Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

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Lyran

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Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

Bonjour à toutes et à tous !

La création de ce sujet fait suite aux échanges ayant eu lieu sur ce topic, qui porte sur le genre de la romance M/M. Pour vous résumer, ce type de romance met en scènes des hommes homosexuels - hors, ces livres sont écrits en majorité par des femmes hétérosexuelles. S’en est ensuit tout plein de réflexions sur la légitimité de ces autrices à traiter de ce sujet, l’appropriation culturelle, la liberté d’expression... Réflexions qui dépassaient le cadre du topic et que je propose donc de reprendre ici, en les élargissant à des thématiques plus vastes.

Petite précision : j'ai écris "auteur" et "lecteur" dans le titre, et pour faire simple, et puisqu'on est sur un forum littéraire, je pense que j'utiliserais ces termes en priorité. Mais la discussion inclut également les autres formes de médias artistiques, au-delà de la littérature.

Enfin, je m’en excuse par avance, mais tout ça risque d’être un peu fouillis. J’ai des questions qui fusent dans tous les sens, mais vous êtes parfaitement libre de rebondir uniquement sur ce qui vous intéresse ;)
  • Pour commencer, pensez-vous que les auteur(e)s ont un impact sur la société ? J’ai tendance à considérer qu’une œuvre a une dimension politique par défaut, puisqu’elle s’insère nécessairement dans un contexte socio-culturel. Qu’en pensez-vous ?
  • L'auteur(e) a-t-il une responsabilité envers son lectorat ? Que pensez-vous de la relation entre l'auteur(e) et son public ? En tant que lecteurs, avez-vous des attentes particulières envers les auteur(e)s ?
  • Faites-vous des choix politiques en tant que consommateurs, comme boycotter les œuvres d'un artiste problématique, ou en privilégier d'autres selon certain critères ? Ou faites-vous partie de la team "séparer l'homme de l'artiste" ?
  • Pour reprendre les questionnements du topic évoqué ci-dessus, pensez-vous qu'il y a des précautions à prendre lorsque l'on écrit sur des communautés dont on ne fait pas partie ? A-t-on une responsabilité envers ces communautés ? Doit-on écrire seulement que les sujets que l'on connaît ?
  • Concernant la liberté d'expression, est-ce que le fait de suivre des méthodes / suggestions données par d'autres pour nous guider dans le travail d'écriture peut être considéré comme un frein à cette liberté ?
  • Et enfin, vaste vaste question, mais pour vous, quel est le rôle de l'art ?
Voilà, je suis curieuse de connaître vos avis. Et si vous avez vous-mêmes des questionnements concernant ces thématiques, n'hésitez pas à les poster !
Audryx

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Audryx »

Pffiu beaucoup de questions je me lance mais je vais essayer de sélectionner quelques-unes de tes problématiques si tu me permets pour ne pas noyer tout le monde dès le premier commentaire 😉 alors je pense bien sûr que les auteurs ont un impact sur la société mais je pense même que certaines thématiques de société découlent du fait que auteurs nous les ont suggéré. Il me vient une très belle phrase d'Oscar Wilde qui résume cette idée
"Des brouillards ont pu exister pendant des siècles à Londres. J’ose même dire qu’il y en eut. Mais personne ne les a vus et, ainsi, nous ne savons rien d’eux. Ils n’existèrent qu’au jour où l’art les inventa"
Je pense que c'est le rôle de l'art de nous questionner sur des choses qui nous sont trop familières trop normales.
Suite à cela je suis donc pleinement favorable à ce que l auteur, l'artiste détienne une liberté totale sur son oeuvre car la surprise, le choc de nos perceptions rend une oeuvre intéressante. Le lecteur appréciera peut être temporairement une oeuvre qui suit son envie mais je ne pense pas que c'est viable sur le long terme.
Et non je ne censure jamais un artiste il arrive que les idées d'un auteur me fatiguent comme ce fut le cas dans des tomes de l'épée de vérité mais sans idées contraires à ce que l'on pense on ne pourrais pas argumenter n'est ce pas ? Bon cette réponse est très brouillonne j'en suis désolée ta question est très très intéressante en tout cas.
theyoubot

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par theyoubot »

Lyra1998 a écrit :
  • une œuvre a une dimension politique par défaut, puisqu’elle s’insère nécessairement dans un contexte socio-culturel
Les kebabs s'insèrent aussi dans un contexte socio-culturel. Ont-ils aussi une dimension politique par défaut ? Je crois que tu devrais préciser ta pensée.



Lyra1998 a écrit :
  • L'auteur(e) a-t-il une responsabilité envers son lectorat ? Que pensez-vous de la relation entre l'auteur(e) et son public ? En tant que lecteurs, avez-vous des attentes particulières envers les auteur(e)s ?
- L'auteur a la responsabilité professionnelle qu'il choisit de s'imposer. Chacun exerce son métier comme il l'entend.
- Ça ne m'empêche, moi, en tant que lectrice, de rechercher des textes ayant des qualités bien précises. Je juge l'auteur responsable de la présence ou de l'absence de ces qualités. Mais une autre lectrice pourra chercher tout autre chose dans le même roman. Il est impossible de satisfaire une telle variété d'exigences. L'auteur fera un choix. C'est sa liberté de création.



Lyra1998 a écrit :
  • Faites-vous des choix politiques en tant que consommateurs, comme boycotter les œuvres d'un artiste problématique, ou en privilégier d'autres selon certain critères ? Ou faites-vous partie de la team "séparer l'homme de l'artiste" ?
Séparer l'homme de l'artiste
Je ne veux rien savoir de l'homme derrière l'artiste. Ses idées politiques, son sexe, son âge, son époque. Les plus grandes oeuvres d'art sont celles qui ne disent rien sur leur créateur/trice. Dans les meilleurs romans que j'ai lus (meilleurs selon mes critères, cela va de soi), il est impossible de deviner le sexe de la personne qui écrit, son âge, l'époque où elle a écrit le livre, l'époque où elle a vécu.
Dans les mauvais romans, on devine tout ça.
D'ailleurs, il arrive souvent qu'un artiste en fin de carrière devienne 'engagé' pour retrouver un semblant d'exposition médiatique. Idem pour les artistes peinant à sortir de l'obscurité du fait de leur manque de talent. C'est une manoeuvre désespérée.



Lyra1998 a écrit :
  • pensez-vous qu'il y a des précautions à prendre lorsque l'on écrit sur des communautés dont on ne fait pas partie ?
Tout auteur a le droit de commettre un suicide professionnel en écrivant des choses fausses, insultantes, stupides sur une communauté. C'est son choix.
Parfois, ce n'est pas un choix artistique mais marketing qui vise à caresser dans le sens du poil les ennemis d'une communauté dont l'existence créée une vive polémique. Alors l'auteur cesse d'en être un. Il n'est plus qu'un instrument de communication, un minuscule et méprisable rouage dans un débat politisé.



Lyra1998 a écrit :
  • A-t-on une responsabilité envers ces communautés ?
Aucune.
Institutionnellement, il n'existe aucune moyen de donner corps à cette responsabilité sans atteinte à la liberté d'expression.
Individuellement, on en revient à un choix personnel de chaque auteur. C'est à dire à la question précédente.




Lyra1998 a écrit :
  • Doit-on écrire seulement que les sujets que l'on connaît ?
Les bons auteurs écrivent sur des sujets qu'ils connaissent. Les mauvais auteurs copient pauvrement les bons romans.
Tu t'intéresses donc ici aux mauvais auteurs : "mauvais auteurs, vous devriez écrire sur des sujets que vous connaissez !".
Mais je ne crois pas qu'ils soient mauvais au point de l'ignorer. Ils sont juste trop pressés, ils ont trop peu de temps à consacrer à l'écriture de leurs textes pour faire un bon travail d'écriture.
Combien d'heures de recherche documentaire pour écrire un roman aussi détaillé que Neropolis ?

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Lyra1998 a écrit :
  • Concernant la liberté d'expression, est-ce que le fait de suivre des méthodes / suggestions données par d'autres pour nous guider dans le travail d'écriture peut être considéré comme un frein à cette liberté ?
Tant que ces "autres" ne tiennent pas un pistolet, tout va bien.



Lyra1998 a écrit :
  • quel est le rôle de l'art ?
Transmettre une émotion. Les bons romans font ça très bien.

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DeadlySin

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par DeadlySin »

Pour commencer, la littérature est de nos jours une industrie et tout comme l’industrie des films, de la musique, des jeux-vidéos... elle est tiraillée entre art et consommation. Toutes les créations ne se valent pas. Certaines sont nées d’une volonté artistique assez forte, d’autres sont paramétrées pour être le plus vendables. Cette seconde catégorie n’est pas forcément plus mauvaise (ça se vend donc en soi ils ont raison de le faire) et peut même donner des produits très qualitatifs car l’auteur aura su viser pile juste dans les attentes des lecteurs mais, personnellement, cet état de fait m’invite à être prudente pour qualifier un livre d’œuvre et me force à me nuancer pour qualifier la littérature d’art.
De plus en plus, je regrette de voir des phénomènes comme le binge-reading, la micro-lecture, les sorties de chapitres hebdomadaire ou mensuel... ces habitudes invitent à toujours plus de consommation, une sur-consommation où les livres sont interchangeables et où on ne prend plus le temps d’avoir une réflexion sur ce que l’on lit. On prend, on lit, on jette, on passe à un autre et on recommence.

