ça signifiait que je devais m’offrir sur un plateau à la mort! Je n’agirai pas contre moi-même, je ne deviendrai pas quelqu’un d’autre pour leur faire plaisir! Jamais! Je pouvais faire des concessions. J’en étais capable. Et je le faisais. Mais me demander d’accepter l’amitié de personnes qui ne me faisaient pas confiance? À quoi ça rimait?
J’avais besoin qu’on me fasse confiance.
Pour que je puisse avoir confiance en retour.
J’espérais que ce n’était pas trop demander…
Mais si ce l’était… eh bien tant pis! J’agirai en conséquence. Comme toujours. Je pris une grande inspiration en refermant ma Carte. D’ici la fin de la journée je parlerai avec mon cousin, seule à seul. Et si je devais trouver un moyen de les leurrer, quelque part… alors, sois! Je savais très bien comment piéger James et les autres? Comme ils n’étaient pas les amis que je connaissais depuis cinq ans, ça devrait être assez facile de m’en occuper aussi.
Parce qu’ils ne connaissaient pas tous les tours que j’avais dans mon sac.
Un léger sourire étira mes lèvres et pour la première fois depuis que le cours avait commencé je me mis à tendre l’oreille aux informations et à prendre des notes. Peut-être que plusieurs choses se passaient en même temps ces dernières semaines, mais je ne voulais pas, le jour où je les rejoindrais, que mes meilleurs amis se rendent compte que j’avais négligé les cours. Surtout Rose, en fait. Je ne voulais même pas m’imaginer son expression si je devais admettre avoir échoué un examen. Non, vraiment… je n’en avais aucune envie!
Au moment où le professeur Binns annonça enfin la fin du cours, je poussai un soupir de soulagement et commençai à ramasser mes choses en vitesse. Il fallait que je sorte d’ici le plus rapidement possible pour éviter toutes les personnes qui m’étaient proche à Serpentard. Je me levai prestement de mon siège pour bondir hors de la salle de classe.
Unique problème.
Je ne fis pas même un pas que l’on m’arrêta par le poignet. Je jetai un regard furibond à Joshua, sauf que son air n’était ni désagréable ni moqueur, mais diablement sérieux.
- Quoi! grommelai-je.
- Va falloir qu’on parle. À propos de cette Carte que j’ai vue tout à l’heure…
- On s’en parlera le jour où tu voudras bien m’expliquer pourquoi tu as dit que ce n’est pas tout le monde qui a la chance d’avoir une bonne et gentille petite famille! rétorquai-je en me délivrant d’un mouvement sec.
Sur ces mots, je m’éloignai sans me retourner. Pas même lorsqu’il me cria un « Beauxbâtons » particulièrement colérique. Qu’il s’énerve si ça lui chantait, moi j’avais des choses à faire. Et la première étant bien évidemment de déguerpir d’ici aussi vite que mes jambes pouvaient me porter. Ensuite, se rendre jusqu’à la classe du professeur Blacksen. En entendant mon prénom crié par quelques personnes de ma connaissance, j’accélérai encore un peu le pas.
Connaître le château comme sa poche ayant des avantages indéniables, je me glissai rapidement dans un passage secret à l’insu de ceux qui me poursuivaient. Une fois à l’intérieur je ne ralentis pas pour autant, je savais pertinemment que la première chose que ferait mes prétendus amis ce serait d’aller chercher James, et la Carte du Maraudeur. Le plus distance que je pouvais mettre entre eux et moi, le mieux ce serait!
J’entrai brusquement dans la salle de divination et refermai la trappe avec plus de brusquerie que nécessaire, sans doute. Si je me fiais à l’air qu’affichait le professeur, en tout cas. Elle avait arqué un sourcil et me regardait avec insistance.
- Désolée, professeur. Mais il me fallait vous voir. Seule. Et…
- Certaines personnes veulent vous voir.
Je ne cherchai pas à lui demander comment elle le savait, car j’avais déjà compris. C’était sans doute sa double vue.