Pour la présence de la politique dans chaque livre.
Je n’aime pas cette démarche de dire que tout est politique car c’est, pour moi, s’enfermer dans une grille de lecture du monde politisée par sa propre couleur politique (subjectivité très grande et personnelle à chacun). Ne voir que la dimension politique ou du moins la chercher, c’est pour finir avec une obsession qui au final vient nous gâcher notre plaisir de lire. Surtout que, d’une part, tous les livres n’ont pas vocation à cela, certains ne sont écrits que dans une volonté de distraire, d’apporter de l’aventure, faire travailler l’esprit avec un mystère... Et ce n’est pas parce que l’auteur a certaines opinions politiques qu’il faut absolument les rechercher dans son livre. On tombe même dans certains cas dans le procès d’intention en imputant à l’auteur certaines positions de par le contexte socio-culturel dans lequel son livre a été écrit alors que certains auteurs essayent de s’en détacher car l’écriture, c’est l’imaginaire, c’est pour certains une fuite de la réalité et on voudrait les ramener de force dans notre réalité socio-culturelle alors que ça va à l’encontre de leur démarche de base. D’autre part, à voir la politique dans le moindre détail, tout devient sur-politisé et on force des auteurs à devoir s’engager. Qu’ils s’engagent si ça leur plaise mais pour ceux qui veulent écrire de manière la plus décontextualisée qu’il soit, qu’on les laisse faire et qu’on arrête d’essayer de trouver des marques de tels ou tels autres choses dans un sous-texte parfois inventé par les lecteurs. Car là est un gros problème : le lecteur n’est ni neutre, ni objectif ! Qui dit qu’il a plus raison que l’auteur sur le sous-texte politique de son livre ? Si on devait parler de relation de pouvoir, c’est le lecteur qui l’a dans ce contexte et c’est lui qui choisit le propos politique en accord ou non avec l’auteur qui parfois voit son œuvre être détournée à des fins politiques contre sa volonté et ça... ça me brise le cœur de voir certains auteurs se faire déposséder du contrôle de leur œuvre par des lecteurs obsédés par la politique.

En outre, je suis pour la séparation la plus nette et complète entre la personne et l’auteur. Je me fiche complètement de la vie des auteurs, je ne m’y intéresse uniquement si celui-ci a une vision du monde qui me fascine tout particulièrement et pour l’instant un seul y est parvenu. Pour les autres, mon intérêt est zéro. Son sexe, son âge, son milieu social, sa nationalité, sa couleur politique... peu importe tant qu’il écrit de bons livres. Et surtout, je ne veux pas juger sur les apparences. Actuellement, avec l’avènement des raisons sociaux, il y a cette volonté de scruter les plus petits aspects de la vie des gens et les auteurs ne sont pas épargnés. On va parfois récupérer des phrases qu’ils ont dites il y a 5/10 ans sur lesquelles on va les juger aujourd’hui (parfois même les virer - James Gunn). On sort des paroles de leurs contextes pour faire tomber une image négative sur des livres qu’ils ont écrit auparavant (J.K. Rowling en est un triste exemple). Je trouve ça malsain et hypocrite et je n’en veux pas. Je préfère juger un auteur sur son livre et qu’il se sente libre de faire ce qu’il veut dans sa vie personnelle, ça ne me regarde pas ; de même que ce que je fais chez moi ne regarde que moi. Je ne lui demande pas de suivre un standard de perfection, je ne lui demande pas d’être engagé, de devenir un modèle, d’être toujours cohérent et dans une même ligne de pensée... alors que je ne saurais pas l’être. Chaque humain à ses défauts, chacun est libre de changer d’opinion et je ne mélangerai pas plus vie professionnelle et vie privée pour un auteur que ce que je ferai pour mon médecin, un ouvrier dans la bâtiment, une esthéticienne ou un toiletteur pour chien. Là encore, je trouve qu'il y a quelque chose de l'ordre de l'obsession à rechercher dans la vie privée des gens des actes ou des paroles en adéquation ou en opposition avec nos propres valeurs. Ce n'est pas parce que certaines personnes exhibent leurs positions morales et politiques, qu'ils sont en droit de demander à ce que tout le monde le fasse pour ensuite juger leur travail.
Surtout que tout ce qui peut être connoter négativement de nos jours comme certaines prises de positions et ben... c’est déjà visible dans les livres, il n’y a pas besoin de s’intéresser à la vie de l’auteur. Les livres misogynes transpirent la misogyne de par le traitement des personnages...
Laissons-leur une vie privée et ne leur demandons pas de suivre des standards que nous nous appliquons même pas.

Et de ce fait, je n’attends rien de l’auteur à part qu’il écrive comme il le voudrait. Si je devais devenir auteur, j’apprécierais énormément qu’on me laisse tranquille et libre d’écrire ce que je veux comme je le veux. Ainsi, j’en fais de même pour les auteurs que je lis. C'est une question de respect mais aussi de confiance. Je respecte assez la personne pour lui donner la chance de se prouver et je lui fais assez confiance pour qu'il arrive à écrire son livre sans mon aide (qui n'est pas de facto supérieure juste par mon statut de lecteur). Surtout que je vois d’un très mauvais œil toute les incursions des lecteurs dans le processus créatif d’un auteur car, quand ils le font, ils demandent ce qu’ils veulent personnellement sans prendre en considération les volontés de l’auteur (pas très sensible de faire cela) et, en plus, ça peut venir saper de très bonnes idées certes parfois moins populaires. Quand je lis certaines conversations ou certains commentaires, je me demande s'il n'y a pas des lecteurs qui considèrent les auteurs comme de simples machines à écrire leur désir. C'est comme si on oubliait qu'il y avait une personne avec ses propres désirs et sensibilités.

Ainsi, l’auteur, pour moi, n’a pas de responsabilité envers son lectorat. Il ne fait que proposer un produit et puis c’est au lecteur de faire le choix de lire ou de ne pas lire. Si le lecteur n’a aucune obligation et qu’il est libre de sélectionner les livres à sa guise, il devrait en être de même pour l’auteur. Le lecteur a autant de responsabilité que l’auteur dans cette relation et je ne vois pas pourquoi je ferais peser une charge plus lourde de responsabilité sur l’un que sur l’autre.
Psyl

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Psyl »

Lyra1998 a écrit : mer. 09 févr., 2022 9:02 pm
  • Et enfin, vaste vaste question, mais pour vous, quel est le rôle de l'art ?
L'on devrait pouvoir à tous poèmes donner ce titre : Raisons de vivre heureux. Francis Ponge

Ca résume bien le rôle de l'art pour moi
Lyran

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

Merci pour vos réponses, ça envoie déjà du lourd ! Je rebondis pour l'instant sur les points qui me marquent le plus, mais dès que j'aurais un peu plus de temps, je répondrai au reste des questions que j'ai posées.

Sinon je me rends compte que je n'ai pas précisé pourquoi tous ces sujets m'intéressent autant. Je travaille dans le cinéma, notamment en tant que scénariste - et de manière générale, j'aime l'écriture et la création artistique. D'où ces questions, que je rencontre de fait assez souvent dans mon milieu.

Audryx a écrit : mer. 09 févr., 2022 9:47 pm Je pense que c'est le rôle de l'art de nous questionner sur des choses qui nous sont trop familières trop normales.
J'aime beaucoup la citation d'Oscar Wilde que tu as postée :)
Est-ce que tu as des exemple d’œuvres qui ont accompli ce rôle, en te questionnant sur une réalité devenue trop familière ?

theyoubot a écrit : jeu. 10 févr., 2022 12:00 am Les kebabs s'insèrent aussi dans un contexte socio-culturel. Ont-ils aussi une dimension politique par défaut ? Je crois que tu devrais préciser ta pensée.
Haha oui, c'est vrai que j'ai un peu balancé ça comme ça ! Déjà, quand je parle de dimension politique, je l'entends dans le sens de ce qui a trait à la vie en société - pas dans le sens de gauche ou droite.

Cette idée me vient de ce que j'observe dans le cinéma, plus que dans la littérature (où je suis moins calée). Le contexte culturel influence énormément la production cinématographique : en ce moment, la tendance est à la diversité, au féminisme, mais aussi aux angoisses du moment comme par exemple la crise écologique. Ça peut être bien fait, tout comme on peut se retrouver avec de la représentation faite uniquement pour remplir les quotas ou des séquences de girl power complètement artificielles.
En passant, si ces tendances sont plus perceptibles dans la production audiovisuelle, c'est à mon avis car elle coûte bien plus cher que la publication d'un livre et est donc davantage calibrée pour attirer le spectateur.
Tout ça pour dire qu'une œuvre, en étant le produit d'un contexte socio-culturel, va (consciemment ou non) avoir une résonance avec ce contexte - explicite ou implicite, parfois très peu apparente. C'est ça que je considère comme sa "dimension politique".

Quant aux kebabs, on pourrait sans doute considérer qu'ils également ont une dimension politique ? Dans le sens où c'est un plat qui est connoté, car d'origine étrangère, peu cher, et consommé majoritairement par une certaine catégorie de la population.

theyoubot a écrit : jeu. 10 févr., 2022 12:00 am Transmettre une émotion. Les bons romans font ça très bien.
Je te rejoins là-dessus. Enfin, je pense que l'art a plusieurs rôles, mais à titre personnel, c'est surtout ce critère-là qui va me faire apprécier ou non une œuvre.

DeadlySin a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:08 am Je n’aime pas cette démarche de dire que tout est politique car c’est, pour moi, s’enfermer dans une grille de lecture du monde politisée par sa propre couleur politique (subjectivité très grande et personnelle à chacun). Ne voir que la dimension politique ou du moins la chercher, c’est pour finir avec une obsession qui au final vient nous gâcher notre plaisir de lire.
Je suis bien d'accord, ce serait épuisant d'analyser l'art uniquement par ce prisme. Quand je dis qu'il y a toujours une dimension politique sous-jacente, je n'estime pas qu'il est forcément important de la chercher ou d'y prêter attention. Par contre, en tant qu'auteur(e), je ne pense pas qu'on puisse prétendre y échapper : elle existe un peu par défaut. Même dans la volonté de se détacher de notre réalité, il y a bien l'existence implicite de cette réalité.

DeadlySin a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:08 am Car là est un gros problème : le lecteur n’est ni neutre, ni objectif ! Qui dit qu’il a plus raison que l’auteur sur le sous-texte politique de son livre ? Si on devait parler de relation de pouvoir, c’est le lecteur qui l’a dans ce contexte et c’est lui qui choisit le propos politique en accord ou non avec l’auteur qui parfois voit son œuvre être détournée à des fins politiques contre sa volonté et ça... ça me brise le cœur de voir certains auteurs se faire déposséder du contrôle de leur œuvre par des lecteurs obsédés par la politique.
Ce que tu dis me fait penser au concept de "mort de l'auteur", qui remet en question le pouvoir qu'a l'auteur(e) sur son texte. En gros, si je me souviens bien, une fois qu'un texte est publié, il va être compris légèrement différemment selon la personne qui le lit. Ce qui peut donner lieu à de multiples interprétations d'une même œuvre, parfois très loin de ce que voulait transmettre l'auteur(e), mais qui n'en sont pas moins valides pour autant.

DeadlySin a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:08 am Chaque humain à ses défauts, chacun est libre de changer d’opinion et je ne mélangerai pas plus vie professionnelle et vie privée pour un auteur que ce que je ferai pour mon médecin, un ouvrier dans la bâtiment, une esthéticienne ou un toiletteur pour chien. Là encore, je trouve qu'il y a quelque chose de l'ordre de l'obsession à rechercher dans la vie privée des gens des actes ou des paroles en adéquation ou en opposition avec nos propres valeurs.
Sur cette question de séparer l'homme de l'artiste, j'ai un peu de mal à me faire un avis. D'instinct, je me dis la même chose que toi et theyoubot : la vie personnelle de l'artiste n'impacte pas la qualité d'une œuvre, il faut juger après avoir vu, etc. Mais deux points me taraudent :
  • Déjà, on ne peut pas comparer un(e) auteur(e) à n'importe quel autre métier, puisqu'il ou elle émet un discours au travers de ses œuvres et a ainsi un pouvoir d'influence sur son public que, disons, un boulanger n'aura pas. Quand il s'agit de journalistes ou de politicien(ne)s, on voit bien que leurs opinions personnelles ont un impact sur leur travail, et on ne peut pas vraiment séparer la personne de son métier. Eh bien pour l'artiste, j'ai l'impression que c'est un peu pareil (par contre, ça ne dit rien de la qualité de son travail).
  • Ensuite, j'ai l'impression qu'il y a une indulgence particulière envers les artistes, et qu'on leur pardonne leurs manquements parce que "oh les belles œuvres !" Je pense par exemple à tous ces réalisateurs qui se permettent d'harceler leurs acteurs et actrices au nom de l'Art - et c'est accepté dans le plus grand des calmes car le film est bon, alors on ne va pas juger leurs méthodes, hein.

DeadlySin a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:08 am Et de ce fait, je n’attends rien de l’auteur à part qu’il écrive comme il le voudrait. Si je devais devenir auteur, j’apprécierais énormément qu’on me laisse tranquille et libre d’écrire ce que je veux comme je le veux. Ainsi, j’en fais de même pour les auteurs que je lis. C'est une question de respect mais aussi de confiance. Je respecte assez la personne pour lui donner la chance de se prouver et je lui fais assez confiance pour qu'il arrive à écrire son livre sans mon aide (qui n'est pas de facto supérieure juste par mon statut de lecteur). Surtout que je vois d’un très mauvais œil toute les incursions des lecteurs dans le processus créatif d’un auteur car, quand ils le font, ils demandent ce qu’ils veulent personnellement sans prendre en considération les volontés de l’auteur (pas très sensible de faire cela) et, en plus, ça peut venir saper de très bonnes idées certes parfois moins populaires. Quand je lis certaines conversations ou certains commentaires, je me demande s'il n'y a pas des lecteurs qui considèrent les auteurs comme de simples machines à écrire leur désir. C'est comme si on oubliait qu'il y avait une personne avec ses propres désirs et sensibilités.
Je plussoie totalement !
Et tu fais bien de souligner que la relation auteur/lecteur engage une responsabilité des deux côtés.

Psyl a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:32 am L'on devrait pouvoir à tous poèmes donner ce titre : Raisons de vivre heureux. Francis Ponge
Ca résume bien le rôle de l'art pour moi
Encore une jolie citation :)
Mais en pratique, est-ce que ça veut dire que tu privilégies uniquement les œuvres qui vont te rendre heureux ?
theyoubot

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par theyoubot »

Lyra1998 a écrit :Une œuvre a une dimension politique par défaut
Cette idée me vient de ce que j'observe dans le cinéma, plus que dans la littérature (où je suis moins calée). Le contexte culturel influence énormément la production cinématographique : en ce moment, la tendance est à la diversité, au féminisme, mais aussi aux angoisses du moment comme par exemple la crise écologique. Ça peut être bien fait, tout comme on peut se retrouver avec de la représentation faite uniquement pour remplir les quotas ou des séquences de girl power complètement artificielles.
En passant, si ces tendances sont plus perceptibles dans la production audiovisuelle, c'est à mon avis car elle coûte bien plus cher que la publication d'un livre et est donc davantage calibrée pour attirer le spectateur.
Tout ça pour dire qu'une œuvre, en étant le produit d'un contexte socio-culturel, va (consciemment ou non) avoir une résonance avec ce contexte - explicite ou implicite, parfois très peu apparente.

Montrer une femme indépendante ou un aspect du dérèglement climatique, ce ne sont pas des messages politiques. C'est montrer une réalité acceptée par l'écrasante majorité de la population et donc - pour des raisons évidentes de survie professionnelle - des grands partis politiques.
J'ai vu une centaine de séries TV et les 8000 films 'majeurs' qui ont marqué le cinéma américain grand public de 1970 à nos jours. Avec ses diverses évolutions, sur la forme (rythme, caractérisation) et sur le fond (thèmes, genres). On constate exactement le contraire de ce que tu affirmes. Le 7° art grand public n'a pas le moindre impact politique. Il fait même de gros efforts pour ne jamais prêter le flanc à une interprétation idéologique. Il y a des centaines d'exemples de scripts qui ont été retravaillés afin d'éviter tout risque qu'on leur attribue accidentellement un sous-texte politique. Ces 50 dernières années, un des grands reproches faits au cinéma américain est justement d'être devenu un divertissement décérébré, consensuel et sans la moindre audace sur le fond.
Bien sûr, il a existé en Europe un cinéma social dans les années 70, ainsi que des productions engagées, avec des sensibilités politiques de gauche et d'extrême gauche. Mais elles ne caractérisent pas plus plus le cinéma qu'une chanteur engagé ne caractérise la chanson. Dans les deux cas, il s'agissait d'épiphénomènes. Sur les 500 000 films produits par l'industrie cinématographique dans des démocraties, une infirme pourcentage ont eu une dimension politique.
De même en littérature. Non seulement je ne connais pas d'exemple de roman de ces 30 dernières années qui aurait eu une dimension ou un poids politique (dans une démocratie), mais je ne crois pas avoir croisé un roman qui avait ne serait ce qu'un semblant de contenu politique.
Et c'est très bien. Notre génération estime, à juste titre je pense, qu'un roman ou un film n'est pas l'endroit pour faire de la politique.