- Je croyais pourtant que vous aviez compris que la solitude ne vous servirait à rien pour la tâche qui vous attend, ajouta-t-elle.
- Je ne peux pas m’entourer de gens qui ne me font pas confiance, rétorquai-je. Mais je ne suis pas venue pour parler d’eux. Je suis venue pour une faveur et une question.
- Peut-être que tu dis la vérité, affirma-t-elle. Mais je connais tes hésitations passées et avant longtemps… elles reviendront. Alors, fais bien attention.
- Merci pour la mise en garde! Mais je ne suis pas venue pour ça!
Elle haussa des épaules et m’invita à venir m’asseoir près d’elle. Je m’approchai lentement, sentant encore la rage faire battre mon cœur à toute vitesse. J’en avais plus que marre qu’on me lance des avertissements sans me donner des explications! Que sous-entendait-elle par « mes hésitations passées »? Et où était le rapport entre ça et ce qui se passait maintenant? Pourquoi est-ce qu’il fallait toujours que je finisse par comprendre lorsqu’il était trop tard? Ce ne serait pas plus simple de tout m’expliquer dès le départ?
Peut-être pensait-elle que c’était déjà très clair?
Peut-être que ma colère aveuglait mon jugement?
C’était possible.
Je pris une grande inspiration pour me calmer et me laisser tomber sur un tabouret pas très loin du bureau. Elle s’y assoyait souvent pour donner ses cours. Sauf lorsqu’elle choisissait de s’asseoir sur son bureau. En tournant les yeux dans sa direction, je croisai son regard gris-vert et j’eus l’impression qu’elle avait vu beaucoup plus de choses qu’elle ne m’en avait dit. Me concernant. Mon petit-doigt me soufflait aussi… qu’elle ne m’en ferait pas part.
Était-ce pour me ménager ou encore pour rendre les choses plus compliquées qu’elles ne l’étaient déjà?
Par Morgane, calme-toi, Allison! me sermonnai-je.
J’inspirai à nouveau et fermai les yeux quelques secondes. J’étais complètement à cran et ça ne faisait que deux semaines que j’étais ici! Les choses iraient-elles en s’améliorant ou en se détériorant? Connaissant ma chance… ça serait la dernière possibilité! Tant que j’arrivais à survivre et à rentrer chez moi, j’en avais cure.
Enfin, presque.
- Alors, que voulais-tu, Allison?
J’ouvris instantanément les yeux avant de répondre :
- Je veux en savoir plus sur votre ancêtre. Ça, c’est concernant la question.
- Et la faveur?
- Je vais avoir besoin d’une boule de cristal pour vérifier un truc. Pour le professeur Williams, je lui ai promis.
- Alors ce sera avec plaisir que j’accepte.
Elle se cala un peu plus dans sa chaise avant de poser les deux pieds sur son bureau et de les croiser. Ensuite, elle planta son regard dans le mien pour me demander :
- Que veux-tu savoir au propos de mon ancêtre?
- Déjà, quel était son nom complet?
- Mary Bromeïro, née Peverell.
Un long frisson me traversa le dos. Bromeïro? Comme celui qui… mais… comment! Et Peverell… Ce nom me disait tout autant quelque chose! Je fouillai ardemment dans ma mémoire et un nouveau frisson se fraya un passage le long de ma colonne lorsque la lumière se fit dans mon esprit. Peverell, comme les frères Peverell. Les trois frères. Les reliques de la Mort!
- Je suppose que tu viens de faire le lien avec la fable sur les reliques et aussi…
- Les pierres!
- Voilà. Ce que peu de gens savent, même parmi les personnes douées de double vue, c’est le prénom de la voyante qui a su emplir le cœur de Bromeïro. Maintenant, tu le sais. Et tu sais aussi qu’ils se sont mariés.
- Que pouvez-vous me dire d’autre?