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Flashback, une dystopie saupoudrée d'un zeste de credos ultralibéraux, islamophobes et climato-sceptiques. Mais ce parfum de propagande d'extrême droite est tellement discret qu'il est à peine digne d'être mentionné



Lyra1998 a écrit :Séparer l'homme de l'artiste
  • on ne peut pas comparer un(e) auteur(e) à n'importe quel autre métier, puisqu'il ou elle émet un discours au travers de ses œuvres et a ainsi un pouvoir d'influence sur son public que, disons, un boulanger n'aura pas. Quand il s'agit de journalistes ou de politicien(ne)s, on voit bien que leurs opinions personnelles ont un impact sur leur travail, et on ne peut pas vraiment séparer la personne de son métier. Eh bien pour l'artiste, j'ai l'impression que c'est un peu pareil (par contre, ça ne dit rien de la qualité de son travail).
Tes deux exemples vont à l'encontre de ton affirmation.
Pour un politicien, avoir des idées politiques fait partie de son métier. C'est même dans le nom de son métier.
Pour un journaliste engagé, présenter le monde avec un regard biaisé politiquement fait aussi partie de son métier. Un journaliste engagé vend une interprétation politique de l'actualité qui renforce la ligne éditoriale du média engagé où il travaille ou de sa propre production engagée (essais engagés, interviews, conférences).
Pour un journaliste neutre, présenter l'actualité sans le moindre biais politique est la pierre angulaire de son métier. Il doit réussir cela s'il veut être crédible et respecté.
Bien qu'ils aient en théorie le média adéquat pour s'exprimer, les réalisateurs et les auteurs n'ont pas de discours politiques. Voir paragraphe précédent. L'industrie du cinéma estime que ce n'est pas son rôle. En littérature, je suppose que ça vient de la désaffection de notre génération pour la politique. Les auteurs font partie de la même génération, ils sentent bien qu'un discours politique n'aiderait en rien leur oeuvre à trouver son public.



Lyra1998 a écrit :
  • il y a une indulgence particulière envers les artistes, et qu'on leur pardonne leurs manquements parce que "oh les belles œuvres !" Je pense par exemple à tous ces réalisateurs qui se permettent de harceler leurs acteurs et actrices au nom de l'Art - et c'est accepté dans le plus grand des calmes car le film est bon, alors on ne va pas juger leurs méthodes, hein.
Ça n'a pas le moindre rapport avec le sujet de ce topic. La justice a été d'une indulgence scandaleuse dans des cas de harcèlement commis par des réalisateurs ou artistes célèbres. Ça ne prouve en rien que ces réalisateurs ou artistes avaient un impact politique sur la société.


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Fitzyfool

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Fitzyfool »

Bonjour ! Je viens apporter ma contribution, c'est un sujet qui me fait beaucoup réfléchir depuis quelques années.

Lyra1998 a écrit : mer. 09 févr., 2022 9:02 pm
  • J’ai tendance à considérer qu’une œuvre a une dimension politique par défaut, puisqu’elle s’insère nécessairement dans un contexte socio-culturel. Qu’en pensez-vous ?
Je suis tout à fait d'accord avec toi sur la dimension politique des œuvres. A partir du moment où le livre a pour vocation d'être lu par autrui et diffusé, il est politique. Les auteurs et autrices, mais aussi les maisons d'édition : en favorisant tel sujet ou tel grand nom reconnu plutôt qu'une personne concernée... font un grand nombre de choix qui vont avoir un impact sur les lecteurs et lectrices et leur confèrent donc une responsabilité envers la société. A plus faible échelle, toute personne qui participe à recommander un livre plutôt qu'un autre va également avoir un impact.

Lyra1998 a écrit : mer. 09 févr., 2022 9:02 pm
  • Faites-vous des choix politiques en tant que consommateurs, comme boycotter les œuvres d'un artiste problématique, ou en privilégier d'autres selon certain critères ? Ou faites-vous partie de la team "séparer l'homme de l'artiste" ?
Je pense qu'il est naïf de croire qu'un ou une artiste, même remarquable, peut totalement s'extraire de son vécu en créant. Ses opinions, son milieu social, son genre... transparaissent dans ses choix créatifs.
Par exemple, cela fait quelques années que je suis consciente du sexisme dans les livres que je lis, les films que je vois... et force est de constater que, quand je lis des livres écrits par des femmes, j'ai moins fréquemment affaire à des personnages féminins creux, sexualisés à outrance ou qui n'existent que pour apporter quelque chose au héros forcément masculin. Je lis donc maintenant une majorité de livres écrits par des femmes, non pas parce que je m'empêche de consommer la moindre œuvre créée par un homme, mais justement parce que je continue à en consommer et à faire ce constat régulièrement. Evidemment, je parle de sexisme mais cela s'applique à toute autre forme de discrimination, d'où l'importance du ownvoice et des sensitivity readers pour les auteurs et autrices qui tiennent à parler de sujets qui ne les concernent pas directement.

En tant que lecteurs et lectrices averties, il est difficile de faire le poids face aux artistes problématiques et aux maisons d'édition qui les diffusent largement. Mais il est toujours possible de se tourner vers des moyens alternatifs de les obtenir (occasion, prêt...), d'avertir nos proches à leur sujet, de recommander d'autres livres si on dispose d'une plateforme... Encore une fois, nous avons un impact.

Lyra1998 a écrit : mer. 09 févr., 2022 9:02 pm
  • Concernant la liberté d'expression, est-ce que le fait de suivre des méthodes / suggestions données par d'autres pour nous guider dans le travail d'écriture peut être considéré comme un frein à cette liberté ?
A moins d'être incapable de remise en question ou de vouloir sciemment mal faire, je ne vois pas pourquoi un ou une artiste s'opposerait à recevoir des recommandations de personnes concernées. Au contraire, ça me paraît être une chance de rendre un livre plus ancré dans le réel, d'attirer des lecteurs et lectrices concernées qui ne se seraient pas intéressées à notre livre de crainte d'une énième mauvaise représentation... Les personnes qui écrivent des livres policiers ne sont-elles pas connues pour faire des recherches sur tout un tas de sujets pour accentuer le réalisme de leurs crimes et enquêtes ? Ca me paraît aller exactement dans le même sens.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par DeadlySin »

Ce que tu dis me fait penser au concept de "mort de l'auteur", qui remet en question le pouvoir qu'a l'auteur(e) sur son texte. En gros, si je me souviens bien, une fois qu'un texte est publié, il va être compris légèrement différemment selon la personne qui le lit. Ce qui peut donner lieu à de multiples interprétations d'une même œuvre, parfois très loin de ce que voulait transmettre l'auteur(e), mais qui n'en sont pas moins valides pour autant.
Je ne suis qu'en partie d'accord avec cela. Certaines œuvres sont plus interprétatives que d'autres. Dans certains cas, l'auteur laisse la porte ouverte aux lecteurs pour se faire leurs propres interprétations mais ce n'est pas toujours le cas.
Le cas opposé le plus flagrant est l'écrit contenant une volonté de "dénoncer" : Les "J'accuse... !" de Zola ou "Le Dernier Jour d'un Condamné" de Victor Hugo ne sont pas des écrits à interpréter comme l'on veut. Ces auteurs avaient une pensée très précise et l'ont exprimé de telle sorte qu'il n'y ait qu'une manière de comprendre ces écrits. Après, le lecteur peut être d'accord ou pas avec ce qui est dit dedans mais des interprétations alternatives ne peuvent pas exister ou sinon c'est que le lecteur n'a absolument rien compris et toute "interprétation" de son cru serait erronée.
En outre, pour moi, il y a des limites à la validité de certaines interprétations. Dès l'instant qu'un lecteur vient affirmer qu'il existerait un sous-texte dans un livre mais que ce soi-dit sous-texte a été démenti par l'auteur, l'interprétation n'est plus valide.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

theyoubot a écrit : ven. 11 févr., 2022 1:26 am Montrer une femme indépendante ou un aspect du dérèglement climatique, ce ne sont pas des messages politiques. C'est montrer une réalité acceptée par l'écrasante majorité de la population et donc - pour des raisons évidentes de survie professionnelle - des grands partis politiques.
Je pense que tu n'as pas compris ce que j'entendais par politique, mais tant mieux, ça me donne l'occasion de peaufiner ma réflexion. Voilà mon raisonnement :
Toute œuvre porte en elle un discours, qu'elle le veuille ou non. Ça peut être super basique et consensuel, ce n'est pas le problème ; à partir du moment où on écrit sur un sujet, on formule une opinion sur ledit sujet.
Ce message est créé, puis diffusé, lu et compris dans le contexte de notre société. C'est en ça qu'il est politique (et encore une fois, je n'entends pas par là la notion de partis politiques).
Sachant que cette dimension politique n'est 1) jamais la seule dimension d'une œuvre, 2) n'implique pas forcément que l’œuvre soit engagée, audacieuse ou intelligente, et 3) n'a pas forcément une influence directe sur le public (c'est plutôt l'accumulation de discours allant dans le même sens qui peut avoir un impact à long-terme).