- Beaucoup de choses, sois-en sûre! m’assura-t-elle avec un petit sourire. Déjà, ils ont eu des enfants. Deux, pour être plus précise. Des jumeaux, une fille et un garçon. La fille a hérité du gène actif, le garçon d’un gène latent. Je parle évidemment des visions. Ce n’est que deux ans après la naissance des enfants qu’est survenu le drame qui a entraîné sa mort.
- Elle descend de quel Peverell?
- D’Antioche, celui qui serait le premier à avoir eu en sa possession la baguette de sureau. Et je crois que ça t’intéressera de savoir que nous avons un point commun, toi et moi.
- Vraiment?
- Nous descendons toutes les deux d’Antioche Peverell, et de sa fille Mary.
- Une minute… quoi!
- Les Williams, Allison, sont assez bien connus pour avoir des gènes actifs et latents dans leur arbre généalogique. Tu en es la preuve vivante. Mary était l’une des plus puissantes voyantes de son époque, et c’est pour ça que pendant longtemps, les pierres ne représentaient pas un obstacle majeur. C’est à peine si elle voyait la différence. Jusqu’au jour où elle a un peu trop poussé… Mais, ce n’est pas important. Mon point est le suivant : tu es une descendante directe, Allison. Ta lignée descend de la fille de Mary, qui elle aussi avait un pouvoir énorme. Et la mienne descend de son fils, qui ne possédait qu’un gène latent.
Plus elle prononçait le nom de Mary et plus j’avais l’impression que quelque chose clochait dans cette histoire. J’ignorais jusqu’au fait même que la femme dont m’avait parlé le professeur Trelawney avait eu des enfants. Et ce savoir… pour une raison obscure m’angoissait. J’avais l’impression d’avoir une réponse sur le bout de la langue. Une réponse que je désirais ardemment.
- Peux-tu me dire ce qui leur est arrivé? À Mary, à ses enfants, à Bromeïro.
- Déjà, Bromeïro est mort le cœur brisé des années après que ses enfants aient atteint l’âge adulte. Ce n’est que grâce à eux qu’il réussissait à tenir le coup après la mort de sa femme. Mais… enfin. Il n’a pas vécu assez vieux pour voir grandir ses petits-enfants. Il les a vus naître, mais… Enfin.
Et là, elle m’expliqua la suite.
Mary Bromeïro, née Peverell, est morte exactement deux ans après la naissance de ses jumeaux. En plein milieu de la nuit, elle s’est réveillée en hurlant après une vision-dormante particulièrement violente. Elle avait vu tout leur village partir en fumée et ses enfants brûlés vifs sur les buches rougeoyantes d’un bucher. Elle avait pu entendre leur cri de douleur et leur appel. Après ce réveil brutal, elle avait couru vers ses enfants qui, comme elle les avait laissés avant d’aller se coucher, dormaient paisiblement dans leur lit respectif. Cette constatation lui en apporta une autre.
C’était une vision du futur.
Mais elle ignorait encore pourquoi cet évènement devait se produire. Et sans ce savoir, elle ne pourrait rien y changer. Alors, dès le lendemain matin, elle en informa son mari et ils mirent en place tous les éléments qui lui permettraient une meilleure connexion avec son don. C’est au moment où le soleil atteignait son zénith qu’elle se précipita dans les méandres du temps et qu’ainsi elle précipita son trépas. Le fléau qui les guettait avait une cause magique et non magique. Une force extérieure qui poussait les sorciers à être moins prudent et les Moldus à se battre contre eux.
Cette force joua contre elle et c’est à ce moment que les pierres virent leur pouvoir se décupler. En sentant ses forces diminuer à force de creuser, elle revint au moment présent pour en prévenir son mari. Il comprit immédiatement la cause et tenta de se débarrasser des pierres, mais sa femme ne lui en laissa pas le temps. Après lui avoir assuré son amour une dernière fois, elle lui murmura un adieu plein de larmes, puis repartit dans le temps. Cette fois en utilisant sa magie pour transmettre sa vision en mots, permettant ainsi de prévenir Bromeïro de ce qui les attendait.
Mais le prix à payer fut plus qu’elle ne l’avait cru.
Elle savait qu’elle perdrait la vie…
Mais pas de cette façon-là.
Au moment où elle dépassait les limites psychique et physique de son corps, tout éclata en elle. Du sang se mit à couler de ses yeux, de son nez, de ses oreilles et de sa bouche, alors que quelque chose semblait creuser en elle de l’intérieur avec des griffes tranchantes et sans pitié. Mary ne conserva pas longtemps sa santé mentale. Rapidement, elle se mit à essayer de s’arracher la peau du visage et y parvenant, laissant des sillons sanglants sur tout son visage. Son mari parvint à l’empêcher de se faire plus de mal en la maintenant contre lui, et lui épargnant aussi de s’arracher les yeux.
Après des convulsions de plus en plus violentes, Mary finit par rendre l’âme. De sa mort, une légende se vit naître. Mais plus encore, c’est la suite de son histoire que plusieurs ignorent. Elle ne rejoignit pas l’au-delà, endroit si souvent défini pour accueillir les défunts. Non, elle, elle rejoignit un univers parallèle où tout s’entrecroisait. Elle eut le plaisir de voir bien des choses, horribles comme fabuleuses. Elle put voir ses enfants grandir, vieillir et mourir, comme elle put les voir périr sur ce même bucher qu’elle avait tenté d’éviter. Elle vit mille et un scénarios. Mais elle put voir l’avenir de sa famille, celle où elle était morte. Car dans certaines, elle avait vécu.
C’est comme ça qu’elle put voir ses petits-enfants. Trois enfants de sa fille, quatre de son fils. C’est aussi comme ça qu’elle assista à la mort de ses deux enfants alors qu’ils n’avaient que vingt-cinq ans. Et à peine un an plus tard, ce fut le tour de son mari. Ce dernier périt de sa propre main et ses enfants… périrent dans les flammes d’un incendie ravageur qui enveloppa quelques sorciers qui s’étaient réunis dans un bâtiment abandonné. Elle ne réussit jamais à savoir qui les avait tués.
- Bloody Mary, lâchai-je tout bonnement alors que le professeur Blacksen arrêtait de parler pour prendre une gorgée d’eau. Des miroirs! Bon sang, c’est elle que je dois contacter!
- Elle a effectivement eu la malchance de se faire donner ce nom, confirma ma professeur de divination. Et tous les inconvénients qui viennent avec. Sache donc qu’à un moment précis, des Moldus peuvent effectivement l’invoquer. Les nuits de nouvelle lune, de demi-lune et de pleine lune. Les sorciers peuvent le faire à tous les coups, mais aucun ne s’y risque généralement. Déjà, parce qu’aucun ne connaît la légende. Et qu’ils doivent être majeur, sinon leur magie n’est pas assez sous contrôle et vieille pour leur permettre. Quant à nous… les gens comme nous, je dis bien, on peut le faire à tout âge, à toute heure…
- Est-ce que je l’invoque sous le nom de Bloody Mary ou de Mary Bromeïro?
- Elle est toujours de mauvaise humeur lorsqu’on l’invoque de la mauvaise manière… donc sous l’appellation que sa légende a inspirée.
- Alors, va pour Mary Bromeïro, conclus-je.
- Avais-tu d’autres questions la concernant?
- Est-ce que tu sais ce qu’était la force en question qui a tenté de détruire son village?
- À ce jour, personne n’a encore de réponse. Mais peut-être que tu seras celle à la trouver?
- Peut-être…
Je n’en étais pas vraiment certaine. Et à quel point avais-je envie de courir après cette réponse alors même qu’elle était la cause de la mort de mon aïeule éloignée? Non, vraiment, je n’en avais pas la moindre envie. Et en même temps… Non! Tu as déjà suffisamment de problèmes sur les épaules comme ça, Allison! me raisonnai-je. Du moins, j’essayais très fort de me raisonner. Mon attention se reporta sur le professeur Blacksen lorsqu’elle retira les pieds de sur son bureau pour pouvoir se lever. Elle se dirigea rapidement vers une grande armoire.