Des exemples dans mes dernières lectures / visionnages "grand public" :
  • Dans Les frères Grimm, de Terry Gilliam,
    Spoiler
    on peut voir une opposition entre les gouvernants déconnectés du peuple et les villageois attachés à leurs traditions. L'autorité est montrée comme cruelle, désirant l'ordre, rationnelle jusqu'au déni. Les villageois sont présentés comme crédules, mais au final c'est bien eux qui avaient raison. Le folklore apparaît comme une dimension essentielle de la vie, qui aide à comprendre le monde qui nous entoure.
  • Dans Tous en scène 2, du studio Illumination,
    Spoiler
    la troupe d'artistes est soumise à la volonté de leur mécène, un espèce de PDG intéressé uniquement par le succès et l'argent qu'il peut se faire sur leur dos. Le metteur en scène doit donc se plier à ses exigences, au détriment de la qualité de son spectacle. Jusqu'au moment où il se rebelle, le spectacle est une réussite artistique et le PDG finit en prison.
  • Dans la saga de La passe-miroir, de Christelle Dabos,
    Spoiler
    les personnages vont jusqu'à affronter Dieu pour récupérer leur libre-arbitre. Toute leur quête est motivée par leurs valeurs : indépendance, esprit critique, liberté. Les personnages en position d'autorité sont révisionnistes, hypocrites et obéissent aveuglément à leurs supérieurs. Les protagonistes réussissent leur quête ; la liberté de faire ses erreurs est préférée à la société policée et restrictive, qui désirait leur bonheur commun sans se rendre compte qu'il était impossible de l'atteindre de cette manière.
Voilà, sinon, je trouve que Fitzyfool a plutôt bien résumé l'idée dans son post.

theyoubot a écrit : ven. 11 févr., 2022 1:26 am Tes deux exemples vont à l'encontre de ton affirmation.
Les buts poursuivis en journalisme et en politique ne sont pas les mêmes qu'en art (informer, légiférer, influencer...), mais ces exemple me semble pertinents car ce sont également des métiers axés autour du discours. Or, ces discours sont le résultat d'une somme d'expériences propres à chaque individu, expériences qui forment ses opinions. En comparaison, les expériences et opinions d'un boulanger ont peu de chance d'avoir un effet sur la production de son pain.
De plus, il s'agit de positions d'influence ; ces discours ont un impact sur le public qui les reçoit (conscientisé ou non, à court ou long-terme, parfois minime). A contrario, le pain de mon boulanger risque peu de m'orienter dans mes opinions.
J'aurais également pu prendre en exemple les professeurs, les publicitaires, ou les si bien nommés influenceurs.

theyoubot a écrit : ven. 11 févr., 2022 1:26 am Ça n'a pas le moindre rapport avec le sujet de ce topic. La justice a été d'une indulgence scandaleuse dans des cas de harcèlement commis par des réalisateurs ou artistes célèbres. Ça ne prouve en rien que ces réalisateurs ou artistes avaient un impact politique sur la société.
La gestion de ces affaires a un impact politique sur la société. Et c'est typiquement dans ce genre d'histoires qu'on entend les "il faut séparer l'homme de l'artiste" répétés à tout va. Ce qui me donne l'impression que cette vision des choses, poussée à son extrême, entraîne une indulgence qui flirte avec le déni et pousse à fermer les yeux sur des choses inacceptables. Voilà le rapport avec le sujet du topic.



DeadlySin a écrit : ven. 11 févr., 2022 6:33 pm Je ne suis qu'en partie d'accord avec cela. Certaines œuvres sont plus interprétatives que d'autres. Dans certains cas, l'auteur laisse la porte ouverte aux lecteurs pour se faire leurs propres interprétations mais ce n'est pas toujours le cas.
(...) En outre, pour moi, il y a des limites à la validité de certaines interprétations. Dès l'instant qu'un lecteur vient affirmer qu'il existerait un sous-texte dans un livre mais que ce soi-dit sous-texte a été démenti par l'auteur, l'interprétation n'est plus valide.
Je n'ai pas étudié le concept en profondeur, mais il me semble que cette mort de l'auteur est indépendante de ce que celui-ci ou celle-ci décide de laisser comme porte ouverte à son public. Le principe, c'est justement que l'auteur.e n'a pas le pouvoir de forcer son lectorat à ressentir et interpréter le texte comme il ou elle le voudrait, et qu'une dimension de son œuvre lui échappera toujours. Évidemment, il est possible de réduire le champ des lectures faisables, et comme tu le dis, certaines œuvres sont plus précises que d'autres sur le message qu'elles portent. Mais que l'auteur.e démente ou non l'interprétation d'un.e lecteur ou lectrice ne change rien au fait que cette interprétation existe et fait sens pour certain.e.s.

Cette liberté d'interprétation ressort beaucoup avec le sous-texte queer, par exemple. Pendant longtemps, il y a eu pas ou peu de représentation de personnages lgbt dans la littérature littérature et à l'écran. Les personnes queer se sont donc créée cette représentation en interprétant certains personnages comme tel.
Par exemple, dans Good Omens de Terry Pratchette et Neil Gaiman, les personnages d'Aziraphale et Crowley sont très souvent considérés comme étant amoureux l'un de l'autre. Or, ce n'était pas l'intention des auteurs, qui n'avaient pas imaginé que cela puisse être reçu de cette façon. Quand des lecteurs ont interrogé Neil Gaiman sur le sujet, il a répondu que dans le livre (parce qu'il y a eu une adaptation en série), ce n'était bel et bien que de l'amitié, mais que ça ne les empêchait pas de voir ça autrement s'ils en avaient envie.
Ou encore dans La reine des neige, Elsa est perçue comme lesbienne par pas mal de gens ; ça fait sens avec son parcours, même si ça n'a jamais été confirmé.

DeadlySin a écrit : jeu. 10 févr., 2022 8:08 am Ainsi, l’auteur, pour moi, n’a pas de responsabilité envers son lectorat.
Je me rend compte qu'en te répondant là-dessus dans mon dernier post, j'ai oublié de préciser qu'à mon sens, on écrit d'abord pour soi avant d'écrire pour les autres.



Fitzyfool a écrit : ven. 11 févr., 2022 5:32 pm Evidemment, je parle de sexisme mais cela s'applique à toute autre forme de discrimination, d'où l'importance du ownvoice et des sensitivity readers pour les auteurs et autrices qui tiennent à parler de sujets qui ne les concernent pas directement.
Je crois que j'ai plus ou moins deviné le sens de ces termes, mais tu pourrais préciser quand même ce que tu entends par "ownvoice" et "sensitivity readers" ?
Autrement je suis d'accord avec l'intégralité de ton message ! Tu as formulé les choses très clairement, ça m'aide à me retrouver dans mes propres pensée haha.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par DeadlySin »

Et que penses-tu des récupérations par certains lecteurs/spectateurs de personnages ou d'histoires qu'ils interprètent selon leur grille d'analyse personnelle (parfois à l'opposé complet de ce qui est écrit) pour se les réapproprier complètement au point de vouloir s'accaparer ceux-ci et déposséder les auteurs de leurs œuvres ?
Plus d'une fois, j'ai pu voir des réactions complètement disproportionnées, violentes et même menaçantes envers des auteurs de la part de lecteurs/spectateurs car un personnage n'était pas développé selon leurs désirs, parce qu'un personnage ne finissait pas en couple avec la personne de leur choix etc. Que penser de ces pressions sur les auteurs actuels de la part des fandoms ? N'est-ce pas un manque de respect et de considération pour l'auteur et son individualité ? L'auteur a-il vraiment de nos jours la liberté de dire aux "fans" : "Non, vous vous trompez. Ce n'est pas ainsi que j'ai écrit mon histoire et votre interprétation est fausse" ? A-il la possibilité de répondre autrement que par "Tout va bien. Toutes vos interprétations sont bonnes" ? Car, en l'état des choses, l'expression de certaines opinions par les auteurs est de plus en plus limitée justement parce qu'il y a des "fans" qui réagissent violemment au fait que leur "interprétation" ne serait pas bonne. Si un auteur ne veut pas se prendre des critiques et des campagnes d'attaques contre sa personne par certaines communautés de "fans", il est obligé de se taire sur certaines choses.
Si un auteur écrit d'abord pour lui-même, comment devons-nous prendre ces réactions de lecteurs qui décident de s'éloigner du canon de l'univers créé par l'auteur au point de les rejeter tous les deux ?
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

Qu'est-ce que tu entends exactement par "déposséder l'auteur.e de son œuvre" ?
Les productions de fans (fanfictions, fanarts, etc.) ne causent de tort à personne : il est impossible de se faire de l'argent dessus, et l'auteur.e conserve la propriété intellectuelle de son travail. Et à la mort (réelle) de l'auteur.e, il y a un délai avant que son œuvre ne tombe dans le domaine public. Même lors des cas de réactions disproportionnées - qui sont déplorables, je pense par exemple à la pétition demandant à refaire la saison 8 de Game of Thrones -, l'auteur.e reste décisionnaire et propriétaire de son travail.
Je pense donc qu'il faut différencier l'interprétation, qui reste quelque chose de personnel, et la volonté d'influer sur l'auteur.e pour lui faire modifier son œuvre.

Bien sûr, cela n'enlève pas l'existence d'une pression - qui j'ai l'impression, a malheureusement tendance à augmenter ces derniers temps. Ceci étant, ce genre de harcèlement est souvent le fait d'une minorité de fans. La plupart se contentent de réagir dans leur coin quand ils ne sont pas satisfaits d'un aspect de l’œuvre.
Notons, par ailleurs, que la réinterprétation et réécriture des œuvres existe depuis la nuit des temps. Il y a toujours eu une dissonance plus ou moins grande entre le canon et les fans.