Je savais ce qu’elle renfermait.
Je ne fus donc pas surprise lorsqu’elle ouvrit les panneaux et que mes yeux purent admirer les dizaines de boules de cristal réparties sur les étagères, toutes soigneusement déposées sur un pied avec coussin. Elle en saisit une avec délicatesse avant de revenir vers moi.
- Je crois que tu n’as plus de questions sur notre ancêtre commun, n’est-ce pas? Alors, je crois que je peux te permettre de passer à la seconde raison de ta présence ici. Mais fais bien attention dans ta quête d’informations, le moindre faux pas et tu perdras encore plus profondément dans les réalités alternatives.
- Merci de la mise en garde, soufflai-je en sentant les sueurs froides revenir.
Elle avait raison. Complètement et irrévocablement raison. Le moindre faux pas m’entraînerait à coup sûr autre part, et cet autre part ne pourrait jamais être chez moi, car j’avais besoin d’Al, de mon Al pour y arriver. Pour ce que j’en savais, je pourrais disparaître dans une réalité dix fois pire que celle où je me trouvais. Sans aucun allié.
Et malgré ce que j’en disais… je me doutais bien que j’en aurais besoin.
Même si ça ne me plaisait pas. Pas du tout. J’étais encore hantée par le visage de ceux qui n’étaient plus à cause de moi et de cette histoire avec Berkeley. Et maintenant que tout recommençait… je n’étais pas complètement certaine que j’avais envie que tout ce que j’avais vu se reproduise. Ana… Je papillonnai des paupières brusquement en saisissant la boule de cristal que me tendait le professeur Blacksen. Ce n’était pas le moment de penser à tout ça.
Là, c’était le lien entre mon cousin et Berkeley que je devais vérifier.
Avec mille et une précautions, je déposai la boule de cristal sur la table près de moi et m’installai confortablement. En posant mes mains sur la surface froide de l’objet de divination, je pris une grande inspiration et fermai les yeux. Pour certains, les visions apparaissaient directement dans la sphère, mais pour moi… je l’utilisais seulement que de moyens de transport vers mon don. Avec ma deuxième inspiration, je me sentis aussitôt aspirée.
Deux enfants, deux univers les séparant, les secrets du temps ils possèdent, de la mort ils seront l’intermède, à un grand sorcier ils causeront la fin.
Je fermai les yeux avec plus de force, ça n’avait aucun sens!
Une vision diffuse se présenta à mon regard artificiel. Deux personnes semblaient s’invectiver furieusement. Je reconnaissais le corps d’une femme et celui d’un homme. Par terre… il y avait un corps étendu. Immobile. Ce corps m’était… familier. Ma vue s’éclaircit et ce fut là que je la reconnus. Cette chevelure longue et sombre. Ce teint d’albâtre. C’était moi!
Mais ça n’avait rien avoir avec les réponses que je désirais, par Merlin! Je crispai les mains autour de la boule de cristal en essayant de puiser tout au fond de moi la force nécessaire pour clarifier ma question.
La vision immatérielle et légèrement floue d’une femme s’offrit à moi. Elle avait la pose typique de la personne contrariée : une main sur la hanche, un sourcil froncé et l’autre arqué, un rictus sur les lèvres. Elle affirmait d’une voix cassante :
- Ne fais aucune bêtise! Nous n’avons pas droit à l’erreur, cette fois, Elliot. Obtiens la fille, obtiens le gamin et on arrivera peut-être à notre but.
Un verre se fracassa brusquement sur l’image et une voix je reconnus s’écria :
- Le gamin est inutile! Un bon à rien, comme ses parents! Mais la fille, je l’aurai. Et c’est son pouvoir dont a besoin.
Comme si de rien était, la femme continua :
- Ils sont la clé. Ne l’oublie pas. Je n’aurais jamais pensé que tu aurais besoin de ce truc pour te le rappeler. Tu es vraiment pitoyable… Mais bon. N’oublie pas : tu lis le grimoire. Tu utilises mes cadeaux pour obtenir ce que l’on cherche. Dès que tu es au bon endroit, tu mets en marche le sortilège de rappel. C’est simple. Même toi tu devrais y arriver! Bonne chance!
En une seconde la femme avait disparu en un petit nuage de fumée. Mon regard se braqua sur Berkeley et tomba sur un calendrier. À la date d’aujourd’hui. Un mouvement de la part de celui que j’exécrais me ramena sur terre et je le vis déposer un petit objet sur la table. Il appuya de nouveau dessus et pour la deuxième fois je vis la femme contrariée. C’était un souvenir enregistré?
- Un frère et une sœur au destin maudit, l’ambition d’un renouveau où prospérer, arrivent l’enfant prédit, un lien du sang inespéré, les liera jusqu’à la dernière minute de l’incendie. Ça, ça, c’est la première chose que tu dois retenir. Fouille les arbres généalogiques et tu trouveras ce qu’on cherche.
J’avais besoin d’en savoir plus! Sauf qu’alors même j’essayais de refermer ma prise sur la boule de cristal, je sentis des mains fraîches sur mes avant-bras et d’un seul coup mon lien avec la sphère disparue. Je relevai un regard mauvais vers le professeur Blacksen, mais aussitôt ma vision s’embrouilla et je titubai. Je me rattrapai de justesse à la table avant de m’effondrer par terre.
- Tu étais en train de disparaître, Allison. Les secrets de la boule de cristal sont plus… difficiles pour toi. Particulièrement sans ton ancre. Tu risques de te perdre dans les visions mêmes que tu vois… ou pire.
Je hochai lentement de la tête face à ses propos. D’accord… Si je comprenais bien de ce que j’avais vu, il y avait trois éléments d’importance. La première une prophétie bizarre énoncée par une voix décharnée. Et elle faisait mention de deux enfants, deux univers les séparant. La dernière fois, je ne pensais pas que c’était lié à moi, que mes visions… ne me concernaient pas. Et j’avais eu tort. Mais aurais-je la prétention de croire que je faisais partie de l’un des deux enfants mentionnés? Avais-je seulement le choix?
Pouvait-il être question d’Albus et moi?
Après tout, nous n’étions pas dans le même univers, en ce moment… Sauf que ça ne pouvait pas être aussi simple. Un élément crucial me manquait, à savoir le moment où cette prophétie avait été énoncée. Le deuxième point. J’allais mourir. Probablement. J’espérais que non, mais j’étais diablement immobile dans la vision que j’avais eue. Et j’étais presque certaine que les deux personnes qui se disputaient étaient Berkeley et sa sœur. Quant au dernier point… Berkeley ignorait encore pour mon cousin, mais d’après la dernière prophétie énoncée, il ne tarderait pas à le comprendre.
- Alors? Tu as trouvé quelque chose d’intéressant? me demanda le professeur Blacksen.
- Oui… et non, soufflai-je. Pourrez-vous dire au professeur Williams que tout va bien pour le moment?
- Bien sûr. As-tu vu autre chose?
- Oui. Mais rien de particulièrement pertinent.
Elle arqua un sourcil et je n’eus aucune difficulté à comprendre pourquoi. Elle ne me croyait pas. Et elle avait parfaitement raison de ne pas me croire puisque c’était un mensonge éhonté. Je lui adressai un sourire que j’espérais innocent, mais elle se contenta d’afficher un air déçu.