Du coup, quand je dis "écrire pour soi avant d'écrire pour les autres", c'est pour rappeler qu'il y aura toujours des réactions négatives, des gens pour rejeter ce que l'on crée. Écrire pour soi permet au moins la satisfaction d'avoir fait quelque chose qui nous plait personnellement, quel que soit l'accueil qui lui sera fait.

Quand à la possibilité de mettre un stop aux fans : certain.e.s auteur.e.s arrivent parfaitement à leur tenir tête pour imposer leur canon.
Anne Rice a plusieurs fois exprimé sa désapprobation quant à l'écriture de fanfictions basées sur ses livres. JK Rowling s'est pris une réaction plutôt négative quand elle a annoncé l'homosexualité de Dumbledore, mais elle n'a jamais bougé de sa position. Même dans l'exemple que je donnais avec Good Omens, Neil Gaiman différencie bien le canon (une histoire d'amitié) de la vision de certain.e.s lecteurs et lectrices (une histoire d'amour), qui relève de leur liberté d'interprétation.
Je pense que ça n'a pas tant de sens pour un.e auteur.e d'affirmer qu'une interprétation de leur œuvre est fausse. En revanche, qu'elle ne correspond pas à ce qu'il ou elle a essayé de dire, sans doute.
La multiplicité des lectures d'une œuvre permet d'en faire ressortir certains aspects qui avaient échappés à l'auteur.e, et c'est pour ça que je pense que quel que soit son talent, une dimension de sa création lui échappe toujours.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par theyoubot »

Lyra1998 a écrit :La gestion de ces affaires a un impact politique sur la société. Et c'est typiquement dans ce genre d'histoires qu'on entend les "il faut séparer l'homme de l'artiste" répétés à tout va. Ce qui me donne l'impression que cette vision des choses, poussée à son extrême, entraîne une indulgence qui flirte avec le déni et pousse à fermer les yeux sur des choses inacceptables
Oui. Mais ça ne confère aucune dimension politique aux films des célébrités concernées. Le Cosby Show n'est pas subitement devenu une apologie des agressions sexuelles au procès de son producteur. Donc aucun rapport avec ce que tu essaies de prouver, la dimension politique de la littérature et du cinéma.





Lyra1998 a écrit :Les buts poursuivis en journalisme et en politique ne sont pas les mêmes qu'en art
Oui. C'est justement pour ça que tes deux exemples (politiciens, journalistes engagés) n'ont aucune valeur pour la littérature et le cinéma. Le fait que tu sois obligée de recourir à des exemples non pertinents, en dehors des médias que tu discutes sur ce topic, devrait te mettre la puce à l'oreille.





Lyra1998 a écrit :Toute œuvre porte en elle un discours, qu'elle le veuille ou non. Ça peut être super basique et consensuel, ce n'est pas le problème ; à partir du moment où on écrit sur un sujet, on formule une opinion sur ledit sujet. Ce message est créé, puis diffusé, lu et compris dans le contexte de notre société. C'est en ça qu'il est politique (...) Sachant que cette dimension politique n'est 1) jamais la seule dimension d'une œuvre, 2) n'implique pas forcément que l’œuvre soit engagée, audacieuse ou intelligente, et 3) n'a pas forcément une influence directe sur le public (c'est plutôt l'accumulation de discours allant dans le même sens qui peut avoir un impact à long-terme).
Tu ne peux pas affirmer que toutes les femmes de la planète sont grandes. Pour affirmer que certaines sont grandes, tu dois admettre que certaines sont petites et d'autres moyennes. Si tous les contenus ont une dimension politique, alors aucun n'en a.
Ta définition d'un message politique veut s'appliquer à tout contenu audiovisuel ou littéraire de large diffusion. Ce faisant, ta définition perd toute substance.





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Lyra1998 a écrit :ce sont également des métiers axés autour du discours. Or, ces discours sont le résultat d'une somme d'expériences propres à chaque individu, expériences qui forment ses opinions. (...)
De plus, il s'agit de positions d'influence ; ces discours ont un impact sur le public qui les reçoit (conscientisé ou non, à court ou long-terme, parfois minime). A contrario, le pain de mon boulanger risque peu de m'orienter dans mes opinions.
J'aurais également pu prendre en exemple les professeurs, les publicitaires, ou les si bien nommés influenceurs.
En littérature et cinéma, ça reste des discours majoritairement dépourvus de dimension politique. Ton raisonnement est le suivant :

Une œuvre, en étant le produit d'une société où il y a des vélos, va (consciemment ou non) avoir un discours sur les vélos. Toute œuvre porte en elle un discours sur le vélo, qu'elle le veuille ou non. Ça peut être super basique et consensuel, ce n'est pas le problème ; à partir du moment où on écrit sur une société où il y a des vélos, on formule une opinion sur les vélos.
Ce message sur les vélos est créé, puis diffusé, lu et compris dans le contexte de notre société. C'est en ça que c'est une prise de position sur les vélos.
Sachant que ce message sur les vélos n'est 1) jamais le seul message d'une œuvre, 2) n'implique pas forcément que l’œuvre s'engage fermement sur le sujet des vélos (ni de façon audacieuse ou intelligente), et 3) n'a pas forcément une influence directe sur l'opinion du public concernant les vélos (c'est plutôt l'accumulation de discours allant dans le même sens qui peut avoir un impact à long-terme).


Bien sûr, ce raisonnement est absurde. 100% des films n'ont pas un discours sur les vélos.
100 % des films n'ont pas une dimension politique. En fait, à Hollywwod, 0 % des films des dernières décennies ont une dimension politique. Et ce, pour d'impérieuses raisons marketing.
Rares sont les films (même en Europe) ou romans de genre qui ont une dimension politique. Quelques exemples contrastés :
- Apocalypse Now a un propos fort sur la folie des hommes et les horreurs de la guerre.
- Il faut sauver le soldat Ryan offre une vision du débarquement qui est sans doute la scène du genre la plus terrifiante et la plus aboutie de toute l'histoire du 7° art. Mais le film adopte l'angle d'une courageuse escouade prise dans une situation épouvantable. Cela permet au film d'éviter tout propos sur la guerre, réduite ici, par son absence de dimension morale (positive ou négative), au rôle d'une sorte de tragique catastrophe naturelle.
- De même, si Wall-E a été perçu comme véhiculant un message social sur l'obésité (et critiqué pour ça), ce ne fut pas de cas de Professeur Foldingue.
La plupart du temps, ce que montrent les films n'a aucun impact politique. Ce sont juste des codes narratifs pour susciter chez le spectateur des émotions (amusement pour Foldingue, peur pour Ryan) et non des idées.

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

theyoubot a écrit : sam. 19 févr., 2022 2:15 am Oui. Mais ça ne confère aucune dimension politique aux films des célébrités concernées. Le Cosby Show n'est pas subitement devenu une apologie des agressions sexuelles au procès de son producteur. Donc aucun rapport avec ce que tu essaies de prouver, la dimension politique de la littérature et du cinéma.
Ah mais je n'essayais pas d'établir un rapport entre les célébrités et le message véhiculé par leurs productions ! Je l'ai dit au début, j'ai posé des questions qui partent un peu dans tous les sens ; là l'idée c'était de répondre sur le point "séparer l'homme de l'artiste".

theyoubot a écrit : sam. 19 févr., 2022 2:15 am Oui. C'est justement pour ça que tes deux exemples (politiciens, journalistes engagés) n'ont aucune valeur pour la littérature et le cinéma. Le fait que tu sois obligée de recourir à des exemples non pertinents, en dehors des médias que tu discutes sur ce topic, devrait te mettre la puce à l'oreille.
J'ai déjà expliqué en quoi ces exemples étaient pertinents, je ne vais pas me répéter. Tant pis si tu n'es pas convaincue.

theyoubot a écrit : sam. 19 févr., 2022 2:15 am Tu ne peux pas affirmer que toutes les femmes de la planète sont grandes. Pour affirmer que certaines sont grandes, tu dois admettre que certaines sont petites et d'autres moyennes. Si tous les contenus ont une dimension politique, alors aucun n'en a.
Certes, et je ne peux pas affirmer que tous les livres sont écrits en Times New Roman taille 12. En revanche, je peux dire que toutes les femmes de la planète ont une forme physique et un esprit sans trop risquer de me tromper. Les êtres humains, tout comme les œuvres d'art, ont une forme et un fond.
Mon propos, c'est qu'une œuvre d'art étant le produit d'une société, son fond aura un rapport (plus ou moins grand) avec cette société, que ce soit volontaire ou non.

theyoubot a écrit : sam. 19 févr., 2022 2:15 am Une œuvre, en étant le produit d'une société où il y a des vélos, va (consciemment ou non) avoir un discours sur les vélos.
(...) Bien sûr, ce raisonnement est absurde. 100% des films n'ont pas un discours sur les vélos.
Effectivement, ce raisonnement est absurde ; il n'est également pas équivalent à celui que j'ai formulé.
Je n'ai pas dit que dans notre société "il y a de la politique" - la société EST politique. L’œuvre, en étant dans l'impossibilité de s'extraire de la société, aura de fait une dimension politique.

Sachant que donner une vision de la guerre dépourvue de dimension morale, c'est effectivement porter un message (guerre = catastrophe naturelle) avec une dimension politique (la guerre étant un phénomène lié aux sociétés humaines).
Le seul exemple que tu as donné qui pourrait aller dans ton sens, c'est Professeur Foldingue - mais comme je ne l'ai pas vu, je ne peux pas vraiment argumenter dessus.

theyoubot a écrit : sam. 19 févr., 2022 2:15 am La plupart du temps, ce que montrent les films n'a aucun impact politique.
Comme je l'ai dit plus tôt : la dimension politique d'une œuvre n'a pas forcément un impact direct sur le public.


En fait, j'ai l'impression que le fondement de notre désaccord, c'est que quand je dis "politique" (= relatif à la société), tu penses "engagé" (= qui prend ouvertement position sur un problème dans le but d'avoir un impact politique). Si c'est le cas, j'admets en effet que les œuvres engagées sont minoritaires dans la production artistique actuelle, surtout dans ce qui est destiné au grand public.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par DeadlySin »

Dans ce cas, pourquoi employer le mot politique ? Pourquoi ne pas parler d’œuvres sociétales vu que « sociétal » est ce qui se rapporte à la structure, à l’organisation ou au fonctionnement de la société ou d’œuvres sociales ? Car je crois sincèrement qu’il y a un problème avec ce terme de politique qui est utilisé soit involontairement de manière erronée, soit par certains groupes de pressions pour pousser une idéologie.

J’avais rédigé une réponse par rapport au message de Theyoubot dans laquelle je développe le problème de l’emploi du terme politique qui s’invite à tort dans des domaines qui ne le concerne pas. La voici :

----------

Je rejoins assez l’opinion de Theyoubot en particulier sur ceci :
Tu ne peux pas affirmer que toutes les femmes de la planète sont grandes. Pour affirmer que certaines sont grandes, tu dois admettre que certaines sont petites et d'autres moyennes. Si tous les contenus ont une dimension politique, alors aucun n'en a.
De manière générale, j’ai l’impression qu’il y a un problème de définition de ce qui est « politique ». Si tout est « politique », qu’est-ce qu’est la politique ? Quel est sa définition et son champ d’application si elle s’applique à absolument tout ? Le jour s’oppose à la nuit, la vie à la mort, le meuble à l’immeuble, le bruit au silence, le commun au rare... Toute notion/toute idée se voit limitée par la présence d’une autre : on comprend l’ « idée » du bruit parce qu’il existe le silence, on reconnait un endroit sombre par son absence d’éclairage, on distingue les présomptions réfragables en droit parce qu’il existe des présomptions irréfragables... On ne crée pas une notion et un mot pour la désigner si elle s’applique à tout et qu’elle n’a pas de contraire ou d’autres nuances venant la limiter. Le mot n’aurait aucune raison d’exister. Si tout était tiède, jamais on aurait commencé à parler de froid et de chaud par opposition et le mot tiède ne serait même pas apparu à cause de son absence d’utilité pour décrire une réalité non remarquable par l’homme due à son absence de contraire. Et on ne s’amuse pas non plus à créer des mots vagues aux notions floues pouvant s’appliquer à tout.
La politique, à la base, c’est la science du gouvernement de la cité, comment le gouvernement règle ou devrait régler son action pour organiser une société selon un idéal. C’est une notion qui s’applique aux États et à leurs manières de diriger au sein de leurs sociétés et de diriger leurs relations avec les autres États.
En outre, même si dans la politique on fait appel à de la morale, ces 2 notions sont pas superposables.
La question de la place de la femme au sein d’une société est politique, les questionnements sur les fondements et les bienfaits de la guerre pour un État sont politiques, la remise en doute du mouvement de l’industrialisation et aujourd’hui de la digitalisation de la société est également politique...
La gestion du deuil et des souffrances personnelles, le bonheur de pratiquer une activité et l’épanouissement que l’on peut trouver dedans, les expériences d’amitié à l’école, l’amour d’un parent pour ses enfants (des thèmes et des messages que l’on retrouve dans des livres) ne sont pas politiques. Les messages du type : « La famille, c’est ultra important », « L’amitié rend plus fort », « L’homme est un loup pour l’homme », « Le mal est partout », « Il faut laisser son passé derrière soi », « L’instant présent doit être chéri », « Rendez grâce à Dieu » etc. sont des messages relevant de la morale, de la philosophie voire de la culture ou de la religion mais ils ne sont pas politiques car ils n’ont pas vocation à redéfinir le fonctionnement d’un État et de la société au sens large...
De plus, décrire la réalité comme elle est, ne rend pas notre message politique. On peut reprocher aux auteurs plus anciens d’avoir écrit des livres où les femmes étaient reléguées au second plan. Ce n’est pas pour autant qu’ils ont écrit leurs livres avec l’intention politique de dépeindre une société idéalisée où la femme est subordonnée à l’homme. Certains auteurs l’ont fait mais pour la plupart, c’est juste parce que les choses étaient ainsi à leur époque. Un auteur qui met en scène des protagonistes qui se déplacent en vélo n’a pas forcément une intention politique de promouvoir la mobilité douce si il ne fait que décrire les habitudes de ces co-citoyens. Écrire un livre historique à une époque où l’esclavage existait n’est pas forcément synonyme pour l’auteur de prendre position pour ou contre l’esclavage ou synonyme pour le livre d’avoir un discours sur l’esclavage s’il n’est qu’un élément contextuel de l’histoire. Parenthèse amusante, la question de l’esclavage est justement un bel exemple de confusion entre les notions de politique et de morale dans l’esprit des gens. Aujourd’hui, des personnes expliquent que l’esclavage est mauvais et inacceptable sur le plan politique alors qu’en réalité l’esclavage est mauvais sur un plan moral à dimension humaniste et universaliste. Sur le plan politique, l’esclavage peut être "bon" car il n’y a ni bien, ni mal en politique ; il n’y a que des positionnements et des décisions efficaces/inefficaces pour parvenir à organiser la société selon un modèle théorique pré-établi. La politique étant une science à l’origine elle s’abstient de toute dimension émotionnelle.

Cependant, on étend aujourd’hui la notion de politique à tout et surtout à la morale et aux opinions personnelles. Chaque geste, chaque parole et même les silences et les absences sont interprétés sous le prisme de la politique. Au point d’en devenir absurde. Petite exemple de l’absurdité : Quand il a été annoncé que le casting des personnages principaux dans Final Fantasy XV ne seraient composés que d’hommes, ça a fait scandale. Plusieurs personnes ont interprété cela comme un mouvement réactionnaire masculiniste, une mise en avant des hommes, un désir d’invisibilisation des femmes, une remise en doute de leurs capacités à être des héroïnes d’histoire, une honte de faire ça au XIXe siècle... Bref, ces personnes ont donné une portée politique à un choix artistique de vouloir raconter une forme de roadtrip, une histoire d’amitié entre 4 personnages. Et c’est là, le problème lorsqu’on vient dire que tout est politique, on finit par faire des procès d’intention et même pas pour des éléments présents mais pour des choses qui seraient absentes des créations. Chaque décision prise devient un choix politique et non plus artistique. Et même des choix narratifs dus à des limitations techniques et/ou budgétaires arrivent à être réinterprétés politiquement.
Et on en revient au questionnement de départ, si des choix artistiques sont politiques, si faire un simple constat à un temps t est politique, si des messages relevant de la morale sont classés dans la case politique... c’est quoi la politique aujourd’hui ? Et quelle est son utilité ? Qu’est-ce qui la distingue de la morale qui auparavant était placée sur un autre plan que celui de la politique ? Et quelle est la place de l’art et de l’émotion dans tout cela ?

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Parler d’œuvres sociétales/sociales car influencées par la société entourant l’auteur ne serait-il pas plus juste ? Cela permettrait de les distinguer et de les opposer aux œuvres engagées qui elles cherchent à influencer la société et son organisation et donc qui cherchent à jouer sur un plan politique.
De plus, parler d’œuvres sociétales/sociales inviterait uniquement à reconnaitre une influence du contexte dans lequel un auteur écrit sur son œuvre mais sans inviter à porter un jugement et à prendre position sur l’œuvre car malheureusement la politique d'aujourd'hui est connotée comme engagée. On ne peut plus se contenter d'étudier la politique, la forme des différents gouvernements existants... il est demandé au gens de s'engager et de prendre position. Dire qu'une œuvre est politique, c'est l'assimiler à une prise de position, ce qui peut porter préjudice à certains auteurs. C'est sous-entendre qu'ils cherchent à faire passer un message politique alors que ce n'est pas toujours le cas.
Lyran

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Lyran »

J'avoue que je n'avais pas trop réfléchi à la formulation de mes questions dans mon premier message ; j'ai écrit politique parce que c'est ça qui m'est venu instinctivement. En me relisant, je me rends compte que j'ai calé ça à côté de ma question sur l'impact des auteur.e.s dans la société.
Je pense que ma logique, c'était que (de mon point de vue), en portant un message sur la société, les œuvres ont un impact dessus, et dans ce sens on peut leur trouver une dimension politique. Ou sociétale, si on préfère - mais je trouve qu'il est compliqué de dissocier les deux : l'un n'existe pas sans l'autre (on ne peut pas avoir une société organisée sans politique, et la politique ne peut pas exister en dehors d'une société). Bref, je pense qu'inconsciemment, c'est le mot "politique" qui est ressorti pour appuyer cette question de l'impact.