- Tu sais, Allison… J’aimerais que tu me fasses confiance. Je suis sans doute l’une des seules qui peuvent te comprendre ici. Parmi tes professeurs et les adultes, évidemment. Je sais aussi que tu ne dois pas être certaine de pouvoir me faire confiance, puisqu’on ne se connaît pas. Et j’espère que j’arriverai un jour à l’obtenir, en espérant simplement qu’il ne sera pas trop tard…
Je déglutis difficilement, mais réussit à me ressaisir suffisamment pour répondre d’un ton neutre :
- Merci pour vos informations et pour la boule de cristal, professeur. On se reverra vendredi après-midi.
- Ce fut un plaisir, affirma-t-elle.
Sur ces mots, je m’éloignai sans un regard en arrière. Je sortis rapidement ma Carte de ma poche pour vérifier où se trouvait tous les autres et fut rassuré de voir qu’ils étaient tous à la Grande Salle. Quant à mon cousin… il était parti dans sa Salle Commune. Merveilleux!
- Si vous vous demandez si vos amis se trouvent de l’autre côté, Miss Lévesque-Williams, je peux vous assurer que ce n’est pas le cas. Pendant que vous consultiez la boule de cristal, j’ai pris le loisir de les renvoyer à la Grande Salle.
- Merci encore, professeur, me contentai-je de dire en rangeant précipitamment la Carte dans ma poche.
Sans plus ajouter un mot, je sortis rapidement par la trappe et m’éloignai à grands pas dans le château. Quelque chose avec le comportement de mon cousin me rendait mal à l’aise. Malheureusement je ne connaissais personne à Poufsouffle qui pourrait me dire qui étaient les amis de Lukas Ash et ainsi essayer d’obtenir un laissez-passer sur les habitudes d’école de mon cousin. Ça simplifierait bien les choses. Surtout si Ruby avait raison quand elle disait que la Allison d’ici n’avait pas la meilleure relation qui soit avec lui…
Mais pourquoi, au juste?
J’aurais donné n’importe quoi pour avoir des cousins! Ou des cousines! Mais oui! Ma cousine! Je pouvais commencer par elle. Ruby n’avait rien dit à son propos, alors peut-être que je pourrais la retrouver! Mais quel était son prénom? Sans doute que son nom de famille était Ash, mais… ça ne m’avançait pas vraiment. Ruby le savait sans doute, mais je n’avais aucune envie d’aller la voir pour lui demander.
On pouvait appeler ça de l’obstination ou de l’orgueil, j’en avais cure!
Bon, il y avait un autre problème, même si je devais apprendre son prénom par hasard. Était-elle au courant que sa mère avait eu des ennuis avec Elliot Berkeley? Savait-elle qu’Abigail avait été torturée et sous l’emprise de ce dernier? Car si elle l’ignorait… ça compliquerait horriblement les choses. Sauf si… je pouvais simplement dire qu’il n’appréciait pas beaucoup notre famille. Qu’il avait une dent contre elle. Ce qui était l’entière vérité. Et si elle savait pour sa mère, elle ferait elle-même le lien!
Bon, un problème de réglé!
Restait plus qu’à résoudre le plus important : trouver son prénom. Il y avait un endroit très simple où je pourrais me rendre pour l’obtenir. La seule question qui résidait quant à cette solution étant la suivante : en étais-je capable? Le moins d’interaction j’avais avec lui, le mieux je me porterais. Déjà que le voir en cours était presque insupportable…
Autant que l’idée qu’à mon départ, je ne le reverrais sans doute plus jamais.
J’inspirai brusquement pour me donner du courage. Je n’avais pas le choix, alors j’irais! Le seul problème avec le fait d’aller voir mon… le professeur Williams, c’était qu’il se trouvait lui aussi dans la Grande Salle, et qu’il y avait un certain nombre de personnes indésirables, là-bas. Mais! J’avais un cours de Défense en début d’après-midi! Il ne me restait qu’à y arriver d’avance!
Mais avant… il fallait que je mange!
Direction les cuisines! me dis-je en souriant. Ensuite, j’irais à la bibliothèque pour essayer de fouiller un peu concernant n’importe quoi qui pourrait m’aider à retourner chez moi. J’accélérai un peu la cadence en entendant mon estomac gargouiller. Je ne me rappelais que maintenant que je n’avais pas pris de petit-déjeuner! Alors même que je mourrais de faim en quittant l’infirmerie!