Et du coup je précise, parce que je réalise que je n'ai pas été très claire sur cette histoire de l'influence de l'art sur la société.
Je ne considère pas que les œuvres aient un impact puissant et direct sur la vie en société / la vie politique - ça arrive quelquefois, mais ce n'est clairement pas le cas pour la majorité d'entre elles.
En revanche, les messages qu'elles véhiculent sont absorbés (ou rejetés) par l'individu qui les reçoit, et contribuent à former son expérience du monde. Au bout d'un moment, l'accumulation de messages similaires a de bonnes chances d'influencer cet individu dans ses opinions. Cet individu agira ensuite selon ses opinions, qui influent sur son impact en tant que citoyen dans la société.
C'est donc une vision très globale des choses, pensée dans le long-terme. En fait, c'est le même principe que la pub ou la propagande.

DeadlySin a écrit : sam. 19 févr., 2022 10:47 am Le jour s’oppose à la nuit, la vie à la mort, le meuble à l’immeuble, le bruit au silence, le commun au rare... Toute notion/toute idée se voit limitée par la présence d’une autre
L'antonyme de "politique", c'est "naturel" (dixit le dictionnaire des synonymes). La notion a donc bien un contraire, et c'est vrai que je ne m'imagine pas l'appliquer en dehors des sociétés humaines (encore qu'on puisse se poser la question pour certains animaux, mais c'est un autre débat).
Sinon, c'est un mot polysémique, et dans son acception la plus large, ça désigne juste ce qui est relatif à la société organisée - sans même entrer dans les notions de pouvoir et de gouvernance.

DeadlySin a écrit : sam. 19 févr., 2022 10:47 am Les messages du type : « La famille, c’est ultra important », « L’amitié rend plus fort », « L’homme est un loup pour l’homme », « Le mal est partout », « Il faut laisser son passé derrière soi », « L’instant présent doit être chéri », « Rendez grâce à Dieu » etc. sont des messages relevant de la morale, de la philosophie voire de la culture ou de la religion mais ils ne sont pas politiques car ils n’ont pas vocation à redéfinir le fonctionnement d’un État et de la société au sens large...
Effectivement, ces idées ne sont pas politiques en elles-mêmes. Mais la morale, la philosophie et la religion ont une influence sur la politique ; c'est dans ce sens que je considère que ces messages ont une dimension politique potentielle.

DeadlySin a écrit : sam. 19 févr., 2022 10:47 am Et on en revient au questionnement de départ, si des choix artistiques sont politiques, si faire un simple constat à un temps t est politique, si des messages relevant de la morale sont classés dans la case politique... c’est quoi la politique aujourd’hui ? Et quelle est son utilité ? Qu’est-ce qui la distingue de la morale qui auparavant était placée sur un autre plan que celui de la politique ? Et quelle est la place de l’art et de l’émotion dans tout cela ?
De mon point de vue, les choix artistiques ne sont pas purement politiques (enfin, ça arrive, mais pas toujours). En revanche, ils ont une dimension politique. Tout comme ils ont une dimension esthétique, une dimension philosophique, etc., qui reflète le vécu de l'artiste et impacte le public, et par effet de domino, la société.
Pour le reste je t'avoue que c'est encore un peu le flou dans mon cerveau, mais tes questions sont très intéressantes, je vais y réfléchir.
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par Fitzyfool »

Lyra1998 a écrit : sam. 19 févr., 2022 9:16 amEn fait, j'ai l'impression que le fondement de notre désaccord, c'est que quand je dis "politique" (= relatif à la société), tu penses "engagé" (= qui prend ouvertement position sur un problème dans le but d'avoir un impact politique).
Sans m'engager plus que ça dans le débat en cours, je suis tout à fait d'accord avec toi sur ce point - et sur le contenu de tes posts en général !

Lyra1998 a écrit : sam. 12 févr., 2022 11:36 amJe crois que j'ai plus ou moins deviné le sens de ces termes, mais tu pourrais préciser quand même ce que tu entends par "ownvoice" et "sensitivity readers" ?
Les livres ownvoice sont écrits par des personnes concernées par ce que vivent leurs personnages (ou souvent au moins le personnage principal) : orientation sexuelle, identité de genre, couleur de peau, handicap... Sans m'y limiter, j'essaie de favoriser ces livres pour deux raisons : d'une part pour avoir accès à une représentation non stéréotypée (dans la mesure du possible, même les personnes concernées ne sont pas infaillibles !), d'autre part pour soutenir ces auteurs et autrices qui ont plus de mal à se faire publier que des personnes privilégiées.

Les sensitivity readers sont des personnes qui appartiennent à une ou plusieurs minorités, qui sont leurs domaines d'expertise, et qui proposent leurs services, souvent rémunérés, pour relire des livres avant publication : repérer des passages où la représentation pose problème, donner des conseils pour que les personnages soient plus crédibles, etc.

Pour plus d'info sur le sujet, des recommandations de livres ownvoice, etc., je recommande le blog Planète Diversité. :)
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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par theyoubot »

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Lyra1998 a écrit :donner une vision de la guerre dépourvue de dimension morale, c'est effectivement porter un message (guerre = catastrophe naturelle) avec une dimension politique (la guerre étant un phénomène lié aux sociétés humaines)
Autrement dit, à tes yeux, un film apolitique comme Il faut sauver le soldat Ryan est politique ?



Lyra1998 a écrit :dans son acception la plus large, ça désigne juste ce qui est relatif à la société organisée - sans même entrer dans les notions de pouvoir et de gouvernance
Faux. Ce mot là, c'est 'social'. Ou sociologique, ou sociétal. 'Politique' a un autre sens.



Lyra1998 a écrit :le fondement de notre désaccord, c'est que quand je dis "politique" (= relatif à la société), tu penses "engagé" (= qui prend ouvertement position sur un problème dans le but d'avoir un impact politique). Si c'est le cas, j'admets en effet que les œuvres engagées sont minoritaires dans la production artistique actuelle, surtout dans ce qui est destiné au grand public.
Merci.
Mais 'politique' et 'engagé' (politiquement) sont des synonymes. Tu ne peux pas affirmer que la littérature est l'un et pas l'autre. On est les deux ou aucun des deux.



Lyra1998 a écrit :en portant un message sur la société, les œuvres ont un impact dessus, et dans ce sens on peut leur trouver une dimension politique. Ou sociétale, si on préfère - mais je trouve qu'il est compliqué de dissocier les deux
'Sociétal' et 'politique', ce n'est pas pareil.
Tu trouves compliqué de dissocier les deux. Eh bien, confondre les deux comme tu le faisais est encore pire. Voir débat ci-dessus.




Lyra1998 a écrit :Je ne considère pas que les œuvres aient un impact puissant et direct sur la vie en société / la vie politique - ça arrive quelquefois, mais ce n'est clairement pas le cas pour la majorité d'entre elles.
En revanche, les messages qu'elles véhiculent sont absorbés (ou rejetés) par l'individu qui les reçoit, et contribuent à former son expérience du monde. Au bout d'un moment, l'accumulation de messages similaires a de bonnes chances d'influencer cet individu dans ses opinions. Cet individu agira ensuite selon ses opinions, qui influent sur son impact en tant que citoyen dans la société.
C'est donc une vision très globale des choses, pensée dans le long-terme. En fait, c'est le même principe que la pub ou la propagande.
Exactement. Tu as fait depuis le début un usage impropre du mot 'politique'.




Ce que je retiens de cet échange, c'est que tu ne voulais pas avoir l'air de formuler une lapalissade. Genre :
Lyra1998 a écrit :pensez-vous que les auteur(e)s ont un impact sur la société ? J’ai tendance à considérer qu’une œuvre a une dimension sociétale par défaut, puisqu’elle s’insère nécessairement dans un contexte socio-culturel.
Donc plutôt que d'enfoncer cette porte ouverte, tu t'es lancée dans un torture test sur la notion de politique en lui faisant dire tout et son contraire (Il faut sauver le soldat Ryan)
D'où l'importance des exemples. Ils auraient mis immédiatement en évidence l'usage problématique que tu faisais de ce mot.

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Re: Considérations sur l’auteur, le lecteur et la société

Message par DeadlySin »

Polysémique ? Pas tant que ça...
https://www.larousse.fr/dictionnaires/f ... ique/62189
https://www.linternaute.fr/dictionnaire ... politique/
https://dictionnaire.lerobert.com/definition/politique
La politique concerne toujours la gouvernance d'un État ou ce qui s'y rapporte et il n'est aucunement synonyme de sociétal ou social.
La seule explication que j'ai pour toi viendrait d'une vilaine influence américaine où là-bas le terme anglais de politics peut renvoyer à l'organisation de la société :
https://www.merriam-webster.com/dictionary/politics
Mais voilà, en français, la politique a un sens qui lui est propre et lorsqu'il est utilisé il est à la fois engagé et engageant. La langue française est d'une immense richesse et une des langues les plus nuancées au monde. Si un mot ne recouvre pas parfaitement l'idée que nous souhaitons exprimer, tu peux être sure qu'il en existe déjà un autre correspondant à cette idée.
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