Sauf que je n’avais pas prévu une toute petite chose…
Celle où au moment que j’ouvrirais la porte des cuisines, le noir tomberait sur mes yeux en à peine quelques secondes.
Je poussai un soupir en reconnaissant l’environnement où je me trouvais. C’était l’endroit même où j’avais vu Berkeley ouvrir un coffre pour en sortir un grimoire et une lettre. Sauf que là, il se trouvait confortablement installé sur le canapé, les bras croisé derrière la tête et il sifflotait un air joyeux. Un air joyeux! Mes poings se crispèrent brusquement et en le voyant se lever, je regrettai amèrement de ne pas pouvoir lui faire une jambette.
Avant que mon don ne suive le courant de mes pensées, je les orientai vers autre chose : l’observation. Si je ne voulais pas m’attirer encore plus de problèmes, il valait mieux que je ne fasse qu’observer ce qui se passait. Je ne pouvais pas me permettre d’intervenir dans les évènements. J’eus donc tout le loisir d’observer Berkeley se masser le front et grommeler entre ses dents :
- Contrairement aux prédictions de ma stupide de sœur, Lévesque n’a pas du tout répondu à l’appel. Comme si un troll allait nous être utile. Quelle idée! Nous aurions dû dès le départ opter pour l’option suivante. Si je m’étais écouté, cette idiote serait sans doute ici! Et le gamin, pourquoi voudrait-on de lui? Il ne sera qu’un poids mort!
Il continua à marmonner de plus en plus inintelligiblement et dirigea ses pas vers une autre salle. Je pris tout le temps nécessaire pour le suivre en analysant bien les décors tout autour, essayant même d’apercevoir ce qui se trouvait de l’autre côté de la seule fenêtre disponible. Je ne vis rien, évidemment, mais au moins je pourrais avoir une idée précise de son environnement intérieur. On ne savait jamais quand on pourrait en avoir besoin…
Toutefois, en franchissant la porte menant à la pièce suivante, je ne m’attendais pas à ça. Même si je me l’étais souvent représentée lorsque mon parrain avait narré quelques aventures ayant eu lieu au 12, square Grimmaurd. Une tapisserie couverte de visage relié les uns aux autres. Un arbre généalogique. Oh, merde. Berkeley avait le doigt sur un nom tout en haut que je n’eus pas vraiment le temps de lire, j’étais trop préoccupée par le mouvement qu’il effectua ensuite. Il descendit, suivant toujours le modèle masculin de sa branche familiale. Et j’eus presque une crise cardiaque en voyant qui était son grand-père ou arrière-grand-père.
Grindelwald.
Oh, par la barbe et les caleçons de Merlin! Non! Ça ne pouvait pas être ça! Ou si? Est-ce que le fait d’avoir des visions simultanées de Berkeley et de Grindelwald était dû au fait qu’ils étaient apparentés? Y avait-il plus que ça? Si oui… Quoi? Quel pouvait être leur lien? À part qu’ils étaient de la même famille. Non, c’était forcément que ça. D’ailleurs, ça devait être à cause de Grindelwald si Berkeley avait connaissance des gens comme moi, à cause de Mary!
Mon regard se reporta sur celui que je détestais le plus en ce monde, ou dans le mien. Il avait maintenant le doigt sur lui-même.
- Ce ne doit pas être cet arbre généalogique que je dois regarder, souffla-t-il doucement. Allison Lévesque… Allison Lévesque-Williams. Oui, c’est sans doute le sien.
Il eut un léger sourire avant d’ajouter :
- Apparemment, c’est l’heure d’utiliser du Polynectar!
Il ne commençait qu’à s’éloigner à grands pas lorsque tout commença à disparaître à mes yeux et que le temps commençait à me renvoyer d’où je venais.